ARRET N°193 DU 16 JUILLET 2015
REPUBLIQUE DU MALI
-------------
COUR SUPREME
-------------
SECTION ADMINISTRATIVE
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative), en son audience publique ordinaire du neuf juillet deux mille Quinze délibéré le 16 juillet 2015 a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
LE PREFET DU CERCLE DE KATI
Af AG MALI-SA et Ai Ap B (IF) ayant pour conseils Maître Mamadou Bobo DIALLO-JCS CONSEILS
La Direction Générale du Contentieux de l’Etat ;
APPELANT
D’UNE PART
ET :
Ac AI et LE JUGEMENT N°485 DU 05/12/2013 DU TAB ; ayant pour conseil Maître Abdoulaye SANGARE ;
INTIME
D’AUTRE PART
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en quoi que ce soit aux parties et sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
EN MATIERE DE RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
FAITS ET PROCEDURE :
Par acte n°373/13 du 13 décembre 2013 Maître Mamadou Bobo DIALLO, Avocat inscrit au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de son client Af AG Mali-SA (Intervenant forcé) a déclaré interjeter appel contre le jugement n°484 du 05 décembre 2013 du Tribunal Administratif de Bamako rendu dans l’affaire opposant Ac AI (requérant) au Préfet du Cercle de Kati défendeur en matière de recours pour excès de pouvoir. Le dispositif du jugement attaqué est ainsi libéllé :
« En la forme : Reçoit le recours comme régulier ;
Au fond : Annule les lettres d’attribution N°12554 ; 12555 ; 12556 ; 12557 ; 12558 ; 12559 ; au profit de Af AG MALI-SA ainsi que tout autre acte subséquent notamment les actes au nom de Ai Ap B ;
Ordonne la restitution de la consignation »
Maître Mamadou Bobo DIALLO assurant la défense des Intérêts de l’appelante a produit un mémoire ampliatif daté du 31 mars 2014 lequel a été communiqué aux autres parties notamment à Ac AI ayant pour conseil Maître Abdoulaye SANGARE, Avocat au Barreau qui y a répondu par un mémoire en défense daté du 28 avril 2014. La Direction Générale du Contentieux de l’Etat, agissant pour le compte du Préfet du Cercle de Kati a produit un mémoire ampliatif daté du 12 mars 2014. Le Cabinet Conseils JCS assurant la défense des intérêts de Monsieur Ai Ap B intervenant forcé a produit un mémoire daté du 19 mars 2015.
II-EN DROIT
EN LA FORME :
Le recours formé par la Société Af AG MALI-SA satisfait aux conditions légales de délai d’intérêt à agir en justice, de qualité ; l’appelante justifie en outre avoir versé au greffe de ce siège le montant de la consignation requise par la loi ; par ailleurs la décision attaquée lui faisant grief son recours sera déclaré recevable en la forme.
AU FOND :
Au soutien de son recours la Société Af AG MALI-SA explique, que par un jugement avant dire droit la juridiction d’instance a confié trois missions limitativement énumérées : 1…dit que l’expert devra déterminer la position exacte des parcelles litigieuses (dit si elles sont situées à Dio ou à C) ; 2. dit s’il y a empiètement ou pas ; 3. dit que l’expert fournira au Tribunal tout document ou renseignement utiles pouvant l’édifier sur la situation des parcelles litigieuses » ; que le jugement N°484 du 05 décembre 2013 a entièrement entériné l’analyse qui a été faite par l’expert ; que le rapport d’expertise brille par sa partialité ; que les lettres d’attribution de l’appelante (Af AH sont régulières ; que c’est courant 2012 que suivant acte notarié daté du 15/11/2012 dressé par devant Maître Alkaïdi TOURE qu’elle a acquis avec Ai Ap B des parcelles de terrains contigües à son Unité de Broyage de la cimenterie sise à Dio-Gare dans le cercle de Kati ; que ces parcelles sont consacrées par les lettres d’attribution n°12555. 12556. 12557 ; 12558 et 12559 établies au nom de Af AG MALI-SA ; que suivant attestation du 10 mai 2005 Ai Ap B a acheté son champ avec Ak X alors que l’intimé Ac AI prétend avoir acquis ses terres en 2007 ; que sur le fondement des incohérences du rapport d’expertise et du manque de base légale du jugement entrepris, elle sollicite son annulation et l’irrecevabilité pour défaut de qualité du recours de Ac AI intimé qui également n’a pu démontrer le caractère illégal d’un acte administratif.
Dans son mémoire en défense daté du 12 mars 2014 la Direction Générale du Contentieux de l’Etat agissant pour le compte du Préfet du Cercle de Kati fait valoir :
que les lettres d’attributions établies par le Cercle de Ah ont été régulièrement faites conformément aux dispositions en vigueur ; qu’il sied donc de débouter l’intimé Ac AI de ses prétentions et de le renvoyer à mieux se pourvoir et statuant à nouveau d’infirmer le jugement entrepris.
Dans son mémoire en défense daté du 28 avril 2014 l’intimé Ac AI, fait valoir : qu’en fait la parcelle convoitée par l’appelante se trouve être exactement la même que celle de l’intimé qui est situé à Dio ; que le plan signé par le Cabinet Assi Topo n’existe pas et ne figure pas sur la liste des Géomètres Experts Agrées, que donc ce plan ne répond pas à la loi n°97-026 du 20 mai 2007 qui dispose que leur validité les plans doivent être signés par un Géomètre Expert agréé ; que le préfet du Cercle de Kati a établi les lettres d’attributions sans vérifier l’originalité de ce plan ; qu’ayant été trompé il aurait dû procéder à l’annulation de l’acte manifestement illégal avant l’expiration du délai de deux mois ;
que si la procédure avait été instruite il serait facilement revenu au Préfet que l’intimé est le premier occupant des lieux et qu’il avait droit à une indemnisation préalable après épurement ; que le jugement entrepris procède d’une saine application de la loi ; qu’il conclut à sa confirmation.
Dans son mémoire daté du 19 mars 2015, Ai Ap B intervenant forcé dont la défense des intérêts est assurée par le Cabinet JCS, conseils, Avocats au Barreau du Mali fait valoir qu’avant tout débat sur le fond il soulève une fin de non-recevoir au motif que selon une jurisprudence constante de la Section Administrative de la Cour Suprême et notamment son arrêt N°113 du 10 Novembre 1994 dans l’affaire Ao A contre Gouverneur du District de Bamako « est irrecevable pour défaut de qualité l’action du demandeur qui n’a son nom sur aucun titre ou acte administratif et qui, par conséquent ne dispose d’aucun droit juridiquement protégée » ; qu’en l’espèce le requérant n’a produit aucun titre administratif en son nom et ne dispose non plus d’aucun droit juridiquement protégé relativement à la parcelle litigieuse ; que son recours doit être déclaré irrecevable pour défaut de qualité ; que toutefois si par extraordinaire la Cour passe outre il conclut à un sursis à statuer tiré de l’article 6 du CPPM aux termes duquel « L’action civile est soumise aux règles de la loi civile. Elle peut être exercée séparément de l’action pénale. Toutefois il est sursis au jugement de cette action civile tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement » ;
Qu’en l’espèce Ac AI a porté plainte entre les mains de Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Kati depuis le 11 juin 2012 contre l’intervenant forcé Ai Ap B, les familles X et KANE de Dio pour atteinte à la liberté de travail tentative de dépossession ; faits requalifiés par le juge d’instruction du 1er Cabinet en faux et usage de faux ;
SUR LE FOND
Que le jugement entrepris s’est fondé sur le rapport fourni par le Géomètre ; que le découpage territorial sur l’étendue du territoire national, relève de la compétence exclusive des autorités administratives ; que dès lors il échet d’infirmer le jugement entrepris et d’ordonner une nouvelle expertise ; qu’il confirme que sa parcelle d’une superficie de 5 ha est située à Dio Aq et non à C ; que l’acquisition de sa parcelle est antérieure à celle du requérant comme cela ressort des différentes attestations de vente ; que le processus de création du titre au nom de l’intervenant forcé remonte à mai 2010 comme l’atteste sa demande datée du 10 mai 2010 adressée au Préfet du Cercle ; qu’il en résulte pour lui un droit acquis qui échappe au contrôle de la circulaire interministérielle du 31 octobre 2011 et dont se prévaut Ac AI ; qu’enfin il sollicite le sursis à statuer fondé sur l’article 6 du CPPM ; par extraordinaire ordonner au fond une nouvelle expertise par les soins des autorités administratives compétentes et ordonner la restitution de l’amende de consignation.
DISCUSSION
FIN SUR LA NON RECEVOIR TIRE DU DEFAUT DE QUALITE D’Ac AI
Considérant que selon la doctrine dominante et la jurisprudence constante de la haute juridiction la qualité pour agir en justice n’est autre qu’un aspect particulier de l’intérêt ; elle est absorbée par lui et l’action est appelée banale par opposition aux action attirées qui sont strictement personnelles ; qu’en effet, ont droit à exercer un recours tous ceux dont une décision du juge modifient les droits et les charges ; qu’ainsi avoir qualité, c’est avoir un intérêt direct et personnel tiré de la modification de ces droits ou charges ; (Ae Ar et Am Ad, « Procédure Civile 24è édition-Collection Droit Privé-Précis » 1996, p.102) ; qu’avoir qualité c’est simplement agir comme titulaire d’un droit ou comme représentant du titulaire de ce droit ; que le caractère suffisant et sérieux de l’intérêt est apprécié
souverainement par les juges du fond ;
Considérant qu’en l’espèce il résulte des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de sommation interprétative établi le 27 mars 2013 par Maître Ousmane KANTE huissier de justice officier public près le ressort judiciaire de Bamako et une attestation de vente datée à Diogo le 23 février 2007 que Aa Y a vendu à Ag AI un champ d’une superficie de 04 hectares et demi, représenté à l’instance par Ac AI ; qu’il en résulte que la fin de non-recevoir prise du défaut de qualité est infondée ;
SUR LA DEMANDE DE SURSIS A STATUER FONDE SUR L’ARTICLE 6 DU CPP
Considérant que selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation française et la doctrine dominante le principe que « le criminel tient le criminel tient le civil en l’état » ne s’applique que si une instance a été engagée devant une juridiction répressive ou que si tout au moins, l’action publique a été régulièrement mise en mouvement ; cf CPPF, Edition 2002, ED. DALLOZ P.27 ; qu’en conséquence la demande de sursis à statuer présentée devant une juridiction administrative est infondée ne peut donc être accueillie ;
SUR L’APPEL AU FOND
Considérant qu’il est reproché par les appelants au jugement entrepris de manquer de base légale et de se fonder sur le rapport d’expertise ;
Considérant que le manque de base légale constitue de la part du juge une insuffisance des constatations de fait imprécises ou incomplètes pour justifier la solution retenue en droit ;
Considérant qu’il est constant que les juges disposent de très larges pouvoirs d’appréciation des éléments de preuve et des conclusions des rapports d’expertise pour fonder leur conviction ; qu’en de déterminant comme il l’a fait le Tribunal Administratif de Bamako a fait une bonne appréciation des éléments de preuve et une saine application de la loi ;
Qu’il convient donc de confirmer le jugement entrepris.
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative) où siégeaient
Messieurs :
-David SAGARA…………………Président;
-Madeleine MAIGA……..........Conseiller-rapporteur;
-Sambala TRAORE.........Conseiller;
En présence de Monsieur An Aj Al Commissaire du Gouvernemen; ;
Avec l’assistance de Maître AMY KANE Greffière ;
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de recours pour Excès de Pouvoir et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
En la forme : - Reçoit les Appels
Au Fond : - confirme le Jugement entrepris
- Met les dépens à la charge de Af AH.
Ainsi fait jugé et prononcé par la Cour Suprême Section Administrative, les jours, mois et an que dessus
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER
suivent les signatures
signé : illisible
6000F CFA
Enregistré à Bamako le 01-09-2015
Vol VII Fol 172 N°1022 Bordereau 0544
Six Mille Francs CFA
L’Inspecteur de l’Enregistrement
Signé : illisible
Z, le 02 DECEMBRE 2015
LE GREFFIER EN CHEF
Mme OULARE ASSANATOU SAKILIBA
suivent les signatures
signé : illisible
Gratis
Enregistré à Bamako le 23-01-2015
Vol XXIII Fol 155 N°1 Bordereau 147
Gratis
L’Inspecteur de l’Enregistrement
Signé : illisible
REPUBLIQUE DU MALI
« AU NOM DU PEUPLE MALIEN »
La République du Mali mande et ordonne au Ministre de l’Education Nationale en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.
En foi de quoi la présente expédition a été scellée, collationnée et signée par Nous Mme OULARE Assanatou SAKILIBA Greffier en Chef de la Cour Suprême du Mali pour servir de Première Grosse délivrée le 26-1er-2015 à Ab AJ.
BAMAKO, le 26 JANVIER 2015
LE GREFFIER EN CHEF
Mme OULARE ASSANATOU SAKILIBA