COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
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Chambre Sociale
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POURVOI N°16 DU 14 MARS 2003
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ARRET N°18 DU 11 OCTOBRE 2004
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NATURE: Réclamation de droits
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi onze octobre de l'an deux mille quatre, à laquelle siégeaient :
Madame Niamoye TOURE, Présidente de la Chambre Sociale, Président;
Monsieur Fakary DEMBELE, Conseiller à la Cour, Membre;
Monsieur Boubacar DIALLO, Conseiller à la Cour, Membre;
En présence de Monsieur Mahamadou BOIRE, avocat général près ladite Cour, occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître TRAORE Adama SOW, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI de Maître Chouaïbou BABY, Avocat à la Cour, agissant au nom et le compte de Aa A, d'une part;
CONTRE:: Laborex - Mali, ayant pour conseil Maître Salif TOURE, Avocat à la Cour, défendeur, d'autre part;
Sur le rapport du Conseiller Fakary DEMBELE et les conclusions écrites et orales de l'Avocat Général Mahamadou BOIRE.
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
EN LA FORME:
Par acte n°16 du 14 mars 2003, Maître Chouaïbou BABY, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Aa A, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°28 du 13 mars 2003 rendu par la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de Bamako dans l'instance en réclamation de droits opposant son client à Laborex - Mali;
Le demandeur dispensé de consignation a produit mémoire ampliatif auquel il a été répliqué;
Le pourvoi ayant satisfait aux exigences de la loi est recevable en la forme;
AU FOND:
A l'appui de son pourvoi, le mémorant sous la plume de son conseil présente deux moyens de cassation tirés respectivement du défaut de réponse à conclusions et le défaut de base légale;
Premier moyen de cassation tiré du défaut de réponse à conclusions: en ce que la cause du licenciement ne peut reposer Sur de simples soupçons ou allégations de l'employeur comme c'est le cas dans la présente affaire; qu'elle ne peut tenir qu'à un fait objectif dont l'existence est vérifiée et qui est imputable au salarié; qu'il ressort des mêmes conclusions qu'une distinction doit être faite entre règles de preuve de la cause réelle et sérieuse et celle de la faute; que s'agissant de la preuve de la faute du salariée, il incombe à l'employeur qui l'invoque de l'établir et s'il existe un doute sur l'existence de celle - ci, le doute profite au salarié ( cass soc. 11 déc. 1986, juri. Soc. 1987, n°1, F 6);
Qu'en ce qui concerne les règles régissant la preuve et la cause réelle et sérieuse, celles -ci obéissent à une procédure inquisitoire, le juge étant chargé de rechercher lui - même la preuve; que l'arrêt querellé n'a pas répondu aux conclusions relativement aux points sus- évoqués; que le défaut de réponse aux conclusions s'assimile à un défaut de conclusions; qu'il sanctionne une insuffisance de recherche de la part des juges du fond et constitue un moyen pour la Cour de Cassation d'indiquer les éléments qui lui paraissent déterminants dans l'application de la règle de droit et doivent donc faire l'objet d'investigations particulières; qu'il s'ensuit que l'arrêt querellé encourt la censure de la Cour;
Deuxième moyen basé sur le défaut de base légale pris en sa branche unique à savoir l'incertitude quant au fondement juridique de la décision:
Qu'en disposant que l'irrégularité constatée dans le travail du mémorant est constitutive d'une faute professionnelle suffisamment grave pour justifier son licenciement, l'arrêt querellé lui a enlevé du coup le bénéfice des droits réclamés notamment les indemnités de préavis de congés payés et de licenciement; que cependant la faute lourde même avérée du travailleur ne compromet aucunement le paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés qui constitue un droit acquis pour le travailleur; qu'en statuant ainsi, les juges du fond enlèvent tout fondement juridique à leur décision;
ANALYSE DES MOYENS:
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt déféré le défaut de réponse à conclusions et le défaut de base légale;
Attendu, eu égard à leur interférence et à leur connexité, que les deux moyens peuvent être examinés ensemble;
Attendu que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs et doit entraîner la nullité du jugement en application de l'article 463 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale alors que le défaut de base légale est constitué par une insuffisance de motivation de la décision attaquée qui ne permet pas à la Cour Suprême de contrôler la régularité de la décision ou plus précisément de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règle de droit;
Attendu que les juges du fond, après avoir largement exposé les prétentions des parties (1er et 2ème considérants) ont admis qu'en cas de licenciement pour faute lourde il incombe à l'employeur de prouver qu'il a un motif légitime de licenciement avant de faire constater que Laborex - Mali a produit au dossier des fiches dites de «commande normale» et « Commande corrigée» d'où il ressort que certaines quantités de médicaments commandés ne correspondent pas; qu'à titre d'illustration, la quantité defansidar indiquée sur la «Commande corrigée» est de 4 tandis que celle indiquée sur la commande normale est de 5 et qu'en plus le nombre 10 est marqué au bic; que le mémorant reconnaît cette situation qu'il qualifie de seule irrégularité constatée; que cette irrégularité est constitutive d'une faute professionnelle suffisamment grave pour un magasinier justifiant la mesure prise par l'employeur; qu'en déclarant le licenciement du mémorant justifié au fond, l'arrêt entrepris retient qu'il est irrégulier en la forme pour être intervenu en violation de l'article L40 du Code du Travail avant de confirmer le premier jugement qui a condamné Laborex - Mali à payer au mémorant la somme de 143.5666 F cfa représentant un mois de son salaire brut;
Attendu que cette motivation est abondante pour permettre à la Cour Suprême d'exercer son contrôle, la notion de faute lourde relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond; qu'il s'ensuit que ces moyens ne peuvent prospérer et que le pourvoi doit être rejeté;
PAR CES MOTIFS:
En la forme: Reçoit le pourvoi;
Au fond: le rejette comme mal fondé;
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDNET ET LE GREFFIER./.