AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI DIX-SEPT MARS DEUX MILLE SEIZE (17-03-2016).
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au Siège de la Cour à Lomé, le jeudi dix-sept mars deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :
LA COUR
Sur le rapport de Monsieur Kuma LOXOGA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;
Vu l’ordonnance N°190/11 rendue en matière civile le 7 septembre 2011 par le président de la Cour d’appel de Lomé ;
Vu la requête afin de pourvoi de maître Jil Benoît AFANGBEDJI, conseil des demandeurs au pourvoi ;
Vu le mémoire en réponse de maître AHYEE Ayité, conseil des défendeurs au pourvoi ;
Vu le mémoire en réplique de maître Jil-Benoît AFANGBEDJI, conseil des demandeurs au pourvoi ;
Vu les conclusions écrites de Monsieur le Troisième Avocat Général ;
Vu les autres pièces de la procédure ;
Vu la loi organique N°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour Suprême et le décret N°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ;
Ouï le conseiller Kuma LOXOGA en son rapport ;
Nul pour maître Jil-Benoît AFANGBEDJI, absent et non représenté, Conseil des demandeurs au pourvoi ;
Nul pour maître AHYEE Ayité, absent et non représenté, conseil des défendeurs au pourvoi ;
Le Ministère Public entendu ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant en matière civile sur le pourvoi formé le 5 avril 2012 par maître Jil-Benoît AFANGBEDJI, Avocat à la Cour à Lomé, agissant au nom et pour le compte des nommés Ae Am Af et Ae Ab An, contre l’ordonnance N°190/11 rendue le 7 septembre 2011 par le président de la Cour d’appel de Lomé qui a déclaré irrecevables les demandeurs au pourvoi en leur demande tendant à ordonner, en référé, la cessation des travaux que le sieur C Y Ac Ad, acquéreur de Ae Ah Aj, était en train d’entreprendre sur le terrain litigieux ;
EN LA FORME
Attendu que tous les actes de la procédure ont été faits et produits dans les forme et délai de la loi ; qu’il suit que le pourvoi est recevable ;
AU FOND
Attendu qu’il ressort des énonciations de l’ordonnance attaquée et d’autres pièces du dossier qu’un litige oppose les nommés Ae Am Af et Ae Ab An à leur frère germain Ae Ah Aj au sujet d’un immeuble bâti d’une contenance de 06 ares 23 centiares, sis rue des Rameaux à Lomé, quartier Bè, objet du titre foncier N°8136 RT, appartenant à leur mère, feue Aa Ak Ao B épouse LAWSON ; que par jugement N°967/2004, le Tribunal de première instance de Lomé a confirmé le droit de propriété du sieur Ae Ah Aj sur ledit immeuble et a ordonné l’expulsion des autres frères et sœurs des lieux au motif que cet immeuble a fait l’objet d’une donation consentie de son vivant par dame Aa Ak Ao B épouse LAWSON à son fils Ae Ah Aj ; que suivant arrêt N°139/10 rendu le 29 juillet 2010, la chambre civile de la Cour d’appel de Lomé a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; que le sieur C Y Ac Ad qui s’est porté acquéreur de l’immeuble querellé auprès de Ae Ah Aj, continue d’entreprendre des travaux de construction sur les lieux ; que pour mettre fin à cette situation, les nommés Ae Am Af et Ae Ab An ont, par exploit en date du 8 juin 2011, saisi le Président de la Cour d’appel de Lomé, juge des référés, aux fins d’ordonner la cessation des travaux sur l’immeuble querellé ; que, par l’ordonnance dont pourvoi, le Président de la Cour d’appel a déclaré les requérants irrecevables en leur demande ;
Sur le moyen unique
Vu l’article 301 du code de procédure civile ;
Attendu qu’aux termes de ce texte, « Dans chaque juridiction, les incidents d’exécution des jugements ou arrêts qu’elle a rendus sont soumis au président de cette juridiction ou à un magistrat qu’il désigne en qualité du juge de l’exécution » ;
Attendu que les demandeurs au pourvoi font grief à l’ordonnance déférée de les avoir déclarés irrecevables, motif pris de ce que la procédure pour obtenir la cessation des travaux querellés n’est pas celle qu’ils ont initiée, alors que les conséquences de l’exécution desdits travaux qu’ils ont relevés, constituent des incidents d’exécution qui peuvent être soumis au président de la Cour d’appel de Lomé dont émane la décision exécutée, conformément à l’article 301 susvisé ;
Attendu que pour déclarer les nommés Ae Am Af et Ae Ab An irrecevables en leur demande tendant à obtenir la cessation des travaux sur l’immeuble litigieux, le président de la Cour d’appel de Lomé, tout en estimant que les arguments du conseil des adversaires de ces derniers sont pertinents, a poursuivi « qu’en effet, les requérants ayant formé pourvoi contre la décision de la Cour d’appel…, ils ne sont pas fondés à saisir le président de ladite Cour d’appel pour obtenir la cessation des travaux qu’ils invoquent ; que, la procédure pour obtenir l’inexécution de l’arrêt de la Cour, n’est pas celle qui est initiée par les requérants ; que dans ces conditions il y a lieu de débouter les requérants de leur demande… » ;
Attendu en effet qu’il est constant que l’arrêt N°139/10 rendu le 29 juillet 2010 par la Cour d’appel de Lomé qui a confirmé le jugement N°967/2004 du 28 mai 2004 par lequel le Tribunal de première instance de Lomé a confirmé le droit de propriété du sieur Ae Ah Aj et ordonné l’expulsion des demandeurs au pourvoi, est une décision définitive insusceptible d’une voie de recours ordinaire, donc exécutoire sous la seule réserve qu’en cas de pourvoi contre ladite décision, le demandeur au pourvoi qui veut empêcher son exécution, obtienne du président de la Cour suprême une ordonnance sur requête de sursis à exécution ;
Attendu que la réalisation des travaux sur les lieux querellés par le sieur C Y Ac Ad qui s’en est porté acquéreur auprès du sieur Ae Ah Aj, ainsi que l’expulsion des demandeurs au pourvoi, sans laquelle lesdits travaux ne peuvent être effectués, sont des actes qui rentrent dans l’exécution de l’arrêt attaqué et non pas des incidents d’exécution, qui s’entendent des difficultés auxquelles peuvent donner lieu les procédures d’exécution et des mesures conservatoires ou encore des contestations élevées à l’occasion de l’exécution forcée ;
Attendu que dès lors que les demandeurs au pourvoi ont saisi la Cour Suprême d’un pourvoi en cassation contre l’arrêt déféré, seul le président de cette juridiction est compétent pour ordonner le sursis à l’exécution dudit arrêt pour faire cesser les travaux sur les lieux ;
Qu’ainsi, c’est à bon droit que le président de la Cour d’appel de Lomé a rejeté la demande de cessation des travaux sur les lieux qui, loin d’être un incident d’exécution, est une remise en cause, une contestation de l’arrêt attaqué, laquelle remise en cause ou contestation n’est pas de la compétence du Président de la juridiction qui a rendu la décision dont l’exécution est contestée ;
Que dès lors, le pourvoi n’est pas fondé en son moyen unique ; qu’il y a lieu de le rejeter ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, publiquement en matière civile et en état de cassation ;
EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ;
AU FOND
Le rejette comme non fondé ;
Prononce la confiscation de la taxe de pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi dix-sept mars deux mille seize (17-03-2016) à laquelle siégeaient :
Monsieur Agbenyo Koffi BASSAH, conseiller à la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, PRESIDENT ;
Messieurs Koffi KODA, Essozinam ADI-KPAKPABIA, Badjona SAMTA et Kuma LOXOGA, tous quatre Conseillers à ladite Chambre, MEMBRES ;
En présence de Madame X Ai Ag, Premier Avocat Général près la Cour Suprême ;
Et avec l’assistance de Maître Awié ATCHOLADI, Attaché d’Administration, Greffier à ladite Cour, GREFFIER ;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier
PRESENTS : MM
BASSAH : PRESIDENT
ADI-KPAKPABIA, LOXOGA, KODA, SAMTA Membres
Z : M. Al
A : GREFFIER
POURVOI N°72/RS/12 DU 5 AVRIL 2012