20071008223
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°59 DU 07 AVRIL 2005 ARRET N°223 DU 08 OCTOBRE 2007
RECLAMATION DE SOMME-EXCEPTION D'INCOMPETENCE D'ATTRIBUTION-RENVOI COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D'ARBITRAGE.
Les articles 13, 14 et 15 du traité du 17 octobre 1993 relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique disposent ainsi qu'il suit :
Art 13 « le contentieux relatif à l'application des actes uniformes est réglé en première instance et en appel par les juridictions des Etats - Parties ».
Art 14 « la Cour Commune de justice et d'arbitrage assure dans les Etats Parties l'interprétation et l'application du présent traité des règlements pris pour son application et d'actes uniformes. ».
Art 15 « les pourvois en cassation prévus à l'art 4 sont portés devant la Cour commune de justice et d'arbitrage, soit directement par l'une des parties à l'instance soit sur renvoi d'une juridiction nationale statuant en cassation, saisie d'une affaire soulevant des questions relatives à l'application des actes uniformes »
« .lorsque le pourvoi visé a été formé dans une matière relevant du domaine du droit des affaires défini à l'article 2 du traité relatif à l'organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique, la procédure est celle prévue par le traité précité et le règlement de procédure de la Cour commune de justice et d'arbitrage ». Donc, dès lors que le caractère commercial du litige n'est contesté par aucune des parties, il convient de déclarer recevable en la forme et justifiée au fond l'exception d'incompétence de la Cour Suprême et de renvoyer la cause et les parties devant la Cour commune de justice et d'arbitrage sise à Ae.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Par acte n°59 du 07 avril 2005, Maître Abdoul Wahab BERTHE, Avocat à la Cour, a au nom et pour le compte de Af Ad Aa, déclaré former pourvoi contre l'arrêt n°121 rendu le 06 avril 2005 par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance de validation d'hypothèque et réclamation de somme opposant les Assurance Lafia-SA à son client ;
PROCEDURE
Le demandeur a versé la consignation requise comme en fait foi le certificat de dépôt n°04 en date du 09 janvier 2007 du greffier en chef de la Cour d'Appel et a produit mémoire ampliatif par l'intermédiaire de son conseil qui a été notifié à la défenderesse qui y a répondu par un mémoire en défense sollicitant de la Cour Suprême de se déclarer incompétente et de renvoyer la cause et les parties devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) d'Abidjan. Le pourvoi est donc recevable en la forme pour avoir satisfait aux exigences de la loi.
AU FOND :
Le concluant a sollicité à titre principal le renvoi de la cause devant la cour Commune de Justice et d'Arbitrage de l'OHADA et à titre subsidiaire, il a soulevé un moyen unique tiré de la violation de l'article 450 de l'acte uniforme de l'OHADA relatif aux sociétés commerciales et au GIE.
FAITS ET PROCEDURE :
Pour garantir le paiement d'une créance évaluée en principal à 27.555.601 Francs CFA, les assurances Lafia-SA obtenaient du Président du Tribunal de Première Instance de la Commune V du district de Bamako, l'ordonnance n°21 du 31 décembre 2002 les autorisant à faire inscrire une hypothèque provisoire sur le titre foncier n°21020sis à Ab et appartenant à leur débiteur Af Ad Aa. Par jugement n°342 du 07 juillet 2003 ledit tribunal validait cette hypothèque en ces termes « reçoit les Assurances Ac en leur requête ; déclare que l'hypothèque déjà inscrite contre le défendeur sera maintenue dans sa totalité et condamne Af Ad aux dépens ». Le même jour Af Ad Aa par le truchement de son conseil, Maître Abdoul Wahab BERTHE interjetait appel de cette décision qui fut frappée d'appel également par les Assurances Lafia-SA par acte en date du 16 juillet 2003 ; Au soutien de son appel, Af Ad Aa sous la plume de son conseil soulève in limine litis l'exception tirée de la nullité de la convention de prêt en se fondant sur les dispositions de l'article 450 de l'acte uniforme de l'OHADA relatif aux société commerciales et du G.I.E. Il conclut donc à l'infirmation de la décision déférée et demande à la Cour de constater la nullité de la convention, base de la créance et ordonner la main levée et la radiation de l'hypothèque inscrite ; Les Assurances Lafia-SA au soutien de leur appel et sous la plume de leur conseil les SCP YATTARA -SANGARE et A, allèguent que leur créance contre Af Ad Aa, évaluée à 27.555.601 F CFA est certaine et liquide ; c'est pour cette raison qu'elles ont obtenu une inscription hypothécaire provisoire conformément aux dispositions de l'article 136 de l'acte uniforme de l'OHADA portant organisation des sûretés.
Elles sollicitent de cette hypothèque provisoire et la condamnation de leur adversaire au paiement de 27.555.601 en principal et celle de 500.000 FCFA à titre de dommages et intérêts. Cependant, par correspondance en date du 1er février 2005, les Assurances Ac se sont désistées de leur appel. La Cour d'Appel de Bamako par son arrêt n°121 du 06 avril 2005 a infirmé le jugement querellé, a rejeté l'exception soulevée par Af Ad Aa, l'a condamné à payer aux assurances Lafia-SA la somme de 27.555.601 FCFA et les a débouté de leur demande de dommages intérêts ; C'est cet arrêt qui fait l'objet du pourvoi soumis à la censure de la haute juridiction.
PROCEDURE
Présentation du moyen tiré de la violation de l'article 450 de l'acte uniforme de l'OHADA relatif aux sociétés commerciales et au GIE :
En ce que ledit article dispose : « A peine de nullité de la convention il est interdit aux administrateurs. de contacter sous quelque forme que ce soit des emprunts auprès de la société.. » ; Q'en l'espèce, il n'a jamais été contesté que le sieur Af Ad Aa est administrateur de la société Lafia-SA et qu'il s'agit d'un emprunt à lui fait par ladite société ; dès lors, le juges du fond avaient l'obligation de déclarer nulle la convention en vertu du texte visé ; Qu'en statuant donc comme ils l'ont fait, les juges du fond ont violé le texte visé au moyen et l'arrêt querellé doit être censuré ; Que cependant le concluant ne propose l'examen du moyen qu'à titre subsidiaire, sinon, il sollicite le renvoi de la cause à titre principal devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage d'Abidjan, s'agissant d'une matière du droit harmonisé de l'OHADA ;
ANALYSE DU MOYEN :
Sur l'exception d'incompétence d'attribution soulevée par le demandeur au pourvoi : Attendu que le demandeur sollicite à titre principal le renvoi de la cause et des parties devant la Cour commune de justice et d'Arbitrage d'Abidjan, s'agissant d'une matière relevant du droit harmonisé de l'OHADA ; Que la défenderesse s'appuie aussi sur les dispositions des articles 13 et 14 du traité du 17 octobre 1993 relatif à l'harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, lesquels disposent ainsi qu'il suit :
Article 13 : « le Contentieux relatif à l'application des Actes uniformes est réglé en première instance et en appel par les juridictions des Etats Parties » ;
Article 14 : « La Cour Commune de Justice et d'Arbitrage assure dans les Etats Parties l'interprétation et l'application du présent traité, des règlements pris pour son application et des Actes Uniformes.. » ;
Attendu que l'article 15 dudit traité dispose : « les pourvois en cassation prévus à l'article 4 sont portés devant la Cour Commune de Justice d'arbitrage d'Abidjan, soit directement par des parties à l'instance, soit sur renvoi d'une juridiction nationale statuant en cassation ; saisie d'une affaire soulevant des questions relatives à application des Actes Uniformes » ; Qu'en outre les alinéa 1 et 2 de l'article 615 du code de procédure civile, commerciale et sociale disposent aussi : « le pourvoi en cassation tend à faire censurer par la Cour Suprême ou le Cour Commune de Justice et d'arbitrage de l'OHADA la non conformité aux règles de droit du jugement qu'il attaque ; Lorsque le pourvoi visé à l'alinéa ci-dessus a été formé dans une matière relevant du domaine du droit des affaires défini à l'article 2 du traité relatif à l'organisation pour l'harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, la procédure est celle prévue par le traité précité et par le règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage » ;
Attendu que le caractère commercial du litige n'est contesté par aucune des parties, le demandeur n'invoquant que la violation de l'article 450 de l'acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et le G.I.E.
PROCEDURE
Qu'il convient donc de déclarer recevable en la forme et justifiée au fond l'exception d'incompétence d'attribution soulevée par Af Ad Aa. Il est donc superfétatoire d'analyser le moyen relatif à la violation de l'article 450 ci-dessus indiqué ;
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : se déclare incompétente ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage sise à Ae ; Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.