Cour Suprême du Mali République du Mali
Section Judiciaire Un Peuple – Un But Une Foi
Chambre Commerciale
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Pourvoi n°68 du 16/10/2020
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Arrêt n°03 du 16/02/2021
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Nature : Restitution de titres fonciers sous astreinte.
LA COUR SUPREME DU MALI
En son audience publique ordinaire du Mardi seize février deux mille vingt un, à laquelle siégeaient ;
Monsieur Mahamane Alassane MAÏGA, Président de la Chambre Commerciale, Président ;
Monsieur Taïcha MAÏGA, Conseiller à la Cour ; membre
Monsieur Amadou Abdoulaye SANGHO, Conseiller à la Cour ; membre ;
En présence de Monsieur Yaya KONE, Avocat Général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public ;
Avec l’assistance de Maître Diènèba FOFANA, Greffier ;
A Rendu l’arrêt dont la teneur suit :
Sur le pourvoi : De Maître Sidiki DIARRA, Avocat inscrit au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de la SOMACAR-SARL, représentée par Mme A Ac C, Société à responsabilité limitée, ayant son siège social Bamako immeuble Ab Ad / KONATE1, demanderesse ;
D’UNE PART :
Contre : L’arrêt n°375 du 28/09/2020 de la Chambre des référés de la Cour d’Appel de Bamako et la Bank Of Africa Mali-sa, Société Anonyme avec conseil d’administration, ayant son siège social à Aa Z 2000 Immeuble BOA, ayant pour conseil Etude Youba, Avocat inscrit au Barreau du Mali, défenderesse,
D’AUTRE PART :
Sur le rapport de Monsieur Mahamane Alassane MAÏGA, Président de la Chambre Commerciale, les conclusions écrites et orales de l’Avocat Général Yaya KONE ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
I- En la forme :
Par acte n°68 en date du 16 Octobre 2020, Maître Sidiki DIARRA, Avocat à la cour, agissant au nom et pour le compte de SOMACAR-SARL, a déclaré former pourvoi contre l’arrêt n°375 rendu par la Chambre des référés de la Cour d’Appel de Bamako dans une procédure en restitution de titres fonciers sous astreinte opposant sa cliente à la Bank Of Africa Mali- SA.
Suivant certificat de dépôt n°345 du 12/11/2020 du greffe de la cour de céans, la demanderesse a acquitté la consignation prévue par la loi ;
Son conseil a produit un mémoire ampliatif qui, notifié à la défenderesse a fait l’objet de réplique.
Le pourvoi ayant ainsi satisfait aux exigences de la loi doit être déclaré recevable.
II- Au fond :
Faits et procédure :
Dans le cadre d’importation d’hydrocarbures, la SOMACAR-SARL a bénéficié du concours financier de la Bank Of Africa Mali-SA. La banque, pour l’octroi de ce prêt à AG n’a jamais exigé de constitution d’hypothèques ;
Par contre la BOA-Mali-SA pour avoir consenti d’autres concours financiers a exigé de nombreuses hypothèques, depuis fort longtemps à d’autres Sociétés dont :
Af Ac C
;X ;
A TRANSIT, toutes représentées par une seule et
même personne, Mme A Ac C ;
Ces concours financiers avoisinent ou dépassent les 800 millions de francs CFA sur lesquels, à ce jour, pas un centime n’a été remboursé à la banque ;
Il est quand même heureux de faire remarquer qu’au nom de SOMACAR-SARL, Mme Ac C a complètement soldé le prêt à elle consenti, tel qu’il ressort des écritures passées entre elle et la banque ;
Après ledit remboursement, constaté par la banque et suivi d’une lettre de remerciement et de reconnaissance, SOMACAR-SARL, à sa demande, s’est vu opposer le refus de la Bank Of Africa Mali-SA aux fins de restituer les titres fonciers en sa possession ;
Elle a donc saisi le tribunal de commerce de Bamako aux fins de restitution desdites garanties sous astreinte.
Par ordonnance n°196/20 du six Juillet 2020, ledit tribunal a statué en ces termes :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière d’urgence et en premier ressort ;
Rejetons l’exception d’incompétence soulevée par le conseil de la défenderesse ;
En la forme : Recevons la Société Malienne de Carburant en sa demande ;
Au fond : La déclarons bien fondée, y faisant droit ;
Ordonnons à la Société Bank Of Africa-Mali-SA de restituer à la Société Malienne de Carburant (SOMACAR-SARL) les titres fonciers n°6118/CI, n°9066/C5, n°32577/Kati, Y Ae et N°9160/Bacodjicoroni ACI et la lettre d’attribution n°435 CI/9836 ;
Disons que notre décision est exécutoire sous astreinte de 500.000 FCFA par jour de retard à compter de sa date ;
La déboutons du surplus de sa demande ;
Disons exécutoire notre décision au seul vu de la minute ;
Mettons les dépens à la charge de la défenderesse ».
Suite à l’appel interjeté par la BOA-Mali-SA, la Cour d’Appel de Bamako a rendu l’arrêt n°375 du 18 Septembre 2020 en ces termes
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort ;
En la forme : Reçoit l’appel ;
Au fond : Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a ordonné à la Bank Of Africa-Mali-SA de restituer à la Société Malienne de Carburant (SOMACAR-SARL) les T.F 6118/CI, n°9066/C5, n°32577/Kati, Y Ae, la lettre d’attribution n°435 CI/9836 sous astreinte de 500.000 FCFA par jour de retard à compter de sa date ;
Statuant à nouveau sur ce point :
Déclare l’action en restitution des T.F réclamés par la SOMACAR-SARL mal fondée et la rejette en conséquence ;
La confirme en ses dispositions relatives au rejet de l’incompétence soulevée par la banque Of Africa-Mali-SA ;
Rejette en outre la demande de restitution des T.F n°1429/CI et 1417/CII faite par la SOMACAR-SARL comme mal fondée ;
Mets les dépens à la charge de SOMACAR-SARL ».
La SOMACAR-SARL a fait pourvoi contre cet arrêt.
III - Exposé des moyens du pourvoi :
La SOMACAR-SARL par le biais de son conseil Maître Sidiki DIARRA, Avocat à la cour expose un seul moyen de cassation tiré du défaut de base légale.
- Sur le moyen unique tiré du défaut de base légale :
En ce que pour infirmer l’ordonnance n°96 susvisé, la Cour d’Appel de Bamako a estimé que la preuve de la remise des titres fonciers à la Bank Of Africa-SA en garantie les engagements de la Société Malienne de Carburant n’est pas faite alors qu’il est clairement établi que quand la SOMACAR-SARL adresse à la BOA-Mali-SA une demande de main levée de caution et restitution de garanties, celle-ci répondit que la SOMACAR-SARL reste lui devoir la somme de 6.978.184 FCFA ;
Que la SOMACAR-SARL règle cette dette avant de réitérer sa demande ;
Qu’en dépit de toutes les preuves écrites par la Bank Of Africa-Mali-SA pour reconnaitre et attester de la remise des T.F, la Cour d’Appel de Bamako, en considérant que la preuve de l’hypothèque n’est pas rapportée, expose sa décision à la censure de la haute cour ;
Qu’il sollicite qu’il plaise à la cour casser et annuler l’arrêt rendu et dire n’y avoir lieu à renvoi ;
Attendu que sous les écritures de Maître Salif SANOGO, la SOMACAR-SARL pour parvenir à ses fins a estimé que la Cour d’Appel de Bamako n’aurait pas tiré toutes les conséquences des constatations de faits réels qui, non seulement priverait sa décision de base légale, mais aussi ne permettrait pas à la haute juridiction d’exercer son contrôle de légalité ;
Attendu cependant qu’à l’appui de ses allégations, la SOMACAR-SARL ne rapporte pas la preuve du lien juridique qui existe entre elle et les titres de propriété qu’elle revendique conformément aux dispositions de l’article 9 du CPCCS ;
Or, dans le système OHADA, l’article 205 AUS dispose que l’hypothèque peut être consentie soit par un acte authentique établi par le notaire territorialement compétent ou l’autorité judiciaire habilitée à faire de tels actes ; ou par acte sous seing privé dressé suivant un modèle agrée par la conservation de la propriété foncière ;
Que la banque rappelle de passage que si l’Acte Uniforme n’a pas réduit la forme de l’hypothèque au seul acte notarié, il ne fait cependant aucun doute que, hors les formes qu’il a prescrites, l’hypothèque consentie est inexistante ou nulle et d’une nullité absolue.
Qu’une décision de justice ne peut se fonder uniquement sur des faits allégués par une partie pour en déceler une affectation hypothécaire en l’absence du concours d’un notaire ou de l’intervention d’une autorité judiciaire ;
Que dès lors la SOMACAR-SARL ne saurait véritablement soutenir le prétendu défaut de base légale reproché à l’arrêt déféré à partir du moment où les juges d’appel pour motiver leur décision ont soutenu que « L’intimée ne produit pas aux débats la preuve que la Société SOMACAR-SARL a autorisé la banque à inscrire une quelconque hypothèque ou sureté réelle sur lesdits titres conformément à l’article 9 du CPCCS », selon lequel il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires en succès de sa prétention » ;
Que l’apposition sur lesdits titres d’un cachet de la SOMACAR-SARL et d’un cachet de la banque ne peut suffire à constituer une hypothèque en l’absence d’un acte notarié ou de tout acte régulièrement inscrit au LIVRE FONCIER conformément aux dispositions légales en vigueur » ;
Maître Salif SANOGO, a donc conclu au nom et pour le compte de la Bank Of Africa Mali-SA qu’il plaise à la cour de rejeter le pourvoi.
IV- SUR CE :
Analyse du moyen :
Attendu que le prétendu défaut de base légale reproché à l’arrêt déféré ne saurait résister à la motivation dudit arrêt qui précise que l’intimé ne produit pas aux débats la preuve que la Société SOMACAR-SARL a autorisé la banque à inscrire une quelconque hypothèque ou sureté réelle sur lesdits titres conformément à l’article 9 du CPCCS ;
Que l’apposition sur lesdits titres d’un simple cachet de la SOMACAR-SARL et de la banque ne peut constituer une hypothèque en l’absence d’un acte notarié ou de tout acte régulièrement inscrit au LIVRE FONCIER conformément aux dispositions légales en vigueur » ;
Attendu qu’en effet, contrairement aux allégations de AG, suivant divers actes passés par devant Maître Boubacar Abdoulaye Sékou SOW, notaire à la résidence de Bamako, Mme A Ac C a consenti une hypothèque conventionnelle sur les titres fonciers litigieux en garantie du remboursement des sommes dues par la Société A Transit SARL et la Société Etablissement Ac C ou Madame A Ac C dans les livres de la Bank Of Africa-Mali ;
Que mention expresse desdites inscription ressortent des bordereaux analytiques des titres fonciers aujourd’hui réclamés en restitution (cf les pièces n°1, n°2, n°3, n°4, n°5 et n°6 versées au dossier)
Or, dans le système OHADA, l’inscription hypothécaire conserve le droit du créancier hypothécaire jusqu’à l’expiration de la durée prévue par la convention ou la décision de justice ;
Qu’à l’alinéa 1er de l’article 202 AUS, il est précisé que « L’hypothèque est radiée selon les règles de publicité de l’ETAT PARTIE où est situé le bien grevé » ;
Que cependant la SOMACAR-SARL ne verse nulle part dans le dossier de la procédure preuve quelconque des inscriptions d’hypothèques, ni celle de leurs radiations encore moins leurs mains levées susceptible d’établir le bien-fondé de sa demande en restitution de titres fonciers sous astreinte ;
Qu’en conséquence, il n’existe aucun lien de droit entre la SOMACAR-SARL et les titres qu’elle revendique à tort ;
Qu’en statuant comme ils l’ont fait, les juges d’appel ont fait une saine application de la règle de droit en la matière ;
Qu’il y a donc lieu de rejeter ce moyen.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR :
En la forme : Reçoit le pourvoi ;
Au fond : Le rejette ;
Ordonne la confiscation de l’amende de consignation.
Mets les dépens à la charge de la demanderesse.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessous.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.