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15/11/1994 | SUISSE | N°C.143/93

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 novembre 1994, C.143/93


120 V 502

70. Arrêt du 15 novembre 1994 dans la cause Office fédéral de
l'industrie, des arts et métiers et du travail contre X, intimé, et
Tribunal administratif du canton de Berne
A.- X a travaillé en qualité d'enseignant au Gymnase français de
Bienne. Son taux d'occupation était de 100% du 1er août 1990 au 31
juillet 1992; à partir du 1er août 1992, son horaire de travail a été
réduit de 22 à 16 heures hebdomadaires, ce qui correspondait
désormais à un degré d'occupation de 72,7%. Son salaire mensuel a été
diminué dans

la même proportion, passant de 9'338 fr. 40 à 6'791 fr.
55.
Le 11 août 1992, l'assuré a demand...

120 V 502

70. Arrêt du 15 novembre 1994 dans la cause Office fédéral de
l'industrie, des arts et métiers et du travail contre X, intimé, et
Tribunal administratif du canton de Berne
A.- X a travaillé en qualité d'enseignant au Gymnase français de
Bienne. Son taux d'occupation était de 100% du 1er août 1990 au 31
juillet 1992; à partir du 1er août 1992, son horaire de travail a été
réduit de 22 à 16 heures hebdomadaires, ce qui correspondait
désormais à un degré d'occupation de 72,7%. Son salaire mensuel a été
diminué dans la même proportion, passant de 9'338 fr. 40 à 6'791 fr.
55.
Le 11 août 1992, l'assuré a demandé l'indemnisation de son chômage
partiel. Il a par ailleurs réalisé un gain pendant les mois d'octobre
et de novembre 1992, en donnant des leçons d'appui.
Considérant en droit:
1.- Le litige porte sur le droit de l'intimé aux indemnités
journalières pour le chômage qu'il a fait contrôler du 17 août au 30
novembre 1992, étant admis qu'il dispose encore d'un revenu mensuel
supérieur à l'indemnité correspondant au gain maximal assuré, malgré
la réduction de son horaire de travail.
La solution du présent litige dépend dès lors de la notion de gain
intermédiaire au sens de l'art. 24 LACI, dans sa version - applicable
en l'espèce - en vigueur depuis le 1er janvier 1992.
2.- a) Dans sa décision du 9 décembre 1992, la caisse de chômage a
considéré que l'assuré ne subissait aucune perte de gain, du moment
que l'indemnité de chômage maximale à laquelle il aurait droit se
montait à 6'480 fr., soit 80% du salaire assuré (8'100 fr.), eu égard
à son salaire actuel de 6'791 fr. 55.
b) Les juges cantonaux ont toutefois estimé que l'appréciation de
l'administration ne pouvait être partagée, car elle conduirait à
refuser toute indemnité de chômage à un assuré partiellement sans
emploi, dont le revenu serait supérieur à l'indemnité de chômage à
laquelle il aurait droit
3.- Dans son recours relatif au présent litige, l'OFIAMT conteste
l'appréciation des premiers juges. L'autorité de surveillance
soutient que la pratique à laquelle le Tribunal administratif bernois
se réfère pour justifier la prise en considération de la perte de
gain subie par l'assuré a été abolie par l'art. 24 LACI, dans sa
version en vigueur depuis le 1er janvier 1992. La nouvelle
dénomination "gain intermédiaire" engloberait tout gain obtenu durant
une période de contrôle, qu'il s'agisse d'un gain de remplacement,
d'un gain intermédiaire ou d'un gain provenant d'une activité à temps
partiel, ceux-ci étant soumis à un régime uniforme (FF 1989 III 383
ad art. 24 et 25 LACI), cette réglementation ayant pour but d'inciter
les chômeurs à accepter des emplois leur procurant des gains
intermédiaires et à éviter les surindemnisations.
Cela étant, l'OFIAMT allègue que le fait d'assimiler une activité à
temps partiel à un gain intermédiaire se justifie par le souci de ne
pas traiter les chômeurs partiels plus favorablement que les chômeurs
complets, et pour ne pas vider l'art. 16 al. 1 let. e LACI de sa
substance. L'office recourant estime que si l'assuré devait perdre
son activité restante, il serait indemnisé sur la base du gain assuré
total et que les prestations versées jusqu'alors, calculées en gain
intermédiaire, auraient représenté moins d'indemnités. Aussi l'OFIAMT
est-il d'avis que si l'on suivait le calcul effectué par le Tribunal
cantonal, l'intimé toucherait des indemnités pleines et entières avec
un gain assuré fragmenté et qui pourrait l'être encore plusieurs
fois, en cas de diminution successive de l'activité. Il pourrait
alors arriver que, se trouvant finalement sans emploi, l'assuré ne
puisse plus toucher d'indemnités, son droit à celles-ci étant épuisé.
Dès lors, le gain obtenu par l'intimé constitue, selon l'OFIAMT, un
gain intermédiaire au sens de l'art. 24 LACI. Il s'ensuit que pour
déterminer si l'assuré subit une perte de travail à prendre en
considération, il faut calculer sa perte de gain en comparant
l'indemnité journalière (80% de 8'100 fr., soit 6'480 fr.) et le
revenu (gain intermédiaire) qu'il réalise, et non plus, comme par le
passé, en se référant à la perte de travail qu'il subit.
En conséquence, soutient le recourant, le revenu réalisé par
l'intimé dans son activité à temps partiel (6'791 fr. 55) étant
supérieur à l'indemnité à laquelle il pourrait prétendre en cas de
chômage complet (6'480 fr.), il n'a pas droit aux indemnités
litigieuses, car l'activité exercée est convenable au sens de l'art.
16 al. 1 let. e LACI.
6.- a) Sous le titre "Prise en considération du gain
intermédiaire", l'art. 24 LACI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre 1991, disposait ce qui suit:

1 Est réputé intermédiaire tout gain que le chômeur retire d'une
activité
salariée ou indépendante durant une période contrôle. Il n'est pas
tenu
compte d'un gain accessoire (art. 23, 3e al.).
2 Le montant total de l'indemnité à laquelle le chômeur aurait
droit s'il
n'avait pas de gain intermédiaire durant les périodes de contrôle
est
réduit de la moitié du gain intermédiaire. Le solde éventuel de
l'indemnité
de chômage est versé sous forme d'indemnités journalières aussi
longtemps
que le nombre maximum de ces indemnités (art. 27) n'a pas été
atteint. La
somme du gain intermédiaire et des indemnités journalières ne doit,
cependant, pas dépasser 90 pour cent du gain mensuel assuré.

Quant à l'art. 25 LACI, qui a été abrogé à partir du 1er janvier
1992, il disposait ce qui suit, sous le titre "Compensation de la
différence de revenu en cas de travail de remplacement":

1 Est réputé travail de remplacement, un emploi à plein temps que
l'assuré
accepte d'occuper pendant au moins une période complète de
contrôle, pour
éviter de tomber au chômage ou d'y rester, et dont la rémunération
est
inférieure à l'indemnité de chômage à laquelle il a droit. La
rémunération
doit, cependant, être conforme aux usages professionnels et locaux.
2 Le chômeur a droit à la compensation de la différence entre le
salaire
versé pour le travail de remplacement et 90 pour cent du gain
assuré. Ce
droit subsiste pendant six périodes de contrôle au plus et tant que
l'assuré n'a pas touché le nombre maximum d'indemnités journalières
(art.
27).
3-5 (...)

b) L'interprétation de l'art. 24 LACI, dans sa teneur en vigueur
jusqu'au 31 décembre 1991, a donné lieu à plusieurs arrêts du
Tribunal fédéral des assurances (ATF 120 V 233; ATF 114 V 345, 113 V
150, 112 V 229, 111 V 251; DTA 1992 no 2 p. 72, 1990 no 4 p. 29, 1988
no 14 p. 115, 1987 no 4 p. 62).
C'est ainsi que le Tribunal fédéral des assurances a jugé que
l'art. 41a OACI (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1991)
était contraire à la loi, dans la mesure où le revenu d'une activité
qui avait duré plus de trois mois au total n'était pas considéré
comme gain intermédiaire, mais comme revenu tiré d'une activité à
temps partiel (ATF 111 V 255-256 consid. 5). De même, les directives
et la pratique administratives ont été jugées
7.- a) Sous le titre "Prise en considération du gain
intermédiaire", l'art. 24 LACI, dans sa teneur en vigueur depuis le
1er janvier 1992, dispose ce qui suit:

1 Est réputé intermédiaire tout gain que le chômeur retire d'une
activité
salariée ou indépendante durant une période contrôle.
2 L'assuré a droit à 80 pour cent de la perte de gain aussi
longtemps que
le nombre maximum d'indemnités journalières (art. 27) n'a pas été
atteint.
8.- a) Ainsi qu'on l'a dit, le Tribunal fédéral des assurances
s'est prononcé sur la portée du nouvel art. 24 LACI dans un arrêt de
principe du 31 mai 1994 (ATF 120 V 233). Voir aussi GERHARDS,
Zwischenverdienst, in SZS 1994 pp. 331 ss.
Dans cette affaire, l'OFIAMT soutenait que tous les revenus qu'un
assuré réalise durant une période de contrôle doivent être qualifiés
de gain intermédiaire au sens de l'art. 24 al. 1 LACI, y compris ceux
qui proviennent d'une activité à temps partiel. Ces différentes
situations sont en effet décrites à l'art. 10 al. 2 let. b LACI et
concernent les assurés qui occupent un emploi à temps partiel et qui
cherchent à le remplacer par une activité à plein temps, ou à le
compléter par une autre activité à temps partiel.
Toutefois, la Cour de céans a jugé que le droit à l'indemnité
journalière en cas de chômage partiel devait être fixé conformément
aux art. 18 ss LACI (ATF 112 V 229 et 237). Selon l'art. 18 al. 1
première phrase LACI, ce droit se détermine d'après la durée de la
perte de travail à prendre en considération pendant une période de
contrôle, chaque mois civil pour lequel le chômeur prétend des
indemnités constituant une période de
9.- En l'espèce, l'intimé continue d'exercer son activité
lucrative au Gymnase français de Bienne, dans le cadre d'une
nomination à titre provisoire à un poste d'enseignant dans cet
établissement, sous réserve qu'à partir du 1er août 1992, la durée du
travail hebdomadaire a été réduite à 72,7% d'un horaire à temps
complet. Aussi l'intimé a-t-il désormais le statut de chômeur partiel
à raison de 27,3% d'un horaire de travail à temps complet, depuis le
1er août 1992, sa situation n'étant toutefois pas la même que celle
d'un assuré qui occupait initialement un emploi à temps partiel (sans
être chômeur) et qui cherche à le remplacer par une activité à plein
temps, ou à le compléter par une autre activité à temps partiel (cf.
consid. 8a ci-dessus; SVR 1994 ALV no 11 p. 27).
L'intimé dispense encore 16 heures de cours hebdomadaires depuis sa
mise au chômage partiel. Le revenu qu'il en tire constitue donc un
gain intermédiaire au sens de l'art. 24 LACI (cf. consid. 8a et 8b
ci-dessus). Toutefois, contrairement à l'avis des premiers juges, un
chômeur partiel dans la situation de l'intimé ne saurait prétendre
des indemnités de chômage, lorsque le revenu qu'il tire de son
activité lucrative dépendante et résiduelle satisfait aux conditions
d'un travail convenable, et notamment excède le montant de
l'indemnité légale maximale (80% de la perte de gain prise en
considération) qu'il pourrait toucher en cas de chômage complet (cf.
consid. 8c ci-dessus). En effet, pour chaque période de contrôle, le
revenu réalisé par l'intimé excédait largement le montant maximal de
l'indemnité qu'il aurait pu prétendre s'il avait été totalement au
chômage.
En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a considéré,
dans sa décision du 9 décembre 1992, que l'intimé ne subissait ni
perte de gain, ni perte de travail qui puisse être indemnisée par
l'assurance-chômage. Le recours de l'OFIAMT se révèle ainsi bien
fondé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
prononce:

Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif du
canton de Berne du 16 juillet 1993 est annulé.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.143/93
Date de la décision : 15/11/1994
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 24 LACI dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 1992, art. 24 et 25 LACI dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1991, art. 16 et 18 LACI. - Notion du gain intermédiaire (ancien et nouveau droit). - Cas d'application (consid. 9).


Références :

22.05.1996 C 90/95; 31.05.1994 C 105/93


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1994-11-15;c.143.93 ?
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