COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
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Chambre Sociale
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POURVOI N°15 et 16 DU 1er MARS 2002
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ARRET N°05 DU 21 MARS 2005
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NATURE: Demande de dommages - Intérêts.
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi vingt un mars de l'an deux mille cinq, à laquelle siégeaient :
Madame Niamoye TOURE, Présidente de la Chambre Sociale, Président;
Monsieur Etienne KENE, Conseiller à la Cour, Membre;
Monsieur Fakary DEMBELE, Conseiller à la Cour, Membre;
En présence de Monsieur Moussa Balla KEÏTA, avocat général près ladite Cour, occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître SAMAKE Fatoumata Z. KEÏTA, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI de Maîtres Ousmane A. BOCOUM et Amadou T DIARRA, tous deux Avocats à la cour, agissant au nom et pour le compte de Aa B et autres, d'une part;
CONTR:: Groupe Achkar ayant pour conseil Maître Kassoum TAPO, Avocat à la cour, défendeur, d'autre part;
Sur le rapport du Conseiller Fakary DEMBELE et les conclusions écrites et orales de l'Avocat Général Moussa Balla KEÏTA.
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
EN LA FORME:
Par actes n°15 et 16 du 1er mars 2002, Maître Ousmane A. BOCOUM et Maître Amadou T. DIARRA tous Avocats à la Cour, agissant respectivement au nom et pour le compte de Ab A et dix autres et Aa B et autres ont déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°16 du 28 février 2002 rendu par la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de Bamako dans l'instance en demande de dommages - intérêts opposant leurs clients au Groupe Achkar;
Les demandeurs dispensés de consignation ont tous produit mémoires ampliatifs auxquels il n'a pas té répondu. Le dossier revient sur second pourvoi mais avec des moyens nouveaux. La formation compétente est donc la Chambre Sociale.
Les pourvois ayant satisfait aux exigences de la loi, sont par conséquent recevables.
AU FOND:
Exposé des moyens:
Sous la plume de leurs conseils respectifs les mémorants ont soulevé trois moyens de cassation tirés du manque de base légale, du défaut de motifs et du défaut de réponse à conclusions.
Moyens soulevés par Maître Ousmane A. BOCOUM:
Premier moyen:
Il est fait grief à l'arrêt déféré de manquer de base légale en ce que les mémorants ont contesté le respect par l'employeur de l'ordre de licenciement prévu par les dispositions de l'article L48 alinéa 1 du Code du Travail, le quel a gardé les plus jeunes au détriment des plus anciens; que pour rejeter les prétentions des mémorants l'arrêt recherché motive « considérant que dans le cas d'espèce l'arrêt n°86 du 31 mai 1994 de la Chambre Sociale de la cour d'Appel tout en indiquant les critères dégagés par la loi dans l'établissement de l'ordre de licenciement prévu par l'article L48 al 1 du Code du Travail a estimé souverainement que ces critères avaient été respectés» alors qu'il est constant que suivant arrêt n°33 du 21 avril 1997, l'arrêt visé par la Chambre Sociale a été cassé et annulé en toute ses dispositions; qu'il est également acquis que l'annulation tout ou privant la décision de tout effet, empêche tout juge de s'y référer expressément ou implicitement; qu'en faisant fi de l'annulation de l'arrêt n°86 et en fondant sa décision sur les motivations dudit arrêt, il sied déclarer la décision manquant de base légale et la casser.
Deuxième moyen tiré du défaut de motifs:
En ce que la Cour d'Appel de Bamako, à l'instar du Tribunal de Travail avait été saisie d'une réclamation de droits liés au licenciement des mémorants qui en contestent le paiement; que pour rejeter les prétentions des mémorants, l'arrêt recherché motive « considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que le groupe Achkar a payé à Aa B et autres tous le droits auxquels ils peuvent prétendre» alors qu'il est acquis de l'article 463 al 1 du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale qui dispose: « le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyen; il doit être motivé à peine de nullité»; que la jurisprudence et la doctrine s'accordent qu'il y a défaut de motifs toutes les fois où les motivations sont insuffisantes ou dubitatives; que dans le cas d'espèce, la motivation de l'arrêt recherché ne permet nullement à la haute juridiction de déterminer sur quoi se sont fondés les juges du fond pour départager les parties au litige; qu'il sied dès lors casser et annuler l'arrêt recherché en toutes ses dispositions avec les conséquences de droit.
Moyens présentés par Maître Amadou T. DIARRA:
Il s'agit d'un moyen unique fondé sur le défaut de réponse à conclusions; qu'après son licenciement le mémorant a saisi le tribunal pour s'entendre condamner son employeur à lui payer des dommages - intérêts; que le tribunal saisi lui a accordé la somme de 500.000 F cfa toutes causes de préjudice confondues; que le groupe Achkar ayant formé opposition contre ce jugement, le Tribunal a ramené le montant des dommages - intérêts à 300.000 F cfa; que le mémorant a intégré appel contre ce jugement en démontrant non seulement que la somme de 500.000 F cfa accordée toutes causes de préjudice confondues était loin de couvrir les droits des concluants à plus forte raison celle de 300.000 F cfa pour les raison suivantes, le mémorant aussi bien que d'autres étant en attente de faire valoir leurs droits à une retraite car ils étaient à deux ans de la retraite; que sur cette base; ils se sont prévalus des dispositions de l'article L53 du Code du Travail et la somme de 948.600 F cfa a été obtenu; que la Cour d'Appel de Bamako n'ayant même pas daigné examiner sous cet aspect les conclusions du mémorant, son arrêt mérite cassation sur ce point;
ANALYSE DES MOYENS
Attendu, que dans les deux mémoires il est fait grief à l'arrêt entrepris le manque de base légale, le défaut de motifs et le défaut de réponse à conclusions;
Des moyens présentés par %Maître Ousmane A. BOCOUM:
Attendu que les mémorants par l'organe de leur avocat susnommé reproche à l'arrêt le manque de base légale et l'absence de motifs;
Attendu qu'eu égard à leur interférence et leur connexité, les moyens peuvent être examinés ensemble;
Attendu, sur le premier moyen, que les mémorants ont contesté le respect par l'employeur de l'ordre de licenciement prévu par les dispositions de l'article L48 al 1 du Code du Travail en ne gardant que les plus jeunes au détriment des plus anciens; que pour rejeter leurs prétentions, l'arrêt recherché motive « considérant que dans le cas d'espèce l'arrêt n°86 du 31 mai 1994 de la chambre sociale de la cour d'Appel de Bamako tout en indiquant les critères dégagés par la loi dans l'établissement de l'ordre de licenciement prévu par l'article 48 al 1 du Code du Travail a estimé souverainement que ces critères avaient été respectés»; qu'ils considèrent cette référence comme un défaut de base légale tant il est constant que suivant arrêt n°33 du 21 avril 1997, la cour Suprême a cassé et annulé l'arrêt visé;
Attendu que le défaut de base légale est l'insuffisance de motifs empêchant la cour Suprême d'exercer son contrôle;
Attendu que pour une bonne intelligence de la procédure il convient de faire observer que l'article 47 ancien du Code du Travail applicable au moment des faits et l'article L48 al 1 nouveau procèdent du même esprit notamment en réglant l'ordre de licenciement pour cause économique;
Attendu que l'arrêt recherché de la Chambre Sociale de la cour d'Appel de Bamako fait effectivement référence à la motivation de son arrêt n°86 du 31 mai 1994 cassé et annulé parla cour Suprême et qui a déterminé souverainement les critères prévu par l'article 47 du Code du Travail à savoir la valeur professionnelle, l'ancienneté dans l'établissement, la situation de famille et estimé que le critère dominant est la valeur professionnelle que l'employeur est mieux placé pour apprécier;
Attendu qu'en cas de cassation et de renvoi, les juges du fond recouvrent leur souveraineté pour apprécier les faits de la cause; que cette latitude d'appréciation ne saurait leur permettre de tirer référence de l'arrêt casser et annuler lors de l'examen du précédent pourvoi eu égard à l'effet juridique attaché à un acte annulé; qu'en procédant comme ils l'ont les juges d'appel n'ont pas donné de base légale à leur décision; que le moyen est donc pertinent.
Attendu que le deuxième moyen, qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les prétentions des mémorants qui contestent le paiement de droit liés au licenciement en motivant « considérant qu'il ressort des pièces versés au dossier que le groupe Achkar a payé à Aa B et autres tous les droits auxquels ils peuvent prétendre»; que ces motifs sont insuffisants ou dubitatifs et ne permettent pas à la haute juridiction de déterminer sur quoi se sont fondés les juges du fond pour départager les litigants.
Attendu que la référence simple aux pièces du dossier sans les désigner procède d'un défaut de motifs car une décision de justice doit se suffire à elle même; que le visa des éléments de la cause n'est toléré parla cour de cassation que dans le cas où le juge du fond avait procédé à l'évaluation d'un préjudice ou dans le cas où la décision étant motivée et les documents ayant été analysés dans les conclusions des parties, la référence aux documents de la cause dans analyse détaillée de ceux - ci, n'est pas constitutive d'un défaut de motif ( cf. Jacques Boré Cassation en matière civile pages 636 et 637. Edition 1988);
Moyen présenté par Maître Amadou T. DIARRA:
Attendu que le mémorant a dans ses conclusions en cause d'appel, réclamé une indemnité de licenciement sur la base de l'article L 53 nouveau du Code du Travail; que la cour d'Appel de Bamako tout en reprenant dans ses motifs ladite demande a omis d'y répondre;
Attendu que le défaut de réponse à conclusions équivaut à une absence de motifs et doit entraîner la nullité du jugement en application de l'article 463 du Code de Procédure civile, Commerciale te Sociale; qu'il échet par conséquent de recevoir ce moyen.
PAR CES MOTIFS:
En la forme: Reçoit le pourvoi;
Au fond: casse et annule l'arrêt défér2;
Renvoie la cause te les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée;
Met les dépens à al charge du Trésor Public;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus .
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.