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15/01/1959 | MAROC | N°P179

Maroc | Maroc, Cour suprême, 15 janvier 1959, P179


Texte (pseudonymisé)
Cassation sur le pourvoi formé par Buysschaert contre un jugement confirmatif rendu le 22 février 1958 par le tribunal de première instance de Casablanca, qui l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis pour homicide involontaire, 1200 francs d'amende pour omission de ralentir ou arrêter son véhicule et à des dommages-intérêts envers les parties civiles.
La Cour,
SUR LE MOYEN DE CASSATION PREALABLE pris du défaut de motifs en ce que la décision attaquée ni celle de première instance n'ont vérifié l'existence des faits constitutifs du défaut de maîtrise et de l'ho

micide involontaire ;
Vu les articles 163 et 195 du Code d'instruction ...

Cassation sur le pourvoi formé par Buysschaert contre un jugement confirmatif rendu le 22 février 1958 par le tribunal de première instance de Casablanca, qui l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis pour homicide involontaire, 1200 francs d'amende pour omission de ralentir ou arrêter son véhicule et à des dommages-intérêts envers les parties civiles.
La Cour,
SUR LE MOYEN DE CASSATION PREALABLE pris du défaut de motifs en ce que la décision attaquée ni celle de première instance n'ont vérifié l'existence des faits constitutifs du défaut de maîtrise et de l'homicide involontaire ;
Vu les articles 163 et 195 du Code d'instruction criminelle et 13, 5°, du dahir du 2 rebia I 1377 (27 septembre 1957) ;
Vu les mémoires produits ;
Attendu que toute décision de justice doit contenir les motifs propres à la justifier ;
Attendu que Buysschaert était poursuivi, tout d'abord pour avoir omis de ralentir ou même d'arrêter le mouvement de son véhicule alors qu'en raison des circonstances de temps et de lieu, il pouvait être une cause d'accident, contravention prévue par l'article 32 de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953 ;
Attendu que pour déclarer cette contravention établie, le jugement de première instance, confirmé purement et simplement sur ce point par la décision attaquée, se borne à énoncer, outre des considérations générales sur la conduite des automobiles «que les gendarmes ont
constaté que le véhicule conduit par Ae avait laissé une trace de freinage débutant sur le bas-côté gauche à la limite de ce dernier et de la chaussée pour s'arrêter finalement après avoir parcouru 57 m 15 » ;
Attendu que cette constatation qui permet seulement de conclure que le véhicule roulait avant l'accident à une vitesse élevée ne comporte aucune indication relative aux circonstances de temps et de lieu qui rendaient nécessaire le ralentissement du mouvement du véhicule ou même son arrêt ;
Que la Cour suprême ne se trouve pas en conséquence, en mesure de vérifier la légalité de la décision de condamnation prononcée pour la contravention ;
Que par suite cette décision manque de base légale ;
Attendu, sur le délit d'homicide involontaire reproché en second lieu à Buysschaert, que pour déclarer cette infraction établie, la décision de première instance confirmée purement et simplement sur ce point par la décision attaquée se borne à énoncer «que cet accident et conséquemment le décès de Le Corriard ont été causés par l'imprudence, la maladresse et l'inobservation des règlements de la part de Buysschaert";
Attendu qu'une telle motivation qui ne comporte aucune indication sur les fautes d'imprudence et de maladresse peut néanmoins être considérée comme suffisante en ce que pour caractériser l'inobservation des règlements reprochés à Buysschaert elle se réfère implicitement aux motifs de la condamnation prononcée contre lui pour la contravention de défaut de ralentissement ou d'arrêt du mouvement de son véhicule ;
Attendu cependant qu'elle ne permet pas à la Cour suprême de vérifier la légalité de la décision intervenue dès lors que se trouve constaté le manque de base légale de la décision de condamnation prononcée pour la contravention ;
D'où il suit que la condamnation sanctionnant le délit d'homicide involontaire manque également de base légale ;
PAR CES MOTIFS
et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen,
Casse et annule entre les parties le jugement rendu le 22 février 1958 par le tribunal de première instance de Casablanca ; pour être statué à nouveau les renvoie devant le tribunal de première instance de Casablanca autrement composé ;
Président : M. Deltel. Rapporteur M. Zehler. Avocat général : M. Ruolt. Avocats : MM. de Traversay, El Ac, Lorrain et Cagnoli.
Observations
I. - SUR LE PREMIER POINT : En ce qui concerne l'obligation, pour les juges du fond, de motiver leurs décisions, V. la note sous Cour supr., Crim, Arrêt n° 6 du 25 mars 1958.
Il résulte de l'arrêt ci-dessus rapporté que les juges du fond, qui prononcent une condamnation en application de l'art, 32 de l'arr. vis. du 8 joumada I 1372 (24 janv. 1953) sur la police de la circulation et du roulage, doivent, pour permettre à la Cour suprême d'exercer son contrôle et donner une base légale à leur décision, indiquer les circonstances de temps et de lieu qui rendent nécessaire le ralentissement du mouvement. du véhicule ou même son arrêt.
II - SUR LE DEUXIEME POINT: Les éléments constitutifs du délit d'homicide involontaire sont au nombre de trois : Il faut qu'il y ait :I°) un homicide ; 2°) une faute ; 3°) une relation de cause à effet entre la faute et l'homicide.
La faute retenue à la charge du prévenu peut être une maladresse, une imprudence, une inattention, une négligence ou une inobservation des règlements.
S'il appartient aux juges du fond de constater souverainement les faits d'où résulte la responsabilité d'un dommage, l'appréciation à laquelle ils se livrent en imprimant à ces faits le caractère légal d'une faute est soumise au contrôle de la juridiction de cassation. Il s'agit en effet d'une question de droit (Faye, n° 160 ; Ah Ab, La distinction du fait et du droit, nos 126 à 128 Rép. Pr, civ., V° Cassation, par Aa Ad, n° 1928 et les arrêts cités Rép. crim., V° Homicide, par Louis Saint-Laurens, n° 53 Mazeaud, t. 3, n° 2208 ; Lalou, nos 817 s. ; Savatier, t. I, nos 271, 359 s., 467 ; Civ. 8 déc.1947, J.C.P. 1948. II. 4081 et la note signée J.F.L.C. ; Sur le contrôle de la chambre criminelle, v. Ag Af, Du contrôle de la Cour de Cassation sur les éléments de la responsabilité civile, Thèse, Paris, 1942, pp. 21 à 36).


Synthèse
Numéro d'arrêt : P179
Date de la décision : 15/01/1959
Chambre pénale

Analyses

1° CIRCULATION - Non-adaptation de la vitesse aux circonstances - Défaut d'indication des circonstances de temps et de lieu rendant le ralentissement nécessaire - Manque de base légale.2° HOMICIDE INVOLONTAIRE - Eléments constitutifs - Faute - Inobservation des règlements - Imprudence - Maladresse.

1° Manque de base légale le jugement qui déclare établie une contravention de non adaptation de la vitesse aux circonstances, sans indiquer quelles circonstances de temps et de lieu rendaient nécessaires le ralentissement du mouvement du véhicule.2° Dès lors qu'aucune autre faute n'est relevée à l'encontre du prévenu, celui-ci ne peut-être déclaré coupable du délit d'homicide involontaire.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1959-01-15;p179 ?
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