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20/05/2014 | MALI | N°12

Mali | Mali, Cour suprême, 20 mai 2014, 12


Texte (pseudonymisé)
CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 12 DU 20 Mai 2014.

Obtention de titre exécutoire.

SOMMAIRE :

La résolution impose la restitution des prestations déjà effectuées de part et d’autre.

FAITS ET PROCEDURE :

Suite à un avis de vente inséré dans le numéro 17168 du Journal ESSOR du 20 avril 2012, B a acquis le 25 avril 2012 avec la société Ecomine- SA un Caterpillar 938 F dont le n° de châssis est 2 RM 0049 pour la somme de 33.000.000 FR CFA sur le site de Tofola dans la région de Sikasso. La livraison ayant été faite le 26 avril, la sociétÃ

© Ecomine –SA transporta le Caterpillar le même jour à Loulo dans le cercle de Kéniéba. Ayant constaté que...

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 12 DU 20 Mai 2014.

Obtention de titre exécutoire.

SOMMAIRE :

La résolution impose la restitution des prestations déjà effectuées de part et d’autre.

FAITS ET PROCEDURE :

Suite à un avis de vente inséré dans le numéro 17168 du Journal ESSOR du 20 avril 2012, B a acquis le 25 avril 2012 avec la société Ecomine- SA un Caterpillar 938 F dont le n° de châssis est 2 RM 0049 pour la somme de 33.000.000 FR CFA sur le site de Tofola dans la région de Sikasso. La livraison ayant été faite le 26 avril, la société Ecomine –SA transporta le Caterpillar le même jour à Loulo dans le cercle de Kéniéba. Ayant constaté que les fonctions de soulèvement et de drainage du Caterpillar étaient défectueuses, B en informa la vendeuse qui dépêcha un mécanicien sur les lieux mais sans succès.

Estimant que son consentement a été vicié au moment de la vente par Ecomine –SA sur la qualité du Caterpillar, B obtenait le26 juin 2012 du président du tribunal de commerce de Bamako, une ordonnance de saisie conservatoire sur les biens de sa débitrice, pour avoir paiement d’une créance évaluée à 38.245.000 FR CFA.

Le 2 juillet 2012, il adressait au tribunal de commerce de Bamako une requête aux fins d’obtention de titre exécutoire avant de servir le 3 juillet 2012 une assignation aux fins d’annulation de vente à Ecomine –SA.

Par jugement n°491 du 26 septembre 2012, le tribunal a déclaré la demande d’obtention de titre exécutoire sans objet et celle d’annulation de vente mal fondée. Suite à l’appel de B, la cour d’appel de Bamako par un arrêt n°40 du 26 juin 2013, a annulé le jugement entrepris, annulé la vente conclue entre B et la Société Ecomine-SA, et condamné la dite société à la restitution de la somme de 33.000.000 FR CFA représentant le prix d’achat de l’engin et au paiement de la somme de 5.000.000 FR CFA à titre de dommages et intérêts.

C’est cet arrêt qui fait l’objet de pourvoi.

EXPOSE DES MOYENS DE CASSATION :

Le conseil de la société Ecomine –SA soulève un moyen unique de cassation tiré de la violation de la loi en quatre branches.

1ère BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE QUALIFICATION DES FAITS :

En ce que les juges d’appel pour motiver leur décision ont retenu ceci : « considérant que dans l’avis de vente l’expression « unité indépendante nouvelle et complète de production d’or » contient forcément le Caterpillar 938 F vendu au sieur B » ; considérant que le terme « nouvelle » exclut toute notion « d’engin d’occasion ».

Alors même qu’il ressort aisément du même avis de vente visé par la cour d’appel que le Caterpillar 938F ne pouvait aucunement être confondu à une unité de production.

Que mieux il est aisé de constater dans le dit avis de vente que le Caterpillar 938F figure en dernière ligne 7ème sous la rubrique « engin de mine » et l’unité indépendante en 1ère ligne sous la rubrique « unité de transformation de minerai ».

Qu’un Caterpillar ne peut constituer en lui seul une unité indépendante de production pour une mine d’or.

Que cette confusion des faits ne vise qu’à faire passer le Caterpillar 938F pour un matériel neuf et non un engin d’occasion.

Que cette fausse qualification des faits par les juges d’appel ne visait qu’à faire ressortir un défaut de consentement du sieur B et faire application des dispositions de l’article 28 du Régime Général des Obligations.

Qu’il s’agit en l’espèce de la vente d’un matériel d’occasion et qu’il appartenait à B de faire vérifier l’état de la machine avant de payer le prix ou même de poser comme condition préalable un essai concluant.

Que si l’article 36 du RGO stipule que « il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur, s’il a été surpris par dol ou extorqué par la violence », l’article 38 du même code précise que « le dol est une tromperie par des manœuvres que l’un des contractants a pratiquées à l’encontre de l’autre pour l’amener à donner son consentement ».

Que l’arrêt infirmatif n°40 n’a pu démontrer en quoi le consentement du sieur A a été surpris par dol.

Que les juges d’appel ont ainsi retenu des faits faussement qualifiés pour soutenir un défaut de consentement valable dans le seul but de faire application de l’article 36 sus visé.

Que soutenir que le Caterpillar 938 F a été présenté comme un engin neuf relève d’une fausseté gravissime.

Qu’en l’espèce s’agissant d’une vente conclue sur un matériel d’occasion, elle ne relève pas du champ d’application de l’article 36 visé par les juges d’appel.

Qu’il suit de tout ce qui précède que les dispositions de l’article 36 du Régime Général des Obligations expressément visées par l’arrêt ont été violées par fausse qualification des faits en ce que le consentement de l’acheteur était bel et bien valable au moment de la conclusion de la vente.

2ème BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE APPLICATION :

En ce que les juges d’appel ont annulé la vente du Caterpillar 938 F en date du 25 avril 2012 conclue entre B et la société Ecomine –SA et condamné Ecomine -SA à restituer à B la somme de 33 millions représentant le prix d’achat de l’engin sans toute fois se prononcer sur le sort de l’engin objet de la vente ;

Alors que selon l’article 107 du RGO « la résolution entraine la restitution des prestations déjà effectuées sous réserve des dispositions concernant le régime foncier et la possession mobilière ».

Qu’il ressort dudit article que la résolution conduit à un anéantissement rétroactif du contrat.

Que l’une des conséquences de cet anéantissement est que les parties doivent être remises dans l’état où elles étaient antérieurement à la conclusion du contrat.

Que le Caterpillar ayant été livré en exécution du contrat, sa restitution devrait être ordonnée en tant que prestation déjà effectuée.

Qu’en omettant de statuer sur ce point, les juges du fond exposent leur décision à la censure de la haute juridiction par fausse application de l’article 107 sus- visé.

3ème BRANCHE : VIOLATION DE L’ARTICLE 138 DU RGO PAR FAUSSE INTERPRETATION :

En ce que les juges d’appel ont accordé des dommages et intérêts ;

Alors que selon l’article 138 du RGO « le créancier a droit lorsque l’obligation a pour objet le paiement d’une somme d’argent, par le seul fait du retard et sans qu’il ait à justifier d’aucun préjudice, au paiement des intérêts de la somme à compter du jour où le débiteur aurait été mis en demeure, ou à compter du jour où il aurait dû payer si la mise en demeure n’était pas exigée » .

Qu’en l’espèce l’obligation qui pesait sur Ecomine –SA n’avait pas pour objet le paiement d’une somme d’argent mais plutôt celle de livrer l’objet de la vente c'est-à-dire le Caterpillar.

Que l’article 138 parle d’intérêt de somme d’argent et non de dommages-intérêts mis à la charge du débiteur.

Que les juges d’appel ont donc confondu deux concepts juridiques non interchangeables.

Qu’en statuant comme il l’a fait, l’arrêt querellé a violé les dispositions de l’article 138 du RGO par fausse interprétation et s’expose à la censure.

4ème BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR REFUS D’APPLICATION :

En ce que l’arrêt a accordé des dommages –intérêts au sieur B ;

Alors qu’une telle demande n’a jamais été soumise au premier juge dans l’acte d’assignation en date du 03 juillet 2012.

Que selon l’article 576 al 1 du CPCCS « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait… ».

Que dans l’acte d’assignation servi le 3 juillet 2012 le sieur B n’avait sollicité que l’annulation de la vente et la restitution du prix d’achat.

Que la demande de dommages –intérêts constitue une nouvelle prétention devant la cour d’appel.

Qu’en outre aucune faute ne peut être reprochée à Ecomine –SA qui a exécuté son obligation consistant à la remise de l’objet de la vente.

Qu’en accordant des dommages –intérêts pour le non remboursement du prix d’achat à titre de préjudice alors qu’aucune faute imputable à Ecomine -SA n’est prouvée et pour une demande nouvelle, les juges d’appel ont violé les dispositions de l’article 576 al 1 du CPCCS.

Qu’en conséquence l’arrêt querellé encourt la censure.

Le conseil du défendeur a conclu au rejet du pourvoi comme étant mal fondé.

ANALYSE :

1ère BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE QUALIFICATION DES FAITS :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt la violation de la loi par fausse qualification pour avoir soutenu que l’expression « unité indépendante nouvelle et complète de production d’or » contient forcément le Caterpillar 938 F vendu au sieur B et qu’il y a par conséquent défaut de consentement, alors que le Caterpillar ne peut être confondu à une unité de production selon l’avis de vente par ce que les deux ne figurant pas sous la même rubrique selon le pourvoi.

Attendu qu’il y a violation de la loi par fausse qualification des faits lors que les juges du fond ont mal appliqué le droit aux faits ou qu’ils ont mal qualifié les faits.

Attendu qu’en l’espèce suite à un avis de vente publié au journal l’Essor, B a acquis le Caterpillar 938F avec la société Ecomine-SA au prix de 33 .000.000 de FR CFA.

Attendu que pour annuler cette vente l’arrêt querellé a retenu que l’unité indépendante nouvelle complète de production d’or indiquée dans l’avis de vente contenait forcément le Caterpillar et que cette expression excluait toute idée de vente d’engin d’occasion pour enfin conclure que la Société Ecomine –SA a procédé par une méthode dolosive pour surprendre le consentement de B.

Attendu qu’en se déterminant ainsi sans s’assurer que l’avis de vente cite expressément le Caterpillar dans la composition de l’unité indépendante neuve de production d’or, et sans indiquer avec précision les manœuvres pratiquées pour amener A à contracter, l’arrêt querellé viole la loi par fausse qualification des faits, la vente n’ayant pas porté sur ladite unité indépendante neuve.

Qu’il convient alors d’accueillir cette première branche du moyen.

2ème BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE APPLICATION :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué la violation de l’article 107 du RGO par fausse application pour s’être contenté d’annuler la vente et d’ordonner la restitution du prix d’achat sans statuer sur le sort du Caterpillar livré en exécution de la vente, alors que ledit article prévoit la restitution des prestations déjà effectuées de part et d’autre quand il y a résolution d’un contrat.

Attendu que l’article 107 dont la violation est évoquée est ainsi conçu « la résolution entraine la restitution des prestations déjà effectuées sous réserve des dispositions concernant le régime foncier et la possession mobilière. La résiliation ne produit d’effet que pour l’avenir ».

Attendu qu’en l’espèce la réclamation de B portait sur l’annulation de la vente, la restitution du prix d’achat et l’octroi de dommages et intérêts.

Attendu qu’en réponse l’arrêt a fait droit à ces différents chefs de demandes, Ecomine –SA n’ayant conclu qu’au rejet des prétentions de son adversaire sans demande reconventionnelle.

Qu’en statuant ainsi, sans prononcer sur le sort du Caterpillar, livré par Ecomine –SA, alors que l’article 107 du R.G.O. impose la restitution des présentations déjà effectuées de part et d’autre en cas de résolution du contrat ; les juges du fond ont violé ledit article par fausse application.

D’où il y a lieu donc d’accueillir favorablement cette branche du moyen.

3ème BRANCHE : VIOLATION DE L’ARTICLE 138 DU RGO PAR FAUSSE INTERPRETATION :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation de l’article 138 du RGO par fausse interprétation pour avoir accordé des dommages et intérêts sur le fondement dudit article alors que ce texte ne prévoit que le paiement des intérêts par le débiteur d’une obligation ayant pour objet le paiement d’une somme d’argent.

Attendu que l’article 138 du RGO dont la fausse interprétation est soulevée est ainsi conçu « le créancier a droit ,lorsque l’obligation a pour objet le paiement d’une somme d’argent, par le seul fait du retard et sans qu’il ait à justifier d’aucun préjudice ,au paiement des intérêts de la somme à compter du jour où le débiteur aurait été mis en demeure, ou à compter du jour où il aurait dû payer si la mise en demeure n’était pas exigée ».

Attendu qu’il y a violation de la loi par fausse interprétation lors que pour statuer, le juge du fond a dû prendre parti sur une difficulté d’interprétation d’un texte.

Mais attendu qu’en l’espèce aucune difficulté d’interprétation de l’article 138 n’était soumise aux juges du fond qui ont en fait répondu à une demande de dommages et intérêts formulée par B en réparation du préjudice découlant du retard dans le remboursement du prix d’achat.

Qu’en ordonnant la réparation d’un préjudice sur le fondement des articles 113 et 138 du RGO, les juges du fond ne violent pas la loi, le visa de l’article 138 n’ayant exercé aucune influence sur la solution donnée au litige.

Qu’il y a lieu donc de rejeter cette branche du moyen.

4 EME BRANCHE : VIOLATION DE LA LOI PAR REFUS D’APPLICATION :

Il est reproché ici à l’arrêt la violation de l’article 576 al 1 du CPCCS par refus d’application pour avoir accordé des dommages et intérêts alors même qu’une telle demande n’avait pas été soumise au premier juge dans l’acte d’assignation.

Attendu que l’article 576 al 1 du CPCCS dispose que « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait… ».

Mais attendu que sur ce point l’arrêt énonce « considérant que la demande de dommages et intérêts de 16 millions du sieur A est contenue dans ses conclusions d’instance du 11 juillet 2012 ; que cette demande n’est donc pas nouvelle » :

Attendu donc que contrairement à ce que soutient la demanderesse, la demande de dommages et intérêts n’est pas une prétention nouvelle au sens de l’article 576 al1 du CPCCS ladite demande ayant été soumise au premier juge dans les conclusions d’instance.

Qu’il s’en suit que cette branche du moyen n’est pas justifiée et doit être rejetée.

…casse et annule l’arrêt déféré ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Bamako autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12
Date de la décision : 20/05/2014

Analyses

Obtention de titre exécutoire.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2014-05-20;12 ?
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