20071001203
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
1èreChambre Civile
POURVOI N°161 DU 22 JUILLET 2005 ARRET N°203 DU 01 OCTOBRE 2007
DIVORCE-MOTIVATION DE LA DÉCISION
Doit être censuré l'arrêt de la Cour d'appel qui se borne à confirmer la décision des premiers juges, au motif que « le premier jugement relève d'une bonne appréciation des faits et une saine application de la loi », sans chercher à vérifier les éléments permettant de constater le défaut d'entretien retenu par le jugement d'instance.
Dans le cas d'espèce, dès lors que de l'analyse des pièces du dossier de la procédure, tant devant le tribunal de Koutiala que devant la Cour d'Appel, il ressort qu'il n'a été procédé à aucune audition de témoin ou production d'éléments de preuve permettant d'étayer les griefs articulés par la femme contre son mari tendant à corroborer le défaut d'entretien, encourt la cassation, l'Arrêt de la Cour d'Appel qui se borne à adopter les motifs du jugement d'instance sans chercher à vérifier les éléments permettant de constater le défaut d'entretien retenu par cette décision.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Par acte n°161 du greffe de la Cour d'Appel de Bamako en date du 22 juillet 2005, Maître Yacouba KONE par substitution à Maître Ousmane N. TRAORE, Avocat au Barreau du Mali agissant au nom et pour le compte de M.S a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°272 rendu le 20 juillet 2005 par la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en divorce opposant son client à A.D ; Le demandeur s'est acquitté du montant de l'amende de consignation prévue par la loi ainsi que l'atteste un certificat de dépôt n°191 délivré le 04 août 2006 par le greffier en chef de ce siège. Il a en outre produit un mémoire ampliatif daté du 05 août 2006 et enregistré sous le
n°830 du 07 août 2006 du greffe de la Cour Suprême. Ledit mémoire a été régulièrement signifié à la défenderesse. En conséquence le pourvoi sera déclaré recevable pour avoir été fait dans les forme et délai de la loi.
AU FOND :
Rappel succinct des faits et de la procédure :
Monsieur M.S et Mademoiselle A.D se sont mariés le 28 mars 1993 par devant l'officier d'état civil du Centre Secondaire de Lafiabougou suivant régime polygamique sans contrat préalable. Aucun enfant mineur vivant n'est issu de leur union.
Par un jugement n°189 du 02 septembre 2004, le Tribunal civil de Koutiala a prononcé le divorce des époux M.S et A.D. Par un arrêt n°272 rendu le 20 juillet 2005 la Cour d'Appel de Bamako a confirmé le jugement du Tribunal de Koutiala. C'est cet arrêt qui fait l'objet du présent pourvoi.
Résumé succinct du moyen du pourvoi :
M.S soulève à l'appui de son pourvoi un moyen unique de cassation tiré du défaut de base légale :
Du moyen unique de cassation tiré du défaut de base légale
Le demandeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fondé sa motivation sur le jugement n°165 du 24 septembre 2003 rendu par le Tribunal de Aa et d'avoir ainsi violé le principe du double degré de juridiction. Alors que selon le pourvoi ce jugement a été rendu par défaut et n'a pas acquis l'autorité de chose jugée ; que l'arrêt attaqué doit donc être cassé et annulé ; A.D, dans son mémoire en défense a fait valoir que M.S est resté plus de deux an sans accomplir des diligences au sens de l'article 390 du code de procédure civile, commerciale et sociale que son appel est frappé de péremption, que le pourvoi est donc manifestement inopérant et doit être rejeté ;
Sur quoi
ANALYSE DU MOYEN UNIQUE DE CASSATION TIRE DU DEFAUT DE BASE LEGALE :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir violé le principe du double degré de juridiction aux motifs qu'il s'est fondé sur un jugement n°165 du 24 septembre 2003 de défaut du tribunal de Koutiala qui n'a pas acquis l'autorité de chose jugée ;
Attendu qu'il est établi qu'il y a défaut de base légale quand les motifs de la décision ne permettent pas de vérifier si les éléments nécessaires pour justifier l'application qui a été faite de la loi se rencontraient bien dans la cause ; qu'ainsi ce défaut appelle une réponse spécifique qui le différencie de la violation de la loi proprement dite ;
Attendu que dans le même sens il y a défaut de base légale lorsque le juge a statué « sans mettre en évidence », « sans rechercher », « sans constater », « sans affirmer » tel ou tel élément nécessaire à la cohérence juridique du raisonnement ; Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que « si tous les deux époux ont aligné des griefs, il reste que seul le défaut d'entretien reproché à S est prouvé par le jugement n°165 du 24 septembre 2003, par lequel une pension alimentaire mensuelle de 50.000 F CFA a été accordée à A.D ; que donc le premier jugement relève d'une bonne appréciation des faits et une saine application de la loi ; Qu'il échet de la confirmer »
Attendu qu'il résulte de l'analyse des pièces du dossier de la procédure, tant devant le tribunal de Koutiala que devant la Cour d'Appel, qu'il n'a été procédé à aucune audition de témoin ou production d'éléments de preuve permettant d'étayer les griefs articulés par la femme contre son mari tendant à corroborer le défaut d'entretien retenu contre le mari par la Cour d'Appel par adoption des motifs du jugement d'instance.
Attendu qu'il a été jugé que doit être censuré l'arrêt, qui se borne à confirmer la décision des premiers juges sans y énoncer le résultat d'une recherche qui avait été négligée ou sans mettre en évidence tel ou tel élément nécessaire à la cohérence juridique de son raisonnement. Qu'ainsi en se déterminant comme elle l'a fait sans chercher à vérifier les éléments qui permettent de constater le défaut d'entretien, la cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision et n'a donc pas mis la Cour Suprême en mesure d'exercer son contrôle ; D'où il suit que le moyen est fondé ;
Vu les dispositions de l'article 9 et 463 du code de procédure civile, commerciale et sociale ;
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : casse et annule l'arrêt déféré ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Bamako autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende de consignation ; Met à la charge du Trésor public les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.