Cassation sur les pourvois formés par Hue, la société nord-africaine Sicli et la compagnie d'assurances « La Concorde »contre un jugement, partiellement confirmatif, du tribunal de première instance de Casablanca, en date du 4 mai 1959, qui a condamné Hue, sous la responsabilité civile de la société Sicli et la substitution de la compagnie d'assurances « La Concorde » à assurer à Jérôme le service d'une rente d'accident du travail et d'une rente allouée à titre d'indemnité complémentaire, la compagnie d'assurances « La Nationale » obtenant le remboursement des prestations qu'elle avait dû servir à son assuré Jérôme.
21 janvier 1960
Dossiers n°3760 - 3772 - 3773
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION pris en sa première branche ;
Vue le dahir du 10 février 1959 instituant une Caisse de dépôt et de gestion ;
Attendu que des articles 14 et 25 du dahir précité il résulte qu'à compter du 1er janvier 1959 la Caisse de dépôt et de gestion est chargée d'assurer la gestion financière des capitaux des rentes d'accidents du travail constitués en vertu du dahir du 25 juin 1927 et de l'arrêté viziriel d'application du 13 novembre1943 ;
Attendu que par le jugement rendu en première instance le 10 décembre 1958, le tribunal de paix de Casablanca-Sud a condamné Hue, tiers responsable de l'accident du travail survenu à Jérôme, à constituer aux lieu et place de la compagnie d'assurances La Nationale, à la Caisse nationale des retraites le capital représentatif des rentes allouées à la victime :
Que cette disposition a été confirmée purement et simplement par la décision d'appel attaquée alors qu'à la date du 4 mai 1959 où celle-ci est intervenue, la constitution du capital représentatif de la rente d'accident du travail devait être effectuée à la Caisse de dépôt et de gestion ;
D'où il suit que les disposition sus-visées du dahir du 10 février 1959 ont été violées ;
et sur la seconde branche du même moyen ;
Vu les articles 98 du dahir formant Code des obligations et contrats et 7 (paragraphes f, g et I ) du dahir du 25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail ;
Attendu que par la décision confirmative attaquée Hue, tiers déclaré entièrement responsable de l'accident du travail dont a été victime Jérôme, a été condamné à constituer le capital représentatif des rentes d'accident du travail et supplémentaire allouées à celui-ci et en outre des accidents du travail :
Attendu qu'en condamnant ainsi le prévenu Hue à servir à la victime une rente annuelle et viagère au titre des accidents du travail en sus de la constitution du capital nécessaires au service de cette rente, le tribunal a accordé cumulativement sous deux formes différentes la réparation du même préjudice et a ainsi violé les dispositions visées au moyen ;
PAR CES MOTIFS
et sans qu'il soit besoin dès lors d'examiner les autres moyens, casse et annule entre les parties le jugement rendu le 4 mai 1959 par le tribunal de première instance de Casablanca ;
Pour être statué à nouveau conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant le tribunal de première instance de Casablanca autrement composé.
Président : M. Ad. -Rapporteur : M. Ac. -Avocat général : M. Aa. -Avocats : MM Cagnoli, Laporte, Pacot.
Observations
I -Sur le premier point : Le dahir du 1er chaabane 1378 (10 février 1959 ) a institué une « Caisse de dépôt et de gestion » et depuis le 1er janvier 1960n, la « Caisse nationale française d'assurances sur la vie », qui était habilitée en vertu de l'art. 7 du dahir du 25 hija 1345 (25 juin 1927 ) relatif à la réparation des accidents du travail, à recevoir le capital constitutif des rentes, a cessé ses opérations au Maroc (V. Ae Ab,législation marocaine du travail, 2e édit, tome 2, P.S.A. 49 ).
II -Sur le second point : Aux termes de l'art. 7, 1, du dahir du 25 juin 1927, « les rentes fixées par (ce dahir ) . ainsi que les rentes supplémentaires, devront, dans les deux mois de la décision judiciaire définitive ou de l'accord des parties, être constituées par les débiteurs » à la Caisse de dépôt et de gestion.
Comme la constitution du capital par le débiteur a pour objet de permettre à cet organisme
de payer la rente à la victime, on ne peut, sans accorder sous deux formes différentes la réparation du même préjudice, condamner l'auteur de l'accident à verser lui-même la rente et à constituer le capital nécessaire à son service.
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