Arrêt
N° 020/CS/CJ/SS/2005
du 06/12/2005
Affaire:
C.S.T/BANDA (Compagnie Sucrière du Tchad/Banda)
(Me Jean-Bernard Padaré )
C/
GARDIENS VILLAGEOIS
Objet:
Pourvoi en cassation contre l'arrêt N° 55/04 du 30/6/2004 de la Cour d'appel de N'Djamena.
RÉPUBLIQUE DU TCHAD
AU NOM DU PEUPLE TCHADIEN
COUR SUPRÊME
Chambre judiciaire
Section Sociale
En son audience publique tenue à son siège (de ladite Cour) le six décembre deux mille cinq, où étaient présents et siégeaient:
ü M. Z X.................Président;
ü M. A Aa AG ...........Conseiller ;
ü M. Y B....Conseiller rapporteur ;
ü M. C Paul............2ème Avocat Général;
ü Maître NANTIGA Julien.................Greffier;
été rendu l'arrêt dont la teneur suit:
Statuant sur le pourvoi en cassation formé par Maître Jean-Bernard Padaré, conseil de C.S.T-BANDA, contre l'arrêt social N° 55/04 du 30 juin 2004 rendu par la Cour d'appel de N'Djamena;
Vu la loi N° 006/PR/98 du 07 août 1998 portant organisation et fonctionnement de la Cour Suprême ;
Vu le rapport du Conseiller rapporteur, les conclusions de l'Avocat général et les observations du conseil de la demanderesse;
Vu les pièces du dossier ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
La Cour:
Faits et procédure
Attendu que la Compagnie Sucrière du Tchad (C.S.T) et le chef de canton de Banda ont signé une convention dénommée «charte du gardien villageois» qui permettait au chef de canton de recruter les gardiens villageois chargés d'assurer le gardiennage de la plantation de canne à sucre;
Que parmi ces gardiens villageois, Alladoumadji et 04 autres ont été licenciés;
Attendu que le tribunal de travail et de la sécurité sociale de Sarh, saisi par procès-verbal de non conciliation de l'inspecteur de travail, a, par jugement contradictoire N° 022/03 du 25 août 2003, condamné solidairement la C.S.T et le chef de canton de Banda à payer à chacun des requérants la somme de 531.350 FCFA;
Attendu que par arrêt N° 055/04 du 25 juin 2004, la Cour d'appel de N'Djamena a confirmé le jugement entrepris dans toutes ses dispositions;
Que contre cet arrêt, un pourvoi a été introduit par le conseil de la C.S.T, Maître Jean-Bernard Padaré;
Que les conditions de forme ayant été remplies, le pourvoi est recevable.
Sur le moyen tiré de la violation des articles 3, 4 et 48 du code du travail et 1er de la charte du gardien villageois.
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (N'Djamena, 30 juin 2004), d'avoir condamné solidairement la C.S.T et le chef de canton de Banda, à payer à chacun des requérants 531.350 FCFA, en violation des articles précités alors que l'article 3 du code de travail précise: «Est considéré comme travailleur ou salarié, quels que soient son sexe et sa nationalité, toute personne physique qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et sous l'autorité d'une personne appelée employeur tel que défini à l'article 4»;
Que l'article 4, quant à lui dispose que «Est considéré comme employeur toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui, sous sa direction et son autorité, utilise les services d'une ou plusieurs personnes physiques moyennant rémunération»;
Que selon le moyen, il ressort de la combinaison des articles précités qu'on ne parlera de contrat de travail que lorsqu'il y a réunion de trois (03) éléments juridiques à savoir l'activité professionnelle du salarié, sa rémunération et sa dépendance vis-à-vis de l'employeur;
Attendu par ailleurs que selon les dispositions de l'article 48 du code de travail, le travailleur ou le salarié est placé sous la dépendance et sous l'autorité de l'employeur à l'endroit duquel il reçoit des instructions pour l'exécution de ses tâches;
Attendu qu'en l'espèce, selon le moyen, il ne s'agit pas d'un contrat de travail liant la concluante aux gardiens villageois, mais au contraire d'une convention de prestation de service liant les chefs de canton à la concluante;
Que selon les dispositions des articles 1 et 2 de la charte, les gardiens villageois sont sous l'autorité et sous la direction des chefs de canton avec la caution morale du sous-préfet;
Qu'en confirmant le 1er jugement dans toutes ses dispositions, la Cour d'appel a violé la loi;
Mais attendu que selon les dispositions des articles précités, tout travailleur ou salarié doit exécuter sa tâche sous la direction et sous l'autorité exclusives de l'employeur moyennant rémunération;
Qu'en l'espace, les gardiens villageois travaillent, non seulement sous la direction et sous l'autorité des chefs de canton, mais ils sont également soumis au contrôle des agents contrôleurs de la C.S.T selon la charte du gardien villageois
Que le contrôle exercé par les agents contrôleurs de la C.S.T sur les gardiens villageois crée un lien juridique entre ces derniers et la C.S.T, susceptible d'engager la responsabilité de celle-ci;
Attendu que la charte du gardien villageois est en contradiction avec les dispositions de l'article 9 du code de travail qui dispose:«Sous réserve de dérogation expresse, les dispositions du présent code sont d'ordre public, en conséquence, toute décision unilatérale de quiconque, tout contrat de travail ou convention collective qui ne respecteraient pas les dispositions dudit code ou des textes pris pour son application seraient nuls de plein droit»;
Qu'au regard de cet article, la charte du gardien villageois est nulle de plein droit;
Que la Cour d'appel, en confirmant le jugement entrepris, n'a pas violé la loi, d'où le rejet du pourvoi.
Par ces motifs
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président, le Conseiller rapporteur et le Greffier.