121 III 6
2. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 24 janvier 1995 dans
la cause S. SA contre époux L. (recours en réforme)
A.- Les époux L. sont locataires d'un appartement de quatre pièces
dans un immeuble propriété de S. SA sis à Châtelaine. Le loyer annuel
se monte à 10'356 fr. depuis le 1er avril 1991.
Par avis de majoration du 21 janvier 1992, la bailleresse a déclaré
porter le loyer annuel à 14'004 fr. dès le 1er avril 1992, ce qui
représente une hausse de 35,22%. L'avis est motivé comme suit:
"Augmentation conforme aux Art. 269.- A, lettres a-b-e C.O., Art.
1.- et
s.s. de l'OBLF du 9 mai 1990.
Taux hypothécaire de référence: 7%."
B.- Saisis par la bailleresse après l'échec de la conciliation, le
Tribunal des baux et loyers puis la Chambre d'appel en matière de
baux et loyers de la Cour de justice civile de Genève ont, par
décisions des 30 juin 1993 et 6 mai 1994, respectivement fixé le
loyer annuel à 10'560 fr. et à 10'776 fr. dès le 1er avril 1993
(charges non comprises).
C.- La bailleresse a interjeté un recours en réforme au Tribunal
fédéral contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière de baux et
loyers. Reprenant les conclusions prises devant la dernière instance
cantonale, elle demandait principalement l'annulation de la décision
attaquée et la fixation du loyer annuel dû par les époux L. à 12'048
fr. dès le 1er avril 1993, charges non comprises, subsidiairement le
renvoi de la cause à l'instance cantonale pour qu'elle statue à
nouveau.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé l'arrêt attaqué.
Extrait des considérants:
2.- La cour cantonale a admis une hausse du loyer de 4% fondée sur
l'augmentation du taux hypothécaire. L'arrêt déféré n'est pas mis en
cause par les parties sur ce point, qui est dès lors acquis. La
bailleresse reproche en revanche aux juges cantonaux d'avoir écarté
pour défaut de motivation les autres facteurs d'augmentation visés
dans l'avis de majoration. Elle y voit une violation des art. 20 et
269d CO, ainsi que 19 OBLF (ordonnance sur le bail à loyer et le bail
à ferme d'habitations et de locaux commerciaux, RS 221.213.11).
3.- a) Selon l'art. 269d CO, l'avis de majoration du loyer, avec
indication des motifs, doit parvenir au locataire dix jours au moins
avant le début du délai de résiliation et être effectué au moyen
d'une formule agréée par le canton. La loi prescrit une forme écrite
qualifiée qui porte non seulement sur le mode, mais aussi sur le
contenu de la communication. Le droit du bail est un domaine
juridique empreint de formalisme, dans lequel il convient de se
montrer strict en matière de respect des prescriptions de forme et de
ne pas admettre en principe d'exceptions aux règles édictées dans
l'intérêt du locataire. L'art. 269d CO exige expressément que les
motifs de la hausse figurent dans la formule officielle elle-même;
l'exigence de la forme écrite qualifiée s'étend par conséquent aussi
à la motivation de la majoration. Les renseignements donnés par un
autre moyen peuvent préciser ou servir à l'interprétation des motifs
mentionnés sur l'avis formel mais non étendre ceux-ci ou remplacer
une indication omise (ATF 120 II 206 consid. 3a et les références).
Les motifs figurant dans l'avis de majoration doivent être eux-mêmes
précis (art. 19 al. 1 let. a ch. 4 OBLF). Ils doivent permettre au
locataire de saisir la portée et la justification de la majoration de
manière à pouvoir apprécier en pleine connaissance de cause
l'opportunité de la contester ou non (ATF 118 II 130 consid. 2b; 117
II 458 consid. 2a). On peut se référer par analogie sur ce point à la
jurisprudence relative aux exigences de motivation des décisions
déduite de l'art. 4 Cst. (cf. ATF 119 Ia 264 consid. 4d, 117 Ib 64
consid. 4 p. 86 et les références).
b) Les majorations de loyer sont nulles lorsqu'elles ne sont pas
notifiées au moyen de la formule officielle (art. 269d al. 2 CO). Il
en va de même lorsque le contenu de la communication n'est pas
suffisamment précis (nullité du point de vue du contenu, cf. ATF non
publié T. contre C. du 31 août 1993 consid. 3 dans lequel la question
a été laissée ouverte).