Abstract
Responsabilité civile
Responsabilité quasi-délictuelle - Intermédiaire - Renseignements inexacts - Défaut de vérification - Imprudence grave - Responsabilité
Garantie
Assurances - Assuré - Activité - Risque couvert
Résumé
Dans une espèce où le défendeur n'a été le mandataire des demandeurs que postérieurement à la réalisation du dommage, le fondement de l'action est quasi-délictuel. En dehors même de la garantie de bonne fin donnée aux clients prospectés, les conditions dans lesquelles le défendeur a reçu et retransmis sans aucune vérification, alors qu'il lui était professionnellement aisé et indiqué de le faire, des renseignements gravement inexacts constituent à son encontre la preuve d'une légèreté et d'une imprudence également graves qui doivent, en outre, être appréciées en considération du profit que lui assurait l'opération. Le défendeur doit être tenu pour responsable des conséquences dommageables de son comportement (1).
Si l'on rapproche la définition de l'activité de l'assuré, dans le texte de la police, de l'énonciation de sa profession en tant que souscripteur, il apparaît que le terme mandataire, intercalé comme il se trouve, ne peut concerner une telle activité que dans le cadre de la fonction d'administrateur de biens ou d'immeubles entraînant de constants mandats et non une activité principale de mandataire jouant un rôle d'agent d'affaireseou de banquier. Le risque résultant d'une telle activité n'est donc pas couvert.
Par contre, ce risque est couvert dans le cadre d'une autre police qui définit l'activité comme correspondant à celle d'agent immobilier, indicateur, intermédiaire, mandataire pour la vente, l'achat, la gérance d'immeubles, en ajoutant « l'assuré pourra accessoirement servir d'indicateur, intermédiaire » et de mandataire pour ... la négociation de prêts hypothécaires et sur nantissement (2).
Motifs
LE TRIBUNAL,
Attendu que la société Sotransco, fondée et administrée par le sieur L. et spécialisée depuis plusieurs années dans la conclusion de prêts hypothécaires, adressait à sa clientèle le 2 juillet 1964 une circulaire proposant trois prêts à consentir sur des biens situés en France : les deux premiers sur des immeubles à Antibes et Beaulieu, au taux de 12 % le troisième sur un terrain de 100 000 m2 à lotir, représentant une valeur de gage de 2 500 000 F. sur lequel le prêt demandé était de 1 800 000 F au taux de 10 % payable d'avance pour les deux ans de durée du prêt ; qu'une « note importante » concernant ce seul dernier prêt marquait qu'il était « assuré contre tous risques de non paiement du capital par une Assurance Crédit au profit des prêteurs, auprès d'une compagnie d'assurances mondialement connue et réassurée à la Lloyd's de Londres donnant ainsi à tous les créanciers, une garantie totale contre tous risques » ;
Attendu que de nombreux clients de Sotransco ont accueilli cette dernière proposition et que dès le 16 juillet 1964 intervenait devant Maître Mounier, Notaire, un acte de reconnaissance de dette avec affectation hypothécaire constant des prêts faits à l'emprunteur S. qui donnait en gage des parcelles de terrain à Saint-Martin-Vésubie ;
Attendu qu'à cet acte comparaissait L. tant en propre que comme mandataire de nombreux prêteurs et plusieurs de ses clients en personne ;
Attendu qu'à l'échéance les prêts ne furent pas remboursés et que la réalisation du gage, sur poursuite d'un créancier différent, ne produisit qu'une somme dérisoire, inférieure à 4,5 % du montant des prêts hypothécaires ;
Attendu que sur les réclamations des prêteurs, L. entreprit des démarches auprès de la compagnie d'assurances belge la Belfort, signa même avec elle une convention qui n'eut pas de suite, cette compagnie étant déclarée en état de faillite le 12 janvier 1968 par le Tribunal de Commerce de Bruxelles ; que nul règlement n'intervint non plus de la part du réassureur B. B. qui avait été présenté comme engageant les Lloyds de Londres vis-à-vis de la Belfort, par une « cover-note » du 19 juin 1964 ;
Attendu qu'en cet état, la société civile immobilière Dablo, représentée par son gérant D. W., a assigné suivant exploit du 23 avril 1970, la société Sotransco et L. pour s'entendre déclarer responsables du défaut de remboursement du prêt et condamner conjointement et solidairement à lui payer 67 692 F. avec intérêts de droit du jour de la demande, outre 17 000 F. à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que par conclusions du 30 avril 1970, 6 créanciers ayant également participé en personne à l'acte de prêt du 16 juillet 1964 et se trouvant dans une situation juridique semblable à celle de la société Dablo sont intervenus aux débats, se joignant à ses moyens pour réclamer :
* le Docteur B.,tant en son nom que comme héritier de son père : 19 132 F. avec intérêts de droit et 4 780 F de dommages intérêts ;
* le sieur R. : 572396 F. avec intérêts de droit et 14 350 F. de dommages-intérêts ;
* le sieur B. : 57 396 F. avec intérêts de droit et 14 350 F. de dommages-intérêts ;
* le sieur L. : 9 566 F. avec intérêts de droit et 2 390 F. de dommages-intérêts ;
* le sieur D. : 19 132 F. avec intérêts de droit et 4 780 F. de dommages-intérêts ;
* la dame Veuve L. héritière de son mari : 19 132 F. avec intérêts de droit et 4 780 F. de dommages-intérêts ;
Attendu que par deux exploits du 9 juillet 1970, Sotransco et L. ont signifié ces assignations et interventions :
1° à Maître Mardens, avocat à Bruxelles, en qualité de curateur à la faillite de la Belfort, et au sieur B. B., assureur à Londres ;
2° à la société anonyme d'assurances « L'Urbaine et la Seine » et à la société anonyme d'assurances « La Concorde » ;
Que tout en contestant la demande principale dirigée contre eux, ils ont appelé ces parties aux débats pour les relever et garantir de toute éventuelle condamnation ;
Attendu que Sotransco et L., en leurs conclusions du 8 octobre 1970 soutiennent que L. n'a jamais agi qu'en qualité de Directeur de Sotransco et doit être mis personnellement hors de cause ; que Sotransco reproche aux demandeurs de ne pas définir la nature de la responsabilité sur laquelle ils fondent leur action et dénie qu'à un moment quelconque, et plus particulièrement à la date de la diffusion de la circulaire du 2 juillet, elle ait manqué, par des agissements fautifs, à ses obligations qui étaient celles du simple intermédiaire mettant en présence emprunteur et préteurs en faisant connaître à chaque partie les conditions de l'autre, mais sans garantir la solvabilité du débiteur ou la valeur du gage : que la circulaire a été établie sur les indications d'un sieur G., mandataire de l'emprunteur S. et en même temps agent de la compagnie La Belfort, laquelle déclarait accepter de couvrir le prêt à concurrence de 1 800 000 F. après l'expertise du sieur C., et sur une attestation bancaire de l'honorabilité du réassureur B. B. ; que toutes ces indications étaient de nature à lui inspirer la plus grande confiance et qu'il ne saurait lui être fait grief de n'avoir pas prévu la carence future des garants qui, d'ailleurs n'ont pas contesté leurs engagements lors de la « convention de Bruxelles » intervenue postérieurement à la déconfiture de S. et à la réalisation du gage, mais qui n'a pas reçu exécution et qui a été dénoncée ;
Qu'à titre subsidiaire et pour le cas où une faute serait éventuellement reconnue, Sotransco et L. soutiennent que les grosses afférentes aux prêts ne se transformeraient pas en titres de créance qui leur soient opposables, car le préjudice des prêteurs n'est encore qu'éventuel et ne pourrait être connu et évalué qu'après réalisation du gage et poursuite par tous moyens légaux de l'assureur et du réassureur qui ont garanti le remboursement du prêt ; qu'en tous cas, ils demandent, à la faveur de leurs appels en garantie, à être relevés de toute éventuelle condamnation ;
Attendu que Maîtres L. et G., après leur intervention ès qualités de curateurs de la faillite de la Belfort, soutiennent le 2 février 1972 que la responsabilité de cette société ne saurait être examinée que si les demandes contre L. et Sotransco, qui les ont appelés en garantie, étaient retenues et indiquent, subsidiairement, que toute condamnation ne pourrait constituer que la reconnaissance d'une créance devant suivre le sort et les règles de la production à la faillite selon la procédure du droit belge ;
Attendu que l'Urbaine et la Seine, concluant le 14 mars 1971 à l'occasion de toutes les procédures, rappelle les termes par lesquels elle avait, dès le 25 avril 1968, décliné, en réponse à la demande de L. et Sotransco, la prise en charge du sinistre comme n'entrant pas dans le cadre des garanties du contrat consenti à L., seul, en tant qu'administrateur de biens et ne couvrant donc pas les faits délictueux ; qu'elle aussi ajoute que l'appel en cause ne pourrait être envisagé qu'en cas d'accueil de la demande principale ;
Attendu que la Concorde en ses écrits des 22 avril 1971 et 12 mai 1972, soutient également que le rejet des demandes entraînerait nécessairement sa mise hors de cause, mais aussi que sa police ne couvre pas les faits délictueux ou provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive, et très subsidiairement que cette police ne concernait que certaines activités, non celle d'agent d'affaires, et qu'en tout état de cause elle comportait une limitation de garantie à 100 000 F. à l'année ;
Attendu qu'en l'état de toutes ces prises de position, la société Dablo et les intervenants ont conclu le 31 janvier 1973 pour combattre les moyens de défense de L. et Sotransco en ce qu'ils tendent à la mise hors de cause du premier d'entre eux et tentent de limiter leur rôle à celui de simple intermédiaire, exclusif de toute garantie ; qu'en dehors de l'inutile reprise d'une argumentation sur la dualité de recours pour des causes quasi-délictuelles ou contractuelles ne concernant pas l'espèce actuelle où le fondement contractuel ne peut être sérieusement invoqué et d'une allusion à des conclusions de Maîtres Sanita et Lorenzi du 24 février 1972 non notifiées ni discutées dans la présence instance, les demandeurs insistent sur l'inexactitude flagrante des indications fournies par la circulaire, caractérisant la négligence et l'imprudence des défendeurs et directement génératrices du dommage dont ils requièrent réparation, de la part de Sotransco et L., sous réserve, pour ceux-ci de leurs appels en garantie ;
Sur l'action principale
Attendu qu'en l'espèce actuelle où L. n'a pas été le mandataire verbal de la société Dablo et des intervenants à l'acte authentique de prêt, s'il l'a été ultérieurement, après réalisation du dommage, pour tenter de recours, le fondement de l'action est purement quasi-délictuel et porte sur la négligence et l'imprudence comme le précisent bien les conclusions ; qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner les moyens tirés de la dualité ou de l'imprécision de la base de l'action ;
Attendu qu'il ne saurait être fait droit à la prétention de L. d'être mis personnellement hors de cause en raison du fait qu'il n'aurait jamais agi quès qualités et pour le compte de la Sotransco ; attendu en effet qu'il y avait une fusion complète d'administration et d'intérêts entre lui et la société, qu'il avait fondée et qu'il dirigeait seul ; qu'il ne conteste pas avoir été le rédacteur de la circulaire, bien qu'il ne l'ait pas signée, et que le fait qu'il ait appelé en garantie la compagnie Urbaine, en vertu d'une police intervenue à son nom personnel, pour le garantir de l'action intentée conjointement contre lui et Sotransco, est révélateur de cette unité de direction, d'intérêts et, partant, de responsabilité ;
Attendu par ailleurs que les défendeurs apparaissent également infondés lorsqu'ils prétendent limiter leur rôle à celui du simple intermédiaire qui met en présence emprunteur et prêteurs sans nulle garantie de valeur du gage ni de bonne fin de l'opération ;
Attendu en effet que la circulaire du 2 juillet, proposant trois prêts, attirait spécialement l'attention sur le troisième, en promettant une garantie totale contre tous risques ;
Que cette garantie se fondait sur une assurance-crédit, déjà contractée par L. auprès d'une compagnie exagérément présentée comme « mondialement connue », réassurée elle-même aux Lloyds de Londres, ce qui ne correspondrait d'ailleurs pas à la réalité ;
Que par ce moyen, une importante tranche de la clientèle habituelle a été décidée en peu de jours à couvrir l'emprunt de 1 800 000 F., préférant manifestement les garanties offertes, avec un taux de 10 %, aux autres propositions de prêts au taux de 12 % mais sans la garantie ; que cette garantie préconstituée et présentée comme totale a bien représenté, de la part de Sotransco et L., un engagement de bonne fin de l'opération excédant le rôle habituel du simple intermédiaire et dont ils ne sauraient se libérer par la seule invocation de l'imprévisibilité à l'époque, du caractère illusoire du recours ;
Attendu que les renseignements fournis par la circulaire étaient inexacts sur leurs deux points essentiels la consistance du gage et le caractère sérieux de la garantie promise ;
Attendu que le gage hypothécaire ne consistait pas en un terrain de 100 000 m2 mais en trois parcelles séparées dont la superficie totale n'était que de 63 325 m2, vérification qui eût été facile à opérer ; que pour justifier l'appréciation donnée de sa valeur, L. ne saurait s'abriter derrière l'avis de l'expert foncier C., dès lors que l'estimation de celui-ci ne portait pas sur l'ensemble du gage mais sur un lot important de 52 000 m2 qui lui était étranger et sur deux parcelles séparées en représentant une partie, mais dont les prix unitaires de 15 et 30 F le mètre ne pourraient, même en les étendant à la surface manquante non expertisée, justifier la valeur attribuée à l'ensemble ;
Attendu par ailleurs que si L. pouvait avoir, de bonne foi, des illusions sur l'avenir de La Belfort, il ne peut être oublié qu'en dissimulant le nom de cette compagnie et en la présentant comme « mondialement connue » il a largement excédé la réalité et qu'il ne devait pas ignorer non plus que ce genre de risque ne pouvait être légalement assuré en France ; qu'il a, de même, affirmé l'existence d'une réassurance aux Lloyds de Londres sans vérifier si B., sur lequel il avait dit-il de bons renseignements, engageait effectivement ce groupement ou lui seul, par sa cover-note n° 125 ; qu'il est bien certain que le relief particulier inexactement donné aux organismes devant assurer une garantie présentée comme absolue a été déterminant de la confiance inspirée et par là-même de la contractation ;
Attendu que la jurisprudence admet que celui qui, même de bonne foi ou à titre gratuit, donne des renseignements inexacts engage sa responsabilité s'il a agi avec légèreté ou imprudence (Paris - 5 février 1952) le point essentiel de la recherche des juridictions portant sur cette légèreté ou imprudence, et la seule absence de ces éléments ayant justifié une mise hors de cause (Req. 1er juillet 1909) ;
Attendu en l'espèce qu'en dehors même de la garantie de bonne fin donnée aux clients prospectés, les conditions ci-dessus rappelées, dans lesquelles Sotransco et L. ont reçu et retransmis sans aucune vérification, alors qu'il leur était professionnellement aisé et indiqué de le faire, des renseignements gravement inexacts constituent à leur encontre la preuve d'une légèreté et d'une imprudence également graves et qui doivent, en outre, être appréciées en considération du profit de 90 000 F que leur assurait l'opération ; qu'il doivent donc être tenus pour responsables des conséquences dommageables de leur comportement ;
Attendu qu'il ne peut être admis, comme le soutiennent les défendeurs, que ce dommage n'ait qu'un caractère éventuel ; qu'il suffit de relever que la réalisation du gage a donné un résultat presque nul et que les procédures engagées directement contre les garants, en dehors de la mise en cause actuelle, sont ajournées sans date ; qu'il appartiendra à L. et Sotransco, après règlement des condamnations qui ne peuvent manquer d'intervenir, conjointement et solidairement contre eux, d'exercer leurs recours contre les garants, à la faveur des appels en garantie et en tant que subrogée aux droits des demandeurs ;
Sur les appels en garantie
I. - Contre la Belfort et B.
Attendu que Maîtres L. et G., curateurs actuels de la faillite de la compagnie la Belfort, doivent être condamnés ès qualités, à relever et garantir Sotransco et L. des condamnations prononcées contre eux, sur la base des engagements contractuels résultant de la police signée le 19 juin 1964, dont ils ne contestent pas l'efficacité dès lors que la responsabilité de ceux-ci est retenue ; qu'il y a lieu seulement de reconnaître qu'en raison de l'état de faillite de la Belfort, ce recours ne pourra être exercé que conformément aux dispositions de la loi belge concernant la production en vue d'obtenir l'admission d'une créance au passif ;
Attendu qu'en ne comparaissant pas, de façon systématique, B. B. laisse entendre qu'il n'a pas de moyen sérieux à opposer au recours exercé contre lui en tant que réassureur ; qu'en retenant également et surtout sa participation sans réserves à la convention dite « de Bruxelles » du 17 mai 1967 aux côtés de la Belfort, où il a pris en charge avec elle le sinistre en exécution de sa cover-note n° 125 du 19 juin 1964, il y a lieu de le condamner, dans les mêmes conditions que la Belfort, mais sans recours à la procédure de production à faillite, à relever et garantir Sotransco et L. des condamnations prononcées ;
II. - Contre la Compagnie Urbaine et Seine.
Attendu qu'il est constant que la police « responsabilité civile » consentie le 19 juillet 1961 par cette compagnie à « M. E. L. », administrateur de biens à Monaco «, précisait aux conditions particulières qu'elle avait pour objet de garantir à concurrence de 1 000 000 de F par événement » les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que pourrait encourir le souscripteur en sa qualité d'administrateur d'immeubles, mandataire, administrateur de biens vis-à-vis de ses clients ou de tierces personnes par son fait ou celui de ses préposés, concierges, ou par suite d'oubli, de négligence ou de faute, à l'occasion de toutes opérations relevant de sa profession d'administrateur d'immeubles, mandataire, administrateur de biens, ou dont ces personnes sont généralement chargées « la garantie ne s'étendant pas aux faits délictueux du souscripteur ;
Attendu qu'à l'appel en garantie formé contre elle par Sotransco et L., la compagnie Urbaine et Seine objecte que les faits commis par L. étant de caractère délictueux, une ordonnance de renvoi du juge d'instruction étant intervenue le 13 mars 1969, sa garantie ne serait pas accordée ; qu'elle demande par ailleurs à être mise hors de cause aux motifs :
* qu'elle a garanti la responsabilité civile de L. seul et non celle de la société Sotransco ;
* que sa garantie s'appliquait à L. administrateur de biens et non en tant qu'agent d'affaires ou banquier, précisant à ce sujet que le terme » mandataire « placé entre ceux d'administrateur d'immeubles ou de biens, ne peut caractériser une extension à d'autres activités non conformes à la définition doctrinale de l'administrateur de biens ;
Attendu que les deux premiers moyens soulevés par l'Urbaine ne sauraient être retenus ;
Qu'en raison de la complète fusion de direction et d'intérêts entre la Sotransco et L., la police garantissant ce dernier et ses préposés ne saurait voir ses effets limités aux conséquences des actes de L. seul ;
Que par ailleurs une seule condamnation pénale a été prononcée contre L. pour un fait entièrement différent des prêts hypothécaires actuels, au sujet desquels n'est même pas intervenue de plainte ;
Attendu par contre que le moyen tiré par la compagnie de la détermination du risque par la profession de l'assuré doit être retenu comme pertinent ;
Attendu en effet que si l'on rapproche la définition de l'activité de l'assuré, dans le texte, de l'énonciation de sa profession en tant que souscripteur, il apparaît que le terme mandataire, intercalé comme il se trouve, ne peut concerner une telle activité que dans le cadre de la fonction d'administrateur de biens ou d'immeubles entraînant de constants mandats, notamment de négociation ou de représentation à des assemblées, et non une activité principale de mandataire jouant un rôle d'agent d'affaires ou de banquier ; que les fonctions attribuées par les Annales des Loyers aux administrateurs de biens, selon la fédération nationale groupant ceux-ci, consistent à effectuer, en qualité de mandataire, toutes opérations de gestion d'immeubles, gérance, entretien, exécution des obligations des propriétaires ou bailleurs ; que cette spécification du souscripteur, dans l'esprit du contrat d'assurance, résulte en outre du mot » concierge « parmi les préposés et même de la modicité de la prime de 150 F par an ;
Que Sotransco et L. ne sauraient donc être déclarés fondés dans leur appel en garantie dirigé contre la compagnie Urbaine et Seine qui ne couvrait pas un risque de la nature de celui qui fait l'objet du litige actuel et qu'ils doivent en être déboutés ;
III. - Contre la Compagnie La Concorde.
Attendu que la police invoquée a été contractée le 18 mars 1965 par le Syndicat patronal des Agents Immobiliers de Monaco au nom et pour le compte de diverses agences énumérées dans le contrat, pour des activités correspondant à trois catégories A, B et C dont les définitions sont détaillées dans la police ;
Que l'agence Sotransco est couverte à raison de 100 000 F pour l'activité » B « et que parmi les conditions générales figure l'exclusion de la garantie pour les malversations, fraudes, vols ou tous autres faits provenant de la faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ;
Attendu que la condamnation de Sotransco et L. et le caractère purement civil de l'action actuelle ne permettent pas d'accueillir les deux premiers moyens tirés par la Concorde du fait qu'elle n'avait été appelée qu'en garantie et de l'exclusion de couverture du risque en cas d'acte délictueux, dolosif ou intentionnel ; que le moyen subsidiaire tiré par cette compagnie de la nature de l'activité garantie ne peut davantage être accueilli ;
Attendu en effet que l'activité » B «, définie à la police, correspond à celle d'agent immobilier, indicateur, intermédiaire, mandataire pour la vente, l'achat, la gérance d'immeubles et ajoute : » l'assuré pourra accessoirement servir d'indicateur, intermédiaire et de mandataire pour... la négociation de prêts hypothécaires et sur nantissement... " étant seules exclues les activités d'administrateur de sociétés de construction et de promoteur ;
Attendu que la Concorde ne peut être accueillie qu'en la partie très subsidiaire de ses conclusions, faisant observer que le risque garanti est limité à 100 000 F, puisque telle est la stipulation de garantie pour l'agence Sotransco ; que c'est à concurrence de cette somme que la Concorde doit être condamnée à relever et garantir les défendeurs ;
Attendu que les dépens doivent être mis à la charge des défendeurs Sotransco et L. et de ceux des appelés en garantie qui succombent ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Accueille en la forme la S.C.I. Dablo en son action et les 6 personnes qui se sont jointes à elle, en leur intervention ;
Accueille la société Sotransco et le sieur L. en leurs appels en garantie dirigés contre :
1° le sieur B. B. et Maître Mardens, es-qualité de curateur de la faillite de la compagnie La Belfort, remplacé en ces fonctions, après son décès, par Maîtres L. et G., qui sont reçus en leur intervention ;
2° les compagnies d'assurances l'Urbaine et Seine et la Concorde ;
Joint les instances ;
Condamne L. et Sotransco, conjointement et solidairement, à payer les sommes suivantes, toutes assorties d'intérêts de droit à compter du jour de la demande et des dommages-intérêts complémentaires indiqués aussitôt après le principal ;
.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
Condamne le sieur B. B. et Maître L. et G. es-qualités à relever et garantir L. et la Société Sotransco des condamnations prononcées contre eux ; condamne la Compagnie la Concorde à la relever et garantir de même, à concurrence de 100 000 F, plafond de la garantie assurée ;
Déboute L. et Sotransco de leur appel en garantie dirigé contre la compagnie Urbaine et Seine ; met celle-ci hors de cause ;
Composition
MM. de Monseignat pr., François prem. subst. gén., MMe Clérissi, Sanita, Lorenzi av. déf., Martin et Renucoli (tous deux du barreau de Nice) av.
^