187-58/59 5 mai 1959 1698
Manutention Marocaine c/ compagnie d'assurances «Transafrique » et autres.
Cassation d'un jugement du tribunal de paix de Casablanca-Nord du 19 mars 1958.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN ;
Vu l'article 73 du dahir de procédure civile ;
Attendu que les jugements des tribunaux de paix doivent être motivés et que des motifs dubitatifs ne sauraient leur servir de base ;
Attendu que, statuant d'une part sur une demande de paiement de la somme de 13774 francs représentant la valeur de marchandises importées par voie de mer et non livrées au destinataire, d'autre part sur la demande en garantie formée par le transporteur contre la «Manutention Marocaine», acconier, le jugement attaqué se borne à déclarer «que la demande paraît suffisamment justifiée par les pièces versées aux débats» et «qu'il ressort des pièces versées aux débats que la «Manutention Marocaine» doit relever et garantir les défendeurs des condamnations prononcées contre eux».
D'où il suit que cette décision, fondée en ce qui concerne la demande principale sur un premier motif dubitatif qui, n'étant complété ou précisé d'aucune manière, ne permet pas à la Cour suprême d'exercer son contrôle, manque de base légale ;
et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen,
PAR CES MOTIFS
Casse.
Président: M Mazoyer-Rapporteur: M Hauw-Avocat général: M CA B Ab, Walch, Chouraqui.
Observation
Le juge doit avoir le courage de ses opinions et ne pas hésiter a affirmer avec fermeté ce
qu'il croit être la vérité (v Mimin,Le style des jugements, n 124). Les motifs dubitatifs ne peuvent pas servir de base à une décision, à moins qu'ils ne soient-complétés ou précisés de quelque manière par les autres énonciations des juges. V Rép.Pr.Civ, V° Jugement, par Ac Aa, n 282 et les arrêts cités. Adde, parmi les arrêts les plus récents de la Cour de cassation française: emploi du terme «paraît» ne constituant pas un motif dubitatif en raison des autres énonciations de la décision-Civ I, 5 mai 1962, B 219 ; 14 Oct 1964, B 448 Civ II, 24 mars 1965 B 302 Civ III, 12 mai 1965, B. 308 ; emploi du terme «semble» ou du terme «parait» constituant un motif dubitatif faute d'énonciations complémentaires-Civ Il, 4 juin 1964, B 445 ; Civ III, 15 mars 1965, B 197.