120 II 252
48. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 14 septembre 1994
dans la cause P. et F. contre H. SA (recours en réforme)
A.- P. a séjourné à l'hôtel H. SA, à Genève, du 29 mai au 1er juin
1986. Le 31 mai, vers 22h30-23h, il a remis les clefs de son véhicule
au chasseur de nuit pour que celui-ci le gare dans la cour extérieure
située derrière l'hôtel. Le véhicule fut volé au cours de la nuit.
Le 8 août 1986, l'assurance F. a versé à P. une indemnité de
468'928 fr. lux. pour ce sinistre.
Invoquant les art. 472 ss CO, P. et F. ont ouvert action en
paiement contre H. SA, le 14 avril 1987. P. lui réclame 948'464 fr.
lux. correspondant au dommage non couvert par l'assurance F.;
Extrait des considérants:
2.- Les demandeurs contestent la qualification du contrat admise
par la cour cantonale. Ils soutiennent qu'il ne s'agit pas d'un bail
assorti d'un mandat, ni d'un dépôt d'hôtellerie, mais d'un contrat de
dépôt ordinaire puisque le demandeur a confié sa voiture à la garde
de la défenderesse.
a) L'hôtelier qui fournit au voyageur le logement conclut avec
celui-ci un contrat d'hébergement. Comme tel, ce contrat n'est pas
réglé par la loi. Il comprend des éléments du bail, de la vente, du
mandat et du dépôt. C'est de ce dernier que relèvent les effets
apportés par le voyageur; la loi règle expressément la responsabilité
de l'hôtelier à leur sujet aux art. 487 ss CO (KELLER, Haftpflicht im
Privatrecht, 5e éd., T. I, p. 440; ENGEL, Contrats de droit suisse,
p. 573).
En vertu de l'art. 487 CO, l'hôtelier encourt une responsabilité
causale à concurrence de 1'000 fr. pour toute détérioration,
destruction ou soustraction des effets apportés par le voyageur, à
moins qu'il ne prouve que le dommage est imputable au voyageur
lui-même, à des personnes qui le visitent ou l'accompagnent ou sont à
son service, ou qu'il résulte soit d'un événement de force majeure,
soit de la nature de la chose déposée. Pour le dommage supérieur, il
n'encourt qu'une responsabilité pour faute; toutefois, le fardeau de
la preuve de celle-ci incombe au voyageur (ATF 76 II 154 consid. 4 in
fine).
3.- En l'espèce, le demandeur et la défenderesse ont passé un
contrat d'hébergement. La responsabilité de celle-ci pour les effets
apportés par celui-là découle donc des art. 487 ss CO, à moins qu'une
convention de dépôt ordinaire indépendante n'ait été conclue
spécialement pour le véhicule.
a) Les demandeurs soutiennent qu'un contrat de dépôt ordinaire
aurait été conclu parce que P. pouvait inférer de la configuration
des lieux, de la mise à disposition des chasseurs et du relevé
journalier de l'occupation des places que le parking de l'hôtel
faisait l'objet d'une surveillance particulière. En outre, en priant
le chasseur de remiser son véhicule sur le parking de l'hôtel et non
pas sur la voie publique - à supposer encore que cela fût possible -
P. aurait manifesté son intention de voir son véhicule surveillé et
donc de conclure un contrat de dépôt.
La cour cantonale a établi que le demandeur connaissait la
configuration des lieux, soit celle d'une place entourée de chaînes
mais dont l'accès n'était pas fermé, et qu'il savait que ce parking
n'était pas gardé, ni muni d'un dispositif empêchant tout un chacun
d'y accéder. La procédure probatoire a également démontré que le soir