Cassation sur le pourvoi formé par la dame Bencheton-Landay contre un jugement correctionnel confirmatif du tribunal de première instance de Casablanca du 28 décembre 1958 qui a relaxé lévy- Bencheton prévenu de violences légères et s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de la partie civile.
24 décembre 1959
Dossier n° 2502
La Cour,
SUR LE MOYEN DE CASSATION, QUI EST PREALABLE , pris par le demandeur de la violation des articles 154, 163, et 176 du Code d'instruction criminelle, contrariété et défaut de motifs ;
Attendu que pour confirmer la décision de relaxe intervenue devant le tribunal de simple police, le jugement d'appel attaqué énonce «qu'il échet de préciser que c'est au bénéfice du doute que cette relaxe doit être prononcée » ;
Attendu qu'en substituant aux motifs du premier juge cette unique affirmation qui peut indifféremment se référer aux circonstances des faits incriminés ou à leur appréciation légale, le tribunal d'appel n'a pas révélé s'il estimait les faits insuffisamment caractérisés ou si, bien que caractérisés, ils ne lui apparaissaient pas constitutifs de l'infraction ; que par cette imprécision il n'a pas légalement justifié sa décision et n'a pas mis la Cour suprême en mesure d'exercer le contrôle qui lui est dévolu ;
Que dès lors, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen présenté par le demandeur, il échet de casser et annuler le jugement attaqué, mais uniquement en ce qui concerne les intérêts civils, à défaut de pourvoi du ministère public ;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule entre les parties, mais quant aux intérêts civils seulement, le jugement du tribunal de première instance de Casablanca en date du 22 décembre 1958 ; pour être statué à nouveau conformément à la loi, et dans la limite de la cassation intervenue, renvoie la cause et les parties devant le tribunal de première instance de Casablanca autrement composé.
Président : M. Ag. -Rapporteur : M. Ad. -Avocat général : M. Ab. -Avocats : MM. Melia, Foucherot et Schramm.
Observations
I.- Sur le premier point : V, la note sous cour supr., Crim., arrêt n° 201 du 12 févr 1959.
Les juges sont tenus d'expliquer les raisons pour lesquelles ils prononcent l'acquittement d'un prévenu. La seule affirmation "qu'il existe quelques doutes qui doivent profiter aux prévenus »ou « qu'un doute subsiste relativement aux fait qui sont imputés au prévenu"est insuffisante et ne permet pas de savoir si le juge du fond s'est déterminé pour des faisons de fait ou de droit (Le Poittevin, art. 191, nos 21 s. : Rép. Crim., V° Cassation, par Af Ae, n° 343 ; Le Clec'h, fasc. III, n° 282 ; Crim. 25 janv. 1877, B.C. 23, D. 1878. I. 45 ; 14 janvier 1898, B.C. II ; 24 nov. 1899, B.C. 336 ; 21 févr. 1914, B.C. 109 ; 8 déc. 1916, B.C. 278 ; 7 mai 1921, B.C. 206 ; 28 févr. 1931, B.C. 61 ; 19 oct. 1944, B.C. 166).
II. - Sur le deuxième point : L'art. 585 du dahir du 1er chaabane 1378 (10 févr. 1959) formant Code de procédure pénale, aujourd'hui applicable, prévoit que « la déclaration de pourvoi opère seule saisine de la Cour suprême. Cette saisine est limitée par l'objet du pourvoi et par la qualité de son auteur . Le pourvoi de la partie civile . est limité quant à son effet dévolutif aux dispositions relatives à l'action civile ». Sur cette règle, sous l'empire du C. instr. Crim., v. Rép. Crim., V° Cassation, par Af Ae, n° 257 ; Le Clec'h, fasc. II, n os 173 s.
Mais en cas de cassation, sur le seul pourvoi de la partie civile, d'un arrêt qui a admis à tort, et sans examen du fond, une exception de compétence ou de prescription, il y a lieu à renvoi pour être, statué non seulement sur l'action civile, mais aussi sur l'action publique non éteinte (Crim. 20 déc. 1930, B.C. 314, D.P. 1931. I. 133 et la note A.S. ; 1er juill. 1953, D. 1953. 574 et le rapport de M. Ac Aa). Il en est de même lorsqu'une décision de relaxe a été uniquement fondée sur la nullité de la citation délivrée à la requête de la partie civile (Crim. 25 juill. 1947, B.C. 190 ; 30 avr. 1949, B.C. 152).
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