Cassation sur le pourvoi formé par la « Royale Marocaine d'Assurances » contre un jugement correctionnel partiellement infirmatif, rendu le 4 avril 1957 par le tribunal de première instance de Casablanca, condamnant par défaut Abdelkader ben Ac à un emprisonnement avec sursis et à une peine d'amende pour homicide et blessures involontaires et allouant des dommages-intérêts aux parties civiles en substituant pour leur paiement la « Royale Marocaine d'Assurances » à son assuré.
La Cour,
Attendu que le jugement attaqué du 4 avril 1957, qui avait statué par défaut à l'encontre d'Abdelkader ben Ac cité à. Curateur, a été notifié audit curateur le 5 juillet 1957 ; qu'en ce qui concerne l'action civile, cette notification a fait courir le délai d'opposition prévu au paragraphe premier-de l'article 187 du Code d'instruction criminelle ; qu'ainsi le jugement correctionnel attaqué est devenu définitif en ses dispositions relatives aux intérêt civils (1)
; que satisfait aux exigences de l'article 39 du dahir du 29 septembre 1957, le pourvoi qui est dirigé contre lesdites dispositions civiles définitives ; que tel est l'objet du présent pourvoi, qui, limité par la qualité de son auteur, ne saurait permettre à la Cour suprême d'exercer son contrôle qu'à l'égard de la responsabilité et des intérêts civils ;
(1)Solution maintenue depuis la mise en vigueur du Code de procédure pénale du 1er chaabane 1378 (10 février 1959), malgré les légères différences de rédaction entre les articles 372, 373 et 374 du Code de procédure pénale et 187 du Code d'instruction criminelle.
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, pris de la violation des articles 319 et 320 du Code pénal, 32 et 8 de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953, 1 et 3 du Code d'instruction criminelle, 77 et 78 du dahir des obligations et contrats, 189 du dahir de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
Attendu que tout jugement doit à peine de nullité contenir les motifs propres à justifier la décision ;
Attendu que pour retenir la responsabilité d'Abdelkader ben Ac, le jugement d'appel attaqué s'est borné à adopter les motifs du jugement du tribunal de paix de Casablanca-Sud du 3 octobre 1956 ; que ce dernier jugement affirme uniquement que l'inculpé s'est bien rendu coupable des faits qui lui sont reprochés et que les actions civiles dirigées contre lui sont fondées en leur principe, sans fournir la moindre indication permettant de constater la matérialité et de caractériser les éléments constitutifs des faits dommageables, prohibés par la loi pénale, qui ont servi de fondement à la responsabilité civile et justifié la condamnation au paiement des dommages-intérêts ;
Qu'ainsi la Cour suprême n'est pas mise en mesure d'exercer son contrôle ;
PAR CES MOTIFS
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens,
Casse et annule entre les parties, mais en ce qui concerne les actions civiles seulement, le jugement rendu le 4 avril 1957 par le tribunal de première instance de Casablanca ;
Renvoie la cause et les parties devant le tribunal de première instance de Casablanca autrement composé, pour que, dans la mesure de la cassation limitée intervenue il soit à nouveau statué, conformément à la loi, sur l'appréciation de la faute et des intérêts civils ;
Président : M. Ab. - Rapporteur M. Azoulay, - Avocat général : M. Ruolt. Avocat : Me Marc Cohen.n.
Observations
I.- SUR LE PREMIER POINT: Dans le sens de l'arrêt ci-dessus rapporté et sur la base des dispositions de l'art. 187 C. instr. crim. aujourd'hui abrogé, V. : Crim. 18 janv. 1901, D.P. 1901.1.51, rapport de M. Ad 27 févr. 1908, D.P. 1908.1.257 7 juill. 1943, D.A. 1943.70 14 janv.1949, D. 1949.106 15 nov. 1951, B.C. 305 ; le Poittevin, Art. 187. n° 130Rép. crim. V° Jugement par défaut, par Aa Ae, n° 101.
Il. - SUR LE DEUXIEME POINT : En ce qui concerne l'obligation pour les Juges du fond de motiver leurs décisions, V. la note sous Cour supr., Crim., Arrêt n° 6 du 25 mars 1958.
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