2eme CHAMBRE CIVILE
ARRET N° 261 du 15/10/2012
Réparation de préjudice et rupture de contrat.
Conditions : faute- Dommage- Réparation (article 125 RGO)- Preuve.
Rapports commis commettant article 140 RGO.
La preuve des éléments de la réparation de préjudice relève de l’appréciation souveraine des juges de fond de même que l’existence des rapports commis commettant.
I -FAITS ET PROCEDURE :
Par requête en date du 07/06/2010, le sieur B a attrait la Direction Régionale de la SOTELMA-MALITEL de Mopti devant le Tribunal de Première Instance de cette localité en réparation de préjudice pour rupture abusive du contrat qu’ils ont conclu en Mai 2010 pour l’implantation d’une antenne MALITEL sur sa parcelle sise à Médina-Coura au quartier Millions King contre un loyer mensuel de 60.000FCFA.
Par jugement n°133 en date du 24 Juin 2010, cette juridiction a rejeté sa demande comme mal fondée.
Sur son appel, la Cour d’Appel de …, dans son arrêt n°110 en date du 29 Septembre 2010, a infirmé le jugement entrepris et statuant à nouveau a condamné la SOTELMA MALITEL à lui payer la somme de un million cinq cent mille francs CFA.
C’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi.
II – EXPOSE DES MOYENS :
Pour soutenir son pourvoi la demanderesse a soulevé un moyen unique de cassation tiré de la violation de la loipar mauvaise application des articles 125 et 140 du Régime Général des Obligations.
Moyen unique : de la violation des articles 125 et 140 du RGO :
En ce que les juges d’appel ont engagé la responsabilité de la SOTELMA MALITEL sur la base des articles 125 et 140 du Régime Général des Obligations, alors que les trois conditions exigées pour l’application de ces dispositions n’ont pas été établies, il s’agit de la preuve d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage;
Que par ailleurs, les sociétés EGY-Mali et Ly-Industrie sont les seules responsables du préjudice causé au défendeur au pourvoi, pour avoir creusé un trou dans sa parcelle sans l’autorisation de la SOTELMA MALITEL, lui faisant ainsi croire à une conclusion prochaine du contrat de bail ;
Qu’en outre, aucun lien juridique n’a pu être établi entre la SOTELMA MALITEL et les sociétés EGY-Mali et Ly-Industrie, seules responsables des dommages causés à B; que dès lors on ne peut soutenir que les sociétés EGY-Mali et Ly-Industrie ont agi sous les ordres de la Direction Régionale de la SOTELMA-MALITEL ;
Que les juges d’appel, en statuant comme ils l’ont fait, ont méconnu les conditions d’application des dispositions des articles 125 et 140 du Régime Général des Obligations et ont exposé leur décision à la censure ;
Qu’il échet dès lors de recevoir le moyen.
Me Sidiki SAMPANA, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de B, a conclu au rejet du pourvoi.
III – ANALYSE DU MOYEN :
Moyen unique : de la violation des articles 125 et 140 du RGO
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué la violation de la loi par mauvaise application des articles 125 et 140 du Régime Général des Obligations, pour avoir engagé la responsabilité de la SOTELMA-MALITEL, alors que les conditions d’application desdits articles telles que la preuve d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage ne sont pas réunies ;
Attendu que les articles 125 et 140 du RGO dont violation est dénoncée sont ainsi conçus :
Article 125 : « Toute personne qui, par sa faute même d’imprudence de maladresse ou de négligence cause à autrui un dommage est obligée de le réparer » ;
Article 140 : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre » ;
Attendu qu’il y a violation de la loi quand « il apparait qu’à partir des faits matériellement établis, correctement qualifiés, les juges du fond ont fait une mauvaise application de la loi au prix d’une erreur le plus souvent grossière soit qu’ils aient ajouté à la loi une condition qu’elle ne pose pas, soit qu’ils aient refusé d’en faire application à une situation qui manifestement rentrait dans son champ d’application » ; (la technique de cassation Marie Noëlle Jobard et Xavier Bachelier p138) ;
Attendu qu’en l’espèce pour retenir la responsabilité de la SOTELMA-MALITEL, l’arrêt a développé la motivation suivante :
« Considérant qu’il ressort des éléments du dossier et notamment du constat d’huissier que les travaux de l’implantation de l’antenne avait même commencé sur la parcelle de B et avaient consisté au creusement d’un trou carré de 5m290 pour une profondeur de 1,60m avec l’élévation dans ledit trou de deux rangées de briques pleines de même que le dépôt de deux voyages de gravier et d’un voyage de sable ;
Considérant que la SOTELMA-SA, qui soutient qu’elle n’est pour rien dans l’exécution de ces travaux entrepris par les sociétés EGY-Mali et Ly-Industrie, a cependant écrit dans ses conclusions à la page 3 et 5 « il est constant que lorsque Monsieur A (le Directeur Régional de la SOTELMA-SA) a constaté le commencement des travaux, il a demandé à l’entreprise EGY-Mali, de les faire arrêter, le contrat n’ayant pas été conclu et cela par l’entremise de l’entreprise WAWAY partenaire de la SOTELMA-SA » ;
Considérant qu’il est difficilement compréhensible de la part de la SOTELMA-SA qui soutient n’avoir aucun lien juridique avec l’entreprise EGY-Mali, de faire arrêter par celle-ci les travaux dont elle n’a pas demandé l’exécution ; que cette instruction de la part de la SOTELMA-SA en direction de EGY-Mali qui a fait exécuter le trou par Ly-Industrie et a acquitté la facture correspondante prouve le lien juridique entre les deux premières sociétés qui sont la SOTELMA-SA et EGY-Mali ;
Considérant que la promesse de bail doublée d’un début d’exécution des travaux d’implantation de l’antenne dépasse le stade des simples pourparlers dont se prévaut la SOTELMA-SA ;
Considérant qu’en allant sur le terrain des pourparlers, la rupture intervenue après le début des travaux revêt un caractère abusif et donc fautif qui oblige à réparation, ceci d’autant que la SOTELMA-SA se contente d’affirmer que la signature ou la conclusion du contrat était subordonnée à cet aval que le Directeur de la SOTELMA-SA n’a pas donné eu égard à la proximité de la parcelle avec le fleuve, proximité qui est un handicap à la bonne circulation des ondes pendant la période des hautes eaux, sans verser au dossier un extrait ou une copie de l’étude de faisabilité ayant abouti à une telle conclusion ;
Considérant que dans les deux hypothèses de bail ou de pourparlers en vue de la conclusion du bail, la SOTELMA-SA en rompant a commis une faute qui en application des articles 125 et 140 du RGO a causé à un préjudice à B consistant en une perte de gain et en l’incommodité d’usage momentanée de sa parcelle » ;
Qu’en se déterminant ainsi, la Cour d’Appel n’a nullement violé les dispositions des articles 125 et 140 du RGO ;
Que par conséquent, le moyen tiré de la violation de la loi par mauvaise application de ces dispositions ne peut prospérer ;
…Le rejette ;…