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29/04/2015 | MALI | N°05

Mali | Mali, Cour suprême, 29 avril 2015, 05


Texte (pseudonymisé)
CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 05 DU 29 Avril 2015.

Réparation de préjudice.

Sommaire :

L’invitation du greffier en chef de la Cour d’appel à l’appelant, à acquitter la consignation exigée par l’article 658 du Code de procédure civile, commerciale et sociale, est-elle le point de départ de la péremption d’instance en appel ?

La Haute Cour a répondu par la négative, et a par conséquent cassé et annulé l’arrêt.

FAITS ET PROCEDURE :

Suite à sa demande de concours financiers en

date du 18 décembre 2002, la société DALAMA –SARL recevait par courrier en date du 31 décembre 2002 de la Banque Comm...

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 05 DU 29 Avril 2015.

Réparation de préjudice.

Sommaire :

L’invitation du greffier en chef de la Cour d’appel à l’appelant, à acquitter la consignation exigée par l’article 658 du Code de procédure civile, commerciale et sociale, est-elle le point de départ de la péremption d’instance en appel ?

La Haute Cour a répondu par la négative, et a par conséquent cassé et annulé l’arrêt.

FAITS ET PROCEDURE :

Suite à sa demande de concours financiers en date du 18 décembre 2002, la société DALAMA –SARL recevait par courrier en date du 31 décembre 2002 de la Banque Commerciale du Sahel (BCS –SA), notification de l’octroi de plafonds de concours ci-après : - Découvert : 20.000.000 FR CFA sur 12 mois ; - aval de traite : 100.000.000 FR CFA sur 12 mois. Ces concours étaient assortis de garanties consistant en une prise d’hypothèque sur le TF n° 1467 sis au quartier du fleuve et une mise en tiers détention des marchandises.

Dans le cadre de cet accord, la société DALAMA-SARL passait commande de 6 conteneurs de boisons gazeuses se décomposant en 11.880 barquettes de coca-cola et 2376 barquettes de Fanta orange pour un montant de 70.202.64 EURO ou 46.049.913 FR CFA avec son partenaire PANAFEX de Casablanca dont la livraison devait se faire à Tema.

Sur demande de la société DALAMA-SARL, la BCS – SA ouvrait alors un crédit documentaire irrecevable et confirmé pour ce montant au profit de la société PANAFEX.

Par la suite les parties ont signé le 17 avril 2003 à l’étude du notaire Moussa FAYE une convention de compte courant pour y faire entrer les opérations qu’elles pourraient avoir à traiter ensemble avec un plafond de 110.000.000.FR CFA. Pour sûreté du remboursement du solde éventuel de ce compte courant la société DALAMA-SARL a affecté en hypothèque le titre foncier n° 1467 évalué à 100.000.000 FR CFA.

A l’arrivée des marchandises à Tema, la société DALAMA-SARL a sollicité de la BCS-SA un autre concours financier pour les frais d’approches de Tema à Bamako.

Sur instruction de la banque, elle versa une avance de 15.000.000 FR CFA que le BHM a viré au niveau de la BCS.

Après plusieurs mois de négociation la BCS a fini par accorder un concours financier qui a permis d’acheminer les marchandises à Bamako.

Les marchandises qui ont été réceptionnées dans les magasins du tiers détenteur, furent par suite vendues sur autorisation du juge des référés, sans aucune information ou compte rendu à la société DALAMA-SARL ;

Estimant que l’échec de l’opération est du à la faute de la BCS-SA qui a refusé de mettre à temps à sa disposition les frais d’approche conformément à la convention de compte courant, la société DALAMA-SARL a saisi le tribunal de commerce de Bamako pour solliciter la condamnation de sa banque à la réparation du préjudice qu’elle a subi.

Le tribunal de commerce, par jugement n° 301 du 08 août 2007, a retenu la responsabilité des deux parties dans la perte des produits achetés par voie de crédit documentaire et a déclaré que chacune des parties supportera en perte les montants injectés par elle dans l’opération litigieuse. Sur appel des deux parties, la cour d’appel de Bamako, par arrêt n° 20 du 19 février 2014 a infirmé le jugement d’instance et a débouté la société DALAMA-SARL de toutes ses prétentions. C’est contre cet arrêt que le présent pourvoi est formé.

EXPOSE DES MOYENS :

Le conseil de la demanderesse soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi par fausse interprétation de l’article 390 du CPCCS et la dénaturation d’un écrit.

I DE LA VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE INTERPRETATION DE L’ARTICLE 390 DU CPCCS :

En ce l’arrêt a rejeté l’exception de procédure tirée de la péremption d’instance malgré l’absence de toute diligence des parties, au motif que l’appelant n’a pas été invité par le greffier en chef de la cour d’appel à verser la consignation comme prévu par l’article 658 du CPCCS ;

Alors que l’article 390 du CPCCS « l’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’a accompli de diligences pendant deux ans ».

Qu’en l’espèce, par bordereau d’envoi n° 38 du 02 octobre 2009, le tribunal de commerce de Bamako a transmis le dossier à la cour d’appel de Bamako.

Que ce n’est qu’en août 2013 que la consignation a été versée, et l’affaire mise au rôle du 3 septembre 2013.

Que quatre ans se sont donc écoulés sans qu’aucune diligence n’ait été faite par une des parties.

Que le délai de péremption commence non pas à courir à compter de la réception du dossier à la cour d’appel, mais du jour de la dernière diligence accomplie par les parties.

Que la dernière diligence accomplie par les parties étant l’appel formé contre le jugement n° 301 du tribunal de Bamako, le délai de péremption ne peut courir qu’à compte dudit acte.

Qu’en estimant que le délai de péremption court à partir de l’invitation du greffier en chef de la cour d’appel, le juge d’appel a fait une mauvaise interprétation de l’article 390 du CPCCS, le greffier en chef n’étant pas une partie au procès.

Que dès lors l’arrêt attaqué mérite d’être cassé pour interprétation erronée des dispositions de l’article 390 du CPCCS.

II DE LA DENATURATION D’UN ECRIT CLAIR ET PRECIS VIOLATIO DE LA LOI :

En ce que les juges d’appel ont considéré que la BCS-SA n’a commis aucune faute ni négligence dans l’exécution de la convention conclue entre les parties ;

Alors que la BCS-SA, qui s’était engagée à mettre à la disposition de la demanderesse les fonds nécessaires à l’opération d’importation de boisson gazeuse, s’est refusée, sans motif, à régler à temps les frais d’approche et de douane de Tema à Bamako malgré l’inscription hypothécaire faite sur un immeuble évalué à dire d’expert à 120.000.000 FR CFA en garantie de la bonne exécution de la convention de compte courant.

Qu’en contre partie de l’exécution de ses obligations contractuelles, la BCS SA a exigé de la Société DALAMA-SARL une avance de 15.000.000 F CFA. Que cette attitude est contraire à l’engagement contenu dans la convention de compte courant qui ne conditionne la mise à disposition des fonds à aucun paiement d’avance.

Que c’est en pleine connaissance de cause que la BCS SA s’est engagée à mettre à sa disposition la somme totale de 118.000.000 FR CFA ;

Que l’argumentaire de la BCS –SA, relatif à l’insolvabilité de DALAMA-SARL ne peut justifier son attitude puisqu’elle bénéficiait de sureté pour le paiement du solde éventuel à la clôture du compte courant.

Que ce refus de la BCS-SA, à mettre à la disposition de DALAMA-SARL, les fonds nécessaires à la bonne marche de l’opération d’importation, constitue une faute contractuelle que le premier juge avait retenue.

Qu’en application de l’article 72 du RGO, « lorsque le juge est saisi, il doit rechercher la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s’en tenir au sens littéral des termes du contrat ».

Que l’article 73 du RGO ajoute que « si les termes du contrat sont clairs et précis, le juge ne peut sans dénaturation leur donner un autre sens ».

Que les termes de la convention de compte étant bien précis, les juges du fond ont violé les dispositions de l’article 73 en considérant que la BCS-SA n’a commis aucune faute dans l’exécution.

Que de ce fait les juges ont dénaturé le contrat liant les parties puisque les conventions font la loi des parties.

Que pour cela l’arrêt encourt la censure.

Le conseil de la défenderesse a conclu au rejet du pourvoi comme étant mal fondé.

ANALYSE

I DE LA VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE INTERPRETATION DE L’ARTICLE 390 DU CPCCS :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt une fausse application ou un refus d’application de l’article 390 du CPCCS en ce qu’il a rejeté l’exception tirée de la péremption d’instance au motif que le greffier en chef de la cour d’appel n’avait pas invité l’appelante à verser la consignation pour faire courir le délai de péremption contre elle alors que ledit article indique seulement que l’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’accomplit de diligence pendant deux ans et qu’en l’espèce 4 ans se sont écoulés sans aucune diligence .

Attendu que l’article 390 du CPCCS dispose que « l’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’accomplit de diligence pendant deux ans ».

Attendu qu’en l’espèce c’est la péremption de l’instance d’appel qui est soulevée.

Attendu que l’arrêt, attaqué pour rejeter l’exception de péremption d’instance, soutient que le délai de péremption ne peut courir que lorsque l’appelant est invité par le greffier en chef de la cour d’appel à verser la consignation.

Attendu cependant que le greffier en chef n’est pas partie au procès ;

Que ses diligences ne peuvent faire courir le délai de péremption.

Attendu que l’article 390 précité ne précise pas le point de départ du délai de péremption.

Attendu que la diligence prévue par l’article 390 du CPCCS est celle des seules parties au procès.

Attendu que selon la jurisprudence, le point de départ du délai de péremption de l’instance en appel court du jour où le litige est porté devant la cour et ce par la mise au rôle de l’affaire.

Que la péremption ne peut commencer à courir qu’à partir d’une diligence d’une des parties.

Attendu que l’arrêt, attaqué en motivant le rejet de l’exception de péremption par le fait que le greffier en chef de la cour d’appel n’a pas invité l’appelante à consigner, fait une fausse interprétation de l’article 390 du CPCCS, cette invitation ne pouvant elle seule établir la saisine régulière de la cour.

Qu’il convient d’accueillir ce moyen.

II DE LA DENATURATION D’UN ECRIT CLAIR ET PRECIS :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué la dénaturation de la convention liant les parties en ce qu’il a retenu que la BCS-SA n’a commis aucune faute dans l’exécution de la convention de compte courant alors que ladite banque a refusé de mettre à temps à la disposition de la société DALAMA-SARL, les fonds nécessaires pour l’acheminement des marchandises de Tema à Bamako et leur dédouanement sous prétexte que cela n’était pas une obligation pour elle.

Attendu que la dénaturation suppose un écrit dont le sens clair et précis a été méconnu par les juges du fond.

Mais attendu qu’en l’espèce il ressort des motivations de l’arrêt attaqué que les juges du fond ont examiné les relations des parties par rapport au crédit documentaire et non par rapport à la convention de compte courant.

Que de ce fait on ne peut leur reprocher une dénaturation de la convention de compte courant aucune allusion n’y étant faite dans les motifs de l’arrêt ; même si les juges du fond ont omis d’examiner les griefs soulevés par rapport à ladite conclusion.

Qu’il y a lieu alors de rejeter ce moyen comme mal fondé.

…Casse et annule l’arrêt attaqué ;

Ordonne la restitution de la consignation ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 05
Date de la décision : 29/04/2015

Analyses

Réparation de préjudice.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2015-04-29;05 ?
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