2004041944
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème CHAMBRE CIVILE
POURVOI N°71 DU 08 FEVRIER 2001 ARRET N°44 DU 19 AVRIL 2004
RÉCLAMATION DE PARCELLE - NATURE JURIDIQUE DU PERMIS D'EXPLOITATION AGRICOLE SUR LES TERRES AFFECTÉES À L'OFFICE DU NIGER-COMPÉTENCE DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
Dans la mesure où il est constant qu'aux termes de l'article 32 du Décret n° 96-188/P-RM du 1er juillet 1996 portant organisation de la gérance des terres affectées à l'Office du Niger le caractère administratif du permis d'exploitation agricole est indiscutable et que l'article 8 de la loi n° 96-006 du 18 mars 1996 portant organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs attribue la connaissance des litiges portant sur les décisions administratives, la Cour d'Appel, en retenant sa compétence, à la suite du juge d'instance procède manifestement par excès de pouvoir, d'où cassation de la décision intervenue.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME :
Par acte du greffe n°71 du 08 février 2001, Maître Abdoulaye N. BALLO, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Ac A, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°108 rendu le 07 février 2001 par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en réclamation de parcelle qui oppose son client à Aa A ; Suivant certificat de dépôt n°8 du 04 janvier 2003, l'amende de consignation a été acquittée par le demandeur ; Par l'organe de son conseil, il a produit mémoire ampliatif qui a été notifié au défendeur qui a répliqué par le truchement de son avocat en concluant au rejet de l'action ; Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.
AU FOND :
Exposé des moyens de cassation
Le mémorant, sous la plume de son conseil, soulève à l'appui de sa demande un seul et unique moyen de cassation basé sur la violation de la loi qu'il subdivise en deux branches ci -après :
Première branche basée sur la violation de l'article 8 de la loi n°94-006 du 18 mars 1994 portant organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs:
En ce que cet article dispose : « le Tribunal administratif connaît des recours pour excès de pourvoir dirigé contre les décisions des autorités administratives régionales locales... » ;
Que le caractère administratif du permis d'exploitation agricole résulte de l'article 32 in fine du Décret n°96 -1 88/PRM du 1er juillet 1996 qui stipule que « les modalités d'octroi du permis d'exploitation sont précisées par arrêté du Ministère du tutelle.. » Que se faisant, la Cour d'Appel, en retenant sa compétence, alors que le permis d'exploitation agricole est un acte administratif, a commis un excès de pouvoir et expose sa décision à la cassation ;
Deuxième branche tirée de la violation de l'article 34 du Décret n°96-188/PRM du 1er juillet 1996
En ce que l'arrêt attaqué en confirmant le jugement d'instance qui a ordonné le partage de la parcelle litigieuse entre les héritiers de feu Ab A alors que l'article 34 du Décret sus-visé dispose que : « les droits dont jouit le titulaire du permis d'exploitation agricole sont transmissibles au conjoint (e), à un descendant ou à un collatéral reconnu suivant les us et coutumes, ayant participé à l'exploitation desdites terres... » Et que les permis sont différents et concernent des superficies différentes, a violé l'article visé au moyen et s'expose à la censure de la Cour Suprême.
ANALYSE DU MOYEN :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt déféré d'avoir procédé par violation de la loi s'analysant en excès de pouvoir subdivisé en violation de l'article 8 de la loi n°94-006 du 18 mars 1994 portant organisation et fonctionnement des Tribunaux administratifs et en violation de l'article 34 n°96/188/PRM du 1er juillet relatif à la nature juridique du permis d'exploitation agricole ;
Attendu que la violation de la loi par refus d'application suppose qu'un texte parfaitement établi et n'appelant pas d'interprétation spéciale ait été directement transgressé ;
Attendu que, selon la jurisprudence, l'excès de pouvoir se définit comme la transgression, par le juge compétent pour connaître du litige, d'une règle d'ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité (cass. Req. 5 juillet 1875) ;
Qu'en règle générale, l'excès de pouvoir suppose que le juge tranche un litige dont il n'a pas le pouvoir de trancher ;
Attendu, à cet égard, que dans la mesure où il est constant qu'aux termes de l'article 32 in fine du décret n°96-188/PRM du 1er juillet 1996, le caractère administratif du Permis d'exploitation est indiscutable et que l'article 8 de la loi n°96-006 du 18 mars 1996 attribue la connaissance des litiges portant sur des décisions administratives, la Cour d'Appel en retenant sa compétence, à la suite du juge d'instance procède manifestement par excès de pouvoir ;
Qu'il s'ensuit que le moyen est pertinent et doit être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi;
Au fond : le déclare bien fondé ; casse et annule l'arrêt déféré ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende de consignation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.