COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
2ème CHAMBRE CIVILE -----------------
------------------
POURVOI N°05 DU 29 NOVEMBRE 2002
---------------------------------------
ARRET N°87 DU 25 AVRIL 2005
----------------------------------
NATURE: Annulation de vente.
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi vingt cinq avril de l'an deux mil cinq, à laquelle siégeaient:
Monsieur Diadié Issa MAIGA, Président de la 2ème Chambre Civile, Président;
Monsieur Fakary DEMBELE, Conseiller à la Cour, membre;
Monsieur Sambala TRAORE, Conseiller à la Cour, Membre;
En présence de Monsieur Mahamadou BOIRE, Avocat Général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître SAMAKE Fatoumata Z. KEÏTA, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI de Maître Boh CISSE, Avocat à la cour agissant au nom et pour le compte de Aa C, d'une part ;
CONTRE: BMCD ayant pour conseils Maîtres Alassane DIOP Cabinet et Abdoulaye Garba TAPO, Avocat à la Cour, défenderesse, d'autre part;
Sur le rapport du Conseiller Sambala TRAORE et les conclusions écrite et orale des avocats Généraux Moussa Balla KEÏTA et Mahamadou BOIRE ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
EN LA FORME:
Suivant Acte n°05 du 29 novembre 2002 du greffe du Tribunal civil de la commune Ii du District de Bamako, il a été enregistré le pourvoi formé le même jour par Maître Bôh CISSE, Avocat au Barreau du Mali agissant au nom et pour le compte de Aa C contre le jugement n°448 du 27 novembre 2002 par ledit Tribunal dans une instance en annulation de vente opposant son client à la Banque Malienne de crédit et de Dépôt;
Le demandeur a consigné et produit un mémoire ampliatif dans les formes et délai de la loi. Ledit mémoire, notifié à la défenderesse a fait l'objet de réponse dans les même constitutions;
Le recours est donc recevable en la forme.
AU FOND:
Sur les faits et la procédure:
En vertu de la grosse de l'acte notarié fixé par devant Maître Amadou DIOP, notaire à la résidence de Bamako, la Banque Malienne de Crédit et de dépôt est créancière de Monsieur Aa C pour la sommes de 126.318.580 F Cfa en principal et soin. Le débiteur avait consenti une hypothèque sur ses deux titres fonciers n°2301 et n°2938 sis à Bamako en garantie du paiement de la créance susdite;
Faute de paiement de la sommes de 126.318.580 F cfa représentant le montant dû par Aa C à sa créancière la BMDC, celle - ci saisit le Tribunal civil de la Commune II du District de Bamako en expropriation forcée portant sur les deux titres fonciers n°2331 et 2938 de Bamako pour avoir paiement de sa créance chiffrée à 126.318.580 Fcfa.
Suivant un jugement n°180 daté du 16 mai 2001, le Tribunal, à son audience éventuelle rejeta les dires et observations formulées par Aa C et fixa la date de la vente au mercredi 06 juin 2001.
Suivant jugement n°s 206 et 207 rendu le 06 juin 2001, le Tribunal civil de la Commune II du District de Bamako déclara la BMCD adjudicataire des titres fonciers n°2301 e 2938 du District de Bamako appartenant à Aa C .
Suivant un jugement n°448 rendu le 27 novembre 2002 dans une instance en annulation du jugement d'adjudication susdit, le Tribunal de la Commune II de Bamako a débouté Aa C de son action comme étant infondée.
Exposé des moyens du pourvoi:
Le demandeur au pourvoi ayant pour conseil Maître Boh CISSE, Avocat au Barreau du Mali, invoque un seul moyen de cassation basée sur la violation de la loi qu'il subdivise en trois branches ci après:
1- De la violation de l'article 254 alinéa 2 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution:
En ce que, l'article 254 al2 précité dispose que « le commandement doit à peine de nullité être signifié au débiteur et le cas échéant au tiers détenteur de l'immeuble»;
Qu'en l'espèce les commandements ayant abouti aux adjudications attaquées n'ont signifié ni au débiteur, Aa C, ni à un tiers détendeur de l'immeuble;
Que toutes les adjudications ont lieu sur la base du amendement signifié le 28 novembre 2000 par Maître Aliou TRAORE, en violation de l'article 254 alinéa 2; que l'huissier susdit s'est contenté de signifier le commandement à une certaine Ac A qui n'est ni débiteur, ni tiers détenteur de l'immeubles vendus;
Qu'il a clairement soulevé cette violation de l'article 254 al 2 dans ses conclusions datées du 23 avril 2002 devant le juge d'instance;
Que le jugement attaqué s'est contenté de retenir que l'amendement qui a été signifié à Ac A, l'épouse Aa C, introuvable sur les lieux a respecté les dispositions de l'article 254 al 2 de l'acte Uniforme de l'OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécutions»;
Que Ac A n'étant ni débiteur, ni tiers détendeur au sens de l'article 254 al 2 le jugement attaqué pour avoir violé ledit article mérite la cassation.
2- De la violation de l'article 281 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant Organisation des procédures Simplifiées de recouvrement et de voies d'exécution:
En ce que cet article dispose quel'adjudication peut être remise pour causes graves et légitime par décision judiciaire motivée;
Quelle ne peut être remise à plus de soixante jours en vertu d'une décision motivée rendue sur requête présentée cinq jours avant le jour de la vente.
Que le créancier poursuivant procède à une nouvelle précité;
Qu'après avoir fixé au 30 mai 2001 la nouvelle date d'adjudication, le Tribunal a opéré une remise au 06 juin 2001 en lieu et place du 30 mai 2001;
Que la créancière poursuivante à savoir la BMCD, n'a pas accompli la formalité prescrite par l'article 281 précité et relatives à la publicité mais s'est contentée de lever un permis de citer le 30 mai 2001 pour le 06 juin 2001;
Que pour une telle violation de l'article 281 précité de l'Acte Uniforme le jugement mérite la cassation.
3- De la violation de l'article 276 de l'Acte Uniforme portant organisations des Procédures Simplifiées de recouvrement et les voies d'exécution:
En ce que les prescriptions faites par la BMCD en vue de la vente du 06 juin 2001 ont violé les délais prescrits par l'article 276 précité à savoir trente jours au plutôt et quinze jours au plus tard avant l'adjudication; qu'entre le 21 mai et le 06 juin 2001 il ne saurait y avoir le délai de 15 jours francs exigé par le texte précité;
Qu'en rejetant la demande d'annulation du jugement d'adjudication du 06 juin 2001, le jugement querellé s'expose à la cassation.
La défenderesse dans son mémoire en réplique a fait valoir:
Que la signification du commandement fait au domicile du débiteur satisfait aux exigences de l'article 254 alinéa 27 de l'Acte Uniforme de portant organisation de Procédure Simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Que le demandeur au pourvoi avait saisi le 1er juin 2001 d'une demande alors que la vente était fixée au 06 juin 2001; qu'il n'a nullement respecté le délai de 05 jours prescrit par l'article 299 de l'Acte Uniforme;
Qu'elle conclut au rejet du pourvoi;
ANALYSE DU MOYEN:
1 Du moyen pris de la violation de l'article 254 al 2 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier que le commandement dont il s'agit a été signifié au domicile du débiteur à son épouse prénommée Ac A;
Attendu qu'il est acquis que les notifications sont faites au lieu où demeure le destinataire s'il s'agit d'une personne physique;
Que toute fois, lors qu'elle est faite à personne la notification est valable quelque soit le lieu où elle est délivré, y compris le lieu de travail. La notification est aussi valablement faite au domicile élu lorsque la loi l'admet ou l'impose; ( cf. Nouveau Code de Procédure Civile Français article 650page 692 );
Qu'en matière de signification, il n'y a nullité que lorsque la violation a porté grief à la partie qui l'invoque; que lorsque la signification à personne s'avère impossible, étant entendu que les circonstances qui caractérisent cette impossibilité doivent être décrite par l'huissier l'acte peut être délivré soit à domicile soit à défaut de domicile comme à résidence, la copie pouvant être remise à toute personne présente. Nouveau Code de Procédure Civile Français article 655 page 392;
Attendu qu'il ressort du commandement daté du 19 novembre 2000 dont la nullité et allégué, qu'il a été signifié à domicile du débiteur «Aa C, à son épouse Ac A chargée de la remise» que la sommation à prendre connaissance du cahier de charge daté du 09 janvier 2001 a été signifié à « domicile à son domestique Ab B qui ont toutes accepté de recevoir la copie des actes »;
Attendu qu'il est constant le demandeur a été représenté par son conseil Maître Bôh CISSE à tous les actes de la procédure d'adjudication; qu'il échet d'enduire qu'aucun grief n'est prouvé par le demandeur au pourvoi;
Qu'il s'ensuit que le moyen invoqué est injustifié et doit être rejeté;
Que le commandement signifié est régulier;
Qu'il convient donc de rejeter ce moyen comme étant injustifié; qu'il résulte du jugement attaqué « qu'il est constant que le commandement signifié à la personne de Ac A, l'épouse de Aa C introuvable sur les lieux a respecté les dispositions de l'article 254 al2 de l'acte Uniforme sur les voies d'exécution;
2- Du moyen pris de la violation de l'article 281 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement des voies d'exécutions:
Le texte dispose: « Néanmoins l'adjudication peut être remise pour causes graves et légitimes par décision judiciaire motivé rendue sur requête déposée cinq jours au moins avant le jour fixé pour la vente;
En cas de remise, la décision judiciaire fixe de nouveau, le jour de l'adjudication qui ne peut être éloignée de plus de soixante jours, le créancier poursuivant doit procéder à une nouvelle publicité;
La décision judiciaire n'est susceptible d'aucun recours sauf si la juridiction compétente a méconnu le délai prévu par l'alinéa précédent. Dans ce cas l'appel est recevable dans les conditions prévues à l'article 301 ci - après»;
Attendu que le dispositif du jugement n°180 rendu le 16 mai 2001: est ainsi conçu « statuant, publiquement, contradictoirement en matière d'incidents de saisie immobilière et par décision inusceptible de recours...;
Vu l'article 279 de l'Acte Uniforme portant organisation de Procédure Simplifiée de Recouvrement et des Voies d'Exécution;
Fixe au mercredi 06 juin 2001 à 10 heures 30 la date à la quelle il sera après qu'elle ait été annoncée conformément à la loi procédé à l'adjudication....;
Attendu que cette mention résultant du corps du jugement fait foi jusqu'à inscription de faux et justifie qu'il a été satisfait aux prescriptions de l'article 281 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d'Exécutions;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé et sera rejeté;
3- Du moyen pris de la violation de l'article 276 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant Organisation de procédure simplifiée de recouvrement et des voies d'exécution: lequel est ainsi libellé:
« Trente jours au plus tôt et quinze jours au plus tard avant l'adjudication, un extrait du cahier des charges est publié, sous la signature de l'Avocat poursuivant par insertion dans un journal d'annonces légales et par apposition de placards à la porte du domicile du saisi, de la juridiction compétente ou du notaire convenu ainsi que dans les lieux officiels d'affichages de la Commune de la situation des biens»;
Attendu qu'il résulte de la copie du procès verbal d'apposition de placards date du 21 mai 2001 à 13 heures 50 minutes établi par Maître Aliou TRAORE, Huissier de Justice près le ressort judiciaire de Bamako, y demeurant, que la vente aura lieu le mercredi 06 juin 2001 à 08 heures du matin et jours suivants s'il y a lieu;
Que selon l'article 335 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de Recouvrement et des voies d'exécution les délais prévus dans le présent Acte sont des délais francs;
Attendu qu'il en résulte que la publicité effectuée pour l'apposition des placards, le délai devant expirer le 07 juin 2001 n'a pas respecté le délai minimum de 15 jours requis avant l'adjudication en ce sens que du 21 mai 2001 au 06 juin 2001 il a moins de 15 jours francs;
Attendu par ailleurs le jugement attaqué en décidant que « le Président de la juridiction compétente peut par décision non susceptible de recours rendue sur requête restreindre la publicité» a méconnu et mal interprété les dispositions de l'article 279 visé au moyen, car restreindre la publicité ne signifie point réduire les délais légaux et particulièrement le minimum;
Attendu qu'en conséquence, de ces énonciations il convient de retenir que le jugement querellé a violé les dispositions de l'article 276 de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
PAR CES MOTIFS:
En la forme: Reçoit le pourvoi;
Au fond: casse et annule le jugement entrepris;
Renvoie et la cause et les parties devant le Tribunal de première instance de la commune II du District de Bamako autrement composée;
Ordonne restitution de l'amende de consignation;
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.