COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
Chambre d'Accusation -----------------
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ARRET N°41 DU 18 AVRIL 2005
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NATURE: Atteinte aux biens publics
et d'enrichissement illicite.
La Première Chambre Civile de la Section Judiciaire, désignée comme Chambre d'Accusation par délibération du bureau à la Cour Suprême:
A, en son audience publique ordinaire du lundi dix huit avril de l'an deux mil cinq, à laquelle siégeaient:
Monsieur Sidi SINENTA, Président de la Chambre d'Accusation, Président;
Monsieur Fakary DEMBELE, Conseiller à la cour, Membre ;
Madame KANTE Hawa KOUYATE, Conseiller à la Cour, membre;
En présence de Monsieur Mahamadou BOUARE, Avocat Général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître SAMAKE Fatoumata Z. KEÏTA, Greffier;
Statuant en Chambre de Conseil
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
Vu la loi n°88/39 AN - RM du 05 avril 1988 portant réorganisation judiciaire en République du Mali;
Vu la loi n°96/071 du 16 décembre 1996 portant loi organique fixant l'organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême ainsi que la procédure suivie devant elle;
Vu le réquisitoire introductif du procureur Général près la Cour Suprême en date du 24 août 2000;
Vu le réquisitoire définitif n°448/PG - CS en date du 20 août 2003;
Vu la procédure Ministère Public contre
Ac Ab A ancien Ministre était inculpé d'enrichissement illicite
M.D : du 17 juin 1991;
EXPOSE DES FAITS:
Dans le cadre du dossier dit « crimes Economique», le sieur Ac Ab A ancien Ministre 2tait inculpé d'enrichissement illicite;
Au cours de l'information judiciaire ouverte, en application des dispositions de l'ordonnance n°6 CMLN du 13 février 1974 et des textes modificatifs subséquents, la saisie conservatoire de ses biens meubles et immeubles a été ordonnée. Au rang de ceux - ci figuraient 3 tracteurs qui au moment des faits étaient en location du complexe Sucrier du Kaala Supérieur ( SUKALA). Suivant ordonnance n°12 du 22 janvier 1992, le notaire Ad B fut nommé séquestre des biens et l'huissier Aa Ae C fut chargé à compter du 25 août 1995 de procéder au recouvrement des loyers et de les verser au notaire séquestre sus invoqué.
Le 21 mars 1995, à la demande des conseils de l'inculpé, une ordonnance portant modification de la garde des biens saisis intervenait et Ac Ab A retrouvait la garde de ses tracteurs.
A l'a suite de l'arrêt de non - lieu intervenu en sa faveur le 12 décembre 1995, Ac Ab A sollicitait par l'intermédiaire de ses conseils la restitution de la somme de 1.396.500 Francs qu'il estimait lui être due au titre des loyers perçus par le séquestre et l'huissier, après déduction des montants retenus au titre de la caution et de l'achat de pièces de recharge et du montant perçu en espèce.
Suivant arrêt n°8 du 15 janvier 1995, sa requête déclarée recevable a été rejetée comme mal fondé, le montant réclamé ayant été considéré comme des frais d'exploitation dont l'origine remonte à lui. Il a relevé appel de cet arrêt.
PROCEDURES
Poursuivi pour enrichissement illicite en application des articles 574 et suivant du Code de Procédure Pénale, lesquels instituent un privilège de juridiction au profit entre autre personne des ministres agissant dans l'exercice de leurs fonctions, Ac Ab A a bénéficié d'un arrêt de non - lieu le 12 décembre 1995.
Le 08 janvier 1996, il a fait par l'intermédiaire de ses conseils une demande restitution de reliquats de loyers de ses tracteurs pour un montant de 1.396.55. Francs.
Le 15 janvier 1996, la Chambre civile de la cour Suprême l'a débouté de sa demande par l'arrêt n°8 dont le dispositif est ainsi conçu: « par ces motifs, déclare recevable la requête en date du 08 janvier 1996 de l'inculpé. La rejette comme mal fondée»;
Suivant acte au greffe de la cour Suprême en date du 20 mai 19998, il a déclaré relever appel de l'arrêt susvisé dont la date de notification n'apparaît pas à la lecture du dossier.
DISCUTION
Le problème qui est posé à la suite de cet arrêt est celui de la recevabilité de l'appel interjeté par l'inculpé contre les arrêts de la Chambre Civile agissant comme Chambre d'Instruction dans le cadre du privilège de juridiction institué par l'article 574 du Code de Procédure Pénale;
Le droit commun de l'instruction préparatoire institue une Chambre d'Accusation, en tant que juridiction d'instruction du second degré, devant laquelle sont portés les contentieux de la détention préventive et d'une manière générale les appels formés contre les actes du juge d'instruction, juridiction d'instruction du premier degré.
Or, s'agissant de l'instruction diligentée en application des articles 574 et suivants du Code de Procédure Pénale, l'article 577 alinéa 1er du même code dispose: « une des Chambres Civiles de la cour Suprême désignée par le bureau de cette cour est chargée de cette instruction. La Chambre nécessaires, dans les formes et conditions prévues par le présent code»;
Et l'article 578 ajoute: «lorsque l'instruction est terminée, la Chambre peut:
Soit dire qu'il n'y a lieu à suivre;
Soit si l'infraction retenue à la charge de l'inculpé constitue un délit, le renvoyer devant une juridiction correctionnelle de premier degré autre que celle dans la circonscription de laquelle l'inculpé exerçait ses fonctions;
Soit si l'infraction retenue à la charge de l'inculpé constitue un crime, saisir une autre chambre civile de la Cour Suprême désignée par le bureau de la cour. Cette Chambre procède et statue dans les formes et conditions prévues pour l'instruction devant la Chambre d'Accusation»;
L'article 580 du même code quant à lui édicte que les arrêts prononcés par les chambres civiles de la cour Suprême dans les cas prévus par les précédents articles ne sont susceptibles d'aucun recours.
La rédaction de l'article 580 laisse clairement apparaître que la seconde chambre civile procède et statue dans les formes et conditions prévues pour l'instruction devant la chambre d'accusation ne possède pas de pouvoir de réformation des arrêts de la première chambre. Elle ne peut en effet être saisie e nant que juridiction d'appel car selon la loi; l'appel est irrecevable.
C'est cela qui fait la spécificité des arrêts rendus par les chambres civiles en matière d'information judiciaire.
D'un autre côté, l'article 35 de la loi n°96-071 du 16 décembre 1996 dispose que les arrêts de la Section Judiciaire ne sont susceptibles de recours que dans les cas de recours en rectification, de recours en interprétation et de requête en rabat d'arrêt.
Il semble donc ainsi que la recevabilité de l'appel devant la Chambre d'Accusation fait l'objet de deux dispositions distinctes; d'une part, l'article 35 de la loi n°96-71 du 16 décembre 1996 fixant l'organisation, le fonctionnement de la cour Suprême ainsi que la procédure suivie devant elle qui traite d'une manière générale des voies de recours contre les arrêts de la Section Judiciaire et d'autre part, l'article 580 du code de Procédure Pénale qui traite spécifiquement des voies de recours contre les arrêts des Chambres civiles de ladite Section comme Chambre d'instruction et chambre d'accusation, dans les procédures instruites suivant la procédure de privilège de juridiction ci - dessus spécifiée;
Un des principes généraux du Droit édicte que devant les règles particulières, les règles de portée générale s'effacent. En raison de ce principe, nous pensons que l'irrecevabilité de l'appel découle plutôt du texte spécifique de l'article 580. Pour la même raison, nous pensons également que si l'article 580 n'existait pas, du fait du renvoi fait aux formes et condition prévues au code de procédure pénale pour l'instruction devant la Chambre d'accusation, l'appel aurait été recevable, cela malgré la présence de l'article 35 susvisé.
L'intérêt de la distinction n'est pas que théorique. Dans l'un des cas, aucun recours n'est possible; dans l'autre, le recours en interprétation, le recours en rectification et la requête en rabat d'arrêt sont possibles.
PAR CES MOTIFS:
La Cour: déclare l'appel interjeté par Ac Ab A contre l'arrêt n°08 du 15 janvier 1996 irrecevable;
Met les dépens à la charge du demandeur.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
Suivent les signatures
Signé illisible
Enregistré à Bamako le 22 juin 2005
Vol I Fol 132 N°01 bordereau N°774 ;
Reçu Gratis;
L'inspecteur de l'enregistrement
Signé illisible