COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIREUN PEUPLE - UN BUT - UNE FOI
Chambre Commerciale --------------------
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POURVOI N°317 DU 10 SEPTEMBRE 2004
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ARRET N°13 DU 06 JUIN 2005
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NATURE : Reddition de comptes.
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi six juin de l'an deux mille cinq à laquelle siégeaient :
Monsieur Boubacar DIALLO: Président de la Chambre Commerciale, Président;
Madame KANTE Hawa KOUYATE : Conseiller à la Cour, membre;
Madame C Af B : Conseiller à la Cour, membre;
En présence de monsieur Mahamadou BOIRE, Avocat Général près ladite Cour ;
Avec l'assistance de maître SAMAKE Fatoumata Zahara KEITA, greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI de Maître Salif SANOGO, Avocat à la Cour, agissant pour le compte B.I.M. - S.A., d'une part;
CONTRE: Société Ad Y et BIPC ayant pour conseils Maîtres Hassane BARRY et Mamadou B. DIALLO, (tous deux Avocats à la Cour ), défenderesses d'autre part;
Sur le rapport du Président Boubacar DIALLO, et les conclusions écrites et orales de l'Avocat Général Mahamadou BOIRE ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
EN LA FORME:
Par acte n°317 formé au greffe de la Cour d'Appel de Bamako le 10 septembre 2004 Maître Salif SANOGO, Avocat au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de la B.I.M. - S.A. s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°434 rendu le 08 septembre 2004 par la Cour d'Appel de Bamako dans une procédure en reddition de comptes opposant la B.I.M. - S.A. aux sociétés Famousse - SA et BIPC ;
La demanderesse a versé l'amende de consignation prévue par la loi ainsi que l'atteste le certificat de consignation n°205 du 04 octobre 2004 versé au dossier de la procédure. Il a en outre produit un mémoire ampliatif qui a été notifié aux défenderesses qui ont répondu ;
Le pourvoi est donc recevable ;
AU FOND :
Résumé des faits de la cause :
Suivant un protocole d'accord daté du 03 juillet 1996, les Sociétés Ad Y et BIPC, toutes deux représentées par Aa Z, en qualité de Président Directeur Général de Ad Y et propriétaire de B.I.P.C. ont reconnu être débitrices de la Banque Internationale pour le Mali - SA ( B.I.M. - S.A.) représentée par Madame X Ag Directrice générale et Ae A, Directeur juridique, de la somme de 173.647.697 F cfa ;
Aux termes dudit protocole les débitrices s'est engagée à payer dès la signature, un acompte de dix millions, puis au paiement de la somme de six millions trimestriellement à compter de septembre 1996 jusqu'à l'apurement de la totalité de la créance de la Banque;
Le protocole d'accord dont il s'agit a été homologué par le Tribunal de commerce de Bamako par jugement n°264 rendu le 20 novembre 1996;
A la requête de la B.I.M. - S.A., Maître Sekou DIAKITE, Huissier de justice près le ressort judiciaire de Bamako, a signifié aux sociétés Famousse SA et BIPC par commandement daté du 29 mai 1997 de payer la somme de 235.880.519 F cfa au principal et frais.
Par requête datée du 12 juin 1997 les sociétés Famousse SA et BIPC, ayant pour conseil Maître Hassane BARRY, Avocat à la Cour, ont saisi le Tribunal de Commerce de Bamako en reddition de comptes contre la B.I.M. - SA;
Par jugement avant dire droit n°304 du 29 octobre 1997, le Tribunal de commerce de Bamako ordonnait la reddition de comptes sollicitée et désignait monsieur Ac Ab, comptable agréé pour y procéder;
Puis par un autre jugement n°164 rendu le 21 avril 2004, le Tribunal de Commerce de Bamako déclarait l'instance de reddition de comptes éteinte par l'effet de la transaction intervenue le 10 mai 2001;
Sur appel des Sociétés Famousse et BIPC, la Cour d'Appel de Bamako par arrêt n°434 rendu le 08 septembre 2004 infirmait ce jugement. Cet arrêt fait l'objet du présent pourvoi;
Exposé des moyens du pourvoi:
La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi un moyen unique de cassation pris de la violation de la loi, développé en trois branches ainsi qu'il suit:
Première branche: tirée de la violation des articles 2044 et 2052 du code civil Français:
En ce que l'arrêt confirmatif a considéré que la procédure de reddition de compte est encore pendante devant le Tribunal de Commerce pour infirmer le jugement n°164 du 21 avril 2004 de cette juridiction qui avait déclaré l'instance entre les parties éteinte par la transaction alors que les parties avaient signé un avenant en date du 10 mai 2001 dans lequel elles avaient décidé de la radiation des affaires pendantes devant les Tribunaux; qu'aux termes de l'article 2044 du code Civil Français cet avenant constitue une transaction; que l'article 2052 du même Code indique que: les transactions ont entre les parties, l'autorité de la chose jugée, en dernier ressort; qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt attaqué viole les dispositions ci dessus et s'expose à la censure.
Deuxième branche: tirée de la violation des articles 77 de la loi Régime Général des obligations au Mali et 1134 du code Civil français:
En ce que l'arrêt attaqué a maintenu l'instance en reddition de comptes entre les parties alors que l'avenant au protocole d'accord, signé le 10 mai 2001 mentionne en son article 11 alinéa premier: « les parties décident de la radiation des affaires pendantes actuellement devant les tribunaux»;
Que conformément aux dispositions des articles 77 et 1134 susvisés « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui l'ont faites;
Qu'elles ne peuvent être révoquées de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise; qu'elles doivent être exécutées de bonne foi»;
Que l'avenant ci dessus invoqué a fait tomber le jugement avant dire droit du 29 octobre 1997 ordonnant reddition de compte;
Que l'arrêt en décidant du contraire, doit être annulé;
Troisième branche tirée de la violation de l'article 390 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale:
En ce que l'arrêt attaqué a méconnu la fin de non recevoir invoquée par la demanderesse tirée du fait que la procédure est demeurée sans .. nouvel acte de procédure du 29 octobre 1997 ( date du jugement avant dire droit ordonnant la reddition des comptes) au 25 août 2003 ( date de la demande de réenrôlement de la procédure de reddition de comptes); qu'il s'est écoulé plus de deux ans alors que l'article 390 du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale dispose « l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit pas de diligence pendant deux ans»; qu'il y a donc violation manifeste de l'article visé au moyen, exposant l'arrêt à la censure de la haute juridiction.
Famousse SA et BIPC, par l'organe de leur conseil, ont conclu au rejet du pourvoi comme mal fondé;
ANALYSE DES MOYENS DU POURVOI:
Première branche: tirée de la violation des articles 2044 et 2052 du Code Civile Français:
La demanderesse excipe de la violation des articles 2044 et 2052 du Code Civil Français ainsi conçus:
Article 2044 « la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître;
Ce contrat doit être écrit»
Article 2052: « les transactions ont, entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort;
Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit ni pour cause de lésion;
Les dispositions ci dessus traitent des transactions, donc de des obligations. Or, la loi n°87 - 31 /AN RM du 29 août 1987 fixent Régime Général des Obligations abroge en son article 305 toutes dispositions antérieures. Par conséquent seule la loi sus - visée doit être la référence puisqu'elle traite du sujet.
Il appert donc que le moyen visant des dispositions non applicables est inopérant.
Deuxième et troisième branches : tirées de la violation des articles 77 de la loi portant Régime Général des Obligations au Mali, 1134 du Code Civil Français et 390 du code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale:
Ces deux moyens peuvent être analysés ensemble en raison de leur interférence;
L'article 77 du Régime Général des Obligations au Mali et l'article 1134 du Code civil Français sont identiques. Ils disposent: « les Conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise;
Elles doivent être exécutées de bonne foi»;
Il est fait grief à l'arrêt querellé ayant ordonné la reddition des comptes, d'avoir méconnu la convention passée entre les parties dans l'avenant qu'elles ont signé le 10 mai 2001 et qui prévoyait entre autre la radiation de toutes les procédures pendantes devant les juridictions.
A cet égard, il échet de rappeler que la demanderesse se prévaut d'une part d'un acte dressé par les parties le 03 juillet 1996 qui indique que suite à des concours dont ont bénéficié les défenderesses et qui se sont mal dénoués, celles - ci sont débitrices d'une créance exigible de la Banque arrêtée d'un commun accord en principal au jour de la signature dudit protocole à 173.647.691 F cfa; qu'elles se sont engagées à payer ainsi qu'il suit:
10.000.000 F dès la signature et le reliquat soit 163.647.691 F à raison de: 6.000.000 F par trimestre à partir de septembre 1996; Ce protocole a été homologué suivant jugement n°204 du 20 novembre 1996;
La demanderesse se prévaut d'autre part de l'avenant au protocole d'accord du 03 juillet 1996 signé le 10 mai 2001, notamment de son article 11 dans lequel les parties décident de la radiation des affaires pendantes actuellement devant les tribunaux;
Qu'était pendant devant le tribunal notamment le jugement avant dire droit du 29 octobre 1997 ordonnant la reddition des comptes entre les parties;
A la suite d'une requête de la demanderesse en date du 25 août 2003, le tribunal, par jugement n°164 du 21 avril 2004, après avoir constaté la péremption d'instance suite à la l'inaccomplissement d'un acte dans le dossier pendant plus de deux ans ( du 29 octobre 1997 au 25 août 2003 ) a déclaré l'instance éteinte par l'effet de la transaction intervenue le 10 mai 2001. Ce jugement a été reformé par l'arrêt dont est pourvoi.
L'équation juridique à résoudre est la suivante.
L'avenant intervenu le 10 mai 2001 entre les parties pouvait - il éteindre l'instance pendante devant le Tribunal de Commerce?
Le premier juge répond par l'affirmative en arguant que la reddition des comptes ordonnée le 29 octobre n'ayant pu être exécutée, l'instance est pendante en vertu des dispositions des articles 741 et suivants du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale qui indiquent que la reddition ainsi que le jugement de compte en raison du fait que le jugement ordonnant reddition des comptes est une mesure d'instruction qui ne dessaisit pas le juge ( article 488 et 489 du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale); d'autre part qu'en outre l'instance est périmée en application de l'article 390 du code de Procédure civile, Commerciale et Sociale pour être restée sans aucun acte accompli du 29 octobre 1997 au 25 août 2003 enfin, que la transaction du 10 mai 2001 a autorisé de la chose jugée en dernier ressort.
L'arrêt du 08 septembre 2004 rendu suite à l'appel des défenderesses au pourvoi soutient au contraire que la reddition des comptes ordonnée par le Tribunal n'ayant pu être effectuée, le juge demeure toujours saisi en vertu des dispositions des articles 488 et 489 du code de Procédure Civile, Commerciale te Sociale; que le premier juge ayant donc fait une mauvaise appréciation des faits et une application erronée de la loi il échet de reformer le jugement en rejetant l'exception de péremption d'instance soulevée parla B.I.M. - SA et ordonner la reddition des comptes entre les parties;
Il y a lieu d'observer que l'arrêt infirmatif a occulté des questions qu'il cependant relevées dans les prétentions de la demanderesse à savoir la péremption d'instance tirée de l'article 390 du Code de Procédure civile, Commerciale et sociale, la portée juridique du protocole du 03 juillet 1997 et celle de l'avenant intervenu le 10 mai 2001 entre les parties; qu'il s'est contenté d'affirmer tout simplement que le jugement entrepris procède d'une mauvaise appréciation des faits et d'une application erronée de la loi; qu'il appert donc que le grief formulé à l'encontre du jugement querellé n'est pas prouvé; que ledit jugement en déclarant l'action éteinte par l'effet de la transaction procède d'une saine application de la loi ( le parties ayant convenu du montant de la créance exigible la reddition des comptes paraît alors sans objet );
Le renvoi après cassation ne s'impose donc plus, rien ne restant plus à juger.
PAR CES MOTIFS:
En la forme: reçoit le pourvoi;
Au fond: casse et annule l'arrêt attaqué;
Dit qu'il n'y a pas lieu à renvoi;
Ordonne la restitution de la consignation;
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus;
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.