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27/11/1963 | MONACO | N°27467

Monaco | Tribunal Suprême, 27 novembre 1963, Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers, Société civile Coopérative d'Investissements Immobiliers c/ Directeur des services fiscaux


Abstract

Compétence

Contentieux administratif - recours pour excès de pouvoirs - actes rattachés à la perception d'une imposition - actes ne présentant pas le caractère d'une décision administrative - incompétence du Tribunal Suprême.

Compétence

Contentieux constitutionnel - caractère limitatif - dispositions constitutionnelles ne faisant pas partie du titre III de la Constitution - Incompétence du Tribunal Suprême.

Impôts et taxes

Égalité devant l'impôt - principe applicable à des contribuables se trouvant dans des situations identiq

ues et assujetties pour les mêmes opérations à des impositions différentes.

Procédure devant le Trib...

Abstract

Compétence

Contentieux administratif - recours pour excès de pouvoirs - actes rattachés à la perception d'une imposition - actes ne présentant pas le caractère d'une décision administrative - incompétence du Tribunal Suprême.

Compétence

Contentieux constitutionnel - caractère limitatif - dispositions constitutionnelles ne faisant pas partie du titre III de la Constitution - Incompétence du Tribunal Suprême.

Impôts et taxes

Égalité devant l'impôt - principe applicable à des contribuables se trouvant dans des situations identiques et assujetties pour les mêmes opérations à des impositions différentes.

Procédure devant le Tribunal Suprême

Requête collective - irrecevabilité - intérêts distincts des requérants.

Motifs

Le Tribunal Suprême

Vu la requête en date du 9 mai 1963, présentée par le Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers et de la Société civile Coopérative d'Investissements Immobiliers, tendant à l'annulation des actes relatifs aux impositions auxquelles ils ont été assujettis à raison de certaines opérations effectuées par eux entre le 1er juin 1958 et le 31 mai 1961, à la taxe sur les prestations de service, à la taxe locale et au droit de sortie compensateur, en exécution de deux contraintes décernées contre eux le 25 avril 1963 et qui leur ont été signifiées le 2 mai 1963 ;

Motif pris que lesdits actes sont anticonstitutionnels, contraires à l'ordre public, sans validité et entachés d'excès de pouvoir, que notamment, ils sont intervenus en violation de l'article 17 de la Constitution du 17 décembre 1962, d'une part et d'autre part tant des articles 21 et 22 de la Constitution du 5 janvier 1911 que des articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 73 de la Constitution du 17 décembre 1962 ;

Vu la contre-requête du Ministre d'État et du Directeur des Services Fiscaux en date du 10 juillet 1963, tendant au rejet de la requête comme non fondée ;

Vu le mémoire en réplique présenté le 1er août 1963, pour les requérants et tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu l'Ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962 ;

Vu l'Ordonnance du 16 avril 1963 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu les Ordonnances Souveraines modifiées du 17 juillet 1944 concernant les taxes sur le chiffre d'affaires et du 24 décembre 1949 instituant un droit de sortie compensateur ;

Ouï M. Louis Pichat, membre du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Mes Lorenzi et Fourcade en leurs plaidoiries ;

Ouï M. le Procureur Général en ses conclusions ;

Considérant que les conclusions de la requête formée conjointement au nom du Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers, ainsi que de la Société Civile Coopérative d'Investissements Immobiliers tendent à l'annulation des actes en vertu desquels les requérants ont été assujettis, à raison de certaines opérations effectuées par eux entre le 1er juin 1958 et le 31 mai 1961 à la taxe sur les prestations de service, à la taxe locale et au droit de sortie compensateur en vertu des Ordonnances Souveraines modifiées du 17 juillet 1944 concernant les taxes sur le chiffre d'affaires et du 24 décembre 1949, instituant un droit de sortie compensateur ;

Sur la recevabilité des requêtes :

Considérant que le Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers à Monaco, d'une part, et d'autre part la Société Civile Coopérative d'Investissements Immobiliers, constituent des personnes morales de droit privé, distinctes ; que l'appréciation du bien-fondé des conclusions présentées conjointement, par elles, comporte nécessairement l'examen de l'intérêt particulier dont peut se prévaloir chacune de ces personnes morales ; que dans ces conditions, les requérants ayant des intérêts distincts, devaient former deux requêtes séparées ; que dès lors, la requête collective n'est recevable qu'en ce qui concerne le premier requérant dénommé, à savoir le Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers ;

Sur la compétence :

Sur les conclusions tendant à l'annulation des contraintes :

Considérant, d'une part, que dans la mesure où la requête susvisée constitue opposition aux contraintes décernées en vue du recouvrement des impositions contestées et met en cause l'application des textes fiscaux sur lesquels ces impositions ont été établies, de telles conclusions présentent à juger des questions qui sont de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire en vertu des dispositions combinées des articles 61 et 62 de la loi du 29 avril 1828 sur l'enregistrement, le timbre, les droits de greffe et les hypothèques, de l'article 2 de l'Ordonnance du 19 mai 1909 portant modification du Code de procédure civile, de l'article 54 de l'Ordonnance précitée du 17 juillet 1944 et de l'article 17 de l'ordonnance précitée du 24 décembre 1949 ;

Considérant, d'autre part, que lesdites Ordonnances étaient en vigueur - et par suite applicables - au cours de la période où se sont produits les faits générateurs des impositions en cause ; qu'elles sont d'ailleurs demeurées en vigueur postérieurement au 13 octobre 1962, nonobstant la dénonciation à cette date des conventions fiscales franco-monégasques en vertu desquelles elles avaient été prises, dès l'instant où elles n'ont été abrogées ni explicitement, ni implicitement ; que dans ces conditions, c'est à bon droit qu'il a été fait application de ces textes aux impositions en cause ;

Considérant enfin, que les dispositions de l'article 90 B de l'Ordonnance Constitutionnelle du 17 décembre 1962, fixant la compétence du Tribunal Suprême et dont il convient de faire application à la date de la présente décision pour déterminer la compétence dudit Tribunal dans les litiges nés antérieurement à leur intervention et qui n'ont pas fait l'objet d'une décision de justice, n'ont pas modifié l'ordre de compétence établi en matière fiscale par les textes antérieurs précités ; qu'aux termes dudit article 90 B le Tribunal Suprême n'est, en effet, compétent en matière administrative que « sur les recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions des diverses autorités administratives et les Ordonnances Souveraines prises pour l'exécution des lois, ainsi que sur l'octroi des indemnités qui en résultent » ; que les contraintes qui constituent des actes de poursuites rendus exécutoires par l'autorité judiciaire ne présentent pas le caractère de décisions administratives au sens de l'article 90 B précité ; qu'elles ne sont par suite pas susceptibles de recours pour excès de pouvoir devant le Tribunal Suprême ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des actes, autres que les contraintes, afférents aux impositions en cause :

Considérant que, dans la mesure où la requête tend à l'annulation d'autres actes que les contraintes précitées, les conclusions ainsi présentées ne sont pas de la compétence du Tribunal Suprême dès l'instant où ces actes - qui sont d'ailleurs insuffisamment précisés et ne sont pas joints à ladite requête - se rattachent à la perception des impositions contestées ; que le litige relève, sur ce point également, de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Sur les conclusions tendant à ce que les impositions en cause soient déclarées contraires à la Constitution :

Considérant que dans la mesure où le syndicat requérant conteste devant le Tribunal Suprême les impositions auxquelles il a été assujetti, en se fondant sur des moyens tirés de ce que lesdites impositions auraient été établies en vertu de textes pris en violation de la Constitution, la requête tend à apprécier la validité de ces textes, et la compétence du Tribunal Suprême doit être déterminée et les moyens soulevés doivent être examinés au regard de l'article 90 A de l'Ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962 ; qu'aux termes de cette disposition : « En matière constitutionnelle, le Tribunal Suprême statue souverainement :°.….......... ; 2° sur les recours en annulation, en appréciation de validité et en indemnité ayant pour objet une atteinte aux libertés et droits consacrés par le Titre III de la Constitution et qui ne sont pas visés au paragraphe B du présent article » ; qu'il résulte de ces dispositions que le Tribunal Suprême n'est compétent, en matière constitutionnelle, que si les moyens invoqués visent les articles compris dans le Titre III de la Constitution et lorsque la requête ne relève pas de la compétence administrative attribuée à ce tribunal par le paragraphe B précité dudit article 90 ;

Sur le moyen tiré de la violation des articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 73 de la Constitution du 17 décembre 1962 :

Considérant que les articles dont s'agit ne font pas partie du Titre III de la Constitution ; que par suite, le Tribunal Suprême n'est pas compétent pour se prononcer sur le moyen ainsi soulevé ;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 17 de la Constitution du 17 décembre 1962 :

Considérant que ledit article, qui pose le principe de l'égalité des monégasques devant la loi, fait partie du Titre III de la Constitution ; qu'ainsi le Tribunal Suprême qui n'est pas compétent comme il a été dit ci-dessus pour statuer sur le recours dont il a été saisi en qualité de Juge de l'excès de pouvoir, est par contre, compétent en matière constitutionnelle pour en connaître ;

Au fond :

Considérant que le principe de l'égalité devant l'impôt qui résulte de l'article 17 précité et qui est invoqué par la requête, ne peut être utilement allégué qu'entre contribuables se trouvant dans des situations identiques et qui auraient été assujettis pour les mêmes opérations à des impositions différentes ;

Considérant que le syndicat requérant se borne à comparer sa situation fiscale au regard des impositions contestées aux situations fiscales hypothétiques dans lesquelles se seraient trouvés ses adhérents si ceux-ci avaient effectué, à titre individuel, les mêmes opérations en soutenant que lesdits adhérents n'auraient pas été soumis à ce titre aux mêmes impositions ; qu'un tel moyen ne vise pas des contribuables se trouvant dans des situations identiques et n'est assorti, au surplus, d'aucune précision permettant de comparer lesdites situations ; qu'ainsi le syndicat requérant n'est pas fondé, par ce moyen, à soutenir que les impositions contestées auraient été établies en violation de l'article 17 de la Constitution ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède :

D'une part que la requête doit être rejetée comme irrecevable en tant qu'elle émane de la Société Civile Coopérative d'Investissements Immobiliers ;

D'autre part que la requête doit être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître en ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des contraintes et des actes s'y rattachant ainsi que des conclusions tendant à ce qu'il soit déclaré que les impositions contestées ont été établies en violation des articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 73 de la Constitution du 17 décembre 1692 ;

Qu'enfin, ladite requête doit être rejetée comme non fondée en ce qui concerne les conclusions tendant à ce que soit déclaré que les impositions contestées ont été établies en violation de l'article 17 de la Constitution du 17 décembre 1962 ;

Sur les conclusions tendant à ce que soit ordonnée la restitution au syndicat requérant des consignations effectuées par lui :

Considérant que ces conclusions doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet des conclusions principales ;

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er

La requête est rejetée comme irrecevable en tant qu'elle émane de la Société Coopérative d'Investissements Immobiliers ;

Article 2

Les conclusions de la requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des contraintes et actes s'y rattachant sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Article 3

Les conclusions tendant à ce qu'il soit déclaré que les impositions contestées ont été établies en violation des articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 75 de la Constitution du 17 décembre 1962, sont rejetées comme n'étant pas susceptibles de recours devant le Tribunal Suprême ;

Article 4

Les conclusions tendant à ce que soit déclaré que les impositions contestées ont été établies en violation de l'article 17 de la Constitution du 17 décembre 1962 sont rejetées comme non fondées ;

Article 5

Les conclusions tendant à la restitution aux requérants des consignations effectuées par eux sont rejetées par voie de conséquence ;

Article 6

Le Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers est condamné aux dépens ;

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27467
Date de la décision : 27/11/1963

Analyses

Impôts et taxes divers


Parties
Demandeurs : Syndicat des Jeux, Cadres et Assimilés de la Société des Bains de Mer et du Cercle des Étrangers, Société civile Coopérative d'Investissements Immobiliers
Défendeurs : Directeur des services fiscaux

Références :

articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 73 de la Constitution du 17 décembre 1962
articles 4, 37, 38, 39, 66, 68, 70 et 75 de la Constitution du 17 décembre 1962
Code de procédure civile
article 90 B de l'Ordonnance Constitutionnelle du 17 décembre 1962
article 90 A de l'Ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962
Ordonnance du 16 avril 1963
articles 21 et 22 de la Constitution du 5 janvier 1911
article 17 de la Constitution du 17 décembre 1962
article 2 de l'Ordonnance du 19 mai 1909
Vu l'Ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962
articles 61 et 62 de la loi du 29 avril 1828


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;1963-11-27;27467 ?

Source

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