Cassation sur le pourvoi formé par Aa Ad Aj Ad Ai, Ao ben Lahcen ben M'Hamed et Al Ad Ac Ad Af contre un jugement du tribunal criminel de Rabat du 16 avril 1959 qui les condamnés pour tentative de vol et meurtre à diverses peines de travaux forcés et à payer un franc de dommages-intérêts à Viscaino.
16 juillet 1959
Dossiers nos 3122 à 3124
La Cour,
Joignant les pourvois, vu leur connexité ;
SUR LE MOYEN UNIQUE de pourvoi, pris par Ao ben Lahcen ben M'Hamed du défaut de motifs, manque de base légale ;
Vu les articles Il du dahir sur l'organisation judiciaire du 9 ramadan 1331, 163 et 195 du Code d'instruction criminelle, 13, 41, 56 du dahir du 2 rebia I 1377 ;
Attendu que tout jugement appliquant une peine doit énoncer les motifs propres à justifier légalement la condamnation prononcée ;
Attendu que le jugement attaqué a déclaré les demandeurs coupables de meurtre, et de tentative de vol commis dans les conditions prévues et réprimées par les articles 304 et 396 du Code pénal ;
Que si en ce qui concerne le meurtre, ce jugement par une motivation d'un laconisme regrettable, constate succinctement les éléments de l'infraction tels qu'ils sont rédigés par le texte de loi appliqué, par contre il ne précise aucunement les faits et circonstances par suite
desquelles la tentative de vol manifestée par un commencement d'exécution, aurait été suspendue ou aurait manqué son effet ;
Qu'une telle insuffisance de motifs met la Cour suprême dans l'impossibilité d'exercer son contrôle ;
Qu'ainsi, et sans même relever la rédaction inexacte du jugement qui en fixant au 27 juin la date du meurtre et au 25 juin celle de la tentative de vol prive de base légale la circonstance aggravante de concomitance, il échet d'annuler le jugement attaqué ;
Attendu que la cassation intervenant sur le moyen présenté par un des accusés doit profiter aux co-accusés qui se sont pourvus, l'accusation portant sur des faits indivisibles auxquels ils ont tous pris part ;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule entre les parties le jugement rendu par le tribunal criminel de Rabat le 16 avril 1959 ;
Et pour être statué à nouveau conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant le même tribunal autrement composé ;
Président : M. Ae. - Rapporteur - M. Ab. - Avocat général : M. Ag. - Avocats : MM. Tsaros, Benatar, Luciani.
Observations
I. - Sur le premier point: Afin de permettre à la juridiction de cassation d'exercer son contrôle, les juges du fond doivent préciser les faits qui constituent, en matière de tentative, le commencement d'exécution et les circonstances par suite desquelles la tentative ci été suspendue ou a manqué son effet (Crim 3 juill. 1920, B.C. 298 20 mars 1924. B.C 137 31 oct. 1925, B.C. 297 5 févr. 1926 ; B.C. 44 ; 6 nov. 1930, B.C. 256 ; 10 mars 1932, BC. 68 ; 15 mai 1945, Gaz. Pal. 1946.1.255 ; Rép. Crim, V° tentative, par Am An Ap, n° 5 ; Nouv. Pép. V° tentative, n° 12 Garraud, I, n° 235 Garçon art. 2 et 3, nos 145 5. Notamment n° 149 Donnedieu de Vabres, nos 211 s. Bouzat, nos 192 s.).
Sur le manque de- base légale, v. la note sous Cour supr., Crim., arrêt n° 201 du 12 févr. 1959.
Il. - Sur le deuxième point : L'annulation prononcée en raison d'un grief personnel à l'un des accusés doit être étendue à Son coaccusé lorsque l'accusation porte sur un fait unique ou sur des faits indivisibles auxquels ils ont tous pris part. Il convient alors, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de prononcer une cassation totale. Le renvoi doit porter sur le tout (Crim. 13 mai 1905. 8.C. 238 20 nov. 1930, B.C. 271 ; 18 janvier 1935, B.C. 13 21 févr. 1936, B.C. 28 8 févr. 1940, B.C. 8 14 mai 5947, B.C. 130 ; 31 mars 1952, B.C. 94 ; 3 nov. 1953, B.C. 282 5 janv. 1956, B.C. 18 ; Rép. crim. V° Cassation. par Ak Ah, n° 380).
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