ARRET N°184
DU 06/04/2017
REPUBLIQUE DU MALI
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COUR SUPREME
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SECTION ADMINISTRATIVE
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative), en son audience publique Ordinaire du six avril Deux Mille dix-sept, a rendu l’arrêt dont la teneur suit
ENTRE :
Aa A ayant pour conseil Maître Abdramane SANOGO, Avocat inscrit au barreau du Mali ;
APPELANT
D’UNE PART
ET :
Jugement n°89 du 10 mars 2016 du Tribunal Administratif de Bamako et Ab A, ayant pour conseil, Maître Boubacar MAIGA, Avocat inscrit au barreau du Mali ;
INTIME
D’AUTRE PART
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en quoi que ce soit aux parties et sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
EN MATIERE DE RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
FAITS ET PROCEDURE :
Par une requête en date du 23 décembre 2015, le sieur Ab A par l’entremise de son conseil Maître Boubacar MAIGA, avocat à la Cour, saisissait le Tribunal Administratif de Bamako aux fins d’annulation, pour excès de pouvoir, du contrat de location n°008/A7/MCII du 13 mai 2015 du Maire de la Commune II du District de Bamako au nom de Aa A ;
Suivant Jugement n°89 du 10 mars 2016, le tribunal a rendu la décision ainsi libellée : « En la Forme : Reçoit le recours ; Au fond : Annule le contrat de location n°008/A7/MCII du 13 mai 2015 du Maire de la Commune II du District de Bamako au nom de Aa A ; Ordonne la restitution de la consignation versée ; Met les dépens à la charge du trésor public» ;
Suivant acte n°74/16 du 14 mars 2016, Maître Abdramane SANOGO, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Aa A, a relevé appel du jugement rendu et au soutien de son appel, il a produit un mémoire ampliatif auquel Maître Boubacar MAIGA, a répliqué pour le compte de l’intimé. Cette réplique a été notifiée à l’appelant ;
Suivant lettre n°0827 du 19 Octobre 2015, le Maire de la Commune II du District de Bamako a fait parvenir à la Cour des éléments d’information qui ont été communiqués aux parties à toutes fins utiles ;
Sur ce il a été statué comme suit :
EN DROIT :
EN LA FORME :
II – PRETENTIONS DES PARTIES
Considérant qu’au soutien de son appel, le sieur Aa A, par l’entremise de son conseil, expose :
Que depuis 2003, un contrat le liait à la Mairie de la Commune II du district de Bamako en sa qualité de représentant ès qualité de l’Association des chauffeurs de la ligne Ad Ac pour l’occupation d’un espace de 400 m2 et à côté duquel existait une petite bande de parcelle qui servait de servitude ;
Que cette bande qui faisait 60 m2 était convoitée par le sieur A qui était, lui-même, membre de l’Association des chauffeurs, pour en faire un parking, toute chose qui était difficile car, il ne pouvait avoir accès à cette bande sans traverser l’espace des chauffeurs, ce qui pouvait causer des désagréments à l’Association ;
Que c’est ainsi que le Maire de la Commune II inclura la bande, par un contrat de location, que le sieur Ab A a attaqué en annulation devant le Tribunal administratif de Bamako qui accéda à sa demande par le jugement objet de la présente procédure ;
Qu’il entend donc réitérer la fin de non-recevoir soulevée relativement au défaut de qualité du sieur Ab A en sa qualité de demandeur tant est-il constant que le contrat de location n°008/MCII-DB du 13 mai 2015 ne le concerne pas d’autant plus que son contrat de location n°044/MCII du 25 Aout 2014 était annulé par la Mairie et le Jugement n°307 du 30 juillet 2015 du Tribunal Administratif de Bamako consacrait cet état de fait ;
Qu’il n’a donc aucune qualité à saisir le tribunal et donc son recours doit être déclaré irrecevable pour ce motif ;
Que la Décision n°050 MCII du 17 mars 2015 a mis fin à l’existence du contrat de location entre le sieur Ab A et la Mairie car, il y a eu un seul contrat entre les parties signé le 25 aout 2014 et aucun recours fructueux n’a été produit aux débats pour soutenir le contraire de la réalité juridique ;
Qu’il y a lieu de considérer que la Mairie de la Commune II du district de Bamako n’a commis aucun excès de pouvoir et d’infirmer par voie de conséquence le jugement entrepris ;
Considérant que le sieur Ab A, par l’entremise de son conseil, soutient à son tour :
Que l’irrecevabilité soulevée par l’appelant concerne le contrat n°0046/A6/MCII du 25 Aout diffèrent du recours présentement exercé qui porte sur l’annulation de la Décision n°009/MCII du 13 mai 2015 ;
Que l’objet de ce recours étant différent de celui du Jugement n°307, il y a lieu de rejeter ce moyen puisque Ab A justifie d’un intérêt légitime, protégé et confirmé par un contrat n°0044/A6/MCII en bonne et due forme, il a donc qualité à agir ;
Qu’en outre, il ressort de l’extrait du plan abritant la zone querellée que les deux espaces ne sont pas les mêmes et donc l’argument tiré du rattachement des 60 m2 au 400 m2 n’est pas de nature à justifier la décision illégale prise par le Maire ;
Qu’en plus, il tire ses droits du contrat de 2014 confirmé par une correspondance du Maire adressée à l’Association des chauffeurs qui clarifie la situation ;
Que la réattribution de la parcelle à l’Association a été faite au-delà de deux mois en violation du principe de l’intangibilité des droits acquis consacré par les arrêts Beumert et Dame Cachet ;
Qu’en réattribuant cette même parcelle dans ces conditions, au mépris des droits acquis et surtout de la jurisprudence constante de la théorie de l’antériorité, le contrat établi au nom de Aa A tombe sous le coup de l’illégalité étant entendu que son contrat est créateur de droit qui remonte au 25 aout 2014 ;
Qu’en application des dispositions de l’article 12 du Décret n°02-112 déterminant les formes et conditions d’attribution des terrains du domaine privé immobilier des collectivités territoriales, il n’y a eu ni notification ni mise en demeure préalable ;
Que donc la décision querellée procède d’une violation de la loi toute chose qui justifie la confirmation du jugement querellé ;
Considérant que la Mairie de la Commune II du district de Bamako, dans une Correspondance N°0827/MCII-DB du 19 octobre 2016 enregistrée au greffe de la Cour le 31 octobre 2016, a expliqué :
Qu’il s’agit d’un contrat de bail sur un site servant de gare qui a été consenti à l’Association des syndicats et transporteurs sise à N’Golonina et qu’il y a lieu de rappeler que le sieur Ab A est toujours membre de l’Association ;
Qu’à la suite des difficultés internes au sein de leur association affectant dangereusement la gestion du contrat, il fut annulé et repris au nom de Ab A ;
Que ce dernier n’ayant pas pu respecter les procédures d’établissement du contrat, il a été annulé et redonner à l’Association dirigée par le sieur Aa A, dans un souci de stabilité et de paix dans la zone indiquée car, étant donné qu’ils sont tous membres de cette association, il est légitime de privilégier l’intérêt général sur celui du particulier et qu’à ce jour la Mairie valide le contrat signé avec l’association dirigée par Aa A ;
III - DISCUSSION JURIDIQUE
EN LA FORME
CONSIDERANT que l’appel de Monsieur Aa A obéit aux conditions de recevabilité exigées par la loi, il y a lieu de le recevoir en la forme ;
AU FOND :
CONSIDERANT que la fin de non-recevoir soulevée par l’appelant ne peut être retenue puisque chacune des parties se prévaut d’un acte administratif dont l’appréciation définitive n’a pas été faite par les juridictions compétentes ;
Qu’il ressort du dossier et des déclarations non contestées des parties que Monsieur Ab A est membre de l’Association des chauffeurs de la ligne Bamako-Niono représentée par Aa A qui exploite l’espace attribuée par la Mairie de la Commune II ;
Qu’ainsi, le contrat en date du 25 aout 2014, établi sur la bande litigieuse au nom de Monsieur Ab A, intuitu personae, a fait l’objet d’annulation suivant Décision n°050/MCII du 17 mars 2015 ;
Que le recours en annulation contre ladite décision devant le Tribunal Administratif de Bamako a été déclaré irrecevable suivant Jugement n°307 du 30 juillet 2013 ;
CONSIDERANT que le jugement contesté, pour faire droit à la requête de Monsieur A, a fait application des dispositions de l’article 12 du Décret N°02-112/P-RM du 06 mars 2002 déterminant les formes et conditions d’attribution de terrains du domaine privé immobilier des collectivités territoriales alors qu’il s’agit en l’espèce d’un contrat portant sur l’occupation du domaine public immobilier de la collectivité mise en cause ;
Que par conséquent le décret applicable en la matière est plutôt celui N°02-111/P-RM du 06 mars 2002 déterminant les formes et conditions de gestion des terrains des domaines publics immobiliers de l’Etat et des Collectivités territoriales ;
Qu’une lecture combinée des articles 12, 22 et 28 dudit décret fait ressortir que le domaine public immobilier des collectivités territoriales est géré dans les mêmes conditions que celui de l’Etat ;
Qu’à cet titre, le droit d’occupation temporaire est strictement personnel et la collectivité peut se réserver le droit de mettre fin au bail à tout moment ;
Que de tout ce qui précède, il s’ensuit que pour des raisons d’intérêt public liées à la gestion collective faite par l’Association, dont Ab A est membre, et suite au non- respect des procédures d’établissement du contrat, le Maire a pu valablement résilié le bail avec Ab A et le reconduire avec l’Association des chauffeurs de la ligne Bamako-Niono représentée par Aa A ;
Que le Tribunal administratif de Bamako, en exigeant une mise en demeure conformément aux dispositions de l’article 12 du Décret n°02-112/P-RM du 06 mars 2002, a fait application d’un texte règlementaire qui ne régit nullement la question ;
Qu’en annulant donc le dit contrat au nom de Aa A sur la base d’une disposition réglementaire inapplicable et en se fondant sur un contrat déjà annulé, le jugement contesté procède d’une mauvaise application de la loi et mérite par conséquent d’être infirmé ;
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative) où siégeaient Messieurs :
- Ae Af KOITE……………………………….……….Président ;
- Nouhoum BOUARE…………………………………………. Conseiller ;
- Djougal CISSE………...………..………….. Conseiller-Rapporteur ;
En présence de Monsieur Harouna DAO Rapporteur Public ; Avec l’assistance de Maître KANTE Korotimi TANGARA Greffier ;
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de Recours pour Excès de Pouvoir et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la loi n°2016-O46 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle.
Vu les pièces du dossier
EN LA FORME :
Reçoit l’appel comme régulier ;
AU FOND
Infirme le jugement n°89 du 10 mars 2016 du Tribunal Administratif de Bamako ;
Statuant à nouveau : - Rejette le recours de Ab A comme mal fondé ;
Dit que le contrat n°008/A7MCII-DB du 13 mai 2015 au nom de Aa A, représentant l’Association des Chauffeurs de la Bamako-Niono produira ses pleins et entiers effets ;
Met les dépens à la charge du trésor public ;
Ordonne la restitution de la consignation versée ;
Ordonne la notification de l’arrêt aux parties.
Ainsi fait jugé et prononcé par la Cour Suprême (Section Administrative), en son audience publique ordinaire les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.
Suivent les signatures
Signés illisibles
Reçu : Gratis
Enregistré à Bamako, le 26/05/2017
Vol XXXII Fol 76 N°01 Bordereau 936
Montant reçu
Le Chef de Centre III
Signé : illisible
POUR EXPEDITION CERTIFIEE CONFORME
BAMAKO, LE 13 JUILLET 2017
P/ LE GREFFIER EN CHEF
Me SOULEYMANE SAMAKE