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12/12/1985 | MONACO | N°25168

Monaco | Tribunal de première instance, 12 décembre 1985, Y. c/ B. et Crédit Lyonnais.


Abstract

Saisie-arrêt

Compétence de la juridiction monégasque

Résumé

Un débiteur objet pour une même dette à la fois d'une saisie-arrêt sur son compte bancaire à Monaco et d'une saisie-arrêt sur son compte bancaire en Suisse ne peut invoquer lors de l'instance en validité devant la juridiction monégasque les exceptions de litispendance et de connexité, étant de principe que celles-ci ne peuvent être opposées lorsqu'elles tendent comme c'est le cas en l'espèce, à dessaisir cette juridiction au profit d'une juridiction étrangère.

La juridic

tion monégasque aussi compétente est fondée à ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée à...

Abstract

Saisie-arrêt

Compétence de la juridiction monégasque

Résumé

Un débiteur objet pour une même dette à la fois d'une saisie-arrêt sur son compte bancaire à Monaco et d'une saisie-arrêt sur son compte bancaire en Suisse ne peut invoquer lors de l'instance en validité devant la juridiction monégasque les exceptions de litispendance et de connexité, étant de principe que celles-ci ne peuvent être opposées lorsqu'elles tendent comme c'est le cas en l'espèce, à dessaisir cette juridiction au profit d'une juridiction étrangère.

La juridiction monégasque aussi compétente est fondée à ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée à Monaco en application de l'article 483 du Code de procédure civile dès lors que celle-ci apparaît inutile, la somme saisie-arrêtée en Suisse garantissant amplement la créance.

Le prononcé de cette mainlevée épuise la compétence de la juridiction monégasque que celle-ci tirait uniquement de l'article 3-9 du Code de procédure civile, lui ayant permis jusque-là de connaître du litige opposant les parties en présence, puisque celles-ci étrangères ne sont pas domiciliées dans la Principauté et ne prétendent pas quant au fond que leurs obligations, à caractère personnel, soient nées à Monaco ou aient à y être exécutées, de sorte que la demande de sursis présentée par le créancier devenue inopérante doit être rejetée.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que suivant l'exploit susvisé L. E. Y. qui, par une ordonnance présidentielle en date du 13 juillet 1985 avait été autorisé à concurrence de 1 100 000 francs à pratiquer entre les mains du Crédit Lyonnais (Agence Centrale de Monte-Carlo) une saisie-arrêt sur les fonds revenant aux époux B., a fait assigner ces derniers en validité de la saisie-arrêt ainsi autorisée, à laquelle il a procédé par ledit exploit, de même que l'établissement bancaire, tiers saisi, aux fins de sa déclaration requise effectuée sous la date du 29 juillet 1983, dont il ressort qu'au 20 juillet 1983 le compte ouvert par S. B. dans les livres du Crédit Lyonnais présentait un solde de 1943,85 francs, sauf erreur ou omission ;

Attendu que ce demandeur - qui s'estime créancier envers les époux B. d'une somme de 1 050 000 francs en principal pour avoir prêté à G. B. 200 000 francs, en échange de quatre chèques de 50 000 francs chacun signés sans date par cette dernière, pour avoir en outre, prêté à S. B. 425 000 francs, objet d'une reconnaissance de dette datée du 9 février 1982, et pour avoir, enfin, obtenu de ce même S. B., deux actes de virement, sans date, de 250 000 francs et de 175 000 francs, respectivement, qui seraient toutefois demeurés sans effet - a originairement demandé, de manière implicite au regard des termes de l'assignation ainsi délivrée aux époux B., que ceux-ci soient condamnés à lui payer la somme totale de 1 200 000 francs en principal, frais et accessoires ;

Attendu que ces deux défendeurs - qui ont dès leurs premières conclusions datées du 6 décembre 1984 invoqué une action introduite à Genève par E. Y., pour la même créance de 1 050 000 francs, tendant à la déclaration de validité d'une saisie-arrêt pratiquée le 27 juin 1983 sur leurs comptes, auprès de l'Union des Banques Suisses, dont il serait résulté un blocage à leur détriment des sommes de 210 240,94, 62 137, 220 200 et 155 500 francs suisses, supérieures dans leur total aux causes de la présente instance - demandent au Tribunal de constater la litispendance et la connexité existant entre ladite instance et celle engagée en Suisse, de se dessaisir de l'actuel litige en faveur du Tribunal de première instance de Genève et de condamner le demandeur à leur payer 30 000 francs à titre de dommages-intérêts le tout avec exécution provisoire ;

Attendu qu'E. Y. - admettant en réponse, que la demande par lui introduite à Genève contre les défendeurs tend bien à titre principal au paiement de la créance actuellement litigieuse, mais soutenant que la présente demande en diffère car elle vise la validation de la saisie-arrêt pratiquée à Monaco et, en outre que la litispendance n'opère pas par principe au profit de juridictions étrangères - conclut en dernier lieu à ce qu'il plaise au Tribunal déclarer bonne et valable la saisie-arrêt pratiquée sur le compte ouvert par S. B. au Crédit Lyonnais de Monte-Carlo mais, concomitamment, surseoir à statuer sur la demande en paiement présentement introduite à Monaco contre les époux B. jusqu'à ce que la juridiction genevoise se soit prononcée sur le fond ;

Attendu que les époux B. - qui, d'une part, rappellent que la présente instance, tend non seulement à la validité de la saisie-arrêt pratiquée à Monaco, mais aussi au paiement de la même créance que celle invoquée en Suisse, et, qui, d'autre part, relèvent qu'E. Y., admet bien que seul le Tribunal de première instance de Genève devrait se prononcer au fond, car ce demandeur sollicite de ce chef un sursis à statuer, - maintiennent leurs moyens de litispendance et de connexité et concluent en définitive à ce que le Tribunal se dessaisisse de la demande de paiement au profit du Tribunal de première instance de Genève, et en ce qui concerne l'instance en validité de la saisie-arrêt pratiquée à Monaco, à ce que, sans surseoir à statuer comme il est demandé de ce chef, le Tribunal ordonne la mainlevée de ladite saisie-arrêt qui serait abusive et superflue en raison des garanties obtenues en Suisse dès le 27 juin 1983 par suite du blocage alors effectué de sommes excédant en montant les causes de la présente instance ;

Sur quoi,

Attendu qu'il est de principe selon la jurisprudence constante des juridictions monégasques que les exceptions de litispendance et de connexité ne peuvent être opposées devant lesdites juridictions lorsqu'elles tendent à les dessaisir au profit d'une juridiction étrangère ;

Que les moyens invoqués par les époux B. pour obtenir le dessaisissement du Tribunal, relativement au présent litige, au profit du Tribunal de première instance de Genève, doivent être dès lors rejetés ;

Attendu que pour autant le sursis à statuer réclamé par E. Y. n'a pas lieu d'être nécessairement écarté, si une bonne administration de la justice motivée par les éléments de fait ou de droit de la cause devait commander d'y faire droit ;

Que cela suppose, cependant, que le Tribunal se trouve compétent pour connaître du fond de la demande sur laquelle son sursis à statuer aura été prononcé ;

Attendu qu'en l'espèce les effets de la saisie-arrêt pratiquée à Monaco suivant exploit susvisé, et dont la validation est d'ores et déjà présentement sollicitée concomitamment avec le sursis à statuer demandé quant au fond, n'apparaissent pas devoir être maintenus plus avant en l'état des garanties non contestées par E. Y. que les époux B. invoquent comme ayant été judiciairement procurées à ce dernier en Suisse le 27 juin 1983, soit avant la saisie-arrêt dont s'agit, autorisée le 13 juillet 1983 comme il a été ci-dessus rappelé ;

Que du fait de la procédure en préalable ainsi engagée à Genève, le cumul d'une telle procédure et de la présente saisie-arrêt apparaît en effet avoir revêtu, dès l'origine, un caractère manifestement inutile compte tenu de la modicité de la somme effectivement saisie-arrêtée à Monaco, comparativement à la créance invoquée, amplement garantie en Suisse ;

Qu'il s'ensuit que, faisant application de l'article 483 du Code de procédure civile, le Tribunal se doit de faire droit à la demande de mainlevée à juste titre formulée par les défendeurs à la présente instance, ce, avec exécution provisoire ainsi qu'il en est requis, vu l'urgence tenant en l'espèce à la nécessité légitimement invoquée par les époux B. de recouvrer sans plus tarder la disponibilité du compte bancaire frappé depuis le 15 juillet 1983 par ladite saisie-arrêt ;

Attendu toutefois que ces mêmes époux B., faute d'avoir justifié en l'espèce, en raison précisément de la modicité de la somme saisie-arrêtée, du préjudice que leur aurait causé, par son caractère abusif, une telle saisie-arrêt ne sauraient être admis dans leur demande de dommages-intérêts introduite reconventionnellement à l'encontre d'E. Y. ;

Attendu qu'ainsi, en l'état de la mainlevée à laquelle il sera procédé, il y a lieu pour le Tribunal de constater qu'il se trouve désormais dépourvu du seul chef de compétence, tiré de l'article 3, 9° du Code de procédure civile, lui permettant jusqu'ici de connaître du litige opposant les parties actuellement en présence, puisque celles-ci, étrangères, ne sont pas domiciliées dans la Principauté et ne soutiennent pas, quant au fond, que leurs obligations à caractère personnel soient nées à Monaco ou aient à y être exécutées ;

Qu'il y a dès lors lieu de rejeter, pour ce, la demande de sursis à statuer dont le Tribunal a été en dernier lieu saisi et de condamner le demandeur principal, qui succombe, aux dépens du présent jugement ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Rejette les moyens de litispendance et de connexité invoqués par les époux B. ; faisant toutefois droit à la demande formulée par ces derniers, donne mainlevée, avec toutes conséquences légales, de la saisie-arrêt susvisée pratiquée le 15 juillet 1983 auprès de l'Agence centrale de Monte-Carlo du Crédit Lyonnais ;

Ordonne, de ce chef l'exécutoire provisoire du présent jugement ;

Se déclare désormais incompétent ;

Rejette en conséquence la demande de sursis à statuer formulée par E. Y. ;

Déboute celui-ci du surplus de ses demandes ;

Composition

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Lorenzi, M. Marquet, J.-Ch. Marquet, av. déf. ; Benizat, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25168
Date de la décision : 12/12/1985

Analyses

Opérations bancaires et boursières ; Compétence


Parties
Demandeurs : Y.
Défendeurs : B. et Crédit Lyonnais.

Références :

article 3, 9° du Code de procédure civile
article 483 du Code de procédure civile
article 3-9 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1985-12-12;25168 ?

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