59-64/65 17 novembre 1964 15 073
Aa Ab c/Gandia José.
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 19 décembre 1962.
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE PRIS EN SES DIFFERENTES BRANCHES :
Attendu que le juge, saisi en vertu de l'article 259 du dahir des obligations et contrats, ne peut différer le prononcé de la résolution d'un contrat non soumis à l'application d'une loi d'exception et dont les clauses essentielles n'ont pas été respectées;
Attendu qu'en la partie de son dispositif intéressant le pourvoi l'arrêt attaqué a rejeté la demande le Louis Vautrin en résolution de la vent immobilière intervenue entre lui et Ad Ac, et fondée sur l'inexécution des obligations du preneur, au motif que cette inexécution n'était que partielle et que la résolution du contrat entraînait pour Gandia «de graves conséquences »;
Or attendu qu'il ressort des énonciations préalables de l'arrêt que la vente, parfaite dès le 13 décembre 1956, fixait un prix de 15 000 000 de francs payable, dès l'accord de la créancière hypothécaire sur le montant de sa créance, partie pour ce montant entre ses mains contre mainlevée, et le solde directement entre celles du vendeur, et que le 20 décembre 1956, la première somme ayant été arrêtée à 10 500 000 francs, la créancière étant prête à donner mainlevée, le solde du prix, soit 4 500 000 francs, tel que porté à la connaissance de Gandia, était immédiatement exigible, que celui-ci, «au lieu de s'acquitter de ses obligations adopta une positon a priori injustifiable », offrant pour solde une somme moindre à Vautrin, qu'enfin le 16 février 1957 il se rendit, proprio motu, cessionnaire de la créance hypothécaire; que partant de ces constatations et appréciations la Cour d'appel n'a pu, sans violer par fausse application l'article 259 du dahir des obligations et contrats, statuer comme elle l'a fait, dès lors qu'en résultait l'inexécution totale par Gandia de ses obligations portant sur le paiement du prix, élément essentiel de la vente, ce qui n'autorisait pas les juges du second degré à avoir recours à des considérations d'équité et d'opportunité;
D'où il suit que le moyen est fondé;
PAR CES MOTIFS
Casse.
Président : M. Bourcelin.__Rapporteur : Mme Houel.__Avocat général : M. Guillot.__Avocats : MM. Pajanacci, de Monaghan.
Observations
Lorsque l'une des parties contractantes n'exécute pas son obligation, son cocontractant peut, soit poursuivre l'exécution du contrat, soit en demander la résolution. Sauf convention spéciale prévue à l'art. 260 C. obl. contr. ou disposition légale particulière, «la résolution du contrat n'a pas lieu de plein droit mais doit être prononcée en justice» (art. 259, al. 4, C. obl. contr.). Il en résulte que le juge doit apprécier l'importance de l'inexécution reprochée par le demandeur à son adversaire et que, si cette inexécution lui paraît seulement partielle, il peut refuser de prononcer la résolution (v. Rép. civ. V° Contrats et conventions, par Af Ae, n. 155 et s.); mais cette appréciation est soumise au contrôle de la Cour suprême en fonction des constatations de fait de la décision attaquée.