Abstract
Contrat de travail
Absence de contrat écrit - Preuve - Charge - Demandeur
Preuve
Absence de contrat écrit - Charge de la preuve - Demandeur
Résumé
Alors qu'aucun contrat de travail n'existe et que le défendeur dénie tout rapport de cette nature juridique avec le demandeur, c'est à celui-ci qu'incombe la charge de la preuve quant à l'existence du contrat qu'il allègue ou tout au moins des relations de subordination qui caractérisent les rapports de travail.
Motifs
Le Tribunal
Attendu que le sieur M. a relevé appel d'un jugement contradictoirement rendu par le bureau de jugement du Tribunal du Travail du 8 juillet 1976, qui, statuant sur une demande dirigée contre lui par dame M. S. et tendant à obtenir une somme de 294 660 francs représentant le préjudice qu'elle avait subi à la suite de la rupture du contrat de travail dont elle bénéficiait, et avant de se prononcer définitivement sur l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par le défendeur, a autorisé dame S. à prouver par enquête trois faits cotés à l'appui de ses dires ;
Attendu que le sieur M. reproche aux premiers juges d'avoir écarté les éléments de preuve qu'il avait versés aux débats et qui étaient de nature, selon lui, à établir qu'il n'existait pas de contrat de travail entre dame S. et lui, mais que celle-ci était la représentante, c'est-à-dire juridiquement la mandataire de l'un de ces bailleurs de fonds, le sieur P., avec lequel elle était liée intimement depuis de nombreuses années ; qu'il estime qu'en l'état de ces éléments de preuve, le Tribunal n'aurait pas dû rejeter de plano l'enquête qu'il sollicitait, mais aurait dû l'autoriser à prouver les faits qu'il estimait propres à établir l'absence de tout lien de subordination entre dame S. et lui, et, partant, l'inexistence de tout contrat de travail ;
Attendu que dame S. demande la confirmation du jugement frappé d'appel ;
Attendu que dame S., demanderesse à l'instance, et alors qu'aucun contrat de travail écrit n'existe en l'espèce et que M. dénie tout rapport de cette nature juridique avec elle, a la charge de la preuve quant à l'existence du contrat qu'elle allègue, ou, tout au moins, des relations de subordination qui caractérise les rapports du travail et suffisent à donner compétence au Tribunal du Travail ;
Attendu que le Tribunal du Travail ne peut retenir sa compétence que si les rapports sont établis, sans avoir, dans l'hypothèse où ceux-ci ne le seraient pas, à se prononcer sur la nature des relations juridiques unissant les deux parties ;
Attendu qu'il est dès lors contraire aux règles de preuve ci-dessus rappelées, et au surplus illogique, de rejeter, dans un premier temps, la thèse de M. qui avait donné, au sujet de ces relations, une coloration juridique exclusive de toute relation de travail, comme si M. avait eu à prouver la non existence du contrat de travail, et d'admettre ensuite qu'il existait une présomption grave et sérieuse de l'existence de relations de travail, mais qu'une mesure complémentaire d'enquête apparaissait utile pour compléter lesdites preuves ; qu'en effet, si l'enquête sollicitée avait été ordonnée, tous droits et moyens des parties demeurant réservés, le Tribunal du Travail aurait ainsi conservé sa pleine liberté d'appréciation des éléments de preuve soumis à son examen, alors que si l'enquête n'apporte aucun élément de conviction supplémentaire, il ne pourra que débouter dame S., après avoir affirmé, dans son premier jugement, que la thèse de M. ne pouvait être acceptée et que le contrat de travail était presque établi ;
Attendu en fait qu'il y a lieu, sans égard à la motivation des premiers juges, qui doit être mise à néant, d'ordonner l'enquête sollicitée par dame S. pour établir la preuve, dont la charge lui incombe, de l'existence d'un contrat de travail, ou, tout au moins, des liens de subordination juridique l'unissant à M. et de réserver à celui-ci la preuve contraire, à l'occasion de laquelle il pourra faire entendre tous témoins susceptibles d'établir l'inexistence de ce contrat, et de ces liens ;
Attendu que les dépens doivent être réservés en fin de cause ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal,
Statuant comme juridiction d'appel,
Mettant à néant la motivation du jugement dont appel,
Surseoit à statuer, en l'état, sur l'exception d'incompétence soulevée par le sieur M.,
Confirme le dispositif dudit jugement en ce qu'il a autorisé la dame S. à prouver :
1° que du 1er novembre 1974 au 15 septembre 1975, elle a exercé les fonctions de directrice-décoratrice au service d'A. M., propriétaire exploitant du fonds d'art et décoration « A. T. » à Monte-Carlo, Immeuble « E. », .,
2° qu'elle recevait toutes directives de ce dernier et était tenue à une présence régulière,
3° qu'un salaire de 4 000 francs par mois avait été convenu, partiellement réglé et à maintes reprises réclamé,
et a réservé au sieur M. la preuve contraire ;
Tous droits et moyens des parties demeurant expressément réservés, et, vu l'article 25 de l'Ordonnance du 21 mai 1909, renvoie la cause et les parties devant le Tribunal du Travail pour qu'il soit procédé à ladite enquête et statué sur le fond ;
Réserve les dépens en fin de cause ;
Composition
M. François pr., Mme Margossian subst. gén., MMe Marquet et Sanita av. déf.
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