COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
2EME CHAMBRE CIVILE -----------------
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POURVOI N°28 DU 30 JANVIER 2003
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ARRET N°42 DU 19 AVRIL 2004
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NATURE: Annulation de vente.
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi dix neuf avril de l'an deux mille quatre, à laquelle siégeaient :
Madame BOUNDY Henriette DIABATE, Conseiller à la 2ème Chambre Civile, Président;
Monsieur Abdoulaye Issoufi TOURE, Conseiller à la Cour, Membre;
Monsieur Sidi SINENTA, Conseiller à la Cour, membre;
En présence de Monsieur Mahamadou BOIRE, Avocat Général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître TRAORE Adama SOW, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI du sieur Ab Aa C, agissant en son nom et pour son propre compte ayant pour conseil Maître Lamissa COULIBALY, Avocat à la Cour, d'une part ;
CONTRE: Ad B, ayant pour conseil Maître Mamadou DANTE, Avocat à la cour, défendeur, d'autre part;
Sur le rapport du Conseiller Abdoulaye IssoufI TOURE et les conclusions écrite et orale des Avocats Généraux Moussa Balla KEÏTA et Mahamadou BOIRE ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Par acte n° 28 fait au greffe le 30 janvier 2003 le sieur Ab Aa C, agissant en son nom et pour son propre compte a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 47 du 29 janvier 2002 rendu par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en annulation de vente l'opposant à Ad B.
Suivant certificat de dépôt n° 201 du 16 septembre 2003, le demandeur a acquitté l'amende de consignation et a, par le truchement de son Conseil, produit mémoire ampliatif qui, notifié au défendeur, a fait l'objet de réplique.
Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable.
AU FOND:
I - Présentation des moyens: A l'appui de son pourvoi le demandeur articule les moyens de cassation ci-après; tous relatifs à la violation de la loi.
Violation de l'article 550 du Code Civil en ce que aux termes de ce texte « le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore les vices»; que dans le cas d'espèce Ab Aa C est propriétaire du TF N° 2824 en vertu d'un acte notarié établi le 29 octobre 1996 dont il ignorait les éventuels vices.
Violation de l'article 2268 du Code Civil en ce que ce texte dispose « que la bonne foi est toujours présumée et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver» or Ab Aa C a pris toutes les précautions en vérifiant le jugement d'hérédité et en faisant appel aux services d'un notaire pour authentifier la vente après avoir observé toutes les formalités de publicité; que donc la dame Ac A représentant son fils Ad B s'étant revelée incapable de prouver la mauvaise foi, c'est à tort que les juges du fond ont accédé à la demande d'annulation.
Violation de l'article 202 du Code Domanial et Foncier; cet article stipule que
« les personnes dont les droits auraient été lesés par une inscription peuvent en demander la modification, mais ces modifications, sauf dans le cas où elles sont la conséquence d'une réserve mentionnée au titre foncier, ne peuvent préjudicier aux tiers»; qu'il résulte clairement de ces dispositions que la démarche entreprise par la dame Ac A pour le compte de son fils Ad B ne peut préjudicier aux intérêts de Ab Aa C qui est un tiers; qu'en annulant la vente et ses effets sans émettre la moindre réserve , les juges du fond font encourir la censure à leur décision.
Violation des dispositions de l'article 463 du Code de procédure Civile, Commerciale et Sociale; suivant ces dispositions toute décision de justice rendue en matière civile, commerciale et sociale doit être motivée, que les juges du fond en privant le tiers Ab Aa C du bénéfice des dispositions de l'article 202 du Code Domanial et Foncier, ont simplement sous entendu la mauvaise foi; que même si l'appréciation de la bonne foi leur est souverainement reconnue, ils doivent faire en sorte que la Cour Suprême puisse exercer son contrôle; qu'à toute hauteur de la procédure les débats ont porté sur l'existence de la bonne ou mauvaise foi de Ab Aa C; que malgré ces débats les juges ont répondu à la question par le mutisme dans les motifs pour rendre une décision laissant entrevoir qu'ils ont clairement décidé de la mauvaise foi; qu'en procédant ainsi la Cour d'Appel n'a pas motivé sa décision, violant ainsi l'article 463 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale.
Violation de l'article 2 du Civil, par la mise en cause de la théorie des droits acquis; qu'en effet l'arrêt querellé fragilise la sécurité des contrats en matière de vente; qu'en droit il est un principe universellement admis que « la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactifs; qu'il s'agit là d'une disposition d'ordre public qui peut être invoquée ou retenue d'office à tout instant de la procédure; que mieux dans le domaine des droits acquis, toute loi nouvelle s'applique aux situations établies et aux rapports juridiques formés avant sa promulgation dès lors que cette application n'a pas pour effet ou résultat de léser des droits acquis; qu'ainsi la vente antérieurement conclue ne devrait nullement être remise en cause; que pour une bonne distribution de la justice, l'arrêt querellé mérite la censure.
II - ANALYSE DES MOYENS:
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt déféré d'avoir procédé par violation de la loi notamment des articles 550, 226 et 2 du Code Civil, l'article 202 du Code Domanial et Foncier et l'article 463 du Code de Procédure Civile.
Attendu par rapport aux moyens tirés des articles 550, 2268 du Code Civil et 463 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale, il y a lieu de faire observer que comme l'a rappelé le mémorant lui même, les juges du fond apprécient souverainement la bonne foi; qu'en l'espèce la Cour d'Appel de Bamako pour exclure le bénéfice de la bonne foi a exposé que la personne avec laquelle la vente a été conclue n'avait ni qualité ni mandat pour aliéner le bien motivant du coup sa décision; que donc ces moyens ne sont pas opérants.
Attendu que quant aux articles 202 du Code Domanial et 2 du Code Civil, le premier est relatif à l'inscription qui est la publication aux livres Fonciers des droits réels constitués sur les immeubles postérieurement à leur immatriculation (article 173 du Code Domanial et Foncier), le second à la non rétroactivité des lois; que manifestement tous ces deux textes ne trouvent aucune application à la situation; qu'il echet rejeter les moyens.
PAR CES MOTIFS:
En la Forme: Reçoit le pourvoi.
Au Fond: le rejette comme mal fondé;
Ordonne la confiscation l'amende de consignation;
Met les dépens à la charge du demandeur.
Ainsi fait, jugé te prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
Suivent les signatures
Signé illisible
Enregistré à Bamako le 05 mai 2004
Vol I Fol 193 N°02 bordereau N°154 ;
Reçu six mille francs;
L'inspecteur de l'enregistrement
Signé illisible
«AU NOM DU PEUPLE DU MALI»
En conséquence, la République du mali mande et ordonne à tous Agents Administratifs sur ce requis de mettre à exécution ledit arrêt au procureur de la République et au Procureur Général près la Cour d'Appel et les Tribunaux de Première Instance d'y tenir la main, à tous Commandants et Officiers de la force Publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé, scellé et délivré par nous Boubou BOCOUM Greffier en Chef près la Cour Suprême pour servir de première Grosse;
Bamako, le 06 mai 2004
LE GREFFIER EN CHEF