Arrêt
N° 004/CS/CJ/SS/2006
du 21/02/2006
Affaire:
M.C.T
(Me M.H. Abakar)
C/
AI X
Objet:
Pourvoi en cassation contre l'arrêt N° 71/03 du 03/09/2003 de la Cour d'appel de N'Djamena.
RÉPUBLIQUE DU TCHAD
AU NOM DU PEUPLE TCHADIEN
COUR SUPRÊME
Chambre judiciaire
Section Sociale
En son audience publique tenue à son siège vingt-et-un février deux mille six, où étaient présents et siégeaient:
ü M. AG Y.......Président rapporteur;
ü M. A Ab Z ...........Conseiller ;
ü M. B C.............Conseiller ;
ü M. Aa AH............1er Avocat Général;
ü Maître NANTIGA Julien................Greffier;
été rendu l'arrêt dont la teneur suit:
Statuant sur le pourvoi en cassation formé par Maître Mahamat Hassan Abakar, conseil de Manufacture de Cigarettes du Tchad (M.C.T), contre l'arrêt social N° 71/03 du 03 septembre 2003 rendu par la Cour d'appel de N'Djamena;
Vu la loi N° 006/PR/98 du 07 août 1998 portant organisation et fonctionnement de la Cour Suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu le rapport du Président rapporteur et les conclusions de l'Avocat général ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
La Cour:
Faits et procédure
Attendu que sieur AI X fut embauché par la Manufacture de Cigarettes du Tchad par un contrat à durée indéterminée le 13 décembre 1999 en qualité de Gestionnaire-Matière.
Attendu que le 20 décembre 2000, il fut licencié pour motif économique.
Attendu que sieur AI X actionna la M.C.T devant le tribunal du travail et de la sécurité sociale de Moundou qui, par jugement du 16 mars 2001 déclara le licenciement légitime et condamna la M.C.T à lui verser 420.000 F CFA de loyers, 100.000 F CFA pour non délivrance de certificat de travail, le tout sur la base des articles 282 et 507 du code de travail et de la sécurité sociale.
Attendu que sur appel de sieur AI X ce jugement fut infirmé par arrêt attaqué du 03 septembre 2003 ayant déclaré le licenciement abusif et condamné la M.C.T à lui payer 420.000 FCFA de loyers dûs, 100.000 F CFA pour non délivrance du certificat de travail, 500.000 F CFA des dommages-intérêts et 200.000 F CFA des frais de transports.
Attendu que Maître Mahamat Hassan Abakar agissant au nom et pour le compte de sa cliente la M.C.T s'est pourvu en cassation devant la Cour Suprême le 04 septembre 2003 contre cet arrêt.
Sur la recevabilité du pourvoi
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que le pourvoi est intervenu dans le délai et les formalités exigées par la loi organique N°006/PR/98 du 07 août 1998 portant organisation et fonctionnement de la Cour Suprême sont régulièrement accomplies;
Attendu que le pourvoi est donc recevable.
Les moyens du pourvoi
Attendu que la demanderesse reproche à l'arrêt attaqué d'avoir violé les articles 157 et 138 du code de travail et de la sécurité sociale.
Sur le premier moyen tiré de la violation de l'article 157 du code de travail et de la sécurité sociale
Vu l'article 157 du code de travail et de la sécurité sociale
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir violé les dispositions de l'article 157 du code de travail et de la sécurité sociale «aux motifs que de l'analyse du dossier, il apparaît clairement que sieur AI X aurait été démarché et débauché de la SONASUT par le Directeur général de la M.C.T en la personne de monsieur GUINIER pour le compte de ladite entreprise; que onze (11) mois seulement après son recrutement à la M.C.T, il serait licencié pour motif économique par le nouvel employeur qui craignait en décembre 2000, la perte sensible de son rendement en 2001 à cause de la réouverture de l'usine de cigarette de Bangui; que le motif avancé en l'espèce, tantôt pour suppression de poste de magasinier, tantôt pour inaptitude professionnelle, serait fallacieux, peu sérieux pour licencier AI X par rapport au véritable motif économique qui peut en l'espèce être fondé à l'égard des autres employés licenciés».
« Mais attendu qu'il convient de faire observer que les juges d'appel affirmaient sans aucun fondement que l'exposant aurait démarché et débauché sieur AI X et ce, sans administrer la preuve en quoi avaient consisté le démarchage et le débauchage de ce dernier».
«Qu'en réalité le défendeur au pourvoi avait été compressé avec les dix-huit (18) autres employés de l'entreprise toute catégorie professionnelle confondue et ce, pour cause économique».
«Que les raisons économiques ayant conduit la demanderesse à réduire 15% de son effectif sont réelles car elles sont consécutives à la perte enregistrée par la société au cours de l'exercice 2000 et le rapport du Conseil d'Administration fit ressort une perte de l'ordre de 4.654.198 F CFA».
«Que les difficultés économiquesque traversait la M.C.T à l'époque des faits étaient telles qu'une restructuration de l'entreprise était incontournable pour sa survie»
«Qu'au terme de l'article 157 du code de travail et de la sécurité sociale, constitue un licenciement économique, le licenciement effectué par l'employeur, en raison d'une suppression ou d'une transformation d'emploi consécutive notamment à des mutations technologiques, à une restructuration ou à des difficultés économiques de nature à compromettre l'activité ou l'équilibre financier de l'entreprise»;
«Que c'est à bon droit que le premier juge a déclaré le licenciement légitime en déboutant AI X de ses prétentions à des dommages-intérêts pour licenciement abusif».
Attendu que de l'analyse des motifs de l'arrêt attaqué, il ressort que la Cour d'appel a trouvé les motifs de licenciement de sieur AI X fallacieux et peu sérieux car c'est le Directeur général de la M.C.T qui aurait démarché AI X pour le débaucher et le licencier onze (11) mois seulement après pour motif économique.
Attendu que selon la Cour d'appel, même si les motifs économiques tiennent pour les autres salariés, ils sont fallacieux pour ce qui concerne AI X et le critère de choix le concernant lié à son aptitude professionnelle n'est pas sérieux.
Attendu que dans son arrêt attaqué, la Cour d'appel n'a pas contesté les difficultés rencontrées par la M.C.T suite à la réouverture de l'usine de cigarettes de Bangui mettant en mal la situation économique et financière de cette société.
Attendu qu'elle dit que le critère de choix concernant AI X est fallacieux sans préciser en quoi il est fallacieux et n'est pas sérieux.
Attendu que sur la liste des travailleurs proposés au licenciement, il s'était trouvé qu'au poste de magasinier, c'était sieur AI X qui était le moins gradé et le moins ancien à la M.C.T par rapport à son collègue hautement qualifié et plus ancien.
Attendu qu'il répondait donc aux critères de choix édictés par l'article 158 du code de travail et de la sécurité sociale.
Attendu qu'en affirmant que le motif retenu pour licencier AI X est fallacieux et peu sérieux, la Cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 157 du code de travail et de la sécurité sociale et sans que l'on examine le second moyen, il échet de casser et d'annuler l'arrêt N°71/03 du 03 septembre 2003 et de renvoyer la cause et les parties devant la Cour d'appel autrement composée pour être à nouveau statué.
Par ces motifs
Casse et annule l'arrêt N° 71/03 du 03 septembre 2003;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de N'Djamena autrement composée;
Réserve les dépens.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président rapporteur et le Greffier.