ARRET N°528
DU 21-09-2016
REPUBLIQUE DU MALI
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COUR SUPREME
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SECTION ADMINISTRATIVE
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative), en son audience publique extraordinaire du Vingt Un Septembre Deux Mille Seize, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
AH X, ayant pour conseil Maître Ousmane Aldiouma TOURE, Avocat inscrit au Barreau du Mali;
APPELANTE
D’UNE PART
ET :
Jugement N° 247 du 18-06-2015 du Tribunal Administratif de Bamako- La Mairie du District de Bamako- Les Héritiers de feu Ab Z représentés par Ad Z, ayant pour conseils Maîtres Mohamed THIAM et Boulkassoum SIDALY, Avocats inscrits au Barreau du Mali;
INTIMES
D’AUTRE PART
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en quoi que ce soit aux parties et sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
EN MATIERE DE RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
FAITS ET PROCEDURE :
Par une requête en date du 16 Février 2015, dame AH X par l’entremise de son conseil Maître Mamadou TRAORE, avocat à la Cour saisissait le Tribunal Administratif de Bamako aux fins d’annulation pour excès de pouvoir de la décision N°0731/MDB du 30 avril 2012 portant attribution de parcelle à titre de régularisation dans le lotissement de Aa B ;
Suivant jugement n°247 du 18 juin 2015, le Tribunal a rendu la décision ainsi libellée : « En la forme : Reçoit le recours, au fond le rejette comme mal fondé ; Ordonne la confiscation de la consignation versée ; Met les dépens à la charge de la requérante » ;
Suivant actes n°169/15 du 22 juin 2015 et n°178/15 du 26 juin 2015, dame AH X et Maître Mamadou TRAORE, avocat à la Cour ont relevé appel du jugement rendu au nom et pour le compte de la requérante ;
Maître Ousmane Aldiouma TOURE, Avocat à la Cour a produit un mémoire ampliatif au nom et pour le compte de AH X auquel Maître Mohamed THIAM, avocat à la Cour a répliqué pour le compte des intimés, les dites répliques ont été notifiées à l’appelant ;
EN DROIT
En la forme :
Considérant que les appels de dame AH X en son propre nom et Maître Mamadou TRAORE au nom et pour Compte de AH X obéissent aux différentes conditions de recevabilité, il y a lieu de les recevoir ;
AU FOND :
Considérant qu’au soutien de son appel, Dame AH X, par l’entremise de son conseil, expose :
Que pour l’agrandissement du cimetière de Aa, la mairie du District a retenu une bande dont les occupants parmi lesquels la famille de feu Ab Z devaient être déguerpis et recasés ;
Les familles ont effectivement été recasées à Ac et feu Ab Z bénéficia de la décision N°027/M-DB du 07 février 2007 sous le numéro 1348 ;
Que plus tard la mairie du district a renoncé à son projet et l’endroit fut viabilisé et accorder à d’autres citoyens dont elle suivant n°00548 du 18 mars 2014 ;
Pour motiver son jugement, le juge d’instance a fait recours au principe jurisprudentiel de l’antériorité alors que ce principe vaut tant que des manœuvres frauduleuses n’ont pas guidé la prise de la décision ;
Que le sieur Ad Z et les héritiers de feu Ab Z ont bénéficié au titre de la décision N°027/M-DB du 07 février 2007 portant régularisation des attributions dans le lotissement de Aa B de la parcelle n°P/3 de Titicoumba dans le cadre du recasement ;
Cette régularisation est d’ailleurs faite à titre posthume et la mention est d’ailleurs faite sur la liste des personnes concernées par le recasement ;
Que c’est en vertu d’une régularisation que feu Ab Z est encore attributaire de la parcelle AX/10 du lotissement de Aa B suivant décision N°0731 du 30 avril 2012 et représenté par Ad Z ;
Le sieur Z représentant les héritiers reconnaît dans un procès-verbal dressé par le chef du bureau de renseignement de la mairie versé au dossier la cession de ladite parcelle à dame A Af AG ;
Qu’il soutient formellement que l’agrandissement du cimetière ayant été annulé, les héritiers sont revenus à leur ancien lieu comme si la parcelle n°P/3 qui leur avait été concédée pour les recaser ne comptait plus alors qu’ils ont en contrepartie encaissé le prix ;
Il est constant qu’en la matière personne ne peut même en qualité de notable bénéficier d’une double attribution (P/3 et AX/10) en matière de recasement comme l’on vient de s’en rendre compte avec les héritiers ;
Que le premier jugement mérite d’être infirmé pour avoir rejeté une demande d’annulation d’une décision qui contient en elle-même le germe de son irrégularité, le plan de lotissement n’a été approuvé par l’IGM qu’en octobre 2013 et la décision n°0027 qui sous-tend l’attribution de cette parcelle AX/10 aux héritiers date de 2007 ;
Au contraire, elle est fondée à solliciter la prise en compte de la parcelle AX/10 parce qu’elle est à tout point éligible ;
Qu’une enquête menée conjointement par le chef de quartier et le Président de l’Association des déguerpis en date du 08 Juillet 2010 adressée au Président de la délégation spéciale de la mairie de la Commune IV proposant le maintien et le recasement de certaines personnes notait son nom pour avoir consenti d’énormes sacrifices en participant au financement des travaux de viabilisation ;
Cette pièce est complétée par le rapport de l’IGM qui a validé le schéma de morcellement comportant la liste des différentes parcelles dont AX/10 qui lui était initialement attribuée en guise de compensation du financement des travaux ;
Que les premiers juges ayant fait une mauvaise application de la loi, il y a lieu d’infirmer le jugement querellé ;
Considérant qu’en défense, les héritiers de feu Ab Z par l’entremise de leurs conseils Maître Mohamed THIAM et Boulkassoum Sidaly, avocats à la Cour soutiennent :
-l’impossibilité pour AH X d’apporter la preuve de la fraude ;
Qu’elle a été attributaire de la parcelle litigieuse deux ans après la famille Z ;
C’est en vain qu’il lui a été demandé de produire l’acte de vente de ladite parcelle puisque n’étant ni de Troukabougouni ni de Tintinkouba ; la question de sa présence à Aa B se pose légitimement ;
Que pour tout argument, elle invoque un procès-verbal et un rapport de l’IGM qui ne sont pas versés au dossier en tout cas non communiqués aux intimés ;
Elle invoque également une enquête menée par le chef de quartier ainsi qu’une association de déguerpis, toutes incompétentes dans l’attribution de parcelles ;
Que c’est la famille Z qui est en droit de craindre la spoliation de sa parcelle ;
En effet, les manœuvres frauduleuses dont on l’accuse ne sauraient avoir lieu en 2012 contre l’appelante dont elle ne soupçonnait même pas l’existence, sa décision intervenant deux ans plus tard ;
Que les réquisitions versées au dossier ont toutes conclu à une double attribution donc au droit du premier attributaire ;
-Une décision conforme à la jurisprudence traditionnelle de la Cour ;
Que l’antériorité de la décision N°0731/MDB du 30 Avril 2012 ne fait aucun doute et cette décision n’a jamais été annulée donc le titre le plus ancien prévaut selon la jurisprudence constante ;
Le jugement querellé est conforme à une jurisprudence constante de la Cour qui pose le principe des droits du premier attributaire en cas de double attribution sur la même parcelle (Arrêt N°60 du 07 novembre 1996) ;
Que la décision N°073 ayant été édictée au profit de Ad Z le 30 avril 2012 et celle n°00543 en 2014, le moyen tiré de l’antériorité est fondé et le jugement querellé mérite confirmation ;
DISCUSSION JURIDIQUE :
Considérant qu’il est constant que suivant décision n°0731/MDB du 30 avril 2012 et celle N°0548/M-DB du 18 mars 2014, le maire du district a attribué à titre de régularisation la parcelle n°AX/10 du lotissement de Aa B aussi bien aux héritiers de feu Ab Z qu’à AH X ;
Que le juge d’instance en rejetant le recours de l’appelante contre la décision de la régularisation des héritiers s’est fondé sur la primauté des droits en cas de double attribution ;
Or, il ressort clairement du dossier et cela n’est nullement contesté par les héritiers de feu Ab Z, que dans le cadre de la mise en œuvre des travaux d’agrandissement du cimetière, la parcelle litigieuse a fait l’objet de recasement au profit des héritiers sur la parcelle N°P/3 suivant décision N°027/MDB du 07 Février 2007 du maire du District ;
Il est établi que sur cette base, les héritiers ont accepté ladite parcelle et plus tard ont même reçu une indemnisation de dame A Af AG qui avait effectué des réalisations sur la parcelle N°P/3 a eux attribuée ;
Qu’ainsi donc les héritiers n’ont plus de droit relativement à la parcelle AX/10, la mairie du District les ayant compensé en vue des travaux conformément aux principes généraux régissant les opérations de réhabilitation de quartier ;
Il est constant que les héritiers reconnaissent avoir réinvesti la même parcelle malgré leur compensation suite à l’abandon du projet d’agrandissement du cimetière alors qu’une procédure de régularisation était en cours au nom de AH X ;
Que les héritiers ne peuvent donc nullement justifier la détention de la parcelle de recasement n°P/3 et la celle AX/10 alors qu’ils n’ont jamais apporté la preuve de leur renonciation au recasement, bien au contraire ils en ont perçu l’indemnisation ;
Qu’en procédant à la régularisation au nom des héritiers d’une parcelle ayant déjà fait l’objet de compensation, la mairie a commis une faute qui porte atteinte aux droits de AH X et que le juge d’instance était obligé de relever contrairement à l’application erronée qu’il a fait du principe de la double attribution ;
Ce principe n’est nullement applicable en l’espèce puisque l’ensemble des éléments du dossier atteste à suffisance que les héritiers n’ont aucun droit sur la parcelle litigieuse pour avoir bénéficié d’une autre en compensation ;
Qu’en statuant donc comme il l’a fait, le jugement d’instance a fait une mauvaise appréciation de la cause et sa décision mérite infirmation ;
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative) où siégeaient Messieurs :
-Samba Lamine KOITE………………………….Président ;
-Sory DIAKITE………….…………………..……..Conseiller;
-Nouhoum BOUARE……………..…………..Conseiller-- Rapporteur
En présence de Monsieur Ae C Commissaire du Gouverneme;t ;
Avec l’assistance de Maître MAIGA Kadidjatou DIAKITE Greffière ;
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de recours pour excès de pouvoir et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
En la forme : Reçoit l’appel ;
Au fond : Le déclare bien fondé ;
Infirme le jugement N°247 du 18 Juin 2015 du Tribunal Administratif de Bamako ;
Statuant à nouveau :
Annule la décision n°0731/MDB du 30 Avril 2012 portant attribution de parcelle à titre de régularisation dans le lotissement de Aa B en ce qui concerne les héritiers de feu Ab Z relativement à la parcelle AX/10 ;
Ordonne la restitution de la consignation versée ;
Met les dépens à la charge en Trésor Public.
Ainsi fait jugé et prononcé par la Cour Suprême (Section Administrative), en son audience publique extraordinaire, les jours, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER
Suivent les signatures
Signé : illisible
Gratis
Enregistré à Bamako, Le 10-10-2016
Vol XXX Fol 58 N°01 Bordereau 2070
Montant Reçu : Gratis
Le Chef de Centre III
Signé : illisible
POUR EXPEDITION CERTIFIEE CONFORME
BAMAKO, LE 19 OCTOBRE 2016
P/ LE GREFFIER EN CHEF
MAÎTRE SOULEYMANE SAMAKE
REPUBLIQUE DU MALI
« AU NOM DU PEUPLE MALIEN »
La République du Mali mande et ordonne au Ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités Locales en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.
En foi de quoi la présente expédition a été scellée, collationnée et signée par Nous Mme OULARE Assanatou SAKILIBA Greffier en Chef de la Cour Suprême du Mali pour servir de Première Grosse à Ag Y, ayant pour conseil Maître Yacouba KONE, Avocat à la Cour Bamako.
POUR PREMIERE GROSSE
BAMAKO LE 5 JUIN 2014
LE GREFFIER EN CHEF
Mme OULARE Assanatou SAKILIBA