Cassation sur le pourvoi formé par Ah Ad Aa Ad Ah Contre un jugement rendu le 25 mars 1958 par le tribunal criminel de Rabat qui l'a condamné à la peine de mort pour vol et assassinat.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN, pris de la violation de l'article 296 du Code d'instruction criminelle et des formes substantielles de la procédure ;
Attendu que l'interrogatoire prescrit par l'article 293 du Code d'instruction criminelle promulgué au Maroc par le dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913), doit, aux termes de l'article 296 du même code, être constaté par un procès-verbal portant notamment la signature du magistrat qui a procédé audit interrogatoire ;
Attendu qu'un tel interrogatoire est nul lorsqu'il est subi en l'absence d'un magistrat que faute de la signature de ce dernier, le procès-verbal n'est ni légal ni probant,et ne permet pas à la Cour suprême de contrôler l'authenticité de ce document et la régularité de l'interrogatoire ;
Attendu que cet interrogatoire, formalité substantielle, constitue un préliminaire indispensable pour que l'accusé puisse être valablement traduit devant le tribunal criminel ;
Attendu que le procès-verbal de l'interrogatoire subi à la prison civile de Rabat par Ah Ad Aa Ad Ah le 3 mars 1958 mentionne qu'il y a été procédé par le président du tribunal criminel de Rabat mais ne porte point la signature de ce magistrat ;
Que ce procès-verbal est ainsi entaché d'une nullité qui entraîne celle de toute la procédure ultérieure ;
PAR CES MOTIFS
Et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens exposés
Casse et annule, en ce qui concerne Ah Ad Aa Ad Ah le jugement du tribunal criminel de Rabat en date du 25 mars 1958, ainsi que tous actes antérieurs de la procédure depuis et y compris l'interrogatoire subi par cet accusé le 3 mars 1958 ;
Renvoie la cause et l'accusé devant le tribunal criminel de Casablanca pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi ;
Président : M. Ae. - Rapporteur : M. Ac. - Avocat général : M. Ab. - Avocat : Me Tramini.i.
Observations
Aux termes de l'art. 293 de l'ancien C. d'instr. crim., rendu applicable par le dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913), « vingt-quatre heures au plus tard après la remise des pièces au greffe et l'arrivée de l'accusé dans la maison de justice, celui-ci sera interrogé par le président » du tribunal criminel, « ou par le juge qu'il aura délégué » et l'alinéa 2 de l'art. 296 du même Code prévoyait que « l'exécution du présent art. et des deux précédents sera constatée par un procès-verbal, que signeront l'accusé, le juge et le greffier si l'accusé ne sait ou ne veut pas signer, le procès-verbal en fera mention ».
Il faut en principe que les trois signatures soient apposées. il avait déjà été jugé que doit
être annulé le jugement rendu par un tribunal criminel, lorsque le procès-verbal de l'interrogatoire prescrit par l'art. 293, qui constitue une formalité substantielle, n'a pas été signé par le greffier (Crim. 22 avr. 1953, Rec t.17.390 ; 25 juill. 1956, B.C. 589).
De même, la signature du président est absolument indispensable pour la validité de procès-verbal (Crim 29 juilli. 1947, S. 1949.1.40 Le Poittevin, Art. 296 n° 105 et les arrêts cités RéP. crim., Vo Cour d'assises, par Af Ag, n0 428).
L'art. 453 du dahir du 1er chaabane 1378 (10 févr 1959) formant Code de procédure pénale prescrit actuellement que « les formalités édictées à l'article précédent doivent « être constatées par un procès-verbal qui est signé par l'accusé, le président et le greffier « Si l'accusé ne sait ou ne veut pas signer, le procès- verbal an fait mention.
« Ces formalités doivent être observées à peine de nullité de la procédure ultérieure. « Ces nullités ne sont pas couvertes par le silence de l'accusé dont les droits sont conservés « et qui peut les faire valoir, même après l'arrêt sur le fond ».
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