COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIREUn Peuple - Un But - Une Foi
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Chambres Réunies
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ARRET N°67 DU 31 MAI 2004.
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NATURE: Reddition de compte.
LA COUR SUPREME DU MALI:
A, en son audience publique ordinaire du lundi trente un mai de l'an deux mil quatre, à laquelle siégeaient:
M. Ousmane DIAKITE, vice-Président de la Cour Suprême, Président;
Mme DIALLO Kaïta KAYENTAO, Présidente de la Section Judiciaire, Membre;
M. Boubacar DIALLO, Président de la Chambre Commerciale, Membre;
Mme DOUMBIA Niamoye TOURE, Présidente de la Chambre Sociale, Membre;
Mme KANTE Hawa KOUYATE, Conseiller à la Cour, Membre;
M.Beyla BA, Conseiller à la Cour, Membre;
M. Sidy SININTA, Conseiller à la Cour, Membre ;
M.David SAGARA, Conseiller à la Cour, Membre;
M. Oumar SENOU, Conseiller à la Cour, Membre;
En présence de l'Avocat Général Ab Aa B occupant le banc du Ministère Public ;
Avec l'assistance de Maître SAMAKE Fatoumata Z. KEÏTA, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
Sur la requête du Cabinet DOUMBIA - TOUNKARA et de Maître Abdoul Wahab BERTHE, avocat à la Cour agissant respectivement au nom et pour le compte de Ac A et de la B.D.M. - SA, demandeurs, d'une part ;
Contre l'arrêt n°237 du 18 avril 2001 de la Cour d'Appel de Bamako, défendeur, d'autre part;
Sur le rapport du conseiller Boubacar DIALLO et les conclusions écrites et orales de l'Avocat Général Ab Aa B ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME:
Le 19 avril 2001 suivant actes n°153 et 154, le greffe de la Cour d'Appel de Bamako a enregistré successivement les pourvois du Cabinet DOUMBIA - TOUNKARA et de Maître Abdoul Wahab BERTHE, respectivement aux noms de Ac A et de la B.D.M. - S.A., contre l'arrêt n°237 rendu le 18 avril 2001 par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Bamako, dans l'instance en reddition de comptes opposant leurs clients.
Ac A s'est acquitté de l'amende de consignation suivant certificat daté du 15 janvier 2001 et a produit un mémoire ampliatif qui a été notifié à la B.D.M. - S.A.; celle - ci n'a ni répondu au mémoire à lui notifié, ni produit un mémoire à l'appui de son recours, ni consigné.
Le pourvoi de la B.D.M. - S.A. n'est pas recevable pour n'avoir pas satisfait aux prescriptions de l'article 632 du code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale tandis que celui de Ac A y est conforme et doit être examiné.
EXPOSE MOYENS DU POURVOI:
Le demandeur a développé les mêmes moyens qu'il avait exposé contre le précédent arrêt de la Cour d'Appel devant la haute Juridiction: le défaut de base légale et la violation des droits de la défense ( moyens développés en deux branches ).
1ère Branche:
En ce que la Cour d'Appel a totalement méconnu les motifs de cassation de son précédent arrêt ; que celui - ci était intervenu avant la comparution des parties et des trois experts que la Cour d'appel avait ordonnée, suite au dépôt du rapport d'expertise et à la contestation dudit rapport par le demandeur; que la Haute Cour avait déclaré qu'en ordonnant en la cause de telles mesures la Cour d'Appel avait estimé qu'elle ne tirait pas suffisamment du rapport déposé les éléments de preuve nécessaires pour asseoir sa conviction; qu'à cet égard le Code de Procédure Civile dispose:
- Article 11: «Les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction, sauf au juge à tirer toutes conséquences d'une abstention ou d'un refus»;
- Article 16: « Le juge doit en toute circonstance faire observer lui - même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations»;
Que contrairement à ces prescriptions d'ordre public, la B.D.M. - S.A. et les trois experts n'ont pas comparu à la barre pour discuter contradictoirement avec le mémorant des points par lui contestés; que malgré l'inexécution de la mesure ordonnée, la Cour d'Appel a statué en faveur de la B.D.M., occultant ainsi les questions et observations de l'arrêt avant dire droit ; qu'il est de jurisprudence constante que si le juge du fond apprécie souverainement les faits et qu'il a la latitude d'ordonner ou de refuser une mesure d'instruction, il est constant qu'une fois ordonnée, ladite mesure doit être exécutée, sauf à la juridiction de tirer les conséquences de droit du refus d'une partie d'y collaborer; qu'en disposant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a manifestement violé les dispositions de loi visées au moyens garantissant les droits de la défense et n'a pas de ce fait, donné de base légale à sa décision; que l'article 649 alinéa 1 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale va dans ce sens en disposant que « sur les parties qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé»; que la nouvelle composition de la Cour d'Appel se devait, suivant les indications de la Cour Suprême, de veiller à l'exécution de la mesure d'instruction par l'audition des parties et des experts; que le demandeur avait sollicité les mesures en ces termes devant la Cour d'appel: « le concluant réitère sa demande d'ailleurs conforme aux motifs de l'arrêt de cassation»; qu'il n'a pas été offert au demandeur la possibilité de porter la contradiction aux experts, surtout que lesdits experts n'étaient pas d'avis unanime; que l'arrêt s'expose à la censure.
2ème Branche:
En ce que la formation de la Cour d'Appel était présidée par le même magistrat qui avait connu de l'affaire en 1ère instance; que ceci est une violation grave de l'organisation judiciaire et des droits de la défense qui doit être censurée.
II- ANALYSE DES MOYENS:
De la 1ère branche du mémoire:
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de ne pas s'être conformé aux dispositions des articles 11-16 et 649 alinéa 1 du Code de Procédure Civile, Commerciale et sociale exposée au moyen.
Qu'à cet égard il échet d'observer que l'article 649 est le complément de celui qui le précède; que ces textes sont ainsi conçus:
- Article 648: « La censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire».
- Article 649 alinéa 1: « Sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.»;
Que dans le cas d'espèce la Cour d'appel a ordonné des mesures d'instruction ( la comparution des parties et des 3 experts); que cette mesure n'a pas été rétractée par la cour qui ne l'a pas exécutée, empêchant ainsi le demandeur d'apporter son avis quant au contenu du rapport; que la comparution des parties et des experts ayant établi le rapport, aurait permis de faire observer à l'égard de tous, le principe de la contradiction.
Qu'en refusant d'exécuter les mesures qu'elle avait ordonnées sans les avoir rétractées, la Cour a violé les articles 11 et 16 du Code de Procédure Civile, Commerciale et sociale.
Que dès lors la condamnation du demandeur en l'état, ne repose sur aucune base légale; qu'ainsi le moyen est pertinent et la censure de l'arrêt s'impose.
2ème Branche: de l'empêchement du Président de la Cour d'appel ayant connu de la même affaire en 1ère instance:
Attendu qu'à cet égard il échet de rappeler que l'appel est un recours qui tend à faire reformer ou annuler par la Cour d'Appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré; que logiquement le même magistrat ne peut siéger en appel après l'avoir fait en première instance; que par ailleurs les conventions et chartes Internationales proscrivent cette pratique qu'ainsi plusieurs arrêts de la Chambre Criminelle Française tranchent dans le sens de l'empêchement.
Attendu cependant qu'en l'état, à part la possibilité de récusation prévue par la loi notamment par l'article 337 du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale, aucun texte ne proscrit formellement cette pratique; qu'en conséquence ce moyen ne saurait prospérer;
PAR CES MOTIFS:
En la forme: reçoit le pourvoi :
Au fond: casse et annule l'arrêt entrepris;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée;
Ordonne la restitution de l'amende de consignation.
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.