10 novembre 1960
Dossier n° 6281
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, pris de la violation des formes légales « en ce
que l'arrêt entrepris ne mentionne pas la formule d'exécution qui doit figurer sur toute décision judiciaire » ;
Attendu que la formule exécutoire ne doit être apposée que sur l'expédition de la décision de justice délivrée à la partie qui a obtenu la condamnation, et destinée à en poursuivre l'exécution ;
Que la pièce dont la forme est critiquée par le demandeur ne constitue qu'une simple expédition de la décision de justice, jointe au dossier en exécution des dispositions de l'article 590 du Code de procédure pénale, sans rapports avec l'exécution de la décision, et qui ne devait pas en conséquence comporter la formule exécutoire ;
Qu'ainsi le moyen doit être rejeté ;
SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION, pris du défaut de motifs, en ce que l'arrêt
attaqué se serait borné, par des motifs vagues et généraux, à confirmer la décision des premiers juges, de sorte que l'inexistence de motifs pertinents permettant à la Cour suprême d'exercer son contrôle équivaudrait à un défaut de motifs ;
Attendu que les moyens de cassation doivent être énoncés en termes permettant de déterminer les griefs précis formulés contre la décision attaquée ; qu'en s'abstenant de fournir la moindre indication contre ceux des faits ou des points discutés qui, selon lui, auraient été omis par la Cour
d'appel, le demandeur n'a pas mis la Cour suprême en mesure de connaître la nature et la portée de ses griefs et par suite de les examiner ; qu'en conséquence le moyen tel que formulé ne saurait être accueilli ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, pris de la violation de la loi, en ce que l'arrêt attaqué aurait retenu à la charge du prévenu le délit de fuite, alors qu'ayant ignoré qu'il avait commis un homicide involontaire, il ne pouvait, par suite, avoir tenté d'échapper à la responsabilité qui pouvait lui incomber ;
Mais attendu que les juges de première instance et d'appel ont fondé leur décision sur l'ensemble des éléments de preuve fournis par l'enquête et les débats ; qu'ils en avaient la libre appréciation, et qu'une telle appréciation, lorsque, comme en l'espèce, elle ne contient ni violation de la loi ni contradiction, relève uniquement de la conscience des juges du fond et échappe au contrôle de la Cour suprême ;
Qu'en conséquence, le tribunal et la Cour, ayant par leurs constatations et appréciations souveraines, légalement justifié leur décision, le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président : M Ac . - Rapporteur : M. Ab . - Avocat général : M Ruolt - Avocats : Me Benatar.r.
Observations
I.- Sur le premier point : L'art. 2 du dahir du 21 ramadan 1376 (22 avril 1957), relatif à l'organisation judiciaire du Royaume du Maroc et à la formule exécution, prescrit que « les expéditions des arrêts, jugements et ordonnances, mandats de justice, ainsi que les grosses et expéditions des contrats et de tous autres actes susceptibles d'exécution forcée, seront intitulés ainsi qu'il suit : « Empire chérifien (Royaume du Maroc) ». « Au nom de S.M.. le Roi ». Ils seront terminés par la formule suivante :
« En conséquence, S.M. le Roi mande et ordonne à tous agents sur ce requis de mettre ledit arrêt (ou ledit jugement, etc.) à exécution ; aux procureurs et avocats généraux, aux procureurs commissaires du gouvernement près les diverses juridictions d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte, lorsqu'ils en seront légalement requis.
« En foi de quoi, le présent arrêt (ou jugement, etc.) a été signé par . ».
Par l'arrêt ci-dessus rapporté, la Chambre criminelle confirme sa jurisprudence (Arrêt n° 307 du
28 mai 1959, Rec. crim . t. 1. 82) aux termes de laquelle la formule exécutoire prévue par le dahir susvisé ne doit être apposée que sur l'expédition de la décision de justice délivrée à la partie qui a obtenu la condamnation et destinée à en poursuivre l'exécution (Comp. Rép. pr. civ., V°Expédition et grosse, par Af Ae, nos 44 et 56).
II.- Sur le deuxième point : La Chambre criminelle a déjà décidé que le demandeur doit énoncer ses moyens de cassation en des termes permettant de déterminer les griefs précis formulés contre la décision attaquée (V. les arrêts nos
598 du 31 mars 1960, Rec. crim.t. 1. 258 et 685 du 30 juin 1960, ibid. p. 316 ; en ce sens : Faye, n° 203; Rép. pr. civ. , V° Cassation, par Aa Ad, nos 562 s. ; Soc. 10 janv. 1948, Bull. Soc. n° 35, p. 64 ; 19 févr. 1948, Bull. Soc. n° 192, p. 209 ; 30 juill. 1948,
Bull. Soc. n° 821, p. 844 ; 26 nov. 1948, Bull. Soc. n° 974, p. 1031 ; 12 mai 1949, Bull . soc. n° 403, p. 527 ; Com. 25 juin 1957, Bull. Com 1957. 3. 171 ; 29 oct. 1958, ibid., 1958. 3. 311 ; Soc. 2. Juill. 1959, Bull. Soc. 1959. 4. 687).
III. -Sur le troisième point : V. la note, septième point, sous l'arrêt n° 726 du 27 oct. 1960.