120 Ia 67
10. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 14 mars
1994 dans la cause L. T. contre Conseil d'Etat du canton du Valais
(recours de droit public)
A.- L'art. 1 al. 1 de l'arrêté fédéral du 19 juin 1992 sur la
viticulture (RS 916.140.1; ci-après: arrêté fédéral) dispose:
"La Confédération encourage la viticulture en:
a. autorisant la plantation de vignes uniquement dans
les régions qui s'y prêtent;
b. soutenant la production de qualité et ses appellations;
c. adaptant les récoltes à la situation du marché et à sa capacité
d'absorption."
Selon l'art. 14 al. 1 dudit arrêté, les moûts sont classés comme
suit:
"Les apports de vendange sont classés selon leur teneur naturelle
en
sucre en trois catégories:
a. catégorie 1: moûts permettant l'élaboration de vin
d'appellation
d'origine;
b. catégorie 2: moûts permettant l'élaboration de vin avec
indication
de provenance;
c. catégorie 3: moûts ne permettant que l'élaboration de vin sans
appellation d'origine ni indication de provenance."
L'art. 15 de l'arrêté fédéral fixe la teneur minimale en sucre pour
les différentes catégories de moûts. La section 6 de l'arrêté fédéral
traite de la limitation des quantités et, à l'art. 20, prévoit sous
la rubrique "limitation de la production":
"1 La production de raisins destinés à l'élaboration de moûts de
la
catégorie 1 est limitée à l'unité de surface. Les cantons fixent les
quantités de production maximales en tenant compte des récoltes de
qualité
suffisante obtenues au cours des dix années précédentes. Celles-ci
ne
peuvent être supérieures à 1,4 kg/m2 ou 1,12 l/m2 pour les raisins
blancs
et 1,2 kg/m2 ou 0,96 l/m2 pour les raisins rouges.
2 Sur proposition des Commissions régionales (art. 22), les
cantons
peuvent limiter la production de toutes les catégories pour
l'ensemble de
leur territoire ou pour une partie de celui-ci.
3 Le Conseil fédéral peut, après avoir consulté les cantons et les
Commissions régionales, limiter, le cas échéant, la production de
l'ensemble des catégories.
4 Les cantons édictent les dispositions concernant la limitation
de la
production et le déclassement et en contrôlent l'application. Ils
peuvent
appeler les Commissions régionales et les sous-commissions
cantonales à y
collaborer."
B.- Fondé notamment sur l'arrêté fédéral du 19 juin 1992 et sur la
loi cantonale du 26 mars 1980 sur la viticulture, le Conseil d'Etat
du canton du Valais a pris le 7 juillet 1993 un arrêté sur les
appellations
Extrait des considérants:
2.- a) La liberté du commerce et de l'industrie n'est pas absolue
et n'est garantie que sous réserve de la législation fédérale (art.
31 al. 1 Cst.). Les cantons peuvent aussi apporter, en vertu de
l'art. 31 al. 2 Cst., des restrictions de police au droit d'exercer
librement une activité économique. Des restrictions cantonales ne
peuvent toutefois être prises que dans le cadre de la compétence des
cantons;
3.- a) Le recourant estime ensuite que la limitation du rendement
à l'unité de surface ne répond pas à un intérêt public suffisant et
viole le principe de proportionnalité. Le recourant dénonce aussi,
pratiquement avec les mêmes arguments, une violation de l'art. 4
Cst., en soutenant que l'arrêté attaqué est arbitraire, parce qu'il
ne répondrait pas à une nécessité suffisamment marquée. En fait, le
grief tiré de l'art. 4 Cst. n'a pas de portée propre, de sorte qu'il
ne sera pas traité de manière indépendante.
b) Le Tribunal fédéral examine en principe librement la question de
l'existence de l'intérêt public et celle du respect du principe de
proportionnalité. Il s'impose cependant une certaine retenue
lorsqu'il s'agit avant tout d'un problème d'appréciation ou de
circonstances locales que l'autorité cantonale est mieux à même
d'apprécier (ATF 119 Ia 348 consid. 2a p. 353; 118 Ia 175 consid. 3a
p. 181, 394 consid. 2b p. 397).
c) Il est difficile de nier que la mesure incriminée réponde à un
intérêt public, dans la mesure où elle est prévue par le droit
fédéral lui-même. En revanche, il convient avant tout de déterminer
si cette mesure correspond à un intérêt public suffisant et si elle
respecte le principe de proportionnalité, notamment parce qu'elle est
nécessaire. Le recourant fait valoir que le Goron est un vin léger,
prisé par le consommateur, notamment parce que son prix est
avantageux. Son écoulement ne pose pas de difficulté. Une qualité
suffisante est déjà assurée par les exigences en matière de teneur
minimale en sucre naturel. Une limitation au rendement renchérirait
ce produit et priverait les exploitants d'une possibilité de revenu
d'autant plus nécessaire qu'ils sont déjà frappés par les limites de
production pour les vins de la catégorie I.
Compte tenu du plafond limite de classement, la production de vins
de la catégorie II en général et de Goron en particulier est limitée
en Valais à 1,6 kg/m2 (1,5 kg/m2 LQR selon art. 6 + 0,1 kg/m2 PLC
selon art. 8 de l'arrêté AOC). L'art. 20 de l'arrêté fédéral sur la
viticulture prévoit que les cantons peuvent limiter la production de
toutes les catégories, donc également de la catégorie II. Comme on
l'a vu plus haut, il s'agit d'éviter la surproduction, avec toutes
ses conséquences (difficulté d'écoulement, chute des prix etc...). Le
recourant prétend qu'il s'agit d'une simple possibilité et que rien
ne justifiait que le canton l'utilise en l'espèce. Une intervention
cantonale se justifie déjà pour éviter le risque de surproduction.
Les cantons