Abstract
Compétence
Exception d'incompétence soulevée par deux défendeurs en raison de leur lieu de domicile en France -Rejet au regard de l'exécution du contrat à Monaco -Inapplicabilité de l'article 15 du Code civil français.
Action en Justice
Qualité de l'État pour agir au nom du « Comité d'organisation du Festival International de Télévision ».
Résumé
Les parties au contrat domiciliées en France sont irrecevables à soulever l'incompétence de la juridiction monégasque dès lors que les obligations contractuelles devant être exécutées à Monaco, la juridiction monégasque se trouve compétente en vertu de l'article 3-2° du Code de procédure civile.
L'État a qualité pour se substituer dans une instance à un comité d'organisation qui sans avoir la personnalité morale a conclu un contrat comme intermédiaire de l'État ainsi que le prévoit l'ordonnance souveraine n° 5834 du 21 juin 1976, d'application générale.
Motifs
Le Tribunal,
Considérant les faits suivants ;
Le Comité d'organisation du Festival International de Télévision dont la composition et le fonctionnement ont été fixés par arrêté ministériel pris en vertu de l'ordonnance souveraine n° 5834 du 21 juin 1971, a souscrit le 6 juin 1984 avec la société à responsabilité limitée française dénommée « International Marketing Vidéo » (I.M.V.), représentée par M. D., un contrat signé par son secrétaire général aux termes duquel il a délégué à ladite société « l'organisation et la commercialisation » tant d'un « forum international de télévision » prévu à Monaco pour les 5, 6, 7 et 8 février 1985, que d'une exposition devant se tenir aux mêmes dates dans le grand salon et le foyer de l'Hôtel Loews de Monaco sur le thème « nouveaux produits, nouveaux services pour de nouvelles images » ;
L'article 3 dudit contrat précise que la société I.M.V. avait remis le 22 février 1984 un compte d'exploitation prévisionnel faisant ressortir l'ensemble des dépenses engagées et les hypothèses de recettes liées au Forum et à l'Exposition, que les dépenses devaient être prises en charge par la société I.M.V., et qu'en contrepartie les recettes provenant des droits d'inscription des participants au Forum et à l'Exposition lui seraient intégralement acquises ;
Ce même 6 juin 1984 M. D. représentant la société I.M.V. a écrit une lettre au trésorier général du comité pour lui « confirmer » que la société I.M.V. n'avait pu obtenir de sa banque, la « B.U.O.F.C. » la caution destinée à garantir l'avance de trésorerie devant être procurée par le Comité afin de lui permettre de couvrir le premier tiers des dépenses à engager pour la promotion du Forum ;
Rappelant dans ladite lettre que les trois derniers Forums similaires, antérieurement « organisés et commercialisés » à Monaco par la société I.M.V. s'étaient soldés par des pertes successives de 70 000, 120 000 et 250 000 francs, M. D. a alors proposé au comité, pour suppléer au défaut de caution, d'ouvrir à la B.U.O.F.C. un compte destiné à percevoir les recettes provenant des participants aux forum et d'affecter exclusivement celles-ci au remboursement de l'avance de trésorerie ;
Par une lettre pareillement datée du 6 juin 1984 M. D. a par ailleurs informé le secrétaire général du comité, de ce que consécutivement à leur réunion du même jour et à la signature du contrat susvisé, il s'était mis en relations avec le trésorier général afin d'étudier les meilleures garanties possibles permettant d'assurer la Trésorerie Générale des Finances du remboursement de l'avance de 500 000 francs dès alors nécessaire, à la société I.M.V. pour l'organisation du prochain Forum ;
Lors des pourparlers antérieurs au contrat susvisé, M. D. avait à ce propos, écrit le 14 mars 1984 au Trésorier Général du Comité qu'en suite de l'entretien qui il avait eu le jour même avec lui, il lui confirmait que la société I.M.V. souhaitait obtenir de l'organisation du « Forum 1985 » et comme pour les années passées, une avance de trésorerie qu'il estimait devoir être fixée à 600 000 francs ;
Il avait expliqué alors que les pertes successives des précédents forums, d'une part, et le fait, d'autre part, que soixante-dix participants n'avaient pas encore réglé leur frais d'inscription pour le « Forum 1984 », avaient affecté la trésorerie de la société I.M.V. ;
Il avait en outre précisé par la même lettre qu'une somme de 400 000 francs correspondant à l'avance pour l'organisation du « Forum 1984 » était bloquée à la B.U.O.C.F., que pour faciliter l'action de la société I.M.V. il convenait que ce compte fut débloqué afin que la société I.M.V. puisse disposer de la somme de 400 000 francs, qu'il souhaitait, à cette fin, que la caution donnée par la « B.U.O.F.C. » à la société I.M.V. soit reconduite pour un an et qu'il escomptait, enfin, que cette banque cautionnerait pareillement le remboursement des 200 000 francs restants dont il souhaitait obtenir l'avance dès le 1er septembre 1984, cet ensemble d'opérations, ajoutait-il, devant éviter les transferts de fonds dans un souci de simplicité ;
Quelques jours après cette lettre, soit le 29 mars 1984 M. D. avait d'autre part écrit à la B.U.O.F.C. :
« Suite à nos communications de ce jour avec Monsieur L. B., secrétaire général du Festival de Télévision de Monte-Carlo, nous vous confirmons les points suivants :
1° Monsieur P., directeur du Budget de la Principauté de Monaco m'a donné son accord pour nous consentir une avance immédiate de 500 000 francs ; les 400 000 francs actuellement sur le compte bloqué n'auront pas à être reversés à la Principauté et Monsieur P. nous fera parvenir dans les meilleurs délais 100 000 francs supplémentaires ;
2° Le Comité du Festival est d'accord pour subventionner jusqu'à concurrence de 200 000 francs les pertes éventuelles du » Forum 85 « ;
3° Notre société est également chargée par le Comité de l'organisation et de la prospection de tous les participants payants et de la partie vidéo du Festival ;
En conséquence, nous vous prions de vous mettre en relations avec Monsieur P. pour débloquer le compte I.M.V. Forum et créditer de 402 342 francs le compte I.M.V. n° 1210 32246-10 (...) » ;
A la date du 5 juillet 1984, soit un mois après la signature du contrat susvisé relatif au « Forum 1985 » se tenait à Paris l'assemblée générale ordinaire des associés de la société I.M.V. ;
Le procès-verbal qui en a été dressé rapporte en particulier, quant à l'opportunité pour la société I.M.V. de continuer en 1985 l'opération du Forum de Monte-Carlo, que celle-ci engendrait des pertes croissantes, ce qui causait un grave déséquilibre financier à la société, que pour 1985 les difficultés qui en résultaient étaient d'autant plus graves que la société n'avait pu obtenir de caution bancaire, et que, si une augmentation de capital, proposée par M. D., pouvait, dans l'immédiat, améliorer la trésorerie de la société cela ne pouvait avoir à terme aucun résultat quant à l'opération envisagée qui apparaissait en elle-même déficitaire ;
Prenant acte de ces circonstances et de l'absence de réponse à la lettre adressée au Trésorier Général du Comité sous la date du 6 juin 1984, l'assemblée générale a, dès lors, décidé de ne pas donner suite à la participation de la société à l'organisation du forum et l'exposition de 1985 de Monte-Carlo ;
Cette décision a été officiellement communiquée au secrétariat général du comité par une lettre en date du 6 juillet 1984 ;
Par l'exploit susvisé de Maître Escaut-Marquet, huissier, l'État de Monaco a, sur ce, fait assigner M. D., pris tant en son nom propre que comme directeur général de la « SARL International Marketing Video » ainsi que cette société, aux fins d'obtenir, d'une part, que soit déclarée constitutive d'un abus de droit et d'un quasi délit, l'inexécution par ces deux défendeurs en juillet 1984, de leurs obligations antérieures librement contractées à son égard, d'autre part, la résiliation à leurs torts exclusifs du contrat susvisé, et, enfin, leur condamnation à lui payer, après expertise au besoin la somme de 700 000 francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice tant matériel que moral par lui subi à raison de leurs fautes et agissements délibérés ;
Concluant conjointement en défense la société I.M.V. et M. D. ont principalement demandé au Tribunal, en premier lieu, de se déclarer incompétent au profit du Tribunal de première instance de Paris, dans le ressort duquel ils se trouvent domiciliés et qui, étant une juridiction française, aurait seul vocation à connaître du présent litige sur le fondement de l'article 15 du Code civil français ;
Ils ont ensuite excipé du défaut de qualité pour agir en l'espèce de l'État de Monaco, dès lors qu'ils n'auraient contracté qu'avec le « Comité d'organisation du festival international de télévision », dont ils admettent néanmoins le défaut de personnalité juridique, en sorte que selon eux, le contrat par lui souscrit serait nul ;
Subsidiairement et au fond, ils ont toutefois conclu au rejet de l'action présentement introduite en demandant au Tribunal de dire et juger que le contrat du 6 juin 1984 avait été résilié le 6 juillet 1984 pour cause de force majeure, faute de la reconduction d'une avance de trésorerie refusée par le Comité, de dire et juger qu'une telle résiliation avait été causée par le seul souci de l'assemblée susvisée des associés d'éviter des pertes irréparables et de déclarer enfin que l'État de Monaco n'avait pas subi aucun préjudice en l'espèce puisqu'il avait été informé de la résiliation dont s'agit suffisamment à temps pour prendre ses dispositions ;
Ils ont soutenu à cet égard que le contrat du 6 juin 1984 avait été conclu sur l'engagement par le comité de reconduire l'avance de trésorerie de 400 000 francs consentie pour le « Forum 1984 » et de la voir portée à 500 000 francs, que le Comité avait toutefois, en omettant de répondre positivement à la lettre ci-dessus mentionnée du 6 juin 1984 adressée à son trésorier général, refusé de consentir l'avance de trésorerie promise, à défaut de voir celle-ci garantie par une caution bancaire qui n'avait pu être obtenue, et qu'ainsi, faute de l'avance de trésorerie indispensable pour couvrir les premiers frais du « Forum 85 » le contrat n'avait pu être exécuté en raison d'une circonstance de fait indépendante de leur volonté ;
Selon eux, de la sorte, la responsabilité de la rupture incomberait uniquement au Comité dès lors que celui-ci avait imposé une exigence nouvelle qu'il savait impossible à réaliser s'agissant en l'occurrence de la caution bancaire à fournir, ce qui témoignerait en définitive de la volonté dudit Comité de se défaire de son engagement afin de conclure sur d'autres bases avec un tiers ;
En ce qui le concerne particulièrement M. D. a demandé que soit relevé l'absence de toute faute personnelle de sa part ;
Reconventionnellement, et toujours à titre subsidiaire, ce dernier et la société I.M.V. ont, enfin, sollicité de l'État de Monaco, le paiement de la somme de 50 000 francs pour chacun à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral par eux subi et, en outre, celle de 5 000 francs pareillement pour chacun, à titre de « frais irrépétibles » ;
En réplique l'État a d'abord conclu au rejet de l'exception d'incompétence soulevée, en se fondant sur les dispositions de l'article 3, 2° du Code de procédure civile et la réalité de sa qualité pour agir, motif pris de ce qu'il avait contracté en l'espèce avec la société I.M.V. par le truchement de son comité d'organisation du Festival International de Télévision ;
Quant au fond, il a par ailleurs fait valoir pour l'essentiel, en ce qui concerne l'imputabilité de la rupture, d'une part, que l'attitude de la société I.M.V. était contradictoire en ce que, tout en alléguant des pertes, cette partie avait néanmoins signé le contrat du 6 juin 1984 sur la simple promesse d'une avance de trésorerie au demeurant distincte, de par son caractère remboursable d'une subvention définitivement acquise, d'autre part que, lors des précédents forums, la société I.M.V. n'avait reçu d'avances que garanties par une caution bancaire, laquelle en était, d'un commun accord et selon une règle plusieurs fois rappelée à M. D. la condition « sine qua non », et, enfin, que c'est en réalité la société I.M.V. qui avait manifesté en l'espèce une exigence nouvelle, puisque cette société avait en définitive tenté d'obtenir du Comité, postérieurement au contrat, une avance sans caution à laquelle il ne pouvait être cependant consenti même en contre partie d'une délégation de recettes, car une telle délégation n'offrait, par principe, ni sûreté ni privilège légal, qu'elle était en outre aléatoire en fait et qu'ainsi elle contrevenait aux impératifs de gestion des finances publiques ;
En ce qui concerne son préjudice l'État a estimé par ailleurs que la rupture du contrat dont s'agit s'était accompagnée de manœuvres dolosives ayant consisté notamment pour les dirigeants de la société I.M.V. à utiliser lors de la préparation d'une manifestation concurrente devant se dérouler à Paris du 10 au 17 mars 1985, outre leur expérience acquise à Monaco de 1982 à 1984, les résultats des travaux préalables au « Forum 1985 » de Monte-Carlo effectués entre le 6 juin et le 6 juillet 1984, que de telles manœuvres lui avaient occasionné un préjudice moral, et qu'en outre la rupture du contrat lui avait causé un préjudice financier important découlant tant de la nécessité de rechercher rapidement un autre prestataire de services que du retard dont avait initialement souffert, en conséquence, la « commercialisation » du Forum 1985, ce qui avait compromis le bon déroulement de celui-ci ;
Sur quoi,
Attendu que le contrat dont s'agit daté du 6 juin 1984, commande en l'espèce, en raison du lieu prévu pour son exécution la compétence du Tribunal fondée sur l'article 3, 2° du Code de procédure civile à juste titre invoqué par l'État de Monaco, et, partant, le rejet de l'exception d'incompétence soulevée par la société I.M.V. et par M. D., au demeurant fondée sur des dispositions étrangères à l'ordre juridique interne monégasque, et qui ne sauraient, pour ce, recevoir présentement application ;
Attendu par ailleurs qu'en faisant souscrire ledit contrat par son « Comité d'organisation du Festival International de Télévision » dont l'absence de personnalité morale n'est pas contestée en l'espèce, l'État de Monaco n'a fait qu'agir par l'intermédiaire de cet organisme comme le prévoit l'ordonnance souveraine n° 5834 du 21 juin 1976, d'application générale, en sorte que la société I.M.V. et M. D., qui ne pouvaient ignorer que le patrimoine de l'État se trouverait engagé par l'avance de fonds qu'ils escomptaient obtenir de la Trésorier Générale des Finances de la Principauté, doivent être déclarés mal fondés en leur moyen tiré du défaut de qualité pour agir allégué de l'État de Monaco ;
Attendu sur ce et au fond qu'il est acquis aux débats que la rupture du contrat dont s'agit, notifiée le 6 juillet 1984 l'État, est intervenue à l'initiative unilatérale de la société I.M.V. ;
Attendu qu'aux fins de la demande introduite par l'État il convient dès lors d'examiner, d'une part, si ladite rupture était justifiée pour la société I.M.V. à défaut de que celle-ci ne pouvait sans faute, se délier de ses engagements et devra dès lors en supporter les conséquences dommageables éventuellement subies par l'État, et, d'autre part, si M. D., attrait à l'instance aux côtés de la société I.M.V., doit pareillement pour sa part encourir une responsabilité dans cette même rupture ;
Attendu que, sur ce dernier point, et dès lors qu'ainsi qu'il est constant, c'est l'assemblée générale ordinaire des associés de la société I.M.V. qui a décidé - par un vote auquel M. D. s'est abstenu - de mettre fin à la participation de cette société au Forum 1985 de Monte-Carlo, M. D. ne saurait être tenu, même en partie, pour personnellement responsable de la résiliation invoquée, alors qu'il ressort par ailleurs des termes ci-dessus rapportés du procès-verbal de l'assemblée générale des associés de la société I.M.V. et de la correspondance écrite par M. D. que celui-ci a entendu favoriser la réalisation du forum jusqu'à la décision de sa société de ne plus y participer ;
Qu'aucune demande dirigée contre lui de ce chef ne saurait être dès lors, déclarée fondée, étant par ailleurs relevé que nul élément de fait particulier qui aurait été par lui personnellement commis au détriment de l'État n'a été en l'espèce allégué ni prouvé, en sorte, qu'il y a lieu de rejeter l'ensemble des demandes de l'État formulées contre M. D. pris en son nom personnel ;
Attendu d'autre part, qu'ainsi qu'il résulte du procès-verbal susvisé, la rupture du contrat du 6 juin 1984 n'a été réellement déterminée le 5 juillet suivant que par le souci qu'avait alors la société I.M.V., qui en a elle-même convenu dans ses conclusions, de ne pas compromettre son existence par sa participation à des opérations déficitaires pour elle, telles que le Forum 1985 de Monte-Carlo, dont elle n'aurait pas pu supporter sans péril les charges financières ;
Attendu cependant que ladite société ne pouvait qu'être à même d'appréhender en fait la réalité de telles charges lors de la signature du contrat rompu comme il vient d'être dit, puisque, antérieurement à la conclusion de celui-ci, elle avait établi, ainsi qu'a été ci-dessus relevé, un état prévisionnel des dépenses qui allaient en résulter pour elle et qu'elle n'ignorait nullement les pertes importantes et croissantes - d'ailleurs communiquées au Comité - que sa participation aux Forums antérieurs avait entraînées à son détriment ;
Attendu qu'ainsi elle ne peut être admise à soutenir comme elle l'a fait que la rupture par elle de ses relations contractuelles avec l'État de Monaco, relatives au Forum 1985, n'aurait été le fruit que d'un cas de force majeure étranger à ses prévisions ou à sa volonté, alors surtout que l'insuffisance alléguée des fonds nécessaires à la préparation du Forum 1985 qu'elle impute seulement au refus de l'État de lui consentir une avance (- refus au demeurant amplement justifié par le défaut de la caution qu'elle se devait de fournir et qui lui était légitimement réclamée à titre de garantie -) n'apparaît pas avoir constitué en l'espèce un obstacle absolu à l'exécution du contrat du 6 juin 1984, puisqu'il appartenait à la société I.M.V., en contractant avec l'État, de prendre à temps toutes dispositions utiles d'ordre financier pour faire face conformément à ses engagements à l'ensemble de ses charges prévisibles de manière définitive, et, momentanément, aux besoins de sa trésorerie dont nulle disposition dudit contrat n'imposait, sans caution, l'avance par l'État ;
Attendu qu'il s'ensuit que la rupture du contrat du 6 juin 1984, intervenue entre les parties le 6 juillet 1984, s'analyse en une résiliation anticipée unilatérale et fautive imputable à la seule société I.M.V. ;
Que celle-ci doit être dès lors déclarée tenue d'indemniser l'État de Monaco des conséquences dommageables qui ont pu en résulter pour lui ;
Attendu qu'avant dire droit sur l'étendue de celles-ci, il convient, toutefois de procéder à une expertise à l'effet d'apprécier la nature et l'importance de tous chefs de dommage pouvant être invoqués par l'État auquel, en sa qualité de partie demanderesse à l'instance devant supporter la charge de la preuve, devra dès lors incomber l'avance des frais de l'expertise ;
Attendu par ailleurs que les demandes de dommages-intérêts respectivement formulées par M. D. et par la société I.M.V. (laquelle ne saurait au surplus y être admise au regard de sa volonté fautive de résiliation, ci-dessus rapportée) doivent être rejetées dès lors, notamment, qu'aucune faute de nature contractuelle ou procédurale n'apparaît avoir été commise à l'occasion de la présente instance par l'État, dont le souci de préserver ses intérêts pouvait légitimement commander en l'espèce le principe d'une action dirigée conjointement contre la société I.M.V. et contre M. D. qui avait représenté celle-ci dans ses relations avec le Comité d'organisation du Festival International de Télévision et qui, ainsi qu'il est constant, avait été conseiller technique à titre personnel dudit Comité ;
Attendu enfin que la société I.M.V. qui succombe dans la présente instance doit en supporter entièrement les dépens ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal,
Statuant contradictoirement,
Rejette les demandes formulées par la société International Marketing Video et par M. D., quant à l'incompétence du Tribunal et au défaut de qualité pour agir de l'État de Monaco ;
Prononce, avec effet du 6 juillet 1984 et aux torts exclusifs de la Société International Marketing Video (I.M.V.), la résiliation du contrat susvisé conclu le 6 juin 1984 ;
Dit l'État de Monaco recevable mais mal fondé en ses demandes dirigées contre M. D. ;
Déclare en revanche, la société International Marketing Video (I.M.V.) tenue d'indemniser entièrement l'état des conséquences dommageables pour lui de la résiliation intervenue ;
Avant de statuer au fond sur l'étendue desdites conséquences désigne en qualité d'expert Monsieur Bedel René, demeurant à ., lequel serment préalablement prêté aux formes de droit aura pour mission de rapporter au Tribunal tous éléments de fait permettant d'apprécier la nature et l'importance des préjudices qui ont pu être subis par l'État de Monaco consécutifs à la rupture par la Société International Marketing Video (I.M.V.) du contrat susvisé conclu le 6 juin 1984 ;
Dit que l'expert ainsi désigné répondra à tous dires écrits des parties en relations avec sa mission, conciliera ces mêmes parties si faire se peut, et déposera un rapport de sa mission dans les 4 mois du début des opérations d'expertise ;
Désigne Madame Monique François, Premier juge au siège, pour suivre lesdites opérations d'expertise ;
Dit qu'en cas d'empêchement du magistrat ainsi désigné il sera procédé à son remplacement par simple Ordonnance ;
Déboute la société International Marketing Video (I.M.V.) et M. D. de leurs demandes respectives de dommages-intérêts ;
Composition
MM. Huertas, prés. ; Serdet, subst. proc. gén. ; MM. J.-Ch. Marquet, Lorenzi, av. déf.
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