ARRÊT N° 12 du 21 Mars 2016.
Annulation d’ordonnance.
Désignation d’un juge d’instruction – article 48 al 4 du CPP- saisine du Premier président de la Cour d’appel par le Procureur Général
Dessaisissement d’un juge d’instruction et saisine d’un autre – article 48 al 5 et 6 – saisine de la Chambre d’accusation par le Procureur Général
Section judiciaire de la cour suprême- pouvoirs spécifiques - contrôle la légalité des décisions contre lesquelles il n’existe pas d’autres voies ordinaires de recours.
Sommaire :
Le Code de Procédure Pénale en son article 48 alinéas 4 et 5 détermine les deux cas d’intervention du Procureur Général pour désigner un juge d’instruction. L’alinéa 4 règle le cas où aucun juge d’instruction n’est déjà saisi et l’alinéa 5 le cas où un juge est déjà saisi et qu’il convient de le dessaisir au profit d’un autre.
En vertu de l’article 48 al 4 « Dans le ressort d'une cour d'appel, le procureur général peut présenter requête au premier président de la cour d'appel pour que soit désigné un juge d'instruction chargé d'informer sur tout crime ou délit qui lui aura été, dénoncé, même lorsqu'il aura été commis hors du ressort de la compétence de ce magistrat. Le premier président statue par ordonnance.
En vertu de l’article 48 al5 et 6 le Procureur Général peut requérir la saisine de tout juge d'instruction pour continuer une information commencée par un autre magistrat dont il requiert le dessaisissement. Dans ce cas, la décision de dessaisissement et de saisine est prise par la chambre d'accusation. Cet arrêt ne pourra faire l'objet d'un pourvoi en cassation.
Dans le cas d’espèce, la plainte avec constitution de partie civile avait déjà saisi le juge d’instruction qui ne pouvait donc être dessaisi que par la chambre d’accusation.
En conséquence, l’ordonnance présidentielle qui a désigné un juge d’instruction alors qu’un premier juge d’instruction était déjà saisi a violé donc les dispositions de l’article 48 al 5 et 6 par fausse application, d’où annulation de l’ordonnance incriminée.
FAITS ET PROCEDURE :
Le 14 février 2013 G.I.B. saisissait le juge d’instruction du 2è cabinet du Tribunal de 1ère instance de la Commune II d’une plainte pour escroquerie et abus de confiance contre I. et L.M. tout en se constituant partie civile.
Cette plainte transmise au Procureur de la République près le tribunal de 1ère instance de la commune II s’est retrouvée au niveau du Procureur Général près la cour d’Appel de Bamako.
Cette autorité saisissait par requête le premier Président de la Cour d’Appel de Bamako pour la désignation d’un juge d’instruction au visa de l’article 48 CPP.
Par ordonnance n° 13 du 15 mars 2013 le juge d’instruction du 2è cabinet du tribunal de 1ère instance de la C II était désigné pour informer sur les faits reprochés à L.M. et I.M..
Par requête en date du 10 avril 2013 G.I.B. par le truchement de son conseil le cabinet « KOD » SCP sollicite l’annulation de l’ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel de Bamako.
Il a acquitte la consignation et produit un mémoire ampliatif qui été notifié aux nommés Aa et Ab A.
LES MOYENS DE L’ANNULATION :
Au soutien de sa requête I.B. allègue que le premier président de la Cour d’ Appel de Bamako à la suite du Procureur Général a violé l’article 48 CPP.
En ce que cet article précise que le Procureur Général peut requérir la saisine de tout juge d’instruction pour continuer une information commencée par un autre magistrat dont il requiert de dessaisissement. Dans ce cas la décision de dessaisissement et de saisine est prise par la chambre d’accusation cet arrêt ne pourra faire l’objet d’un pourvoi en cassation.
Qu’au lieu de saisir la chambre d’accusation le Procureur Général a saisi le Premier Président de la Cour qui a rendu l’ordonnance querellée qui mérite annulation.
L.M. fait observer que l’ordonnance du Premier Président est bien conforme à l’article 48 CPP qui dispose que « ... Dans le ressort d’une Cour d’Appel le Procureur Général peut présenter requête au Premier Président de la Cour d’Appel pour que soit désigné un juge d’instruction chargé d’informer sur tout crime ou délit qui lui aura été dénoncé même lorsqu’il aura été commis hors du ressort de compétence de ce magistrat le Premier Président statut par ordonnance ».
Il conclut à la confirmation de l’ordonnance du Premier Président.
SUR CE, LA COUR :
En la forme :
Attendu qu’aux termes de l’alinéa 2 de l’article 32 de la loi n° 96-071 AN- RM du 16 décembre 1996 portant loi organique de la Cour suprême, « elle (la section judiciaire) contrôle la légalité des décisions contre lesquelles il n’existe pas d’autres voies ordinaires de recours ».
Attendu que dans le cas d’espèce aucune voie de recours n’est prévue contre pareille décision du Premier Président.
Qu’il importe en conséquence de recevoir la requête de G.I.B. qui a acquitté la consignation.
Au fond :
(Vu l’article 48 al 4 CPP) ;
Attendu que l’article 48 CPP en son alinéa 4 dispose que « dans le ressort d’une Cour d’Appel le Procureur Général peut présenter requête au Premier Président de la Cour d’Appel pour que soit désigné, un juge d’instruction chargé d’informer sur tout crime ou délit qui lui aura été dénoncé, même lorsqu’il aura été commis hors ressort de la compétence de ce magistrat. Le Premier Président statue par ordonnance… »
Que le même article dans son alinéa 5 énonce «qu’il (le Procureur Général) peut également requérir la saisine de tout juge d’instruction pour continuer une information commencée par un autre magistrat dont il requiert le dessaisissement. Dans ce cas la décision de dessaisissement et de saisine est prise par la chambre d’accusation.
Cet arrêt ne pourra faire l’objet d’un pourvoi».
Attendu qu’à travers ses alinéas 4 et 5 l’article 48 CPP détermine les deux cas d’intervention du Procureur Général pour désigner un juge d’instruction.
Que l’alinéa 4 règle le cas où aucun juge d’instruction n’est saisi et l’alinéa 5 le cas ou un juge est déjà saisi.
Attendu que dans ce dernier cas le dessaisissement et la saisine se font par la chambre d’accusation.
Attendu que dans le cas d’espèce la plainte avec constitution de partie civile avait déjà saisi le juge d’instruction du 2è cabinet du tribunal de première instance de la commune II.
Qu’il ne pouvait donc être dessaisi que par la chambre d’accusation.
Attendu que l’ordonnance présidentielle attaquée viole donc les dispositions de l’article 48 al 4 par fausse application et mérite annulation.
…Annule l’ordonnance attaqué ;
Ordonne la transmission du dossier au Procureur Général de Bamako aux fins de droit ;…