Cassation sur le pourvoi formé par Ac contre un jugement correctionnel confirmatif, du 22 mars 1960 qui l'a condamné à 10000 francs d'amende pour vente de boissons alcoolisées à des Marocains musulmans et a ordonné la fermeture définitive de son débit de boissons.
25 juillet 1960
Dossier n°5549
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, pris de la « violation de l'article 586 duCode de procédure pénale (dahir du 10 février 1959 ), défaut de motifs, manque de base légale, en ce que, tel qu'il est motivé, le jugement attaqué ne permet pas à la Cour suprême d'exercer son contrôle sur le point de savoir si la culpabilité d'Espinoza a été régulièrement déduite, et si ce dernier doit être considéré en doit récidiviste en raison de l'imprécation du casier judiciaire versé au dossier. » ;
Attendu que le tribunal, saisi d'un procès-verbal faisant foi jusqu'à preuve contraire et d'un casier judiciaire constatant une précédente condamnation, n'avait aucune obligation d'ordonner un complément d'enquête ; Qu'il incombait au prévenu, en justifiant du paiement de l'amende, d'établir que cette condamnation aurait été amnistiée ;
Mais attendu que les juges répressifs doivent motiver leur décision tout à la fois sur les faits délictueux, qui forment l'objet de la poursuite, et sur la qualification qu'il convient de donner à ces faits, Que la simple énonciation « que de l'information officieuse et des débats il résulte la preuve que le prévenu s'est rendu coupable des faits qui lui sont reprochés » ne constitue pas un motif suffisant pour justifier une décision judiciaire ; qu'elle ne permet pas à la Cour suprême de vérifier la légalité de la qualification donnée aux faits de la cause, alors que ceux-ci ne sont pas spécifiés, et de s'assurer ainsi que la peine a été légalement appliquée
Attendu que ni le jugement d'appel attaqué, ni la décision du premier juge, n'ont caractérisé les faits imputés au prévenu ; Qu'ils se sont bornés à affirmer sa culpabilité ; Que confirmant, par simple adoption de motif, un jugement du tribunal de paix, qui avait infligé à Ac une condamnation pénale pour vente de boissons alcoolisées à des Marocains musulmans, sans fournir la moindre indication sur les circonstances de l'infraction, le tribunal de première instance de Casablanca a violé les dispositions des articles 347 et 352 du Code de procédure pénale et n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule le jugement rendu par le tribunal de première instance de Casablanca, le 22 mars 1960, et pour être statué à nouveau conformément à la loi, renvoie la cause et le demandeur devant le tribunal de première instance de Casablanca autrement composé.
Président : M. Af. - Rapporteur : M. Ab. - Procureur général : M. Ad. - Avocat : Me Khiat.t.
Observations
I.- Sur le second point : V. la note sous Cour supr., Crim., arrêt n°201 du 12 févr. 1959. L'adoption, par la juridiction d'appel, des motifs du premier juge ne justifie légalement la décision que si les motifs adoptés sont réguliers et complets (V. à ce sujet la note sous Cour supr., Crim., arrêt n°462 du 3 déc. 1959 ).
La simple énonciation « que de l'information officieuse et des débats il résulte la preuve que le prévenu s'est bien rendu coupable des faits qui lui sont reprochés » ne constitue pas une motivation suffisante puisque le jugement de condamnation ne précise pas les faits dont le prévenu est déclaré coupable (v. Le Poittevin, art. 195, n os
5s. ; Rép. Crim., V° Jugement, par Aa Ae, n°211 ; Le Clec'h, fasc. III, nos 260 s. ; Crim. 6 mars 1930, B.C. 71 ; 6 mai 1932, B.C. 119 ; 6 mai 1933, B.C. 103 ).
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