Abstract
Commandement de payer – Opposition – Mesures d'exécution forcée – Exécution provisoire
Résumé
La S. C. S. A s'oppose au commandement de payer délivré par e. C., en exécution du jugement du tribunal de première instance de Monaco du 26 janvier 2023 et de l'ordonnance du Premier Président de la cour d'appel de Monaco du 3 novembre 2023 ayant maintenu l'exécution provisoire du jugement précité en invoquant l'existence d'une prochaine cession d'un fonds de commerce de nature à lui permettre de régler rapidement sa dette en totalité. Après analyse des pièces produites contradictoirement aux débats, seul un échange de courriers électroniques entre la représentante légale de la S. C. S. A et un éventuel acquéreur du fonds de commerce a été communiqué. Or, cet échange ne caractérise nullement pour la S. C. S. A la possibilité de régler rapidement sa dette envers e. C. ainsi qu'une éventuelle acceptation du créancier de suspendre l'exécution de la décision alors qu'il bénéficie de l'exécution provisoire, de surcroit confirmée par ordonnance du Premier Président de la cour d'appel. Au contraire, il convient de constater que l'échange de courriels précités n'a donné lieu à aucune suite à ce jour et que seul un paiement fractionné sur trois années était proposé qui ne permettait pas de régler à court terme la dette. Par conséquent, il convient de déclarer régulier et valable le commandement de payer délivré par e. C. à la S. C. S. A le 12 décembre 2023.
Sur les mesures d'exécution forcée envisagées par le créancier, la S. C. S. A estime que la mesure de saisie du fonds de commerce envisagée par e.C est excessive et inappropriée. En l'espèce, e. C. agit sous le bénéfice de l'exécution provisoire du jugement prononcé par le tribunal de première instance de Monaco le 26 janvier 2023 et de l'ordonnance du Premier Président de la cour d'appel de Monaco en date du 3 novembre 2023 qui a maintenu l'exécution provisoire du jugement précité. De ce fait, et même si le jugement du tribunal de première instance de Monaco en date du 26 janvier 2023 est frappé d'appel, il peut être mis à exécution sous le bénéfice de l'exécution provisoire en application des dispositions de l'article 470 du Code de procédure civile. De plus, le créancier est en droit de cumuler contre son débiteur les différents modes d'exécution autorisés par la loi en application des dispositions de l'article 483 du Code de procédure civile. Par conséquent, la mesure de saisie du fonds de commerce envisagée par e. C. n'est ni excessive ni inappropriée.
Sur l'exécution provisoire du présent jugement, en l'espèce, la créance de e. C. qui est l'un des anciens associés commanditaires de la S. C. S. A, se révèle particulièrement ancienne puisqu'elle résulte de plusieurs prêts et d'un virement consentis en 2007 à la débitrice. Au surplus, e. C. s'est montré très patient vis-à-vis de sa débitrice qui a bénéficié d'un protocole d'accord signé par les parties les 26 mars et 10 juin 2017 regroupant les différents prêts et accordant notamment des délais de paiement et des mensualités réduites à court terme. De ce fait, au vu de l'ancienneté de la dette et des délais de paiements conventionnels, puis judiciaires, déjà accordés et non respectés en totalité, le Tribunal fait droit à la demande d'exécution provisoire présentée par Monsieur e. C. qui est âgé à ce jour de 86 ans.
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
N° 2024/000226 (assignation du 13 décembre 2023)
JUGEMENT DU 29 MAI 2024
En la cause de :
* La société en commandite simple dénommée S. C. S. A, dont le siège social est sis x1 à Monaco, prise en la personne de sa gérante commanditée en exercice, v. B., demeurant en cette qualité audit siège ;
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'une part ;
Contre :
* e. C., né le jma à Colne (Lancashire -Grande -Bretagne), de nationalité britannique, demeurant C/O s.D, x2, BB12 7ND Simonstone (Grande-Bretagne) ;
DÉFENDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Stephan PASTOR, avocat près ladite Cour ;
d'autre part ;
Visa
LE TRIBUNAL,
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, huissier, en date du 13 décembre 2023, enregistré (n° 2024/000226) ;
Vu les conclusions récapitulatives de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de e. C., en date du 25 janvier 2024 ;
À l'audience publique du 14 mars 2024, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé le 29 mai 2024, par mise à disposition au Greffe.
Motifs
FAITS ET PROCÉDURE :
Par jugement du tribunal de première instance de Monaco du 26 janvier 2023, la société en commandite simple de droit monégasque dénommée S. C. S. A dont le siège social se trouve x1 à Monaco, a été condamnée, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à payer à e. C. la somme de 2.092.133,76 €.
Cette décision a laissé la possibilité à la S. C. S. A de régler sa dette au moyen de 11 mensualités de 190.193 € et d'une 12ème mensualité représentant le solde.
La S. C. S. A a ensuite fait appel de ce jugement et a demandé l'arrêt de l'exécution provisoire devant le premier président de la cour d'appel qui a rejeté cette requête par ordonnance du 3 novembre 2023, l'appel principal du jugement du 26 janvier 2023 restant, à ce jour, pendant devant la Cour d'appel de Monaco.
Puis, la S. C. S. A ne s'étant acquittée que partiellement de la première mensualité à hauteur de 189.752,18 €, les autres mensualités restant totalement impayées, e. C. a fait délivrer un commandement de payer sa dette dans un délai de 24 heures à la S. C. S. A par acte d'huissier en date du 12 décembre 2023.
Le 14 décembre 2023, e. C. a également saisi le fonds de commerce, le droit au bail, le matériel et le stock appartenant à la S. C. S. A puis a assigné en référé cette débitrice afin de faire fixer les conditions de la vente aux enchères.
La S. C. S. A a alors, par actes d'huissier en date des 13 et 23 décembre 2023, fait opposition au commandement de payer et assigné e. C. devant le Tribunal de première instance de Monaco. Cette société demande à la juridiction de :
* Recevoir la S. C. S. A en son opposition au commandement de payer du 12 décembre 2023 ;
* Dire que les mesures d'exécution forcée envisagées par Monsieur e. C. sont excessives et inappropriées au regard de la cession projetée à court terme du fonds de commerce de la S. C. S. A pour un montant de 2.500.000 euros ;
* Suspendre toutes contraintes de paiement par toutes voies ou moyens de droit notamment par voie de saisie ;
e. C., dans ses dernières conclusions récapitulatives en date du 25 janvier 2024, demande au tribunal de :
* Dire et juger que la demande en opposition au commandement de payer est irrecevable et mal fondée ;
* Débouter la S. C. S. A de l'ensemble de ses demandes ;
* Déclarer valable et régulier le commandement de payer de e. C. ;
* Dire et juger que les mesures d'exécution forcée envisagées par e. C. ne sont pas excessives ;
* Condamner la S. C. S. A à payer à e. C. une somme de 5.000 euros au titre de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;
* Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
* Condamner la S. C. S. A aux dépens de l'instance distraits au profit de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
Les débats ont été clos à l'audience du 14 mars 2024.
À l'audience du 14 mars 2024, les parties ont plaidé puis déposé leur dossier et l'affaire a été mise en délibéré au 29 mai 2024.
SUR CE
Sur l'opposition au commandement de payer
La S. C. S. A s'oppose au commandement de payer délivré par e. C., en exécution du jugement du tribunal de première instance de Monaco du 26 janvier 2023 et de l'ordonnance du Premier Président de la cour d'appel de Monaco du 3 novembre 2023 ayant maintenu l'exécution provisoire du jugement précité en invoquant l'existence d'une prochaine cession d'un fonds de commerce de nature à lui permettre de régler rapidement sa dette en totalité.
Il convient, tout d'abord, de déclarer recevable l'opposition formée régulièrement dans le cadre de la présente instance.
Après analyse des pièces produites contradictoirement aux débats, seul un échange de courriers électroniques entre la représentante légale de la S. C. S. A et un éventuel acquéreur du fonds de commerce a été communiqué.
Or, cet échange ne caractérise nullement pour la S. C. S. A la possibilité de régler rapidement sa dette envers e. C. ainsi qu'une éventuelle acceptation du créancier de suspendre l'exécution de la décision alors qu'il bénéficie de l'exécution provisoire, de surcroit confirmée par ordonnance du Premier Président de la cour d'appel.
Au contraire, il convient de constater que l'échange de courriels précités n'a donné lieu à aucune suite à ce jour et que seul un paiement fractionné sur trois années était proposé qui ne permettait pas de régler à court terme la dette.
Par conséquent, il convient de déclarer régulier et valable le commandement de payer délivré par e. C. à la S. C. S. A le 12 décembre 2023.
Sur les mesures d'exécution forcée envisagées par le créancier
La S. C. S. A estime que la mesure de saisie du fonds de commerce envisagée par e. C. est excessive et inappropriée.
En l'espèce, e. C. agit sous le bénéfice de l'exécution provisoire du jugement prononcé par le tribunal de première instance de Monaco le 26 janvier 2023 et de l'ordonnance du Premier Président de la cour d'appel de Monaco en date du 3 novembre 2023 qui a maintenu l'exécution provisoire du jugement précité.
De ce fait, et même si le jugement du tribunal de première instance de Monaco en date du 26 janvier 2023 est frappé d'appel, il peut être mis à exécution sous le bénéfice de l'exécution provisoire en application des dispositions de l'article 470 du Code de procédure civile.
De plus, le créancier est en droit de cumuler contre son débiteur les différents modes d'exécution autorisés par la loi en application des dispositions de l'article 483 du Code de procédure civile.
Par conséquent, la mesure de saisie du fonds de commerce envisagée par e. C. n'est ni excessive ni inappropriée.
Sur l'exécution provisoire du présent jugement
En application de l'article 202 du Code de procédure civile, « hors les cas dans lesquels la décision en bénéficie de plein droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, par la décision qu'elle est destinée à rendre exécutoire, sous réserve des dispositions de l'article 203 ».
Le texte précise que « l'exécution provisoire peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi ».
En l'espèce, la créance de e. C. qui est l'un des anciens associés commanditaires de la S. C. S. A, se révèle particulièrement ancienne puisqu'elle résulte de plusieurs prêts et d'un virement consentis en 2007 à la débitrice.
Au surplus, e. C. s'est montré très patient vis-à-vis de sa débitrice qui a bénéficié d'un protocole d'accord signé par les parties les 26 mars et 10 juin 2017 regroupant les différents prêts et accordant notamment des délais de paiement et des mensualités réduites à court terme.
De ce fait, au vu de l'ancienneté de la dette et des délais de paiements conventionnels, puis judiciaires, déjà accordés et non respectés en totalité, le Tribunal fait droit à la demande d'exécution provisoire présentée par Monsieur e. C. qui est âgé à ce jour de 86 ans.
Sur les frais irrépétibles
L'article 238-1 du Code de procédure civile prévoit que :
« Le juge condamnera la partie tenue aux dépens ou qui perdra son procès à payer :
* 1° à l'autre partie la somme qu'il déterminera au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
* 2° et le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'assistance judiciaire une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'assistance aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide ;
Dans tous les cas, le juge tiendra compte de l'équité, de la situation économique de la partie condamnée. Il pourra, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne pourra être inférieure à la part contributive de l'État.
L'avocat bénéficiaire de l'assistance judiciaire ne pourra cumuler la somme prévue au titre du 2° du présent article avec la part contributive de l'État ».
La S. C. S. A qui succombe est condamnée à payer à e. C. une somme de 5.000 euros en application de l'article 238-1 du Code de procédure civile.
Sur les dépens
Aux termes de l'article 231 du Code de procédure civile, la partie qui succombe est condamnée aux dépens.
Il y a donc lieu de condamner la S. C. S. A aux dépens avec distraction au profit de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur sous sa due affirmation.
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
Déclare recevable l'opposition au commandement de payer délivré par e. C. à la S. C. S. A le 12 décembre 2023 ;
Déclare régulier et valable le commandement de payer délivré par e. C. à la S. C. S. A le 12 décembre 2023 ;
Dit que la mesure de saisie du fonds de commerce envisagée par e. C. n'est ni excessive ni inappropriée ;
Déboute la S. C. S. A de l'ensemble de ses demandes ;
Condamne la S. C. S. A à payer à e. C. une somme de 5.000 euros en application de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs plus amples demandes ;
Prononce l'exécution provisoire de la présente décision ;
Condamne la S. C. S. A aux dépens de l'instance distraits au profit de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur sous sa due affirmation ;
Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Après débats en audience du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,
Composition
Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 29 mai 2024, par Madame Evelyne HUSSON, Vice-Président, Monsieur Thierry DESCHANELS, Juge, Monsieur Maxime MAILLET, Magistrat référendaire, assistés, de Madame Marine PISANI, Greffier en chef adjoint, en présence du Ministère public.
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