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13/03/1962 | MAROC | N°P1066

Maroc | Maroc, Cour suprême, 13 mars 1962, P1066


Texte (pseudonymisé)
13 mars 1962
Dossier n°8891
La Cour ,
Vu le dahir du 25 rebia II 1378 (8 novembre 1958) relatif à l'extradition des étrangers et l'article 51 du dahir 2 rebia I 1377 (27 septembre 1957) attribuant compétence à la Chambre criminelle de la Cour suprême pour statuer sur toute demande d'extradition;
Vu la lettre de M. le Ministre de la Justice en date du 20 septembre 1961 portant transmission de la demande d'extradition adressée au ministère des affaires étrangères par le Gouvernement de la République Italienne;
Vu les procès-verbaux d'interrogatoire dressés les 31 mai

1961 par le procureur du Roi prés le tribunal de première instance d'Oujda ...

13 mars 1962
Dossier n°8891
La Cour ,
Vu le dahir du 25 rebia II 1378 (8 novembre 1958) relatif à l'extradition des étrangers et l'article 51 du dahir 2 rebia I 1377 (27 septembre 1957) attribuant compétence à la Chambre criminelle de la Cour suprême pour statuer sur toute demande d'extradition;
Vu la lettre de M. le Ministre de la Justice en date du 20 septembre 1961 portant transmission de la demande d'extradition adressée au ministère des affaires étrangères par le Gouvernement de la République Italienne;
Vu les procès-verbaux d'interrogatoire dressés les 31 mai 1961 par le procureur du Roi prés le tribunal de première instance d'Oujda et le 17 juin 1961 par le procureur du Roi prés le tribunal de première instance de Rabat;
Vu l'arrêt n°918 du 21 juillet 1961 par lequel la Chambre criminelle de la Cor suprême a ordonné la mise en liberté provisoire de B.sous caution de 500 dirhams;
Attendu que B. a été arrêté le 23 mai 1961 en vertu d'un télégramme Interpole contenant demande d'arrestation provisoire en date du même jour, émanant des autorités judiciaires italiennes, pour l'exécution d'un jugement de la Cour d'assises d'Apuania (Italie) en date du 26 mai 1943 le condamnant à dix années de réclusion pour tentative de meurtre, à six années de la même peine pour viol réitéré, à trois mois d'emprisonnement pour détention d'un revolver sans déclaration à l'autorité et à trois mois d'emprisonnement et 1000 lires d'amende pour port abusif d'une arme;
Attendu qu'au cours de son interrogatoire par le procureur du roi prés le tribunal de première instance De Rabat, b.non seulement n'a pas contesté l'existence du jugement du 26 mai 1943, mais encore a précisé que cette décision avait été rendue contradictoirement et qu'il avait effectué environ dix-sept mois d'emprisonnement et avait été libéré fortuitement à la suite d'opérations de guerre;
Qu'à l'audience du 28 septembre 1961, b.ayant déclaré ne point consentir à être extradé et ayant soutenu que les peines prononcées contre lui étaient prescrites, la Chambre criminelle a ordonné un supplément d'information;
Que ce supplément d'information ayant été effectué, la Cour est en mesure d'examiner utilement la demande dont elle est saisie;
Attendu que la demande d'extradition concernant B., né le.à.a été présentée au Gouvernement marocain dans les formes prévues pas l'article 9 du dahir du 25 rebia II 1378 (8 novembre 1958);
Attendu que les faits pour lesquels les condamnations ont été prononcées par la Cour d'assises d'Apuania , prévus et punis par les articles 56, 575, 577 , 81, 519, 542, 2, 697 et 699 du Code pénal italien, tombent également au Maroc sous le coup de la loi pénal et sont prévus et réprimés de peines
criminelles et délictuelles par les articles 2, 295, 304, 332, 333 du Code pénal, rendu applicable par le dahir du 12 août 1913, et par les articles 15, 19 et 30 du dahir du 18 moharrem 1356 (31 mars 1937);
Attendu que B.n'est pas de nationalité marocaine et a été trouvé sur le territoire du Royaume; que les infractions pour lesquelles les condamnations ont été prononcées ont été commises sur le territoire de l'Etat requérant par un sujet de cet Etat; que le jugement de condamnation concernant B. a été produit en expédition authentique et renferme, avec l'exposé de la cause, l'indication précise des faits et de leur dates; que les infractions, qui remplissent au regard de la loi marocaine les conditions exigées par l'article 4 du dahir du 25 rebia II 1378 (8 novembre 1958), ne présentent pas un caractère politique et qu'il ne résulte pas des circonstances de la cause que l'extradition soit demandée à des fins politiques;
Attendu que B.soutient que les peines prononcées contre lui sont prescrites;
Attendu qu'aux termes de l'article5, 5° du dahir susvisé du 25 rebia II 1378, l'extradition n'est pas accordée lorsque d'après les lois de l'Etat requérant ou celles de l'Etat requis le prescription de la peine s'est trouvé acquise antérieurement à l'arrestation de l'individu réclamé;
Qu'en vertu des dispositions des articles 689, 690 du Code de procédure pénale marocain, les peines criminelles se prescrivent par vingt années grégoriennes, les peines délictuelles par cinq années et les peines contraventionnelles par deux années révolues, à compter du prononcé de la condamnation;
Qu'en application de l'article 172 du Code pénale italien , la peine de la réclusion s'éteint par l'expiration d'un délai égal au double de la peine infligée, que le délai court du jour où la condamnation est devenue irrévocable et que, dans le cas de concours d'infractions , on a égard, pour l'extinction de la peine, à chacune d'elles, même si les peines ont été infligées par la même décision;
Qu'aux termes de l'article 173 du même Code, les peines d'emprisonnement ou d'amende se prescrivent par un délai de cinq ans et que si, en même temps que la peine de l'emprisonnement est infligée une peine d'amende de police, on tient compte, pour l'extinction de l'une et de l'autre peine, seulement de l'expiration du délai fixé pour l'emprisonnement;
Attendu que la prescription des condamnations prononcées contre B. a commencé à courir le 28 novembre 1945, date à laquelle la décision de la Cour d'assises d'Apuania est devenue irrévocable par le rejet du recours formulé par le condamné devant la Cour suprême de cassation de Rome;
Attendu que la peine de dix années de réclusion prononcée pour tentative de meurtre n'est prescrite ni selon le droit italien ni selon le droit marocain, un délai de vingt ans ne s'étant pas écoulé depuis le 28 novembre 1945;
Attendu que B. a été condamné le 22 juin 1935 par le tribunal de Massa à une année de réclusion pour mauvais traitements à sa famille;
Que cette infraction n'est cependant pas, au sens des articles 99 et 101 du Code pénal italien, de même nature que le viol réitéré en répression duquel six années de réclusion ont été prononcées par la Cour d'assises d'Apuania;
Que B. n'étant pas, de ce fait, récidiviste, le dernier alinéa de l'article 172 du même Code ne saurait recevoir application en l'espèce;
Qu'en conséquence la peine de six années de réclusion infligée pour viol réitéré se trouve prescrite, plus de douze ans s'étant écoulés depuis le 28 novembre 1945;
Attendu, enfin , que les peines d'emprisonnement et d'amende prononcées par la Cour d'assises d'Apuania sont également prescrites par l'expiration d'un délai de dix ans à compter de la date à laquelle la décision est devenus irrévocable;
Attendu que toutes les conditions légales exigées se trouvant réunies, la Cour ne peut qu'émettre
un avis favorable à la demande d'extradition, mais uniquement en ce qui concerne la peine de dix années de réclusion prononcée pour tentative de meurtre, qui seule n'est pas prescrite;
PAR CES MOTIFS
Emet un avis favorable à la demande d'extradition, mais uniquement en ce qui concerne la peine de dix années de réclusion prononcée contre B. pour tentative de meurtre;
Emet un avis défavorable à la dite demande en ce qui concerne les autres condamnations pénales infligées par la Cour d'assises d'Apuania le 26 mai 1943.
Président: M. Ac. - Rapoorteur: M. Ab. - Avocat général: M. Aa. - Avocat: Me Phéline.
Observations
Aux termes de l'art. 5 dh.8 nov.1958 relatif à l'extradition des étrangers: « l'extradition n'est pas accordée: .5° lorsque les lois de l'Etat requérant ou celles de l'Etat requis, la prescription de l'action s'est trouvée acquis antérieurement à la demande d 'extradition ou la prescription de la peine antérieurement à l'arrestation de l'individu réclamé et d'une façon générale toutes les fois que l 'action publique de L'Etat requérant sera éteinte ».
B., qui avait fait l'objet d'une demande d'extradition de la part du Gouvernement de la République italienne, avait soulevé devant la Chambre criminelle de la Cour suprême une exception de prescription de la peine.
Dans son arrêt longuement motivé, la Chambre criminelle, faisant application de l'art.5 précité, a examiné cette exception d'après les lois de l'Etat requérant et d'après celles de l'Etat requis. Elles n'a émis un avis favorable à l'extradition qu'en ce qui concerne la peine qui ne se trouvait prescrite ni selon la loi marocaine ni selon la loi italienne.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1066
Date de la décision : 13/03/1962
Chambre pénale

Analyses

Extradition - Conditions de fond de l'extradition - Prescription de la peine.

Aux termes de l'article 5, 5°, du dahir du 8 novembre 1958, l'extradition n'est pas accordée lorsque d'après les lois de l'Etat requérant ou celles de l'Etat requis la prescription de la peine s'est trouvée acquise antérieurement à l'arrestation de l'individu réclamé.Lorsque l'une des peines cumulativement prononcées se trouve prescrite d'après les lois de l'Etat requérant la Chambre criminelle émet un avis défavorable à la demande d'extradition en ce qu'elle concerne cette peine.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1962-03-13;p1066 ?
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