Abstract
Fonctionnaires publics
Accident en service - Garantie de l'État - Législation sur les accidents du travail - Inapplicabilité - Procédure suivie par le juge chargé des accidents du travail - Nullité
Résumé
Les mesures ordonnées par le juge chargé des accidents du travail dans le cas particulier d'un fonctionnaire victime d'un accident en service échappant à l'application de la législation destinée à protéger les salariés du secteur privé sont contraires aux règles d'ordre public et doivent être déclarées nulles.
Motifs
LE TRIBUNAL,
Attendu que M. en exécution du jugement susvisé a, par exploit Marquet du 29 avril 1974, assigné, outre l'Administrateur des Domaines et la Compagnie U.A.P. (ex Urbaine et Seine), le Ministre d'État pour des fins identiques que celles de son assignation du 12 novembre 1973, qui ne visait que les deux premières parties, savoir l'homologation du rapport du docteur Blanchi, expert désigné le 26 juin 1973 par le juge chargé des accidents du travail, et la condamnation conjointe et solidaire des trois défendeurs au paiement d'une rente calculée sur le nouveau taux d'I.P.P. de 120 % (80 % d'incapacité + 40 % au titre de l'aide d'une tierce personne) ;
Que par conclusions du 7 novembre 1974 il demande subsidiairement que l'U.A.P. soit condamnée seule, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, en ce qui le concerne, au paiement de ladite rente et que lui soit réservée la faculté de réclamer un éventuel complément d'indemnisation par l'accomplissement des formalités de son statut ;
Attendu que tant le Ministre d'État que l'Administrateur des Domaines, ce dernier ayant également constitué le même avocat-défenseur depuis la déconstitution implicite de Maître Clérissi du 4 novembre 1974, estiment que l'U.A.P. a acquiescé au jugement du 28 février 1974 lequel n'a pourtant pas mis à leur charge, selon eux, l'obligation pécuniaire de dédommager M. par l'application de la législation spécifique des accidents du travail, ni préjugé de l'interprétation de la police d'assurance d'indemnités complémentaires du 3 octobre 1952 dont la terminologie de référence aux lois sur les accidents du travail et aux maladies professionnelles est uniquement un renvoi aux barèmes de calcul en usage en ces matières ;
Que ces deux défendeurs s'en remettent à la sagesse du Tribunal quant à l'appréciation des prétentions de leurs adversaires, sollicitent qu'il soit dit et jugé que l'U.A.P. devra payer la rente correspondant à l'aggravation d'I.P.P. sans pouvoir invoquer contre M. ni contre eux une prescription particulière à la législation sur les accidents du travail et qu'en aucun cas l'État ne doit supporter les conséquences éventuelles de l'erreur ou de l'inertie de la victime ;
Attendu que de son côté l'U.A.P. tend à souligner qu'elle n'a pas acquiescé au jugement du 28 février 1974 et demande qu'il lui soit donné acte de ses réserves de frapper d'appel ladite décision ;
Qu'elle déclare conclure au fond cependant, en maintenant son exception d'irrecevabilité de l'action en révision de rente de M. en raison de la prescription triennale de la loi n° 445, en vigueur au jour de l'accident de cet ancien agent motocycliste, pour démontrer au contradictoire du représentant du Gouvernement Princier, employeur de la victime, et du co-signataire de la police d'assurance du 3 octobre 1952, à la lumière des dispositions du jugement susvisé - d'une part, la nullité et l'absence de force probante du rapport de l'expert Blanchi, désigné, malgré ses protestations, en infraction aux prescriptions des articles 41 et 47 de l'Ordonnance Souveraine n° 293 et 5 de la loi 526 - et d'autre part, que ses obligations propres, découlant du contrat d'assurance sus mentionné, sont limitées au montant de la rente fixée par la convention du 11 février 1959, précédée de l'agrément du médecin contrôleur des prestations médicales de l'État quant au taux d'I.P.P. de 45 %, puisque, au titre des accidents du travail et s'il avait été un salarié du secteur privé M. aurait été forclos pour former en mai 1973 une demande en révision ;
Attendu qu'il est nécessaire tout d'abord de préciser que le Tribunal n'a pas à apprécier la question de l'acquiescement ou du non acquiescement de l'une ou de l'autre des parties au jugement du 28 février 1974 qui a délimité le champ du litige institué par la demande de M., lequel était incité à appeler conséquemment en cause le représentant de l'État monégasque - ce qu'il a fait en la personne du Ministre d'État ;
Attendu que les débats actuels sont la continuation de ceux marqués par la décision susvisée qui les a circonscrits dans le cadre des dispositions d'ordre public du statut des fonctionnaires de l'État et des agents et fonctionnaires de la Sûreté Publique en ce qui a trait aux conditions d'indemnisation du personnel du secteur public en cas d'accident du travail ;
Attendu qu'étant posé le principe que M., victime d'un accident du travail bénéficiait quant à la conservation et à la modification de son droit à réparation de la garantie de l'État, assumant directement et personnellement la charge de cette réparation, à condition que le premier se soumette aux formalités d'évaluation de l'indemnisation lui revenant calculée comme en matière d'accidents du travail - prévues par les textes statuaires ;
Attendu que si le demandeur a, touchant à la première fixation de rente indemnitaire, liquidée par la convention du 12 février 1959 satisfait à l'obligation de se faire examiner ou contre visiter par le médecin conseil du Gouvernement (en l'espèce le médecin contrôleur des prestations médicales de l'État), il apparaît qu'il a complètement méconnu l'observation des formalités édictées par son statut en adressant le 7 mai 1973 une demande en révision de rente fondée sur une aggravation de son état au juge chargé des accidents du travail ;
Attendu que dès ce moment toutes les mesures ordonnées par ce magistrat étaient inopérantes et irrégulières en considération du cas particulier d'un fonctionnaire victime d'un accident du travail échappant à l'application de la législation faite pour la protection des salariés du secteur privé ;
Attendu en conséquence que la procédure engagée depuis le 6 mai 1973 par M., est entachée d'irrégularité à l'égard des règles d'ordre public et doit être déclarée nulle, d'autant que le Gouvernement Princier en s'en rapportant à justice quant aux prétentions des parties conteste le nouveau taux d'I.P.P. fixé par le docteur Blanchi dans son rapport du 1er août 1973 ;
Attendu qu'il y a lieu de donner acte à Maître Marquet, que depuis le 4 novembre 1974, il est constitué avocat-défenseur du Ministre d'État et à l'U.A.P. de ce qu'elle se réserve le droit de frapper d'appel le jugement du 28 février 1974 ;
Attendu que les dépens doivent demeurer à la charge de M., l'erreur commise par M. qui a initié la procédure sur le fondement de la législation sur les accidents du travail, étant la conséquence directe de ce que l'accident dont il avait été victime le 6 août 1966 avait abouti à une rente versée comme s'il s'était agi d'une rente accident de droit commun, et ce, en l'état du contrat passé le 5 octobre 1952 à l'initiative du Gouvernement Princier ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal,
Déclare nulle la procédure suivie depuis le 6 mai 1973 dans le cadre de la législation sur les accidents du travail par M. ;
Renvoie ledit M. à se mieux pourvoir ;
Composition
M Ambrosi, v. pr., Mme Margossian, subst. gén. MMe Sanita, Marquet, Clérissi, av. déf. Michel Marquet, av.
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