COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
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Chambre Sociale
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POURVOI N°33 DU 28 AVRIL 2005
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ARRET N°27 DU 12 SEPTEMBRE 2005
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NATURE: Réclamation de droits
et dommages - intérêts.
LA COUR SUPREME DU MALI
A, en son audience publique ordinaire du lundi douze septembre de l'an deux mille cinq, à laquelle siégeaient:
Madame Niamoye TOURE, Présidente de la Chambre Sociale, Président;
Monsieur Etienne KENE, Conseiller à la Cour, Membre;
Monsieur Boubacar DIALLO, Conseiller à la Cour, Membre;
En présence de Monsieur Moussa Balla KEÏTA, avocat général près ladite Cour, occupant le banc du Ministère Public;
Avec l'assistance de Maître SAMAKE Fatoumata Z. KEÏTA, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:
SUR LE POURVOI de Maître Moussa GOÏTA, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de ABILAB - SARL, d'une part;
CONTRE: Ab Ad B, Ac X, Ac C ayant pour conseil Maître Ladji DIKAITE, Avocat à la cour, défendeurs, d'autre part;
Sur le rapport du Conseiller Boubacar DIALLO et les conclusions écrites et orales des Avocats Généraux Mahamadou BOUARE et Moussa Balla KEÏTA .
Après en avoir délibéré conformément à la loi:
EN LA FORME:
Suivant acte de pourvoi n°33 du 28 avril 2005 du greffe de la Cour d'Appel de Bamako, Maître Moussa GOITA, Avocat au nom et pour le compte de ABILAB - SARL, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt n°45 du 28 avril 2005 rendu par la Chambre Sociale de ladite Cour, dans une instance en réclamation de droits et dommages - Intérêts, opposant sa cliente à Ab Ad B, Ac X et Aa C;
Dispensée de consignation en vertu des dispositions de l'article L202 du code du Travail, la demanderesse a produit conformément à l'article 632 du code de Procédure civile, Commerciale et Sociale un mémoire ampliatif qui, notifié aux défendeurs, a fait l'objet de réponse dans les mêmes conditions.
Le recours est donc recevable.
AU FOND:
EXPOSE DES MOYENS:
A l'appui de son pourvoi, ABILAB - SARL a développé les moyens suivants:
I.1. Du moyen pris de la violation de l'article 463 du code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale ( CPCCS), développé en deux branches:
I.1.1. Première branche: du moyen pris de l'insuffisance de motifs:
En ce que l'arrêt attaqué a déclaré le licenciement de Ab Ad B et Ac C nul de plein droit et a ordonné leur réintégration dans l'entreprise et le rétablissement de leurs droits aux motifs « qu'il ressort des éléments du dossier que Ab Ad B et Ac C étaient délégués du personnel depuis 1998 ( voir avant dernier alinéa des motifs ) alors que ledit arrêt ne spécifie nulle part quels sont « ces éléments du dossier» surtout que la mémorante a toujours contesté aux intéressés la qualité de délégués du personnel à toutes les phases de la présente procédure; qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt querellé n'a pas suffisamment motivé sa décision qui de ce fait, s'expose à la censure de l a Haute Juridiction.
I.1.2. Deuxième branche: Du moyen pris de la contradiction des motifs équivalant à l'absence de motifs:
En ce que l'arrêt attaqué a reconnu dans le troisième alinéa avant le dispositif «.que c'est ainsi qu'après avoir requis l'autorisation de l'inspecteur du travail, qui n'a donné aucune réponse dans le délai de 15 jours imparti par la loi, elle ( s'agissant d'ABILAB) procéda au licenciement des travailleurs après leur avoir payé les droits légaux que dès lors, il n'apparaît de sa part aucune preuve de légèreté blâmable ou intention de nuire; que le seul souci était la sauvegarde des intérêts de l'entreprise», alors qu'immédiatement après, le même arrêt mentionne « que dans le cas d'espèce, ABILAB s'est contentée de transmettre à l'inspection du travail, le procès - verbal de décision de refus du personnel; que cette correspondance ne peut être considérée comme une demande d'autorisation au sens de l'article L277 et qu'il y a lieu de faire droit à la demande de réintégration de Ab Ad B et Ac C»; qu'à la lecture de ces deux motifs, la contradiction apparaît nettement puisque l'on ne peut concilier l'absence de preuve de légèreté blâmable ou d'intention de nuire et la violation d'une quelconque autre disposition légale qui viendrait sanctionner le même comportement alors que la mémorante avait déjà été blanchie; qu'au vu de ce qui précède, cette seconde branche aussi mérite d'être accueillie.
I.2. Du moyen pris de la dénaturation de conclusion:
En ce que la Cour d'Appel, dans son arrêt n°45 du 28 avril 2005, au dernier alinéa des motifs comme dans le dispositif, a jugé qu'il y a lieu de faire droit à la demande de réintégration de Ab Ad B et Ac C et de rejeter les prétentions de Ac X, alors que les appelants eux - mêmes, dans leurs écritures du 05 août 2004 ont par trois fois ( voir page 3 dernier alinéa avant le paragraphe de la correspondance, page 4 premier alinéa et page 5 dans le dispositif), demandé la confirmation de l'arrêt querellé, c'est - à - dire l'arrêt qui a été cassé et annulé parla cour Suprême;
Qu'ABILAB a relevé cette grosse anomalie en consacrant la première partie de ses conclusions en réplique ( paragraphe consacré au droit) à l'absence totale de fondement juridique à ces demandes de confirmation d'un arrêt qui, au regard de la loi, n'existe pas; que l'arrêt querellé n'a nullement fait état de ces demandes « en confirmation d'arrêt» dans le résumé succinct des prétentions et moyens des parties alors que l'intimée en avait expressément demandé le rejet; qu'en ne faisant pas état des vraies demandes des appelants et en se substituant à ceux - ci pour donner toutes autres réponses à des prétentions pourtant claires et juridiquement inaccessibles, l'arrêt attaqué a manifestement dénaturé les conclusions issues des écritures du 05 août 2004 et mérite la censure.
Les défendeurs, par l'organe de leur conseil, ont contesté les moyens de la demanderesse et ont conclu au rejet du pourvoi comme mal fondé.
II- ANALYE DES MOYENS:
II.1.1. De l'insuffisance de motifs:
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu qu'il résulte des éléments du dossier que Ab Ad B et Ac C étaient des délégués du personnel sans indiquer quels étaient les éléments du dossier qui le prouvaient ce, d'autant que cette qualité a toujours été déniée aux défendeurs sus-cités.
A cet égard, il échet d'observer que l'arrêt mentionne à l'avant dernier alinéa des motifs notamment: « considérant cependant qu'il ressort des éléments du dossier que Ab Ad B et Ac C étaient délégués du personnel depuis 1998..», contrairement aux affirmations des défendeurs dans leur mémoire en réplique, il ne résulte d'aucun motifs de l'arrêt querellé, hormis les prétentions des appelants, la preuve de la qualité de délégués du personnel des personnes citées. Une décision de justice doit se suffire à elle-même;
La motivation de l'arrêt procède sur ce point est fondée sur «les éléments de la cause». Or le seul visa des éléments de la cause n'est toléré par la Cour de Cassation, que dans les cas où le juge du fond avait à procéder à l'évaluation d'un préjudice ( cass. 2e civ. 28 avril 1966, bull civ II, n°498; cass. Ass. Plen, 26 mars 1999, bull. Civ. N°3) ou dans le cas où la décision étant motivée et des documents ayant été analysés dans les conclusions des parties, la référence aux documents de la cause sans analyse détaillée de ceux - ci n'est pas constitutive d'un défaut de motifs ( Jacques bore. La cassation civile édition 2003-2004 p.372). Dans le cas d'espèce l'arrêt ne précise même pas les éléments de la cause étayant son assertion quant à la qualité de délégués du personnel attribuée à Ab et Ac.c.
La motivation ne permet donc pas à la Haute Juridiction d'exercer le contrôle qui lui est dévolu. Le moyen doit être accueilli.
II.1.2. De la contradiction des motifs équivalant à l'absence de motifs:
Il est reproché à l'arrêt attaqué de procéder de motifs contradictoires en déclarant qu'ABILAB - SARL n'a fait preuve d'aucune légèreté blâmable ou d'intention de nuire; qu'elle a requis l'autorisation de l'inspecteur du travail qui n'a donné aucune réponse dans le délai de 15 jours imparti par la loi avant de dire ensuite que la correspondance d'ABILAB - SARL ne peut être considérée comme une demande d'autorisation au sens de l'article L277.»;
A cet égard, a verso de la page 2 l'arrêt attaqué renferme les contradictions invoquées par la demanderesse. Or la doctrine et la jurisprudence admettent que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs. Ce moyen doit également être accueilli.
II.2. De la dénaturation des conclusions:
La demanderesse reproche à l'arrêt attaqué d'avoir occulté le manque de fondement juridique reproché aux conclusions des appelants ( défendeurs au pourvoi) qui ont conçu leurs moyens autour de la confirmation de l'arrêt déjà cassé et annulé, censé n'avoir jamais existé.
La Cour d'Appel se devait, même si la confirmation demandée par les défendeurs portait sur le jugement, au lieu de l'arrêt anéanti par la Haute Cour, de répondre à ce point de droit de la demanderesse.
Contrairement aux affirmations des défendeurs dans leur mémoire, la confirmation demandée par eux ne pouvait porter sur un jugement d'instance dans lequel ils ont succombé. A quoi servirait alors leur appel? Il appert donc qu'en demandant la confirmation du premier arrêt annulé, les prétentions des appelants étaient sans fondement juridique. Il échet par conséquent d'accueillir ce moyen.
Il échet d'observer que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement entrepris sans des motifs tendant à prouver que le jugement a procédé d'une mauvaise appréciation des faits et d'une application erronée de la loi. Or ce dernier a discuté tous les éléments de la cause qu'il a appréciés souverainement et la solution juridique apportée à cette constatation procède d'une saine application de la loi; en effet, en écrivant à l'inspecteur du travail pour lui annoncer que certains travailleurs n'ont pas accepté la modification de statut que peut demander l'employeur si ce n'est l'autorisation de licencier. Cela est d'autant vrai que la Cour d'Appel elle même l'a reconnu et a constaté que l'inspecteur a mis plus de 15 jours sans répondre. Cela est d'autant vrai également car les défendeurs ont tous perçus et accepté leurs droits versés à leurs comptes respectifs ( confère jugement du 24 février 2003).
De ce qui précède, il échet de casser et annuler l'arrêt attaqué et de dire qu'il n'y a pas lieu à renvoi.
PAR CES MOTIFS:
En la forme: reçoit le pourvoi;
Au fond: casse et annule l'arrêt déféré;
Dit qu'il n'y a pas lieu à renvoi;
Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.