Abstract
Partage
Communauté. Partage en nature. Impossibilité. Vente par licitation.
Vente
Vente entre époux - Loi n. 891 du 6 Juillet 1970 - Formalités non remplies - Nullité -Conséquence.
Résumé
1. Si le partage en nature est la règle, il convient de procéder par licitation des immeubles dans le cas où ils ne peuvent être commodément partagés ou attribués.
2. Le non respect des formes prévues par la loi n° 891 du 6 juillet 1970 pour un contrat de vente entre époux entraîne la nullité de la vente et oblige l'époux acquéreur à rapporter le bien vendu à la communauté.
Motifs
Le Tribunal,
Attendu que par jugement en date du treize mai mil neuf cent soixante et onze prononçant le divorce d'entre les époux M.-T., le Tribunal de céans a confié la mission de procéder à la liquidation du régime matrimonial des époux à Maître Jean-Charles Rey, notaire, lequel a dressé le dix novembre mil neuf cent soixante et onze un procès verbal de difficulté et de non-conciliation ;
Attendu que suivant exploit de Maître Marquet, huissier, en date du treize mars mil neuf cent soixante-douze, la dame T. a assigné le sieur M. pour voir désigner Maître Rey notaire aux fins de procéder sur enchères réservées aux deux ex-époux à l'attribution du domicile conjugal, et de dresser inventaire des biens mobiliers qui seront vendus par Me Marquet, huissier, aux enchères publiques et le prix versé en l'Etude de Me Rey qui procèdera au partage définitif ; et pour voir condamner M. au paiement de dix mille francs au titre d'une indemnité d'occupation la dame T. depuis son départ ayant dû se loger à ses frais alors que M. demeurait au domicile conjugal propriété commune, et de deux mille francs à titre de dommages-intérêts outre les dépens ;
Attendu que par conclusions en réponse M. demande que lui soit donné acte de ce qu'il ne s'oppose pas à ce que l'appartement, ancien domicile conjugal, dont il est avec la dame T. co-propriétaire indivis, à Monte-carlo soit vendu aux enchères publiques en précisant cependant qu'elles seront ouvertes à toute personne ;
Qu'un inventaire des objets mobiliers propriété commune des ex-époux, partageables en nature, soit dressé par le notaire y compris le véhicule automobile Alfa Roméo et les objets que la dame T. a emportés au moment où elle a abandonné le domicile conjugal et qu'il soit procédé à leur partage ;
Que la dame T. soit déboutée de sa demande en paiement de 10 000 francs à titre d'indemnité d'occupation et de deux mille francs à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que M. forme une demande reconventionnelle tendant à obtenir la condamnation de la dame T. à lui payer la somme de six mille trois cent dix-sept francs quarante-deux centimes, représentant la moitié de la rente viagère ainsi que des frais et charges de copropriété pour l'appartement commun dont il a assumé seul depuis novembre mil neuf cent soixante-dix le règlement intégral, somme portée par conclusions additionnelles du dix-neuf juin mil neuf cent soixante-douze à sept mille cent soixante-sept francs cinquante-huit centimes, outre le remboursement d'une somme de mille deux cent cinquante francs représentant l'indemnité indûment perçue par la dame T. en dédommagement de dégâts matériels subis par le véhicule Alfa Roméo en octobre mil neuf cent soixante-dix ;
Attendu que si le partage en nature est la règle, il convient de procéder à la vente par licitation dans le cas où les immeubles ne peuvent être commodément partagés ou attribués ; que tel est le cas de l'appartement commun des époux M.-T. ;
Qu'on doit relever que ceux-ci n'ayant pu s'entendre pour procéder amiablement au partage sont, en l'état, d'accord pour que cet immeuble soit vendu aux enchères publiques ;
Attendu que les enchères ne sauraient être réservées à deux personnes, ainsi que cela l'avait été sollicité par la dame T. qui n'a d'ailleurs pas maintenu sa demande, un tel procédé ne permettant en aucune manière d'atteindre un prix suffisant, correspondant à la valeur de l'immeuble ;
Qu'il échet en conséquence d'ordonner la vente aux enchères publiques de l'appartement commun sis à Monte-Carlo selon les formes habituelles des ventes sur licitation et de commettre pour y procéder Maître Rey, notaire ;
Attendu que les règles du partage successoral s'appliquent au partage de la communauté, notamment pour la composition des lots ;
Attendu que le principe étant le partage en nature il n'apparaît pas nécessaire en l'espèce de recourir à une vente aux enchères, par huissier, des objets mobiliers, ceux-ci étant aisément partageables en nature ;
Attendu que la masse partageable de la communauté comprend tous les biens présents ou possédés lors du mariage ;
Qu'il existe une présomption de communauté des biens et que l'époux qui les revendique doit démontrer qu'ils lui sont propres pour les reprendre en nature ;
Attendu que la dame T. invoque pour revendiquer la propriété du véhicule automobile de marque Alfa Roméo immatriculé F 957 M.C. la vente de celui-ci faite par M. à son profit ;
Que s'il est certain que le droit monégasque prévoit le contrat de vente entre époux, la loi numéro 891 du six juillet mil neuf cent soixante-dix l'autorise dans certains cas limitativement énumérés ou précise que sa réalisation est subordonnée à l'autorisation du Tribunal, qu'en l'espèce, aucune des formes prévues par la loi pour réaliser une vente entre époux n'a été respectée, qu'ainsi une telle vente, en admettant même qu'elle ait réellement eu lieu est nulle, qu'il échet donc de condamner la dame T. à rapporter à la communauté ledit véhicule ;
Attendu en ce qui concerne les autres objets mobiliers qu'il convient de dire que la dame T. rapportera à la communauté les meubles emportés lors de son départ du domicile conjugal, énumérés dans les conclusions de M., et ne faisant l'objet d'aucune contestation de la part de la dame T. soit une cuisinière électrique de marque Sauter, un frigidaire, un tourne-disque de marque Philips ; qu'il ne résulte pas des pièces versées aux débats que la dame T. ait emporté d'autres meubles ;
Attendu qu'il échet de confier à Maître Rey la mission de dresser inventaire des meubles et objets mobiliers propriété commune des époux y compris le véhicule de marque Alfa Roméo, le tourne-disque Philips, le frigidaire, la cuisinière électrique Sauter, de procéder à leur évaluation en recourant au besoin pour ce faire à l'avis de tel sapiteur qu'il appartiendra, à établir la consistance et la composition des lots, en fixant le cas échéant les récompenses qui pourraient revenir à l'un ou l'autre des conjoints ;
Attendu que le sieur M. demande le remboursement de la somme de mille deux cent cinquante francs indument payée par la Compagnie d'Assurances « l'Union et le Phénix Espagnol » à la dame T. pour des dégâts matériels causés au véhicule Alfa Roméo en octobre mi neuf cent soixante-dix ;
Attendu que cette indemnité est une créance de communauté, qu'il échet de condamner la dame T. à en remettre la moitié soit six cent vingt-cinq francs à M., les créances de la communauté se divisant de plein droit lors du partage ;
Attendu que la dame T. a réclamé à M. dix mille francs à titre d'indemnité d'occupation eu égard au fait que celui-ci depuis le début de la procédure est demeuré dans l'appartement dont les ex-époux sont copropriétaires indivis et qui constituait le domicile conjugal ;
Mais attendu que la dame T. a quitté de son plein gré et sans y être aucunement contrainte le domicile conjugal, qu'au cours de la tentative de conciliation elle a elle-même demandé à être autorisée à résider chez sa mère, qu'elle n'apparaît donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait été obligée de dépenser des sommes importantes pour pouvoir se loger, qu'il est déterminant de relever pour rejeter sa demande qu'elle n'a jamais manifesté l'intention d'obtenir le domicile conjugal comme résidence séparée, où M. était, par conséquent, en droit de demeurer ; qu'il y a lieu de la débouter de ce chef de demande ;
Attendu qu'elle sollicite en outre l'allocation d'une somme de deux mille francs à titre de dommages-intérêts en réparation des frais entraînés par la présente procédure que M. lui aurait manifestement imposée ;
Attendu qu'il est constant que la règle nul n'est contraint de rester dans l'indivision s'applique en cas de divorce et de dissolution de communauté, qu'alors le partage peut être soit amiable soit judiciaire ;
Attendu que M. en refusant un partage amiable qu'il estimait désavantageux pour ses intérêts n'a fait qu'user d'un droit qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit ; de ce chef à la demande de la dame T. ;
Attendu que M. forme une demande reconventionnelle tendant au remboursement par la dame T. de la moitié du montant de la rente viagère et des frais et charges concernant l'appartement dont les ex-époux sont copropriétaires indivis et que depuis le premier novembre mil neuf cent soixante-dix il a intégralement réglés ;
Attendu que les ex-époux avaient acheté conjointement et solidairement à la dame Veuve D. selon contrat en date du 30 septembre mil neuf cent soixante-huit, enregistré, un appartement moyennant la somme de soixante mille francs dont trente-cinq mille francs convertis en rente viagère payable par mensualités de cinq cent quarante-sept francs ;
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats et non contestées que la dame T. doit rembourser de ce chef à M. la somme de sept mille cent soixante-sept francs cinquante-huit centimes ;
Attendu que les dépens seront partagés par moitié en raison de leur succombance partielle réciproque ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal,
Accueille en la forme la dame T. en son action et M. en sa demande reconventionnelle ;
Au fond, y faisant partiellement droit ;
Ordonne la vente aux enchères publiques de l'appartement commun sis à Monte-Carlo, selon les formes habituelles des ventes sur licitation et commet pour y procéder Maître Rey, notaire à Monaco ;
Condamne la dame T. à rapporter à la communauté le véhicule de marque Alfa Roméo, immatriculé sous le numéro F neuf cent cinquante-sept M.C. après avoir constaté la nullité de la vente de celui-ci entre les époux, un frigidaire, une cuisinière de marque Sauter et un tourne-disque de marque Philips emportés lors de son départ du domicile conjugal ;
Confie à Maître Rey notaire, la mission de dresser inventaire des meubles et objets mobiliers, propriété commune des époux y compris les meubles mentionnés ci-dessus, de procéder à leur évaluation en recourant au besoin pour ce faire à l'avis de tel sapiteur qu'il appartiendra à établir la consistance et la composition des lots en fixant le cas échéant les récompenses qui pourraient revenir à l'un ou à l'autre des ex-conjoints ;
Condamne la dame T. à verser à M. la moitié de l'indemnité à elle payée par la Compagnie d'Assurances l'Union et le Phénix Espagnol, soit la somme de six cent vingt-cinq francs ;
Déboute la dame T. de ses demandes de dix mille francs à titre d'indemnité d'occupation et de deux mille francs à titre de dommages-intérêts ;
Condamne la dame T. à rembourser à M. la moitié des frais et charges et arrérages de rente viagère payés par lui depuis le premier novembre mil neuf cent soixante-dix du chef de l'appartement dont les ex-époux sont copropriétaires indivis soit une somme de sept mille cent soixante-sept francs cinquante-huit centimes ;
Rejette comme inopérantes ou mal fondées toutes autres demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires des parties ;
Composition
MM. Rossi, vice-prés. ; François, prem. subst. proc. gén. ; MMe Clérissy et Lorenzi, av. déf. ; Sbarrato, av.
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