120 Ia 171
25. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 18 juillet
1994 dans la cause C. P. contre Tribunal cantonal du canton de Vaud
(recours de droit public)
A.- Le tarif vaudois du 4 décembre 1984 des frais judiciaires en
matière civile (ci-après: le tarif) a été modifié par un règlement
adopté le 1er juin 1993 par le Tribunal cantonal du canton de Vaud
(ci-après: le règlement). Le règlement comprend en particulier les
dispositions suivantes, qui fixent le montant des frais judiciaires
devant la Cour civile du Tribunal cantonal:
"Demande ou réponse
Art. 174.- Pour le dépôt d'une demande ou d'une réponse, la
partie paie,
pour une valeur litigieuse déterminée par ses propres conclusions
actives:
- jusqu'à 30'000 francs: 500 francs;
- de plus de 30'000 francs jusqu'à 100'000 francs: 1'000 francs;
Extrait des considérants:
2.- a) Les émoluments judiciaires sont des contributions causales
qui dépendent des coûts. A ce titre, ils doivent respecter les
principes de la couverture des frais et de l'équivalence (ATF 118 Ib
349 consid. 5 p. 352; 107 Ia 29 consid. 2d p. 33; 104 Ia 113 consid.
3 p. 115).
D'après le principe de la couverture des frais, l'ensemble des
ressources provenant d'un émolument ne doit pas être supérieur à
l'ensemble des dépenses de la collectivité pour l'activité
administrative en cause (ATF 106 Ia 249 consid. 3a p. 252). Les
dépenses à couvrir peuvent comprendre les frais généraux, en
particulier ceux de port, de téléphone, les salaires du personnel, le
loyer ainsi que les intérêts et l'amortissement des capitaux investis
(GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel 1984, vol. II, p.
611; MOOR, Droit administratif, Berne 1992, vol. III, p. 368).
Selon le principe de l'équivalence, le montant de chaque émolument
doit être en rapport avec la valeur objective de la prestation
fournie et rester dans des limites raisonnables (ATF 118 Ib 349
consid. 5 p. 352 et la jurisprudence citée). La valeur de la
prestation se mesure soit à son utilité pour le contribuable, soit à
son coût par rapport à l'ensemble des dépenses de l'activité
administrative en cause (ATF 118 Ib 349 consid. 5 p. 352; 109 Ib 308
consid. 5b p. 314). Pour que le principe de l'équivalence soit
respecté, il faut que l'émolument soit raisonnablement proportionné à
la prestation de l'administration, ce qui n'exclut cependant pas une
certaine schématisation. Il n'est pas nécessaire que, dans chaque
cas, l'émolument corresponde exactement au coût de l'opération
administrative. L'autorité peut également tenir compte de l'intérêt
du débiteur à l'acte officiel et, dans une certaine mesure, de sa
situation économique pour fixer les émoluments, dans les affaires
importantes, à un montant élevé qui compense les pertes subies dans
les affaires mineures (arrêt non publié du 19 mai 1993 en la cause N.
P.-D. contre GE, Président du Tribunal de première instance, consid.
4b; GRISEL, op.cit., p. 611 - au sujet du principe de la couverture
des frais - et p. 612; MOOR, op.cit., p. 369/370). Les émoluments
doivent toutefois être établis selon des critères objectifs et
s'abstenir de créer des différences que ne justifieraient pas des
motifs pertinents. Le taux de l'émolument ne doit pas, en
particulier, empêcher ou rendre difficile à l'excès l'utilisation de
certaines institutions (ATF 106 Ia 241 consid. 3b p. 244 et 249
consid. 3a p. 253).
3.- D'une manière générale, les émoluments encaissés par les
tribunaux n'arrivent pas, et de loin, à couvrir leurs dépenses (ATF
106 Ia 249 consid. 3a p. 252/253).
Dans le cas particulier, le recourant ne prétend pas que les
émoluments perçus par le Tribunal cantonal du canton de Vaud en
couvriraient les frais, mais il soutient que le principe de la
couverture des frais ne devrait être appliqué qu'aux frais directs et
immédiats, à l'exception des frais généraux et des amortissements
d'équipement, ces derniers devant être financés par les impôts au
sens strict. L'administration de la justice suppose toutefois tout un
appareil judiciaire dont l'activité ne se limite pas aux seuls actes
de procédure et qui profite directement et essentiellement aux
justiciables. Dès lors, le grief du recourant se révèle mal fondé. Au
demeurant, l'intéressé n'établit pas que les émoluments perçus par
l'autorité intimée excéderaient les frais directs du Tribunal
cantonal.
4.- a) En ce qui concerne les causes ayant une valeur litigieuse
et qui sont portées devant la Cour civile du Tribunal cantonal
jugeant en instance unique, l'autorité intimée a établi un barème qui
se fonde uniquement sur cette valeur pour déterminer les frais
judiciaires. Il s'agit d'un barème calculé par classes (30'000 fr. de
valeur litigieuse, émolument de 500 fr., soit 1,66%; 31'000 fr.,
émolument de 3,2%; 50'000 fr., émolument de 2%; 100'000 fr.,
émolument de 1%; 101'000 fr., émolument de 1,48%; 500'000 fr.,
émolument de 0,3%); la dernière classe, dépassant 500'000 fr. donne
lieu à un émolument de base de 1'500 fr., plus 1% de la valeur
litigieuse qui dépasse 500'000 fr.; un plafond est fixé à 100'000 fr.
(art. 174 du règlement), qui est atteint avec une valeur litigieuse
de 10'350'000 fr.
Le demandeur doit payer cet émolument à trois stades de la
procédure: pour le dépôt de la demande, pour l'audience préliminaire
et pour l'audience de jugement. Si le défendeur ne prend pas de
conclusions reconventionnelles, il doit payer un émolument de 500 fr.
pour le dépôt de la réponse et pour l'audience préliminaire. Pour
l'audience de jugement, il doit payer un émolument de 500 fr., si les
5.- D'après la jurisprudence relative au principe de la légalité
garanti par l'art. 4 Cst., la perception de contributions publiques -
à l'exception des émoluments de chancellerie - doit être prévue,
quant à son principe, dans une loi au sens formel du terme; si cette
dernière délègue à l'organe exécutif la compétence d'établir une
contribution, elle doit indiquer, au moins dans les grandes lignes,
le cercle des contribuables, l'objet et la base de calcul de cette
contribution (RDAF 49/1993 p. 346 consid. 2b p. 348; ATF 118 Ia 320
consid. 3a p. 323; 112 Ia 39 consid. 2a p. 43; 106 Ia 249 consid. 1
p. 250). La jurisprudence a cependant assoupli ces exigences