2ème CHAMBRE CIVILE
Arrêt n°61 d1515 / 02 / 2016
Réclamation de sommes.
SOMMAIRE
Est considéré comme commerçant celui qui fait de l’accomplissement d’actes de commerce par nature sa profession (article 2 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général).
Obligations nées entre commerçant et non commerçant se prescrivent par cinq (05) ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes (article 16 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général).
Faits et procédure : Monsieur X. et Monsieur C. avaient par l’intermédiaire d’un de leurs amis commun, un marché de fourniture auprès de la SOTELMA. Les bénéfices générés par l’exécution dudit marché devaient être repartis en trois parts soit une part pour X., une part pour A. et une part pour l’ami commun.
Les bénéfices s’étant élevés à 60 000 000 FCFA, chacun devait recevoir 20 000 000 FCFA. Invité à venir récupérer sa part Monsieur A. demande à X. de la réserver afin de pouvoir exécuter d’autres marchés.
Par la suite, les rapports se sont détériorés entre les deux hommes et plus tard, lorsque Monsieur Ab. exigea sa part Monsieur X. qui en avait disposé lui proposa en remboursement, un véhicule de marque ‘‘MERCEDES’’ et la prise en charge de son traitement en Côte D’Ivoire à hauteur de 14 000 000 FCFA, ainsi que la perception des loyers de sa concession sise au quartier Hippodrome de Bamako.
Mais le 21 mai 2010, alors que X. pensait que tout était réglé, Monsieur A. a saisi le tribunal civil de la Commune I du District de Bamako d’une requête aux fins de réclamation de sommes (20 000 000 au principal et 25 000 000 F) de dommages intérêts.
Par jugement n°159 du 23 avril 2011, le tribunal de la Commune II a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par X. et a condamné celui-ci à payer au requérant la somme de 20 000 000 FCFA au principal et celle de 1 000 000 FCFA à titre de dommages intérêts.
Sur appel de X., la Cour d’appel de Bamako a par arrêt n°441 du 26 juin 2013, confirmé le jugement entrepris.
D’où le présent pourvoi.
Exposé des moyens
Le demandeur au pourvoi sous la plume de son conseil soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi et du défaut de base légale.
Premier moyen tiré de la violation de la loi
En ce que pour rejeter l’exception d’irrecevabilité tirée de la prescription soulevée par le demandeur, la Cour d’appel affirme que ni l’appelant, ni Monsieur Ac ne sont des commerçants.
Que contrairement à cette affirmation, Monsieur X. est bien commerçant de son Etat comme l’attestent les factures versées au dossier ;
Que la créance résulte d’opérations commerciales suite à l’exécution d’un marché obtenu auprès de la SOTELMA ;
Qu’aux termes de l’article 3 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant sur le droit de commerce général : ‘‘ont le caractère d’acte de commerce par nature, les opérations des intermédiaires de commerce tels que le courtage et commissions ;
Que la doctrine et la jurisprudence sont unanimes sur le fait que les opérations sont commerciales nonobstant la qualité de l’auteur et peu importe par ailleurs si le courtier met en relation un homme et une femme qui souhaitent se marier (traité de droit commercial-G. Ripert /R. Roblot 17e édition P232).
Que l’article 18 du même acte uniforme ajoute ‘‘ les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçant et non commerçant se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes’’.
Que l’exécution du marché obtenu de la SOTELMA ouvrant droit à des commissions sur le bénéfice pour M.A. T. a eu lieu courant 1998 soit 12 ans avant la saisine du tribunal de la Commune II en 2010 ;
Que la commission étant un acte de commerce par nature et le demandeur étant un commerçant, ses relations avec le défendeur qui a perçu des commissions sur le bénéfice ne peuvent être que commerciales ;
Que dès lors, la Cour d’appel en rejetant la fin de non recevoir tirée de la prescription a violé les dispositions des articles 3 et 18 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur le droit de commerce général et expose sa décision à la cassation.
Deuxième moyen tiré du défaut de base légale
En ce que pour condamner le demandeur à payer les sommes indiquées, la Cour d’appel se borne à énoncer que celui-ci ‘‘n’a pas contesté le paiement fait par A. au profit de la banque pour sécuriser la concession ;
Que ce paiement prouve que la maison lui avait été donnée,
Qu’ainsi la Cour procède par déduction puisqu’aucune preuve en paiement n’a pu être faite ;
Qu’en se déterminant comme elle l’a fait, la Cour d’appel ne permet pas à la haute juridiction d’exercer son contrôle ;
Monsieur A., défendeur au pourvoi n’a pas produit un mémoire en réplique tel que l’atteste le certificat en date du 11 juillet 2011 du Greffier en chef de céans.
Analyse des moyens
Le demandeur au pourvoi soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi (article 3 et 18 de l’Acte Uniforme sur le droit de commerce général) et du défaut de base légale.
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par le demandeur au pourvoi en violation des articles susvisés ;
Attendu que pour ce faire, la Cour d’appel énonce ‘‘… que ni l’un, ni l’autre n’est commerçant, qu’il ne sied donc pas d’appliquer dans leurs relations, la prescription commerciale prévue par l’article 18 de l’Acte uniforme de l’OHADA sur le droit de commerce général…’’ ;
Attendu que contrairement à cette affirmation, il est évident que Monsieur X. est un commerçant IMPORT-EXPORT tel que cela ressort des bordereaux de livraison de la SOTELMA versés au dossier ;
Que s’agissant de Monsieur A., même si sa profession n’est pas mentionnée sur l’acte d’assignation par lequel il a saisi le tribunal, il demeure que, participant à l’exécution d’un marché de la SOTELMA ouvrant droit à des commissions, il a accompli des actes de commerce devenant ainsi un commerçant de fait ;
Qu’en tout état de cause, l’article 16 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur le droit de commerce général dispose que : ‘‘les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçant et non commerçant se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes.
Que l’article 17 du même Acte Uniforme indique que ‘‘le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d’agir a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d’exercer son action’’.
Attendu en l’espèce que la créance objet de la présente instance trouve son origine dans un marché de fourniture auprès de la SOTELMA ;
Que depuis 1998 le marché a été exécuté et les commissions reparties entre les différents protagonistes.
Qu’invité à venir récupérer sa part, Monsieur A., avait demandé à Aa de la réserver pour éventuellement l’exécution d’un nouveau marché ;
Que depuis les rapports s’étant détériorés entre eux, Monsieur Ac a attendu plus de cinq ans pour réclamer son argent ;
Que Monsieur B, pour rembourser avait assuré les frais de traitement de Monsieur Ac à Abidjan et avait mis à sa disposition les loyers de sa concession sise à l’Hippodrome ;
Que dès lors, en saisissant le tribunal civil de la Commune II du District de Bamako en réclamation d’une créance de plus de cinq ans, sa requête devait être déclarée irrecevable pour prescription ;
Qu’en rejetant la fin de non recevoir du demandeur au motif que ni l’un ni l’autre n’est commerçant, la Cour d’appel a violé les dispositions des textes susvisés, et expose sa décision à la cassation ;
Et attendu que la cassation encourue n’implique pas qu’il soit à nouveau statué sur l’affaire la prescription étant prouvée, il y a lieu de dire qu’il n’y a pas lieu à renvoi.
…Casse et annule l’arrêt déféré ;
Dit n’y avoir lieu à renvoi ;…