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03/02/2020 | MALI | N°005

Mali | Mali, Cour suprême, 03 février 2020, 005


Texte (pseudonymisé)
COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple – But – Une Foi

1ère chambre civile

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Pourvoi n°128 du 17 /04 /2019

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Arrêt n° 05 du 03 /02/ 2020

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NATURE : Réclamation de champ



COUR SUPREME DU MALI



A,

en son audience publique, ordinaire du Lundi trois février

deux mil vingt, à laquelle siégeaient :

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COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple – But – Une Foi

1ère chambre civile

- :- :- :- :- :- :- :-

Pourvoi n°128 du 17 /04 /2019

- :- :- :- :- :- :- :- :-

Arrêt n° 05 du 03 /02/ 2020

- :- :- :- :- :- :- :- :-

NATURE : Réclamation de champ

COUR SUPREME DU MALI

A, en son audience publique, ordinaire du Lundi trois février

deux mil vingt, à laquelle siégeaient :

Monsieur Hamet SAM, Président de la 1ère chambre civile ;

Monsieur Boureima GARIKO, conseiller à la cour, membre ;

Madame Djénéba KARABENTA, conseiller à la cour, membre ;

En présence de Monsieur Cheicknè Hamallah FOFANA ;

Avocat général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public ;

Monsieur Mody TRAORE et Mme Awa COULIBALY, Assesseurs ;

Avec l’assistance de Maître KEITA Coumba DICKO, greffier ;

Rendu l’arrêt dont la teneur suit :

Sur le pourvoi de Maître Bakary Aj DEMBELE, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Ae A, né vers 1953 à N’Ai C/ Bla, cultivateur, de nationalité malienne, domicilié à N’Ai ;

Demandeur ;

D’une part

 

Contre : Ab Ad A, Ayant pour conseil Maître Bolly KONE, avocat à la Cour ;

Défendeur ;

D’autre part

Sur le rapport de Monsieur Hamet SAM, Président de la 1ère chambre Civile, les conclusions écrites de l’avocat général Tamba Namory KEITA et orales de l’avocat général Cheicknè Hamallah FOFANA ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME :

Par acte de pourvoi n°128 du 17 Avril 2019. Maître Bakary Aj DEMBELE, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Ae A, a déclaré se pourvoi en cassation contre l’arrêt n°83 rendu le 6 Février 2019, par la chambre civile de la cour d’appel de Bamako dans une instance en réclamation de champ qui oppose son client à Ab. Ac A.

Le demandeur au pourvoi a acquitté l’amende de consignation comme l’atteste le certificat de dépôt n°402 du 5 Juin 2019 du greffier en chef de la cour.

Il a, en outre, sous la plume de son conseil, produit un mémoire ampliatif, lequel, notifié à celui du défendeur, a fait l’objet de réplique.

Le pourvoi ayant satisfait aux conditions légales est donc recevable en la forme.

Au Fond :

I Faits et Procédure :

Il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué les faits suivants : Les nommés Ab dit Ad A et Ae A tous ressortissants du village de N’Ai commune rurale de Af cercle de Bla, se disputent les droits de propriété coutumière sur une parcelle de culture d’une superficie de 5 hectares 47 ares sise dans ladite localité.

Par acte d’huissier de justice en date du 19 Février 2018, Ab dit Ad A faisait assigner Ae A devant le Tribunal civil de Bla aux fins de réclamation de champ portant sur cette parcelle litigieuse.

Cette juridiction, par jugement n°13 du 26 Avril 2018, déclarait sa requête mal fondée et le déboutait de ses prétentions.

Sur le recours de Maître Boly KONE agissant au nom et pour le compte de Ab dit Ad A, la chambre civile de la cour d’appel de Bamako, par arrêt n°83 du 6 Février 2019, infirmait le jugement entrepris et le déclarait propriétaire d’une terre de culture d’une superficie de 5 hectares 47 ares sise à N’Ai limitée.

- A l’Est, par le champ de Ad ;

- A l’Ouest par le champ de Ae Al ;

- Au Sud, par le champ de Ad ;

- Au Nord par le champ de Kétana… »

C’est contre cette décision que Maître Bakary Aj DEMBELE, agissant pour le compte de Ae A, a déclaré se pourvoi en cassation.

II Exposé des moyens du pourvoi :

Le demandeur au pourvoi,  sous la plume de son conseil Maître Bakary Aj DEMBELE soulève trois moyens de cassation tirés du défaut de réponse à conclusions, de la violation de la loi et du défaut de base légale.

Premier moyen : Le défaut de réponse à conclusions.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué de n’avoir pas réservé de suite aux conclusions du demandeur fondées sur les témoignages de Ah Aa A et Ak A et les dispositions de l’article 29 de la loi n°2017-001 du 11 Avril 2007 portant sur le foncier agricole qui dispose que « dans les affaires de revendication en détention coutumière ou de possession de terres agricoles, notamment la propriété et des droits qui en découlent, la possession de la terre non immatriculée ou non enregistrée est acquise par l’exploitant après 20 ans d’exploitation continue et régulière sans contestation, ni paiement d’un quelconque droit de taxe » ;

Qu’en refusant de répondre à ces conclusions, la Cour d’appel a exposé sa décision à la cassation.

Deuxième moyen : Le défaut de base légale

Le demandeur fait en outre grief à l’arrêt attaqué d’être entaché d’un défaut de base légale en ce qu’il a occulté les témoignages ayant confirmé la propriété de Ae A sur le champ litigieux alors que ceux-ci constituent la clé de voûte en matière de droit de propriété coutumière ;

Que les juges d’appel ont aussi motivé leur décision par le rapport de mission et de constat en ces termes « Considérant qu’il ressort du rapport de mission et de constat dans le village de N’Ai que le Sieur Ab Ad A est propriétaire coutumier d’une terre de culture couvrant une superficie de 5 ha 47 aires … » alors  qu’il ne ressort nulle part du rapport que Ab est le propriétaire de la parcelle en question.

Qu’en fondant sa décision sur une déclaration imaginaire faussement attribuée au rapport alors qu’elle n’y figure point, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

Troisième moyen : la violation de la loi

Le demandeur au pourvoi, pour soutenir son recours, soulève la violation de la loi prise en deux branches :

Le 1ere Branche : La violation de l’article 29 de la loi n° 2017-001 du 11 Avril 2017

Il est fait grief à l’arrêt recherché d’avoir violé les dispositions de l’article 29 de la loi susvisée qui dispose « que dans les affaires de revendication en détention coutumière ou de possession de terres agricoles, notamment la propriété et des droits qui en découlent, la possession de la terre non immatriculée ou non enregistrée est acquise par l’exploitant après vingt (20 ans) d’exploitation continue et régulière sans contestation ni paiement d’un quelconque droit de taxe » alors qu’il a été démontré par le mémorant et ses témoins et reconnu par le défendeur que le sieur Ae A exploite le champ litigieux sans anicroche il y a plus de 30 ans.

Qu’en refusant de déclarer le sieur Ae A propriétaire du champ en question, les juges d’appel ont violé le texte ci-dessus cité ;

La 2ème Branche : La violation de l’article de 9 du CPCCS

Il est par ailleurs fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 9 du CPCCS en ce qu’il a retenu que le sieur Ae A n’a pas apporté la preuve de sa propriété alors que cette preuve résulte suffisamment de l’emprise totale et continue sur le champ litigieux, des témoignages de Ah Ag A et Ak A et de la reconnaissance de Ab Ad A et ses témoins ;

Qu’en statuant ainsi, les juges d’appel ont refusé d’appliquer la loi et leur décision encourt la cassation ;

Le demandeur au pourvoi, a en outre sollicité la cassation sans renvoi de l’arrêt déféré afin que le premier jugement produise ses pleins et entiers effets.

Le défendeur au pourvoi, sous la plume de son conseil Maître Boly KONE a produit un mémoire en réplique par lequel il a conclu au rejet du projet.

III Analyse des moyens du pourvoi :

Attendu que le demandeur au pourvoi, sous la plume de son conseil Maître Bakary M.DEMBELE, soulève trois moyens de cassation tirés du défaut de réponse à conclusions, de la violation de la loi et du défaut de base légale.

Sur le Premier moyen : Le défaut de réponse à conclusions.

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt entrepris de n’avoir pas réservé de suite aux conclusions du demandeur fondées sur les témoignages de Ah Ag A et Ak A et les dispositions de l’article 29 de la loi n°2017-001 du 11 Avril 2017 portant sur le foncier agricole.

Attendu que le grief de défaut de réponse à conclusions s’entend en des conclusions qui articulent de véritables moyens et régulièrement déposées.

Mais attendu que dans le cas de figure, le demandeur au pourvoi n’évoque aucune conclusion en cause d’appel conforme aux conditions ci-dessus évoquées.

Qu’il s’ensuit dès lors que le moyen tiré du défaut de réponse à conclusions ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen : Le défaut de base légale

Attendu qu’il est en outre fait grief à l’arrêt entrepris d’être entaché d’un défaut de base légale en ce qu’il a occulté les témoignages ayant confirmé la propriété de Ae A alors que ceux-ci constituent la clé de voûte en matière de droit de propriété coutumière.

Que les juges d’appel ont aussi motivé leur décision en se fondant sur le rapport de mission et de constat alors qu’il ne ressort nulle part dudit rapport que Ab est le propriétaire de la parcelle litigieuse.

Attendu que le grief de « défaut de base légale est constitué par une insuffisance de motivation de la décision attaquée qui ne permet pas à la Cour Suprême de contrôler la régularité de la décision ou plus précisément de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règle de droit » (La Technique de cassation –Marie –Noëlle Jobard –Bachelier – Xavier –Bachelier 7e éd .P.156).

Qu’elle est encourue chaque fois que « la Cour Suprême n’a pas trouvé dans la décision censurée tous les éléments de fait et de doit qui lui ont permis de s’assurer qu’une erreur a été commise par les juges des fond (erreur de qualification ou d’application de la loi) » (Même source).

Mais attendu que dans le cas d’espèce, le moyen ne précise pas le texte de loi dont les éléments de fait et de droit ont été insuffisamment constatés par les juges d’appel.

Qu’en l’absence de cette précision le moyen tiré du défaut de base légale est irrecevable en application de l’article 156 de la loi n°2016-046 du 23-9-2016.

Sur le troisième moyen : la violation de la loi

Sur la première branche : la violation de l’article 29 de la loi n°2017 -001 du 11 Avril 2017.

Attendu qu’il est en outre reproché à l’arrêt entrepris la violation de l’article 29. de la loi sus-visée qui dispose que « dans les affaires de revendication ou détention coutumière ou de possession de terres agricoles notamment la propriété et les droits qui en découlent, la possession de la terre non immatriculée ou non enregistrée est acquise par l’exploitant après vingt (20 ans) d’exploitation continue et régulière sans contestation ni paiement d’un quelconque droit de taxes » alors qu’il a été démontré par le mémorant et ses témoins et reconnu par le défendeur que le sieur Ae A exploite le champ litigieuse sans anicroche il y a plus de 30 ans.

Mais attendu qu’en cause d’appel le conseil du demandeur n’évoque aucun moyen fondé sur l’application de l’article 25 de la loi n°2017-001 du 11 Avril 2017 et tendant au rejet des prétentions de l’appelant Ab Ac A ;

Qu’il se borne à soulever le défaut de qualité de celui-ci fondé improprement sur l’article 29 du CPCCS.

Que nulle part dans l’arrêt attaqué, ce moyen n’est pas soulevé ;

Qu’il s’agit dès lors d’un moyen nouveau insusceptible d’être soulevé pour la première fois devant la Cour Suprême.

Qu’en application de l’article 157 de la loi n°2016-046-du 23-9-2016, il y a lieu de le déclarer irrecevable.

Sur la deuxième branche : La violation de l’article 9 au CPCCS.

Attendu qu’il est par ailleurs fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 9 du CPCCS en ce qu’il a retenu que le sieur Ae A n’a pas apporté la preuve de sa propriété alors que cette preuve résulte suffisamment de l’emprise totale et continue sur le champ litigieux, des témoignages de Ah Ag A et Ak A et de la reconnaissance de Ab Ad A et ses témoins.

Attendu que pour soutenir le moyen tiré de la violation de l’article 9 du CPCCS, le demandeur se prévaut des éléments de preuve apportés pour étayer ses prétentions ;

Mais attendu que l’appréciation de ces éléments de preuve apportés par les parties à l’appui de leurs préventions relève du pouvoir souverain des juges du fond.

Qu’on ne saurait critiquer l’arrêt recherché sur le fondement de l’article 9 du CPCCS.

Qu’il s’ensuit que le moyen ni peut être accueilli en sa deuxième branche.

PAR CES MOTIFS :

La Cour :

En la Forme : Reçoit le pourvoi ;

Au Fond : Le rejette

Ordonne la confiscation de la consignation

Met les dépens à la charge du demandeur.

Ainsi fait jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER

Suivent les signatures

Signé illisible

6.000 F CFA

Enregistré à Bamako, le 04/03/2020

Vol XXXXII Fol 130 N°3 Bordereau 518

Reçu : Six mille francs

Le Chef de Centre III

Signé Illisible.

« Au Nom du Peuple Malien »

En conséquence, la République du Mali, mande et ordonne à tous Huissiers de Justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la République, près les Cours d’Appel et les Tribunaux de Première Instance, d’y tenir la main à tous Commandants et Officiers de la force publique, de prêter main forte pour son exécution, lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, le présent arrêt a été collationné, scellé et signé par Nous, Me OULARE Assanatou SAKILIBA, Greffier en chef de la Cour Suprême, pour servir de Première Grosse à Monsieur Ab Ad A, Ayant pour conseil Maître Bolly KONE, avocat à la Cour .

Bamako, le 11 mai 2020

LE GREFFIER EN CHEF

Maître OULARE Assanatou SAKILIBA

Médaillé du Mérite National


Synthèse
Numéro d'arrêt : 005
Date de la décision : 03/02/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2020-02-03;005 ?
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