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15/02/2024 | SUISSE | N°1C_101/2024

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, Ire Cour de droit public  , Arrêt du 15 février 2024  , 1C 101/2024


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_101/2024  
 
 
Arrêt du 15 février 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, représentée par Me Cyrus Siassi, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, Guisanplatz 1, 3003 Berne. 
 
Objet 
Entraide ju

diciaire internationale en matière pénale à l'Ukraine, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 30 janvier 2024 (RR.2023.93, RR.2023.117). 
 
 
Fai...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_101/2024  
 
 
Arrêt du 15 février 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, représentée par Me Cyrus Siassi, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, Guisanplatz 1, 3003 Berne. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale à l'Ukraine, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 30 janvier 2024 (RR.2023.93, RR.2023.117). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décisions de clôture du 30 mai 2023, le Ministère public de la Confédération (MPC) a transmis au Ministère public ukrainien (Bureau national anticorruption) la documentation relative à deux comptes bancaires détenus par A.________ SA (Genève, ci-après A.________), et a maintenu la saisie ordonnée sur ces comptes le 26 octobre 2022 à hauteur de 10 millions, respectivement 26'217'000 USD. Le 28 juin 2023, le MPC a ordonné la transmission de la documentation relative à deux autres comptes détenus par A.________. Ces décisions ont été rendues en exécution d'une demande d'entraide judiciaire formée pour les besoins d'une procédure ouverte en Ukraine contre des fonctionnaires de la société nationale d'énergie B.________ Sàrl, soupçonnés d'actes de détournement, d'abus de fonctions officielles et de blanchiment. Entre février et avril 2022, les responsables en question auraient vendu de l'énergie à la société C.________, permettant à cette dernière de s'enrichir illégalement. Une partie des bénéfices retirés de la revente d'énergie aurait été versée sur les comptes de A.________. 
 
B.  
Par arrêt du 30 janvier 2024, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours formé par A.________ contre les quatre ordonnances précitées. La recourante, personne morale n'ayant pas le statut de prévenue dans la procédure en Ukraine, ne pouvait invoquer l' art. 2 EIMP (RS 351.1). La demande d'entraide et son complément étaient suffisamment motivés et le principe de la proportionnalité était respecté. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ SA demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 30 janvier 2024, d'annuler la décision d'entrée en matière et les quatre décisions de clôture, de refuser l'entraide judiciaire et d'ordonner la levée des deux séquestres, subsidiairement de renvoyer la cause à l'autorité précédente afin qu'elle statue dans le sens des considérants. 
Il n'a pas été demandé de réponse. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Selon l' art. 84 LTF , le recours en matière de droit public est recevable à l'encontre d'un arrêt du Tribunal pénal fédéral en matière d'entraide judiciaire internationale si celui-ci a pour objet notamment la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s'il concerne un cas particulièrement important (al. 1). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 142 IV 250 consid. 1.3). Une violation du droit d'être entendu dans la procédure d'entraide peut également fonder un cas particulièrement important, pour autant que la violation alléguée soit suffisamment vraisemblable et l'irrégularité d'une certaine gravité (ATF 145 IV 99 consid. 1.5). En vertu de l' art. 42 al. 2 LTF , il incombe à la partie recourante de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l' art. 84 LTF sont réunies (ATF 139 IV 294 consid. 1.1). En particulier, il ne suffit pas d'invoquer des violations des droits fondamentaux de procédure pour justifier l'entrée en matière; seule une violation importante, suffisamment détaillée et crédible peut conduire, le cas échéant, à considérer que la condition de recevabilité posée à l' art. 84 al. 2 LTF est réalisée (ATF 145 IV 99 consid. 1.5). 
 
1.1. Les décisions de clôture du MPC prévoient la transmission de renseignements bancaires à l'autorité requérante. Par ailleurs, la saisie provisoire d'une partie des fonds est également confirmée. La première condition posée à l' art. 84 al. 1 LTF est ainsi réalisée.  
 
1.2. S'agissant de la deuxième, la recourante soutient que le système judiciaire en Ukraine ne présenterait pas des garanties d'indépendance et d'impartialité suffisantes, et que l'Etat requérant aurait ouvert diverses procédures pénales contre elle et son administrateur, actionnaire et ayant droit. La recourante affirme que depuis l'instauration de la loi martiale en Ukraine, les installations stratégiques, notamment dans le domaine de l'électricité, feraient l'objet de réquisitions arbitraires et d'opérations visant à les décrédibiliser.  
 
1.3. Selon la jurisprudence, l' art. 2 EIMP (qui permet notamment d'invoquer les défauts de la procédure étrangère) peut être invoqué en premier lieu par la personne qui fait l'objet d'une demande d'extradition. Si la demande d'entraide judiciaire porte sur la remise de moyens de preuve ( art. 74 EIMP ), seule la personne accusée peut s'en prévaloir à condition qu'elle se trouve dans l'Etat requérant et soit exposée concrètement à un risque de violation de ses droits de procédure (ATF 130 II 217 consid. 8.2). En revanche, les personnes morales n'ont, selon la jurisprudence constante, en principe pas qualité pour invoquer la clause d'ordre public de l' art. 2 EIMP (ATF 133 IV 40 consid. 7.2; 130 II 217 consid. 8.2; 126 II 258 consid. 2d/aa; 125 II 356 consid. 3b/bb; 115 Ib 68 consid. 6 et les références citées; ROBERT ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 5ème éd. 2019, p. 568). Cette jurisprudence a encore été confirmée récemment (arrêts 1C_624/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.5 destiné à la publication; 1C_173/2023 du 25 avril 2023 consid. 1.2; 1C_338/2022 du 17 juin 2022 consid. 1.2 concernant également l'entraide judiciaire à l'Ukraine).  
 
1.4. La recourante soutient qu'elle ferait l'objet de nombreuses procédures initiées par l'Etat requérant. Il n'en demeure pas moins que, comme le relève la Cour des plaintes, elle n'a pas elle-même le statut de prévenu dans la procédure pour les besoins de laquelle l'entraide est requise. La recourante relève que son ayant droit aurait été mis en prévention dans le cadre de cette procédure. Outre qu'il s'agit d'un fait nouveau dont la recevabilité est douteuse sous l'angle de l' art. 99 al. 1 LTF (ATF 139 III 120 consid. 3.1.2; 136 III 123 consid. 4.4.3; arrêt 4A_434/2021 du 18 janvier 2022 consid. 2.2 et les références citées), la mise en prévention de son ayant droit n'a pas d'incidence sur sa propre situation s'agissant de personnes différentes. L'arrêt attaqué est ainsi conforme à la pratique constante  
 
1.5. La recourante relève que l'Ukraine a déclaré le 18 avril 2022, devant le Conseil de l'Europe, qu'elle n'était plus en mesure d'assurer la réciprocité "pendant la période de l'agression armée de la Fédération de Russie contre l'Ukraine". Elle estime qu'il s'agirait d'une question de principe.  
Il n'en est rien. Le principe de réciprocité ( art. 8 EIMP ) n'est pas une exigence absolue ni un obstacle à l'entraide (ZIMMERMANN, op. cit. n° 229 p. 243 et les exemples cités). L' art. 8 EIMP prévoit en effet qu'en règle générale, il n'est donné suite à une demande que si l'Etat requérant assure la réciprocité. L'OFJ requiert une garantie de réciprocité si les circonstances l'exigent, ce qui confère à l'autorité un large pouvoir d'appréciation. A l'égard d'un Etat qui, comme l'Ukraine, est partie à un traité d'entraide judiciaire (en l'occurrence la CEEJ [RS 0.351.1]), la réciprocité résulte du traité lui-même (ATF 130 II 217 consid. 7.1). Dès lors, si l'Etat requérant a déclaré qu'il n'était plus en mesure d'exécuter les demandes d'entraide en raison de la situation actuelle, il faut y voir un empêchement provisoire et non une volonté de se soustraire à ses obligations. L'argument ne justifie pas non plus une entrée en matière. 
 
1.6. Enfin, la violation alléguée du principe de la proportionnalité ne saurait faire de la présente cause un cas particulièrement important (cf. arrêt 1C_25/2023 du 17 janvier 2023 consid. 1.4). L'autorité d'exécution s'en est tenue au cadre de la demande et la Cour des plaintes a appliqué le principe de l'utilité potentielle conformément à la jurisprudence constante.  
 
2.  
En définitive, le cas ne revêt aucune importance particulière au regard de l' art. 84 LTF , dont il convient de rappeler que le but est de limiter fortement l'accès au Tribunal fédéral dans le domaine de l'entraide judiciaire, en ne permettant de recourir que dans un nombre limité de cas jugés particulièrement importants (ATF 145 IV 99 consid. 1.2 et les références). 
Le recours est dès lors irrecevable. Conformément à l' art. 66 al. 1 LTF , les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe. Le présent arrêt est rendu selon la procédure simplifiée prévue à l' art. 109 al. 1 LTF . 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Ministère public de la Confédération, au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, et à l'Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire. 
 
 
Lausanne, le 15 février 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz 


Synthèse
Formation : Ire cour de droit public  
Numéro d'arrêt : 1C_101/2024
Date de la décision : 15/02/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/02/2024
Fonds documentaire ?: www.bger.ch
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2024-02-15;1c.101.2024 ?

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