REPUBLIQUE DU TCHAD
AU NOM DU PEUPLE TCHADIEN
COUR SUPREME, SECTION CIVILE
Après lecture des conclusions de l'avocat général ;
Après observations des conseils respectifs des parties en cause ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu les articles 215 du code de procédure civile et 5 de la loi N° 004 du 28 mai 1998 ;
Attendu que par requête en date du 30 mars 1995, la BATAL, représentée par Maître E. Ngarta a sollicité l'autorisation de pratiquer saisie-arrêt sur les comptes de la Cotontchad pour avoir sûreté et paiement de sa créance qui se chiffre à 763 700 000 FCFA ; que la saisie a été opérée en vertu d'une ordonnance en date du 06/04/1995 qui a fait bloquer le montant de ladite somme dans le compte de la Cotontchad ouvert dans les livres de la BTCD, agence de Moundou ; que le 06 mai 1995, la BATAL a fait assigner sa débitrice en validité de la saisie et a sollicité en outre sa condamnation au paiement de la somme de la somme de 50 000 000 FCFA pour résistance abusive conformément à l'article 07 du code de procédure civile ;
qu'à l'appui de sa demande elle expose qu'elle faisait partie d'un pool bancaire composé de la BDT, BIAO, BNP, et BTCD qui a accordé à la Cotontchad un crédit de 10 760 000 000 FCFA pour les besoins de la campagne cotonnière 1976-1977 ; qu'elle a participé à ce financement à hauteur de 1 067 000 000 FCFA mais n'a reçu qu'un règlement partiel de 303 300 000 FCFA avant d'être contrainte de quitter le Tchad en/07/1977 ; qu'avant son départ elle a fait auprès de la centrale des risques de la BEAC une déclaration de l'état de ses créances et obligations, abandonnant tous ses autres documents dans les locaux qui ont été pillés pendant les événements de 1979; que depuis sa réouverture pour cause de liquidation elle n'a cessé de se rapprocher de la Cotontchad pour obtenir paiement de sa créance mais ses efforts sont demeurés vains ;
Que pour sa part, la Cotontchad résiste à la demande en excipant de l'incompétence ratione loci du tribunal de Moundou et en élevant des contestations au sujet de la régularité de la saisie -arrêt ; qu'elle a en outre plaidé l'irrecevabilité de l'action de la demanderesse en se prévalant des dispositions de l'article 189 bis du code de commerce français de 1985 relative à la prescription décennale en matière commerciale, et a conclu à son débouté au motif de l'inexistence de la créance de cette dernière à son égard ; qu'outre la demande de mainlevée de la saisie, elle se porte demanderesse reconventionnelle en paiement de la somme de 500 000 000 FCFA à titre de dommage et intérêts en invoquant l'application de l'article 7 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en son audience du 27 mai 1995, le tribunal a condamné la Cotontchad à payer à la BATAL la somme de 763 700 000 FCFA à titre de créance, a validé la saisie -arrêt pratiquée en vertu de l'ordonnance N°18/PTM/95 du 06/04/95 du 06/04/95, a ordonné à la BTCD de verser aux mains de la BATAL la somme saisie arrêtée conformément à l'article 288 du code de procédure civile, a condamné subsidiairement la Cotontchad à payer à la BATAL la somme de 25 000 000 FCFA à titre de dommages et intérêts ; que sur appel des parties, la cour par arrêt n° 171/01 rendu le 08 juin 2001 a confirméle jugement entrepris dans toutes ses dispositions ; Attendu que la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris dans toutes ses dispositions aux motifs notamment, que tous les organes de décision de la Cotontchad ayant été transférés à Moundou, l'exception d'incompétence de juridiction n'est pas recevable, et que d'autre part la fin de non recevoir tiré de la prescription ne saurait être accueillie car du fait des événements de 1979, se trouvent réunis fait du prince et force majeure suspensifs de la prescription décennale et enfin que la Cotontchad n'ayant pas rapporté la preuve du montant de la participation de la BATAL au pool bancaire, elle doit être reconnue débitrice envers celle-ci de la somme de 763 700 000 FCFA ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel de la Cotontchad datées des 09.10.95 et 30.03.96 qui soutenaient, qu'à défaut de requête ou d'assignation en validation de la saisie, le tribunal n'a jamais été saisi et que son jugement devait être annulé de ce chef, que la lettre N° 1318/D du 17.05.95 expressément visée par le jugement pour entrer en condamnation de la Cotontchad n'a pas été contradictoirement débattue devant le tribunal car produite après mise en délibéré du dossier sans être communiquée à la Cotontchad, que la preuve du règlement total de la créance de la BATAL a été régulièrement débattue devant la cour d'appel avant les plaidoiries, la cour d'appel a méconnu les exigences des textes susvisés ;
»
PAR CES MOTIFS
Casse et annule l'arrêt n° 171/01 du 08 juin 2001 ; Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de n'djaména autrement composée ;
Réserve les dépens